Déclaration de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur la lutte contre le dérèglement climatique, à Paris le 24 mars 2015.

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Circonstance : Ouverture du colloque "Coopérer pour répondre au défi climatique", à Paris le 24 mars 2015

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs, Chers Amis,


Je suis heureux d'ouvrir ce colloque, qui est le premier événement public organisé par l'agence Expertise France depuis sa création le 1er janvier 2015. La création de cette agence va nous permettre d'offrir une expertise de meilleure qualité pour répondre aux besoins de nos partenaires.

Tout au long de cette journée, vous allez débattre des réponses concrètes que les agences d'expertise et de coopération peuvent apporter à nos partenaires pour les aider à faire face au dérèglement climatique. Quand on parle du climat, on parle forcément d'expertise, de savoir-faire, de technologie. Pour réussir la transition vers un monde zéro carbone, il faudra mobiliser toute ces savoirs.

Un exemple : l'accélération du développement des énergies renouvelables nécessite de développer des réseaux intelligents, des systèmes de stockage. La généralisation de ces technologies, notamment dans les pays du Sud, exiger un appui technique. Il ne suffit pas d'inventer des technologies moins chères, il faut aussi les diffuser. Ce partage des technologies est un élément très important dans la lutte contre le dérèglement climatique et une attente forte, à juste titre, des pays en développement.

Votre rôle est donc essentiel. Il l'est d'autant plus en cette année si importante pour le climat et pour l'avenir de notre planète. En décembre prochain, se tiendra en effet à Paris la 21ème conférence des parties sur les changements climatiques, la COP21. C'est un grand honneur, mais aussi une immense responsabilité pour mon pays. Nous devons en effet aboutir à ce qui serait le premier accord universel afin de nous remettre sur la trajectoire permettant de limiter le réchauffement climatique en deçà de deux degrés.

L'espoir d'un succès à Paris est réel. La COP20 à Lima a ouvert la voie. Depuis lors, la France est, en étroite collaboration avec le Pérou et les Nations unies, mobilisée au plus haut niveau pour parvenir à un succès.

Nous aurons deux autres échéances internationales majeures en 2015 : la conférence d'Addis-Abeba sur le financement du développement en juillet et le sommet de septembre à New York sur les objectifs de développement durable. Il faut envisager ces rendez-vous en lien étroit les uns avec les autres, car ils ont le même objectif : promouvoir un modèle plus durable de développement au niveau mondial.

Pour parvenir à un succès lors de la COP21, nous cherchons à construire ce que j'appellerais une «Alliance de Paris pour le climat». Cette alliance reposerait sur quatre piliers :

- premièrement, un accord universel mais différencié, ayant une portée juridique, qui nous permette de rester sous la barre des deux degrés ;

- deuxièmement, des contributions de tous les États, notamment en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce que nous appelons en anglais les «INDC». Certains pays souhaitent également inclure leurs efforts en matière d'adaptation ;

- troisièmement, un volet financier, afin de garantir l'efficacité et l'équité de l'accord ;

- quatrièmement - et c'est une innovation par rapport aux précédentes négociations - des engagements complémentaires des acteurs non gouvernementaux - les villes, les régions, les entreprises, les associations - et des partenariats entre les États et ces acteurs non gouvernementaux soutenant de tels efforts. C'est ce que nous appelons «l'agenda des solutions» ou le «Plan d'action Lima Paris».

Nous comptons sur vous tous pour nous aider à construire cette alliance. Et notamment sur deux points.

Premier point : les INDC. Il est important que tous les pays présentent leur contribution le plus en amont possible de la COP21. Mais nous savons que certains pays ont des difficultés à préparer ces documents. Il faut donc que les pays développés, mais aussi tous les autres pays qui le peuvent, leur apportent une aide. S'agissant de la France, j'ai demandé à l'Agence française du développement et à Expertise France de mettre en place un fonds, doté de 3.5 millions d'euros, qui va aider une vingtaine de pays d'Afrique et de petits États insulaires en développement à préparer leur contribution d'ici juin.

Deuxième point : les actions concrètes en faveur des pays les plus vulnérables. Au-delà du texte qui devra être adopté à Paris, la COP21 ne sera un succès que si elle apporte des réponses tangibles aux attentes de nos partenaires. Un exemple : lors de la conférence de Sendai à laquelle je participai il y a 10 jours, j'ai lancé un appel pour la généralisation des systèmes d'alerte face aux événements climatiques extrêmes. L'objectif est simple : doter tous les pays les plus vulnérables - nous parlons d'environ 70 pays - de données météorologiques, de formation, de matériel de communication pour envoyer des SMS à la population. Nous ne partons pas de rien, mais nous sommes encore loin d'une couverture universelle. Plusieurs pays ont exprimé leur soutien à cette idée. Nous allons maintenant très vite travailler à la mettre en œuvre. Ce sera une contribution directe à la lutte contre le dérèglement climatique, qui est responsable d'au moins 70 % des catastrophes dites naturelles.

Je compte sur vous, comme vous savez pouvoir compter sur la France, pour contribuer à un succès de la COP21, mais aussi des autres échéances multilatérales importantes de cette année.


Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mars 2015