Texte intégral
Une taxe Tobin dans un projet de loi du gouvernement, cela ne figurait pas dans votre présentation de cette loi cadre au printemps. Pourquoi cette initiative ?
Les débats mûrissent. Le fait que le thème soit inscrit à l'ordre du jour de la présidence belge de l'Union européenne, au Conseil des ministres de l'Économie et des Finances (Ecofin), signifie que nous sommes passés d'une revendication portée par des franges de la gauche plurielle à une problématique inscrite dans le débat institutionnel. C'est maintenant un objet de discussion entre gens qui gouvernent. Il me semblait donc opportun de suggérer quel mécanisme pouvait être mis en place et de relier le fait que l'on prélève sur les excès de l'économie libéralisée à un financement de l'économie solidaire.
Gauche plurielle, vous pensez à qui ? Attac n'en fait pas partie...
Oui, enfin, les 120 députés du groupe Attac de l'Assemblée nationale portent cette thématique et nous sommes passés d'une adhésion des Verts à une résonance de plus en plus forte au sein du Parti socialiste. Les choses évoluent. Il y a le conseil Ecofin, Jospin a réaffirmé qu'il était plutôt favorable à une initiative française, des positions ont l'air de se dégager d'un certain nombre d'autres ministres, et à l'international, il est intéressant que Schröder dise la disponibilité de l'Allemagne. Cette thématique peut devenir un vrai objet de discussion française, internationale, et trouver un débouché. C'était le moment de faire une sortie concrète. Je n'ai pas voulu d'agitation, mais j'entends bien que l'opportunité, le mécanisme et l'affectation de cette taxe soient discutés sérieusement.
J'imagine que Lionel Jospin est au courant de votre initiative...
Le texte est dans les mains des équipes qui l'entourent. L'avant-projet de loi entre en discussion interministérielle, et il compte une quarantaine d'articles de loi solides. Pour l'instant, la taxe en fait partie. Je n'ai pas encore de réaction du Premier ministre, mais je préfère que les gens prennent le temps de mesurer politiquement, techniquement, et dans l'articulation à la fois réelle et symbolique ce que signifie un tel acte de régulation dont le produit est affecté au soutien de l'économie sociale et solidaire.
Ça a du sens.
Comment fonctionnerait cette taxe ?
Elle concerne les changes spéculatifs sur les monnaies, en compte courant ou à terme, sur lesquels on prélève 0,05 % à chaque transaction. Pour être conforme au droit communautaire, on ne taxe pas les échanges commerciaux et intra-communautaires. Techniquement, introduire un paramètre de calcul dans les programmes gérant les transactions n'est pas une affaire d'État. Quant au potentiel de cette taxe, on peut l'estimer à au moins dix milliards de francs, peut-être quelques dizaines de milliards à terme. Je suggère que soit créé un fond de solvabilisation du tiers secteur alimenté par une partie de cette taxe. Après, pour le deuxième axe envisagé, la coopération, ça n'est pas mon champ. Mais il faut un retour en force d'une ambition au niveau de la coopération. Il faut arriver à faire naître un vrai secteur économique maîtrisé par les gens dans les pays en question. Dans les trois quarts des pays africains, le droit associatif, coopératif ou mutualiste en est encore au degré zéro
Votre projet de loi cadre ne sera pas adopté avant les élections...
Ça c'est vous qui le dites. Je ne vous dis pas le contraire, mais si vous connaissez les choix du gouvernement pour le printemps, vous êtes très fort, parce que moi je ne sais pas. L'avant-projet sera présenté en Conseil des ministres en décembre. Ce que je sais, c'est qu'en principe il va rentrer dans un ordre du jour parlementaire pour une première lecture dès le début de l'année. C'est en train de se discuter. En fait, d'ici décembre, je pense qu'il faudrait que le gouvernement, et il le fera en son temps, dise ce qu'il faut mettre à l'ordre du jour avant les grandes échéances qui soit utile pour la société française et ait du sens politiquement pour la gauche plurielle.
Justement, votre initiative n'est-t-elle pas un effet d'annonce en vue des élections ?
Le temps des effets d'annonce est passé, les gens sont beaucoup plus critiques. Le côté " J'ai déjà dit il y a six ans et je vous le redis aujourd'hui "... Il faut poser des actes, en tout cas pour la loi sur l'économie sociale et solidaire. Pour la taxe, on verra, parce que la dimension est européenne.
Sur la faisabilité d'une telle taxe, quels sont vos arguments ?
Quand des gens en 1946 ont suggéré qu'il suffisait de taxer l'ensemble de la masse salariale de 20 % ou 25 % pour financer une protection santé et des retraites, ils étaient bien plus fous que ceux qui aujourd'hui proposent la taxe sur les flux spéculatifs. A un moment donné, c'est un problème de volonté politique. Ça n'est pas un problème technique, ni financier.
Si les spéculateurs sont taxés en France, il leur suffira d'acheter des euros ailleurs dans l'UE...
Une initiative européenne est possible. Ma proposition de taxe est un signal, et c'est une manière de dire : " Prenons l'initiative ! " Les Belges l'ont inscrite à l'ordre du jour, alors il serait incroyable que le conseil Ecofin ne discute d'aucune proposition concrète. Puisque Schröder se déclare prêt à regarder une proposition, que le couple franco-allemand prenne la tête du cortège. Quand les deux marchent main dans la main, il suffit que quelques autres gouvernements adhèrent et ça devient le débat référent. C'est possible et souhaitable.
(source http://www.mediasol.org, le 9 novembre 2001)
Les débats mûrissent. Le fait que le thème soit inscrit à l'ordre du jour de la présidence belge de l'Union européenne, au Conseil des ministres de l'Économie et des Finances (Ecofin), signifie que nous sommes passés d'une revendication portée par des franges de la gauche plurielle à une problématique inscrite dans le débat institutionnel. C'est maintenant un objet de discussion entre gens qui gouvernent. Il me semblait donc opportun de suggérer quel mécanisme pouvait être mis en place et de relier le fait que l'on prélève sur les excès de l'économie libéralisée à un financement de l'économie solidaire.
Gauche plurielle, vous pensez à qui ? Attac n'en fait pas partie...
Oui, enfin, les 120 députés du groupe Attac de l'Assemblée nationale portent cette thématique et nous sommes passés d'une adhésion des Verts à une résonance de plus en plus forte au sein du Parti socialiste. Les choses évoluent. Il y a le conseil Ecofin, Jospin a réaffirmé qu'il était plutôt favorable à une initiative française, des positions ont l'air de se dégager d'un certain nombre d'autres ministres, et à l'international, il est intéressant que Schröder dise la disponibilité de l'Allemagne. Cette thématique peut devenir un vrai objet de discussion française, internationale, et trouver un débouché. C'était le moment de faire une sortie concrète. Je n'ai pas voulu d'agitation, mais j'entends bien que l'opportunité, le mécanisme et l'affectation de cette taxe soient discutés sérieusement.
J'imagine que Lionel Jospin est au courant de votre initiative...
Le texte est dans les mains des équipes qui l'entourent. L'avant-projet de loi entre en discussion interministérielle, et il compte une quarantaine d'articles de loi solides. Pour l'instant, la taxe en fait partie. Je n'ai pas encore de réaction du Premier ministre, mais je préfère que les gens prennent le temps de mesurer politiquement, techniquement, et dans l'articulation à la fois réelle et symbolique ce que signifie un tel acte de régulation dont le produit est affecté au soutien de l'économie sociale et solidaire.
Ça a du sens.
Comment fonctionnerait cette taxe ?
Elle concerne les changes spéculatifs sur les monnaies, en compte courant ou à terme, sur lesquels on prélève 0,05 % à chaque transaction. Pour être conforme au droit communautaire, on ne taxe pas les échanges commerciaux et intra-communautaires. Techniquement, introduire un paramètre de calcul dans les programmes gérant les transactions n'est pas une affaire d'État. Quant au potentiel de cette taxe, on peut l'estimer à au moins dix milliards de francs, peut-être quelques dizaines de milliards à terme. Je suggère que soit créé un fond de solvabilisation du tiers secteur alimenté par une partie de cette taxe. Après, pour le deuxième axe envisagé, la coopération, ça n'est pas mon champ. Mais il faut un retour en force d'une ambition au niveau de la coopération. Il faut arriver à faire naître un vrai secteur économique maîtrisé par les gens dans les pays en question. Dans les trois quarts des pays africains, le droit associatif, coopératif ou mutualiste en est encore au degré zéro
Votre projet de loi cadre ne sera pas adopté avant les élections...
Ça c'est vous qui le dites. Je ne vous dis pas le contraire, mais si vous connaissez les choix du gouvernement pour le printemps, vous êtes très fort, parce que moi je ne sais pas. L'avant-projet sera présenté en Conseil des ministres en décembre. Ce que je sais, c'est qu'en principe il va rentrer dans un ordre du jour parlementaire pour une première lecture dès le début de l'année. C'est en train de se discuter. En fait, d'ici décembre, je pense qu'il faudrait que le gouvernement, et il le fera en son temps, dise ce qu'il faut mettre à l'ordre du jour avant les grandes échéances qui soit utile pour la société française et ait du sens politiquement pour la gauche plurielle.
Justement, votre initiative n'est-t-elle pas un effet d'annonce en vue des élections ?
Le temps des effets d'annonce est passé, les gens sont beaucoup plus critiques. Le côté " J'ai déjà dit il y a six ans et je vous le redis aujourd'hui "... Il faut poser des actes, en tout cas pour la loi sur l'économie sociale et solidaire. Pour la taxe, on verra, parce que la dimension est européenne.
Sur la faisabilité d'une telle taxe, quels sont vos arguments ?
Quand des gens en 1946 ont suggéré qu'il suffisait de taxer l'ensemble de la masse salariale de 20 % ou 25 % pour financer une protection santé et des retraites, ils étaient bien plus fous que ceux qui aujourd'hui proposent la taxe sur les flux spéculatifs. A un moment donné, c'est un problème de volonté politique. Ça n'est pas un problème technique, ni financier.
Si les spéculateurs sont taxés en France, il leur suffira d'acheter des euros ailleurs dans l'UE...
Une initiative européenne est possible. Ma proposition de taxe est un signal, et c'est une manière de dire : " Prenons l'initiative ! " Les Belges l'ont inscrite à l'ordre du jour, alors il serait incroyable que le conseil Ecofin ne discute d'aucune proposition concrète. Puisque Schröder se déclare prêt à regarder une proposition, que le couple franco-allemand prenne la tête du cortège. Quand les deux marchent main dans la main, il suffit que quelques autres gouvernements adhèrent et ça devient le débat référent. C'est possible et souhaitable.
(source http://www.mediasol.org, le 9 novembre 2001)