Texte intégral
Monsieur le préfet,
Monsieur le directeur général du groupe La Poste,
Madame la directrice générale de l'ONAC-VG,
Monsieur le président du conseil d'orientation du Mémorial national de Montluc,
Monsieur le directeur du Mémorial de la prison de Montluc,
Mesdames et messieurs les survivants de Montluc que je veux remercier très sincèrement pour leur présence,
Chers élèves aujourd'hui présents,
Mesdames et messieurs,
J'étais le 27 janvier dernier à Auschwitz aux côtés du Président de la République et des lycéens présents parmi nous, pour rendre hommage aux 76 000 Juifs de France qui y ont été déportés.
J'étais le 6 avril dernier à la maison d'Izieu, une nouvelle fois aux côtés du Chef de l'État, pour y rappeler le drame qui s'est joué, à quelques kilomètres d'ici.
Je serai le 26 avril, ce dimanche, à l'Île de la Cité puis au Struthof, en hommage à tous les déportés. Je serai enfin début mai à Neuengamme pour commémorer la libération du camp.
Et dans chacun de ces lieux de souffrance et de mort, des femmes, des hommes et des enfants, avaient commencé leur calvaire ici, à la prison de Montluc.
Certains ne poursuivront pas plus loin ce chemin macabre. La mort les attend déjà ici, à cet emplacement même où ils furent fusillés.
Mesdames et messieurs, s'il y a bien une chose qui nous rassemble tous aujourd'hui ici, c'est l'émotion.
Celle des anciens internés qui reviennent sur le lieu de leurs souffrances.
Celle qui nous étreint quand on pénètre dans un lieu comme celui-ci. Car la douleur et la mort sont partout.
Celle qui nous engage et nous oblige. Celle qui nous rappelle notre responsabilité de nous souvenir et de transmettre.
Ici à Montluc, militants communistes, résistants, prisonniers, juifs, Français et étrangers, ont été réunis dans l'horreur et la barbarie.
Plus de 8 000 personnes y furent détenues.
Parmi eux, Marc Bloch, Hélène Berthaud, Jean Moulin, Marcel Gompel.
Parmi eux aussi les enfants d'Izieu. Et je vois derrière leurs visages ceux des plus de 11 000 enfants qui, comme eux, ont été déportés parce que juifs. Je vois aussi les visages des milliers d'enfants qui subissent encore, au Moyen-Orient, en Afrique, et ailleurs, les coups de la barbarie, du fanatisme et du totalitarisme.
Ici à Montluc s'est noué le destin tragique de tant de noms qui ont souffert de la France d'hier et ont fait la France d'aujourd'hui.
Au fil de ma visite, j'essayais d'imaginer les douleurs, les peurs mais aussi peut-être les espoirs que cette prison a abrités.
J'entendais le silence que Jean Moulin opposa à ses bourreaux. J'entendais aussi le désespoir de la famille Touitou dont seuls 2 des 11 enfants ont survécu à Auschwitz.
J'entendais enfin, mesdames et messieurs les anciens internés de Montluc, votre espérance pour vous, pour vos camarades, pour votre pays, la France. Et vous n'avez jamais cessé, fidèle à cette espérance, de mener le combat pour la liberté et la fraternité, toujours avec humilité et humanité.
Je veux vous remercier, monsieur le directeur du mémorial, de nous accueillir aujourd'hui pour perpétuer le message de Montluc.
Dans l'esprit des fondateurs de ce lieu de mémoire, le visiteur qui y entrait devait en sortir différent. Nous tous pouvons en témoigner.
La plupart d'entre nous, femmes et hommes d'une génération qui n'a pas connu la guerre, avons hérité de ces trois mots : liberté, égalité, fraternité. Nous avons grandi dans l'illusion que ces valeurs nous étaient acquises.
Les internés de la prison de Montluc les ont défendues inlassablement.
Comme l'avait fait Jean Moulin. Celui dont le silence a été la survie de la France et celle de sa Liberté. Comme l'avait fait Raymond Aubrac. Celui dont l'inépuisable volonté d'égalité entre les hommes l'a animé en temps de guerre comme en temps de paix. Comme l'avait fait Hélène Berthaud qui, encore ces dernières années, venait ici même à Montluc, livrer aux jeunes générations un message de fraternité.
Cette liberté, cette égalité, cette fraternité arrachées au nazisme n'ont pas de prix.
Aujourd'hui ce lieu de douleur fait partie de l'identité lyonnaise dont le destin pendant la guerre fut si singulier mais plus encore de l'identité de la France.
Aujourd'hui, ce lieu de douleur est un lieu de mémoire mais plus encore un lieu de transmission. La présence des lycéens à mes côtés en témoigne. Je veux vous remercier pour votre engagement et votre fidélité.
Vous êtes les nouveaux militants de la mémoire, appelés à construire la Nation de demain dans un esprit de liberté et de justice pour tous. Dans un esprit de fidélité à l'égard de vos aînés qui ont souffert de la haine et de la violence des hommes. Dans un esprit fraternel et d'ouverture à l'autre qui sont les seuls remparts contre la barbarie.
Tel est le message de Montluc.
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 28 avril 2015