Déclaration de Mme Pascale Boistard, secrétaire d'Etat aux droits des femmes, sur le développement de l'entrepreneuriat des femmes, Sao Paulo le 14 mai 2015.

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C'est un honneur que de prendre la suite de la représentante de notre pays hôte, Madame la Ministre Menicucci.
Pour la France, participer de manière active au Sommet Global des Femmes est aussi une façon de faire valoir notre engagement à promouvoir l'indépendance économique des femmes et l'entrepreneuriat des femmes.
La France a en effet toute sa place dans ce panel intitulé« accroître la place des femmes dans le développement économique », car depuis l'entrée en fonction de notre Gouvernement, la France a mené des politiques volontaristes pour promouvoir la participation des femmes à la vie économique et notamment au sein de l'entreprise.
C'est pour cela que le projet, porté par la France et d'autres acteurs du secteur privé mais aussi associatifs, que je souhaite vous exposer aujourd'hui est en lien direct avec la promotion des femmes dans l'entrepreneuriat : un plan ambitieux pour développer l'entrepreneuriat des femmes.
En 2010 a été fait le constat que, si les femmes représentaient la moitié de la population active française, elles ne représentaient que 30% des créateurs d'entreprise. Pire, elles ne représentaient que 10% des créations d'entreprises innovantes, se centrant plutôt sur des activités de service aux particuliers, de santé, de l'action sociale.
Or, comme les hommes, quasiment un cinquième des femmes souhaitent créer leur entreprise : pour développer une idée, pour créer leur emploi, pour contribuer au rayonnement de leur territoire. Les femmes qui créent ont des entreprises aussi pérennes que les hommes ; ainsi, les entreprises financées par le fond que je vais évoquer dans quelques instants sont 82% à passer le cap des 3 ans.
Notre gouvernement a donc considéré que cet écart, entre le nombre de créatrices et le nombre de femmes créant effectivement son entreprise était une perte de chance. Il a estimé que l'entrepreneuriat féminin est à la fois un levier pour la compétitivité et l'emploi, et une source d'émancipation et de liberté pour les femmes. l'entrepreneuriat des femmes est une source de croissance, car la création d'entreprises contribue au rayonnement de la France et à l'innovation. Il est un facteur de cohésion sociale, parce que l'entrepreneuriat permet sur le plan individuel une possibilité d'accéder à l'emploi et sur le plan collectif une possibilité de développer des territoires. Il est bien sur une source de liberté et d'émancipation car il permet de rendre réel un projet, et plus prosaïquement de créer son emploi dans une période de crise économique. C'est pourquoi le gouvernement a estimé que toutes les formes d'entrepreneuriat des femmes devaient être encouragées.
Ainsi a été lancé en août 2013 un plan pour l'entrepreneuriat au féminin, qui réunit trois ministères : le Ministères des Droits des femmes, celui de l'Education Nationale, de l'Enseignement supérieur et de la recherche, et le ministère de l'Economie, ainsi qu'un établissement financier d'Etat : la Caisse des Dépôts et Consignation. Ces trois ministères se sont fixés un objectif : celui de faire passer le taux de femmes créatrices de 30 en 2010 à 40% en 2017.
Ce plan a été décliné au niveau local par des signatures dans toutes les régions et à nouveau consolidé en février 2015, par l'ajout d'axes particuliers de développement dans les quartiers prioritaires de la ville, les zones rurales et la reprise d'activité.
Ce plan s'articule autour de trois piliers que je vais développer.
1 / En premier lieu, nous tentons de sensibiliser les femmes, et notamment les jeunes femmes, à l'entrepreneuriat. Nous leur montrons qu'il est possible pour une femme de créer son entreprise en France, et qu'elle peut ainsi réaliser ses projets, créer son emploi et d'autres. Nous avons créé, pour cela, un site internet : http://www.ellesentreprennent.fr qui offre aux entrepreneures potentielles conseils et référents pour monter leur affaire. Nous réalisons par ailleurs, depuis 3 ans, une semaine de sensibilisation à l'entrepreneuriat féminin chaque année en mars. Le principe en est simple : dans des collèges, des lycées, des établissements d'enseignement supérieur, des femmes entrepreneures viennent présenter leur parcours à des classes ou lors de forums. Ce projet est co-organisée avec une association française nommée 100 000 entrepreneurs et des réseaux d'accompagnement à la création d'entreprise, sous l'égide de mon ministère, du ministère de l'économie et de celui de l'éducation nationale. Au départ modeste, cette initiative a permis cette année l'intervention de plus de 400 femmes devant 10 000 jeunes – filles et garçons -. Tous ces jeunes ont pu constater que les femmes également sont susceptibles de parcours réussis dans l'entrepreneuriat.
2/ En deuxième lieu, nous avons développé des outils de financement spécifique. Comme partout dans le monde, ce sont les banques, publiques ou privées, qui financent les créations d'entreprise. Mais afin de lever des freins potentiels au financement de création par des femmes, nous avons créé un outil spécifique de garantie : le fond de garantie à l'initiative des femmes, géré pour nous par France Active et Initiative France. Ce fond, doté de près de 6 millions d'euros en 2014, permet de garantir 70% d'un prêt dans la limite de 27 000€. En 2015, le montant garanti a même été porté à 45 000 €. Ce mécanisme est d'un excellent rapport : pour une somme de 6 millions, ce sont près de 30 millions d'euros de prêts qui sont garantis. C'est un effet de levier important sur l'activité économique pour un très faible investissement public.
Par ailleurs, ce soutien est très bien accueilli par les banques et les prêteuses : 1863 prêts ont été garantis en 2014, en augmentation incessante.
3/ Enfin, nous soutenons très fortement – financièrement et techniquement – les réseaux d'accompagnement de création d'entreprise.
Ainsi, 14 réseaux ont signé avec mon ministère une convention d'engagement sur l'accompagnement des femmes. Ces réseaux sont pour partie généralistes, pour partie ciblés sur un type d'accompagnement ( l'entrepreneuriat à vocation d'insertion par exemple) ou un type de public (les femmes, les femmes qui créent des entreprises innovantes, les femmes de plus de 45 ans …).
Tous ces réseaux travaillent avec les créatrices potentielles pour les aider à construire leur projet sur la base de leurs idées, à développer leur affaire, ou finalement à consolider leur entreprise.
Cette dimension, les créatrices nous le disent, est particulièrement importante pour la concrétisation de leur projet. Je crois que ce qui est particulièrement intéressant pour cette assemblée dans ce plan réside dans deux de ses caractéristiques : d'une part dans sa forte agilité, et adaptation au contexte local, et d'autre part, dans la dimension très partenariale, tout en restant souple, de son exécution. De mon point de vue, ces deux éléments rendent notre plan particulièrement adaptable à tous les contextes sociaux et économiques, et donc potentiellement transposables à vos pays. En effet, il m'apparaissait essentiel de vous proposer une pratique dont certains aspects sont assez facilement transposables. Laisser moi vous illustrer cette adaptabilité au travers d'un exemple qui me semble emblématique : la semaine de sensibilisation à l'entrepreneuriat au féminin. Cette semaine est organisée par une association, 100 000 entrepreneurs. L'association, qui accueille 8 permanents à Paris ainsi qu'un nombre très restreint de déléguées régionales, a constitué un partenariat avec des réseaux de femmes entrepreneures : elle dispose ainsi d'un vivier de femmes potentiellement intervenantes sur tout le territoire. Par le truchement de mon ministère, elle entretient des relations privilégiée avec les ministères de l'éducation nationale et de la recherche, qui envoient en début d'année une information sur l'opération à tous leurs correspondants locaux en charge de l'égalité entre les femmes et les hommes. Ces correspondants relaient l'information auprès de tous les établissements scolaires.
Par la suite, le processus est très simple :
- Les enseignants sollicitent une intervention en s'inscrivant sur un site internet
- Les permanents sollicitent les femmes entrepreneures locales pour réaliser les interventions
- Celles-ci sont formées grâce à un logiciel de e-learning sur le déroulé type d'une intervention. Les entrepreneures volontaires pour intervenir disposent donc d'un cadre de référence commun pour le faire.
Et plus de 400 interventions ont été réalisées en 2015 avec ce dispositif tout simple, ce qui représente un doublement par rapport à l'an passé.
Ce qui me semble tout particulièrement intéressant dans cette semaine de l'entrepreneuriat au féminin est que :
- Nous utilisons toutes les énergies, issues des entrepreneures, d'entreprises partenaires, d'associations, de l'administration, pour un dispositif finalement assez simple d'application
- Nous utilisons les nouvelles technologies pour déployer, à moindre coût, un dispositif sur l'ensemble du territoire. Ainsi, le développement dès 2016 de cette expérience dans nos départements d'outre mer ne pose aucune difficulté particulière : l'administration y est présente, et l'association porteuse sera relayée par les outils numériques qu'elle a créés : logiciel de formation et de matching des interventions.
Comme vous le voyez, cet exemple de partenariat réussi en faveur de l'entrepreneuriat féminin peut être réalisé sur tous les territoires. C'est un élément qui peut intéressé certains d'entre vous aux territoires vastes ou moins accessibles par exemple.
Pour conclure, je voulais mettre en avant quelques réalisations du plan pour l'entrepreneuriat au féminin. Nous sommes cependant confiants sur l'évolution du taux de femmes parmi les créateurs d'entreprises, car de nombreux indicateurs favorables nous sont apportés :
- Ainsi, toutes les régions françaises ont décliné le plan national, les partenaires locaux s'emparant très vivement de cette thématique
- La semaine pour l'entrepreneuriat au féminin que je viens d'évoquer ne cesse de croître : chaque année, nous voyons un doublement du nombre d'interventions demandées. Cette semaine répond manifestement à une demande des enseignants et des élèves.
- Le fond de garantie à l'initiative des femmes est en constante progression ; il est chaque année consommé, ce qui est une manifestation directe de la création d'entreprises par les femmes.
Ainsi, nous avons confiance dans la réalisation de notre objectif, qui est de faire progresser le nombre et le pourcentage de femmes parmi les créateurs d'entreprises à 40% à l'horizon de 2017. Des données disponibles l'an prochain nous permettront j'espère de confirmer ce bon pressentiment.
Je vous remercie de votre attention.

source http://femmes.gouv.fr, le 21 mai 2015