Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Bruno Le Roux, Mme Brigitte Bourguignon, MM. Patrick Bloche et Pascal Deguilhem et plusieurs de leurs collègues visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale (nos 2734, 2810).
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M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des sports.
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État chargé des sports. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les parlementaires, Cécilia Berder, vice-championne du monde d'escrime, est venue frapper à la porte de mon ministère pour savoir si je voulais bien la prendre en charge de fin d'études de journalisme.
Une réponse positive lui a été donnée, elle est venue et, très rapidement, je l'ai présentée à des chefs d'entreprise afin qu'elle leur expose ce qu'est son quotidien.
La réalité de la vie d'un sportif ou d'une sportive de haut niveau, c'est un entraînement deux fois par jours, des compétitions en fin de semaine, le transport, l'hôtel, la salle de compétition, l'hôtel, le transport puis le retour aux deux entraînements journalier.
À la question qui lui a été posée « Tu vis de quoi ? Cécilia a répondu qu'elle vit de l'aide personnalisée versée par sa fédération c'est donc le soutien de l'État qui lui permet de vivre.
Je rappelle que nous avons maintenu en 2013 et en 2014 les sommes allouées aux fédérations
M. François Rochebloine. Heureusement !
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. à la différence de ce que d'aucuns prétendent. Exactement, monsieur Rochebloine, elles ont été maintenues.
Nous avons donc versé aux fédérations les sommes leur permettant de financer notamment les aides personnalisées aux sportifs de haut niveau.
Il se trouve que l'aide personnalisée que touchait Cécilia Berder était de 900 euros par mois. Après avoir payé son loyer en collocation, qui s'élevait à 350 euros, il ne lui restait donc plus que 550 euros pour vivre. Telle était la situation financière de Cécilia.
Qu'en était-il de sa situation en termes de protection sociale ? Elle n'avait pas de statut, car les sportifs de haut niveau n'en ont pas. Comme elle poursuivait des études, elle bénéficiait tout de même de la Sécurité sociale étudiante. Telle était la situation de Cécilia ; telle est la situation des sportifs de haut niveau dans notre pays.
Je tenais donc à remercier l'ensemble des parlementaires, car si l'ambiance qui régnait en commission perdure ce soir
M. Pascal Deguilhem. Il n'y a pas de raison !
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. nous témoignerons collectivement de notre volonté de mieux protéger nos sportifs, et nous leur montrerons enfin il était grand temps ! que la nation leur est reconnaissante de ce qu'ils lui apportent.
Tel était l'objet du rapport que m'a rendu Jean-Pierre Karaquillo, à qui j'avais confié la mission de réfléchir au statut du sportif de haut niveau. Il m'a remis un rapport concernant les statuts « des sportifs » et non du seul sportif de haut niveau , dont une partie importante concerne également les sportifs professionnels.
Mais revenons tout d'abord aux sportifs de haut niveau. Les principaux problèmes qu'ils rencontrent touchent à la fois à leurs revenus et à leur protection. Dans son rapport, Jean-Pierre Karaquillo note que certaines fédérations n'assurent pas d'assurance complémentaire ; il appelle également notre attention sur les accidents survenus en cours de carrière. Mesdames et messieurs les députés qui siégez au sein de la commission des affaires culturelles, rappelez-vous l'audition d'Astrid Guyart : celle-ci a expliqué que son corps, en fin de carrière, était cassé, d'une certaine façon, et que si demain elle avait le moindre accident, elle ne bénéficierait pas de la législation relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles. Telle est la réalité !
En matière de sport professionnel, la chambre sociale de la Cour de cassation a requalifié des contrats à quatre reprises au cours de l'année 2014, estimant que les contrats à durée déterminée d'usage étaient fragiles. Certains juristes ont même pensé, comme l'a très bien rappelé Mme la rapporteure, que la chambre sociale voulait par là amener le milieu du sport professionnel à contracter des contrats à durée indéterminée. Or, aussi bizarre que cela puisse paraître, et comme le montre très bien le rapport de M. Karaquillo, le contrat à durée indéterminée, dans le sport professionnel, est source de précarité. Il a donc semblé préférable de mieux encadrer et protéger la relation contractuelle entre le sportif professionnel et la société qui l'emploie.
Il importait, enfin, que le mouvement paralympique, auquel je sais que les parlementaires de tous bords sont extrêmement attentifs, soit reconnu très officiellement dans le code du sport.
Lorsque j'ai découvert la proposition de loi déposée par Patrick Bloche, Bruno Le Roux, Brigitte Bourguignon, Pascal Deguilhem et les membres du groupe SRC, ou plutôt puisqu'il paraît qu'il ne faut plus s'en tenir aux abréviations du groupe socialiste, républicain et citoyen,
M. Marcel Rogemont. Surtout républicain !
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. j'ai trouvé qu'elle présentait deux avantages. Elle permet, premièrement, de régler les problèmes des sportifs de haut niveau de manière rapide et unanime et je parle d'une véritable unanimité, pas d'une unanimité de façade, sur tous les bancs de notre assemblée. Deuxièmement, elle permet d'appeler l'attention de l'opinion publique sur la situation de ces sportifs, qui est largement méconnue. On s'imagine trop souvent que le sportif professionnel gagne de l'argent, a de belles voitures et fait n'importe quoi de son argent. Or la réalité est tout autre ; le quotidien des sportifs professionnels, comme celui des sportifs de haut niveau, n'a rien à voir avec cela, et je me félicite que vous ayez pris en compte tous les problèmes que les sportifs rencontrent au quotidien. J'espère que la discussion qui s'ouvre sera marquée par le même esprit d'unanimité que celui qui a caractérisé le débat en commission.
Le Gouvernement ne peut qu'être extrêmement favorable à cette proposition de loi, tant elle répond à un besoin, et tant elle prend en compte la parole des sportifs. Comme Mme la rapporteure vient de le rappeler, nombre d'entre eux ont publié ce matin une tribune dans L'équipe, où ils remercient la représentation nationale de penser à eux. Je voudrais, à mon tour, quel que soit le siège sur lequel vous siégez, vous remercier de montrer que vous pensez à eux ; vous remercier de montrer que le sport est l'intérêt de la nation, l'intérêt général ; qu'il n'y a pas un sport de droite et un sport de gauche, mais la France et les sportifs français, et que tous les parlementaires sont derrière ces derniers.
Je voulais, au moment d'entamer l'examen de ce texte, vous remercier des propos que vous avez tenus en commission et que, je l'espère, vous tiendrez à nouveau ce soir, en séance. Au nom du Gouvernement, je suis à votre disposition pour répondre aux différents amendements que vous déposerez. Je répète que les sportifs avaient vraiment besoin que la nation leur manifeste sa reconnaissance, et je crois que la représentation nationale va enfin le faire ce soir. Je tiens à vous en remercier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur quelques bancs des groupes de l'Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 9 juin 2015