Texte intégral
- Maroc - Relations bilatérales
Q - Vous êtes ministre des affaires étrangères et du développement international. Il s'agit de la première visite après une brouille qui avait opposé France et Maroc. Vous avez rencontré le roi, vous avez rencontré les officiels. La crise est-elle désormais derrière nous?
R - Oui, elle est derrière nous. Il est vrai que l'on a eu une période de difficultés, mais ces difficultés ont été réglées. Maintenant, c'est la période de renforcement et de renouvellement de nos relations. C'est le sens de la visite qui sera d'ailleurs suivie d'autres visites : Manuel Valls va venir ici au mois d'avril ; ensuite, le Premier ministre marocain viendra en France fin mai - début juin. Les relations sont donc reparties sur le bon pied.
Q - On avait dit que la coopération dans la lutte contre le terrorisme avait pâti de cette brouille. Les échanges avaient été interrompus. Vont-ils reprendre désormais ?
R - Oui, ils ont repris. C'est un des points évidemment très importants parce que nous sommes tous face au terrorisme et que la coopération, qu'elle soit judiciaire ou sécuritaire, est évidemment très importante. C'était une des raisons pour lesquelles il était absolument impérieux de reprendre la coopération, ce qui est effectivement déjà fait. (...).
- Lutte contre le terrorisme - Mali
(...)
Q - L'actualité nous porte à parler du terrorisme et de ce qui s'est passé à Bamako. Vous n'aviez pas encore officiellement réagi. Selon vous, est-ce que cet attentat qui a tué cinq personnes, dont un Français, visait la France ?
R - J'interprète cet attentat comme une attaque contre la paix. Vous savez qu'en ce moment même un texte a été proposé, à la fois au gouvernement malien et aux groupes que l'on appelle les « groupes du nord », sous médiation algérienne, qui permet de terminer le conflit inter-malien. Même si nous n'avons pas encore les résultats de l'enquête, c'est précisément à ce moment-là que des terroristes ont frappé. Mon analyse, c'est qu'ils veulent empêcher la paix qui est absolument indispensable.
Malheureusement, historiquement, il arrive parfois que c'est au moment-même où l'on est à deux doigts de la paix que ceux qui veulent l'empêcher frappent. Dans cet attentat, il y a eu malheureusement cinq victimes, dont un de nos compatriotes. De nouveau, comme je l'ai déjà fait, je dis à la famille de notre compatriote et à celles des autres victimes toutes nos condoléances.
Je me suis entretenu avec notre ambassadeur à plusieurs reprises. Les autorités judiciaires et policières du Mali et de la France sont sur place et font leur travail. Nous avons pris des mesures de sécurité renforcée en ce qui concerne les écoles, les lycées et les autres intervenants.
Pour répondre précisément à votre question, mon interprétation, c'est que ces terroristes ont voulu attaquer la paix précisément parce que nous sommes en train de la construire.
Il faut se rappeler qu'il y a deux ans, en janvier 2013, l'ensemble du Mali était sur le point de tomber sous les coups des terroristes. C'est grâce à l'intervention, d'abord, de l'armée française que l'on a pu éviter cela. Ensuite, il y a eu des élections régulières, avec l'élection de M. Ibrahim Boubacar Keïta, l'assemblée législative, les moyens du développement. Maintenant, nous arrivons, je ne dis pas au point final mais à ce qui est absolument nécessaire, c'est-à-dire la coopération, la paix entre les « groupes du nord » et le gouvernement.
C'est ce moment-là que les terroristes choisissent pour essayer de frapper.
Q - N'est-ce pas la preuve que la stabilité est très fragile aujourd'hui ?
R - Il y a bien sûr une fragilité. Personne ne peut dire que la paix et la sécurité soient assurées à cent pour cent. Ce serait absurde de le dire, surtout dans une région qui est elle-même très menacée ; vous voyez ce qui se passe en Libye, ce qui passe dans d'autres pays - je pense au Nigeria.
Cela dit, par rapport à la situation que nous connaissions il y a un peu plus de deux ans, tout le monde vous dira que c'est le jour et la nuit, même s'il y a toujours un certain nombre de risques. Il faut donc se prémunir de ces risques et, surtout, aller vers la paix.
Les terroristes veulent attaquer la paix, c'est le moment où il faut la conclure. (...).
- Lutte contre le terrorisme - Boko Haram - Daech
(...)
Q - L'annonce de Boko Haram qui rejoint Daech - vous avez parlé du Nigeria -, c'est le signe du renforcement de l'État islamique dans de nouveaux territoires. Cela veut-il dire que les opérations de la coalition finalement échouent à endiguer le développement de l'État islamique ?
R - Non, ça ne veut pas dire cela. J'étais, il y a quinze jours, dans les pays circumvoisins de Boko Haram - Boko Haram, c'est au nord-est du Nigeria - et j'ai rendu visite successivement aux présidents du Tchad, du Cameroun et du Niger. Nous avons vu quelle était la situation de Boko Haram et ce qu'il fallait faire.
Hier, le dirigeant de Boko Haram a effectivement enregistré une vidéo où il dit qu'il fait allégeance à Daech - ce n'est pas d'ailleurs la première fois ; cela peut être interprété de deux façons.
Boko Haram est en train d'être durement contré, à la fois par l'armée nigériane, le Niger, le Cameroun et le Tchad. Boko Haram se trouve donc pour la première fois dans une certaine difficulté. En se mettant sous la protection, si je puis dire, de Daech, cela peut être une manière d'essayer de réagir à cette difficulté ; il s'agit donc là peut-être d'un aveu de faiblesse. En même temps, il est vrai que si tous ces groupes font masse, cela peut être un moyen supplémentaire d'intervenir dans le terrorisme. Cela veut dire que Boko Haram et Daech sont des mouvements terroristes internationaux qu'il faut combattre internationalement. Cela nous renforce, la France et beaucoup d'autres pays, dans notre détermination de les combattre, avec le soutien de l'ONU et de la communauté internationale.
Parfois, certains disent que ces groupes terroristes s'en prennent, de façon épouvantable, atroce, barbare, aux populations locales, mais tout le monde est menacé, de proche en proche. Vous avez vu qu'ils cherchent aussi à progresser en Libye, un pays qui est à 350 kms des frontières italiennes et de l'Europe.
Donc, la leçon que j'en tire c'est que, plus que jamais, il faut cette coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme. (...).
- Lutte contre le terrorisme - Persécution des minorités
(...)
Q - Vous évoquez les massacres de Daech. Les chrétiens d'Orient sont parmi les premières victimes, il y a une véritable persécution. Que fait le monde ?
R - S'agissant des chrétiens d'Orient, qui sont persécutés comme d'autres minorités, nous, la France, n'acceptons pas ces persécutions.
C'est la raison pour laquelle, avec le président de la République - je vous l'annonce -, nous avons décidé de réunir, le vendredi 27 mars à New York, le conseil de sécurité des Nations unies. Je présiderai cette réunion, avec mes collègues ministres, pour lancer un appel au monde pour lutter contre la persécution des chrétiens d'Orient et des autres minorités ; ce qui est fait à ces minorités est absolument inacceptable.
Daech et les terroristes qui sont avec Daech veulent absolument éradiquer, supprimer physiquement, décapiter tous ceux qui ne pensent pas comme eux. C'est quelque chose que l'on ne peut pas admettre. La France est dans ce rôle en appelant la conscience universelle au conseil de sécurité à se mobiliser dans la lutte pour préserver l'existence, les droits des chrétiens d'Orient et des autres minorités. C'est ce que nous ferons à la fin du mois de mars au conseil de sécurité des Nations unies, qui est la plus haute instance en matière de relations internationales.
(...)
C'est en ayant une politique forte - et elle est forte - au plan de la politique extérieure que l'on va arriver à combattre ces fléaux qui s'appellent le terrorisme, l'éradication des minorités. C'est le rôle qui le mien aujourd'hui.
- Maroc - Libye
(...)
Q - Vous avez dû parler de la Libye avec les Marocains. Faut-il une intervention en Libye puisque, vous le répétez, c'est là que se réfugient un certain nombre de dirigeants djihadistes ?
R - Sur la Libye, la question d'une intervention n'est pas, à ce jour, d'actualité. La question est d'abord de trouver une solution politique. Actuellement, comme vous le savez sans doute, il y a - j'en ai parlé avec le Roi, précisément, et avec mon collègue des affaires étrangères - une médiation marocaine, en liaison avec le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, M. Bernardino Leon, pour essayer de créer en Libye un gouvernement d'union nationale.
Vous savez qu'il y a en Libye deux gouvernements et deux parlements, le pays est donc ingouvernable et «ingouverné». Nous travaillons les uns et les autres pour qu'il y ait un gouvernement d'union nationale, ce qui permettra ensuite d'agir avec d'autant plus d'efficacité contre les terroristes professionnels, en particulier les terroristes de Daech. C'est notre stratégie. (...).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mars 2015
Q - Vous êtes ministre des affaires étrangères et du développement international. Il s'agit de la première visite après une brouille qui avait opposé France et Maroc. Vous avez rencontré le roi, vous avez rencontré les officiels. La crise est-elle désormais derrière nous?
R - Oui, elle est derrière nous. Il est vrai que l'on a eu une période de difficultés, mais ces difficultés ont été réglées. Maintenant, c'est la période de renforcement et de renouvellement de nos relations. C'est le sens de la visite qui sera d'ailleurs suivie d'autres visites : Manuel Valls va venir ici au mois d'avril ; ensuite, le Premier ministre marocain viendra en France fin mai - début juin. Les relations sont donc reparties sur le bon pied.
Q - On avait dit que la coopération dans la lutte contre le terrorisme avait pâti de cette brouille. Les échanges avaient été interrompus. Vont-ils reprendre désormais ?
R - Oui, ils ont repris. C'est un des points évidemment très importants parce que nous sommes tous face au terrorisme et que la coopération, qu'elle soit judiciaire ou sécuritaire, est évidemment très importante. C'était une des raisons pour lesquelles il était absolument impérieux de reprendre la coopération, ce qui est effectivement déjà fait. (...).
- Lutte contre le terrorisme - Mali
(...)
Q - L'actualité nous porte à parler du terrorisme et de ce qui s'est passé à Bamako. Vous n'aviez pas encore officiellement réagi. Selon vous, est-ce que cet attentat qui a tué cinq personnes, dont un Français, visait la France ?
R - J'interprète cet attentat comme une attaque contre la paix. Vous savez qu'en ce moment même un texte a été proposé, à la fois au gouvernement malien et aux groupes que l'on appelle les « groupes du nord », sous médiation algérienne, qui permet de terminer le conflit inter-malien. Même si nous n'avons pas encore les résultats de l'enquête, c'est précisément à ce moment-là que des terroristes ont frappé. Mon analyse, c'est qu'ils veulent empêcher la paix qui est absolument indispensable.
Malheureusement, historiquement, il arrive parfois que c'est au moment-même où l'on est à deux doigts de la paix que ceux qui veulent l'empêcher frappent. Dans cet attentat, il y a eu malheureusement cinq victimes, dont un de nos compatriotes. De nouveau, comme je l'ai déjà fait, je dis à la famille de notre compatriote et à celles des autres victimes toutes nos condoléances.
Je me suis entretenu avec notre ambassadeur à plusieurs reprises. Les autorités judiciaires et policières du Mali et de la France sont sur place et font leur travail. Nous avons pris des mesures de sécurité renforcée en ce qui concerne les écoles, les lycées et les autres intervenants.
Pour répondre précisément à votre question, mon interprétation, c'est que ces terroristes ont voulu attaquer la paix précisément parce que nous sommes en train de la construire.
Il faut se rappeler qu'il y a deux ans, en janvier 2013, l'ensemble du Mali était sur le point de tomber sous les coups des terroristes. C'est grâce à l'intervention, d'abord, de l'armée française que l'on a pu éviter cela. Ensuite, il y a eu des élections régulières, avec l'élection de M. Ibrahim Boubacar Keïta, l'assemblée législative, les moyens du développement. Maintenant, nous arrivons, je ne dis pas au point final mais à ce qui est absolument nécessaire, c'est-à-dire la coopération, la paix entre les « groupes du nord » et le gouvernement.
C'est ce moment-là que les terroristes choisissent pour essayer de frapper.
Q - N'est-ce pas la preuve que la stabilité est très fragile aujourd'hui ?
R - Il y a bien sûr une fragilité. Personne ne peut dire que la paix et la sécurité soient assurées à cent pour cent. Ce serait absurde de le dire, surtout dans une région qui est elle-même très menacée ; vous voyez ce qui se passe en Libye, ce qui passe dans d'autres pays - je pense au Nigeria.
Cela dit, par rapport à la situation que nous connaissions il y a un peu plus de deux ans, tout le monde vous dira que c'est le jour et la nuit, même s'il y a toujours un certain nombre de risques. Il faut donc se prémunir de ces risques et, surtout, aller vers la paix.
Les terroristes veulent attaquer la paix, c'est le moment où il faut la conclure. (...).
- Lutte contre le terrorisme - Boko Haram - Daech
(...)
Q - L'annonce de Boko Haram qui rejoint Daech - vous avez parlé du Nigeria -, c'est le signe du renforcement de l'État islamique dans de nouveaux territoires. Cela veut-il dire que les opérations de la coalition finalement échouent à endiguer le développement de l'État islamique ?
R - Non, ça ne veut pas dire cela. J'étais, il y a quinze jours, dans les pays circumvoisins de Boko Haram - Boko Haram, c'est au nord-est du Nigeria - et j'ai rendu visite successivement aux présidents du Tchad, du Cameroun et du Niger. Nous avons vu quelle était la situation de Boko Haram et ce qu'il fallait faire.
Hier, le dirigeant de Boko Haram a effectivement enregistré une vidéo où il dit qu'il fait allégeance à Daech - ce n'est pas d'ailleurs la première fois ; cela peut être interprété de deux façons.
Boko Haram est en train d'être durement contré, à la fois par l'armée nigériane, le Niger, le Cameroun et le Tchad. Boko Haram se trouve donc pour la première fois dans une certaine difficulté. En se mettant sous la protection, si je puis dire, de Daech, cela peut être une manière d'essayer de réagir à cette difficulté ; il s'agit donc là peut-être d'un aveu de faiblesse. En même temps, il est vrai que si tous ces groupes font masse, cela peut être un moyen supplémentaire d'intervenir dans le terrorisme. Cela veut dire que Boko Haram et Daech sont des mouvements terroristes internationaux qu'il faut combattre internationalement. Cela nous renforce, la France et beaucoup d'autres pays, dans notre détermination de les combattre, avec le soutien de l'ONU et de la communauté internationale.
Parfois, certains disent que ces groupes terroristes s'en prennent, de façon épouvantable, atroce, barbare, aux populations locales, mais tout le monde est menacé, de proche en proche. Vous avez vu qu'ils cherchent aussi à progresser en Libye, un pays qui est à 350 kms des frontières italiennes et de l'Europe.
Donc, la leçon que j'en tire c'est que, plus que jamais, il faut cette coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme. (...).
- Lutte contre le terrorisme - Persécution des minorités
(...)
Q - Vous évoquez les massacres de Daech. Les chrétiens d'Orient sont parmi les premières victimes, il y a une véritable persécution. Que fait le monde ?
R - S'agissant des chrétiens d'Orient, qui sont persécutés comme d'autres minorités, nous, la France, n'acceptons pas ces persécutions.
C'est la raison pour laquelle, avec le président de la République - je vous l'annonce -, nous avons décidé de réunir, le vendredi 27 mars à New York, le conseil de sécurité des Nations unies. Je présiderai cette réunion, avec mes collègues ministres, pour lancer un appel au monde pour lutter contre la persécution des chrétiens d'Orient et des autres minorités ; ce qui est fait à ces minorités est absolument inacceptable.
Daech et les terroristes qui sont avec Daech veulent absolument éradiquer, supprimer physiquement, décapiter tous ceux qui ne pensent pas comme eux. C'est quelque chose que l'on ne peut pas admettre. La France est dans ce rôle en appelant la conscience universelle au conseil de sécurité à se mobiliser dans la lutte pour préserver l'existence, les droits des chrétiens d'Orient et des autres minorités. C'est ce que nous ferons à la fin du mois de mars au conseil de sécurité des Nations unies, qui est la plus haute instance en matière de relations internationales.
(...)
C'est en ayant une politique forte - et elle est forte - au plan de la politique extérieure que l'on va arriver à combattre ces fléaux qui s'appellent le terrorisme, l'éradication des minorités. C'est le rôle qui le mien aujourd'hui.
- Maroc - Libye
(...)
Q - Vous avez dû parler de la Libye avec les Marocains. Faut-il une intervention en Libye puisque, vous le répétez, c'est là que se réfugient un certain nombre de dirigeants djihadistes ?
R - Sur la Libye, la question d'une intervention n'est pas, à ce jour, d'actualité. La question est d'abord de trouver une solution politique. Actuellement, comme vous le savez sans doute, il y a - j'en ai parlé avec le Roi, précisément, et avec mon collègue des affaires étrangères - une médiation marocaine, en liaison avec le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, M. Bernardino Leon, pour essayer de créer en Libye un gouvernement d'union nationale.
Vous savez qu'il y a en Libye deux gouvernements et deux parlements, le pays est donc ingouvernable et «ingouverné». Nous travaillons les uns et les autres pour qu'il y ait un gouvernement d'union nationale, ce qui permettra ensuite d'agir avec d'autant plus d'efficacité contre les terroristes professionnels, en particulier les terroristes de Daech. C'est notre stratégie. (...).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mars 2015