Déclaration de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur la diplomatie culturelle, à Paris le 18 juillet 2015.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Ouverture des ateliers de l’Institut français, à Paris le 18 juillet 2015

Texte intégral


Mesdames et Messieurs,
Madame la Directrice générale,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Chers Amis,
Je me réjouis d'être parmi vous pour ouvrir ces «Ateliers de l'Institut français», qui constituent chaque année un moment important pour notre réseau culturel.
L'Institut français a choisi le «104» pour accueillir ces Ateliers. C'est un choix judicieux, conforme à la tradition qui veut que votre réseau se réunisse dans des lieux emblématiques de la création culturelle. Marseille et la Friche la Belle de Mai ; Nantes et le Voyage à Nantes ; Lille et la Gare Saint-Sauveur ; Paris et la Cité des Sciences et de l'industrie de la Villette. Chacun de ces lieux illustre la vitalité de notre vie culturelle, aussi bien dans la capitale que dans nos régions. C'est vraiment un excellent choix.
Cette année, donc, le 104. C'est un lieu dynamique, un lieu de liberté vous l'avez très bien rappelé, qui conjugue exigence et accessibilité c'est un équilibre très bien respecté, avec une avant-garde artistique mais qui n'est pas à ce point avant-garde qu'elle laisse l'ensemble des troupes derrière.
C'est aussi un laboratoire de la diversité - diversité des formes d'art et des publics. Vos ateliers ayant cette année pour thème «la diversité de la société française», le choix du 104 était doublement le bon.
J'ai tenu à être présent aujourd'hui d'abord pour vous réaffirmer mon attachement à votre travail et à celui de l'Institut français. Certains parmi vous s'interrogent peut-être parfois sur la place de la culture au sein de notre ministère, sur son rôle dans la diplomatie globale - et donc sur vos propres missions. En effet, on a tellement - moi le premier - parlé de diplomatie économique qu'à un moment, même si tout le monde reconnait qu'il y avait un effort à faire dans ce domaine, on peut peut-être se sentir un peu latéralisé. Je veux être clair : pas seulement à cause de mon parcours personnel qui n'est pas totalement en rupture avec la culture mais par conviction et par choix, le réseau culturel est et restera un élément tout à fait central de notre diplomatie. Tout à l'heure, Denis Pietton, qui en a l'expérience par rapport à la diversité de ses fonctions, s'attachait à réfléchir pour savoir ce qu'est la France, son image et son influence. C'est quelque chose de très particulier. Pour prendre une comparaison, nous avons toutes les touches et toutes les couleurs de la palette et c'est le cas de très peu de pays. Nous sommes, je le vois dans mon activité quotidienne, l'un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité et en passant, en espérant qu'il ne soit pas choqué, merci au général de Gaulle. Il se trouve qu'il y a cinq pays dans le monde - ce n'est peut-être pas juste mais c'est ainsi - qui peuvent lever ou baisser le pouce pour cette raison.
Nous avons une puissance économique qui n'est sans doute pas celle que l'on souhaiterait mais il y a quand même 192 pays qui ont moins de puissance économique que nous. Il n'y en a que quatre devant, peut-être cinq, cela dépend comment on compte et si on n'aime ou pas la Grande-Bretagne. Il y a nos principes, notre Histoire les fils et les filles de la révolution française. Il y a notre réseau scientifique et culturel, notre langue et il y a une politique qui se veut universaliste. On pourrait allonger cette liste mais ce qui me frappe, c'est que nous cochons toutes les cases et même si ce ne sont pas les plus puissantes, cela nous donne, par effet de synergie, une influence considérable. Dans cette palette, l'élément culturel est absolument décisif.
La diplomatie culturelle possède sa valeur propre ; elle constitue une spécificité française que je veux préserver et renforcer. Je puis être encore plus clair : la culture n'a pas à être, ni ne sera instrumentalisée au service d'une autre cause qu'elle-même. Il faut bien comprendre qu'elle fait partie intégrante de cette influence et même, de cette identité.
J'ai d'ailleurs fait du rayonnement de notre pays l'une des priorités de notre politique étrangère. On ne va pas décréter le rayonnement culturel, mais, avec des moyens qui ne sont pas immenses et quand je vois la réalité économique et financière, je n'ai pas le sentiment que du jour au lendemain, les choses deviendront faciles, il faut vraiment que l'on maintienne et si possible, que l'on amplifie encore cette emprunte culturelle tout à fait fondamentale. Ce rayonnement, vous en êtes des acteurs majeurs. Vous l'incarnez par la promotion active de notre langue et de notre culture, mais aussi - cette autre dimension est cruciale - par l'ouverture aux autres, par l'échange avec les cultures du monde, par non seulement l'acceptation mais la revendication de la diversité, tout ceci fait que c'est l'identité française.
Notre culture, ce sont d'abord nos artistes, nos intellectuels, nos chercheurs ; ce sont d'ailleurs des catégories qui ne sont pas exclusives. Ils sont reconnus dans le monde entier. À cet égard, l'année qui vient de s'écouler - si on regarde les récompenses et qui ne sont qu'un élément de jugement - n'a pas été - pour employer une litote «Quai d'Orsay» - trop mauvaise. Je le dis d'autant plus que le gouvernement n'y est strictement pour rien :
Prix Nobel de littérature, Prix Nobel d'économie, Médaille Fields de mathématiques, Palme d'or au festival de Cannes : Il y a des déclins français plus évidents.
Au-delà des personnalités distinguées cette année, notre pays compte de très nombreux créateurs internationalement reconnus, dans toutes les disciplines. Comme j'en reconnais au premier rang, j'hésite à citer les noms pour ne pas me fâcher avec tout le monde. J'ai d'ailleurs noté, c'est le privilège de l'expérience du diplomate, que Denis Pietton, lorsqu'il a cité le public auquel il s'adressait, a trouvé les catégories qui permettent à la fois de respecter la tradition et de ne fâcher personne.
Nous devons continuer à accompagner tous ces «grands noms» des cultures françaises que je n'ai pas cités, mais il ne faut pas le faire au détriment des tous jeunes créateurs car si on veut qu'un autre ministre puisse faire le même exercice que moi, il faut que nous donnions de la force et des atouts à cette génération nouvelle.
Il faut que nous parvenions à conserver nos publics et à en trouver de nouveaux et à construire des réseaux nouveaux. Je n'ignore pas, par exemple, l'excellence de la France dans le domaine de la musique électronique, et je sais que, dans ce secteur comme dans les autres, l'Institut français est particulièrement attentif à soutenir la jeune création. Comme je ne recule devant aucune expérience, durant la semaine des ambassadeurs que je réunirai à Paris, il y aura donc, à votre initiative, la démonstration à des ambassadeurs qui resteront cois de ce que nous allons faire dans ce domaine.
Notre culture, c'est aussi notre patrimoine, et notamment la beauté et la richesse de nos musées. Qu'il s'agisse du MUCEM à Marseille - qui est devenu maintenant un lieu obligé de visite. Il y a deux semaines, je m'y suis rendu récemment en compagnie du Premier ministre chinois, là le président mexicain. Je ne sais pas ce qui est prévu pour la semaine prochaine mais en cout cas, c'est un atout extraordinaire. Le Louvre-Lens, du Musée Picasso et du Musée de l'Homme tous deux magnifiquement rénovés, de l'installation récente d'un Centre Pompidou à Malaga, ou de l'ouverture à venir du Louvre Abu Dhabi, la France est en mouvement et fait figure de référence internationale. Cela fait partie de notre force et de notre rayonnement.
Enfin, sans m'appesantir parce que je ne veux pas être trop traditionnel, je veux souligner que notre culture, au-delà de nos créateurs et de notre patrimoine, ce sont aussi évidemment des valeurs qu'il faut réaffirmer. Je vous remercie de le faire, vous le faites avec conviction et sans esprit de provocation et vous le faites extrêmement bien : la liberté d'expression, la diversité culturelle, l'égalité entre les femmes et les hommes, le développement durable et équilibré de notre planète. Ces causes sont justes, et la France agit partout dans le monde pour les défendre. Ces mots peuvent apparaître galvaudés mais c'est la réalité. Ces thèmes seront abordés au cours de vos ateliers, je m'en réjouis car ils sont une composante à part entière de notre culture.
Cette richesse culturelle qui est la marque de fabrique de notre pays, il ne suffit pas de s'en enorgueillir, il faut la promouvoir et la développer, comme vous le faites. En espérant ne pas être trop directif mais en voulant jeter des coups de projecteurs, je voudrais insister sur trois ou quatre points et j'espère ne pas vous heurter en disant cela et s'il y a un choc, je souhaite qu'il soit positif.
Il faut que, ainsi que cela est déjà fait aller plus loin. Nous devons agir très fortement en faveur des créateurs, à leurs côtés. Cela implique de leur offrir une visibilité. Les Instituts, tout comme les Alliances françaises, je salue Jérôme Clément qui est le président de la Fondation Alliance française, sont déjà d'importants lieux d'accueil pour les artistes et ils doivent le rester. La mobilité internationale de nos créateurs vous doit beaucoup, car vous vous mobilisez pour leur permettre d'être présents dans tous les espaces de création du monde - musées, centres d'art, festivals de littérature, de cinéma, ou de spectacle vivant. Je souhaite que les ambassades deviennent elles-mêmes plus encore des lieux ouverts à la création contemporaine. Qu'on le veuille ou non, l'ambassade au sens physique est une expression particulière de la réalité française. Je souhaite donc que les ambassades deviennent plus encore des lieux ouverts à la création contemporaine. Je suis toujours navré lorsque je voyage et quand, arrivant dans une ambassade, j'y vois physiquement une pâle copie de la culture locale. L'ambassade de France, cela ne doit pas être ainsi ; l'ambassade doit donner une certaine image de ce qu'est la culture française contemporaine, à travers toute une série de manifestations que les ambassadeurs eux-mêmes ont imaginées.
En mars, les salons du Quai d'Orsay ont accueilli une exposition consacrée au mobilier d'exception et aux arts décoratifs français du 21e siècle. Fin août, à l'occasion de la Semaine des ambassadeurs, un événement culturel sera organisé pendant une soirée au Quai d'Orsay autour des enjeux du numérique. Il faut à la fois conjuguer qualité et accessibilité et se servir de ces lieux qui sont exceptionnels.
Agir en faveur des créateurs, cela implique d'être vigilants dans les négociations au plan européen et au plan mondial sur la création d'un «marché unique numérique». Ce n'est pas vous qui négocierez, c'est le ministère mais je souhaite que, si ce n'est pas encore le cas, vous en parliez car ces sujets sont tout à fait importants, en Europe bien sûr mais également dans d'autres parties du monde.
En Afrique, par exemple où la question du droit d'auteur est d'actualité. Vous ne négocierez pas vous-mêmes les accords, mais il est important que vous vous montriez attentifs aux positions prises dans vos pays de résidence et que vous expliquiez et défendiez notre attachement à la diversité culturelle. Ma tâche est de veiller à ce qu'une éventuelle réforme préserve la diversité culturelle et la juste rémunération des créateurs.
Cette première idée toute simple mais évidente que je me permets de souligner, c'est l'action en faveur des créateurs et aux côtés des créateurs.
Deuxième notion que je veux souligner, c'est le soutien au développement international de nos industries culturelles et créatives. La rencontre de ces deux épithètes est d'ailleurs assez étrange car je n'ai pas le sentiment qu'elles s'excluent l'une l'autre, mais c'est ainsi qu'elles s'appellent. C'est un secteur très important en valeur : il représente 1 million d'emplois, 3% de notre PIB, 5% de nos exportations. D'autres pays l'ont compris, les États-Unis par exemple, ayant toujours à l'esprit que les premiers accords après la guerre s'appelaient les accords de Bloomberg et qu'ils portaient sur ces éléments. Aujourd'hui, les industries culturelles nous représentent aux États-Unis beaucoup plus que n'importe quel secteur. Or, nous sommes bons et même excellents dans tous ces domaines ou dans certains d'entre eux et il faut donc que nous élevions encore notre qualité et notre rayonnement. Nous sommes le 2ème exportateur mondial de cinéma, et plusieurs «champions mondiaux» à l'exportation sont français - je pense notamment à Universal Music Group, 1ère entreprise de production musicale au monde ; à Hachette, 2ème groupe mondial d'édition ; à Ubisoft, 3ème éditeur mondial de jeux vidéo. Il est essentiel de soutenir ce secteur, qui crée des emplois et des richesses en France, et qui incarne une part importante de notre créativité. Je vous signale que nous lancerons à la rentrée une campagne mondiale sur le thème «Créative France». Quand on réfléchit à ce qui peut singulariser, sans arrogance mais en étant positif la France dans tous les domaines c'est cette notion de créativité qui nous a paru la plus pertinente. C'est pourquoi j'ai souhaité la création d'une «famille» fédératrice à l'export consacrée à ces industries : l'objectif est d'encourager les synergies entre les acteurs du secteur et de favoriser une plus grande visibilité internationale de notre création, notamment sur les marchés émergents. Je souhaite que vous participiez à la mobilisation autour de cet enjeu.
Troisième notion, en entrant dans des sujets plus épineux - j'espère ne pas vous choquer -, c'est l'articulation entre votre action culturelle et la promotion de notre tourisme. Ce n'est pas seulement parce que le Quai d'Orsay est devenu compétent dans ce domaine mais parce que, au-delà des clichés faciles, il y a l'objectif que nous devons poursuivre. Il y a une expression qui dit de quelqu'un d'un peu approximatif qu'il est un touriste. C'est assez méprisant et ce n'est d'ailleurs pas le seul domaine dans lequel nous le sommes avec les étrangers à tort. Or, nous avons la chance d'accueillir chaque année environ 85 millions de personnes et notre rôle, notre mission est de bien les accueillir car, ensuite, ils seront en permanence nos meilleurs ambassadeurs. De plus, sur un plan économique, c'est un secteur qui se développera de façon formidable et de cette façon, cela crée des emplois qui, par définition ne sont pas délocalisable.
Pourquoi ces personnes viennent-elles en France ? Pour la grande majorité d'entre elles, c'est pour des raisons que j'appellerai culturelles au sens large du terme.
Je réaffirme mon souhait que les Saisons culturelles portées par l'Institut français s'accompagnent systématiquement d'un volet de promotion de notre attractivité touristique. C'est le cas pour les saisons en cours, la Croatie et Singapour.
Il y a aussi la COP21 où la culture a un rôle à jouer.
Je vois ces éléments parce que c'est à la fois la culture et la science qui ont créé ce terreau qui fait qu'aujourd'hui, à la différence de ce qui se passait il y a encore peu d'années, lorsque nous consacrons par exemple un atelier sur ces questions qui détermineront la capacité de vivre sur la planète puisque c'est de cela dont il s'agit, nous n'avons pas la moitié de la salle qui commence contester le phénomène. Maintenant, il est acquis pour des raisons scientifiques et culturelles que ce phénomène grave existe et la question n'est plus : existe-t-il mais comment va-t-on pouvoir l'endiguer.
Cette feuille de route est exigeante : elle nécessite donc que vous puissiez compter sur des moyens suffisants, - c'est mon travail - sur une administration centrale réactive et à l'écoute - Elle l'est et je l'en félicite -, ainsi que sur des opérateurs disponibles et aux missions clairement définies. C'est le cas.
Vous pouvez compter, pour l'animation du réseau, sur la Direction générale de la mondialisation et je veux rendre hommage au travail qui est fait.
Il se trouve que les opérateurs extérieurs relèvent de la tutelle ou de la cotutelle du Quai d'Orsay. Cela nous permet évidemment d'agir de façon plus efficace mais nous sommes du même coup également responsables des résultats.
Vous pouvez vous appuyer aussi sur l'ensemble de nos opérateurs : les opérateurs de l'influence bien sûr - l'Institut français, l'AEFE, Campus France, France Médias Monde, CFI -, mais aussi les opérateurs économiques - Business France, Atout France -, ainsi que les opérateurs de l'expertise et du développement - Expertise France et l'AFD.
Mon souhait c'est que ces opérateurs d'une part et vous d'autre part, vous travaillez en étroite synergie. Il n'est pas toujours simple de concilier des histoires et des cultures différentes mais pour aller tout à fait dans le sens que vous souligniez concernant le 104, je ne dirai pas que le Quai d'Orsay est un grand 104 cela pousserait la comparaison un peu loin, mais la notion de transversalité est un moyen absolument fondamental. Désormais nous avons les outils et il faut donc que les croisements s'opèrent car dans ce domaine comme dans d'autres, sauf peut-être en mathématique, 1+1 ne fait jamais 2 si on comprend cette synergie et cela fait 0 si on ne la comprend pas.
Quelques mots enfin sur l'Institut français. D'abord, je veux saluer et remercier très chaleureusement ses équipes, qui travaillent beaucoup et bien, qui se consacrent avec passion, je le constate lorsque je vous rencontre.
Ce qui me frappe aussi, c'est que vous êtes ouverts à la promotion de tous les secteurs de notre culture - des arts plastiques aux arts visuels, du livre au débat d'idées, de la langue française à la coopération cinématographique. Peut-être cela n'a pas toujours été compris en France parce qu'il faut que l'Institut français fasse de la publicité en France également, Je salue aussi les efforts accomplis par l'Institut en matière d'innovation : je pense à la mise en place de la «Culturethèque», cette bibliothèque numérique pour les Instituts et les Alliances ; je pense aussi à la numérisation des salles de cinéma du réseau. Ces innovations sont positives et doivent être poursuivies.
J'ai souhaité montrer qu'il y a un équilibre à trouver entre la dimension économique et culturelle du ministère où l'Institut français jouera un rôle central lors d'une prochaine manifestation culturelle majeure pour notre réseau. Je le charge en effet d'organiser en janvier prochain au Quai d'Orsay une grande «Nuit des idées», car le soutien au débat d'idées dans le monde doit être une des priorités de notre diplomatie culturelle et un des outils de notre diplomatie d'influence. Cette initiative inédite, ouverte au public, réunira quelques-uns des plus grands intellectuels, artistes, économistes, philosophes, sociologues, architectes de la planète. Je sais que l'Institut saura veiller à la fois à l'excellence des intervenants et à l'originalité de l'organisation. Dans mes fonctions qui ne me réservent pas que des amusements, je dois dire que le mélange Quai d'Orsay-nuit-idées me fait venir l'eau à la bouche. Je m'attends à tout, mais d'abord au meilleur. Si vous le voulez bien, Monsieur le Président, rendez-vous au Quai d'Orsay pour le mois de janvier prochain pour quelque chose qui devra être rayonnant et stimulant.
Vous avez commencé à définir avec l'Institut français les grands axes de son action pour les années à venir. Ils seront affinés rapidement, secteur par secteur, par son nouveau président et sa directrice générale, mais je souhaite insister sur trois points devant vous. D'abord, le périmètre géographique d'intervention. L'Institut doit adapter son action en fonction des zones géographiques, en identifiant les pays où notre action culturelle peut être la plus nécessaire et efficace. Il y a un travail à faire qui n'est pas facile. L'Institut doit aussi clarifier et renforcer son action dans les pays du Sud, et en premier lieu dans les pays francophones : ce sont des viviers majeurs pour notre action culturelle et éducative, il faut y être présent. Cette affaire géographique du périmètre d'intervention est évidemment très importante.
Ensuite, cette notion qui est sans cesse revenue dans vos propos et aussi dans les miens, la transversalité. L'Institut doit favoriser les passerelles entre les disciplines, proposer des rencontres artistiques inattendues - par exemple des rapprochements entre littérature et cinéma, entre danse et peinture. La création française investit ces nouveaux champs, notre diplomatie culturelle doit l'accompagner dans cette direction.
Enfin, la diversification. Je le disais au début, ce qui caractérise l'action et l'influence française, c'est la largeur de la palette et je pense que nous devons confirmer notre ouverture à des secteurs qui font partie de la culture à l'évidence mais pas de la culture comme on l'entend au sens traditionnel. J'y inclus donc - sans me lancer dans une controverse qui serait inutile, l'Institut doit élargir sa palette d'interventions, en s'ouvrant à des secteurs tels que - la mode, l'artisanat d'art, la gastronomie et l'oenologie qui font aussi partie de la culture. Ou le design. Je sais que vous avez déjà commencé à le faire, que ces dimensions sont progressivement intégrées dans le programme des Saisons, mais je souhaite que vous renforciez votre action en ce sens, car je le répète, elles sont toutes constitutives de notre culture.
Je fais confiance au nouveau président de l'Institut, Denis Pietton, et à sa directrice générale, Anne Tallineau, pour avancer sur ces trois points en lien avec l'ensemble des personnels.
Mesdames et Messieurs,
Il me reste pour terminer à souhaiter des échanges fructueux durant vos ateliers. Vous avez choisi comme fil conducteur : «La diversité de la société française et la politique culturelle extérieure de la France». Un choix exigeant, comme l'a rappelé Anne Tallineau. Il faut respecter cette diversité mais travailler aussi à l'unité. Je n'ai rien à ajouter sauf pour souligner une évidence, notre histoire a fait de la France une nation riche d'influences diverses et de cultures multiples. Il n'y a rien de plus stupide que de penser que l'avenir de la France sera dans l'enfermement, dans le renfermement, c'est absolument ne rien comprendre au monde moderne et, ce qui est plus affligeant, lorsque je pense à tel ou tel, à la France parce que la France est ouverture. Il nous appartient aujourd'hui non seulement de la valoriser en faisant respecter cette diversité en montrant qu'elle n'est absolument pas exclusive d'une unité. Dans ce domaine, nous avons beaucoup à faire et la dimension culturelle peut énormément nous y aider.
De vos échanges durant ces deux jours naîtront, j'en suis sûr, des propositions qui permettront de renforcer notre diplomatie culturelle. En tout cas, je serai gourmand d'en avoir le compte-rendu parce que cela me donnera des idées et j'imagine que c'est à partir de ces échanges que vous bâtirez votre programme.
Je voudrais terminer, Mesdames et Messieurs, en vous priant de m'excuser si ce propos était un peu décousu, et en vous remerciant. Tout à l'heure vous me remerciez d'avoir pris sur mon temps pour être avec vous ce matin mais c'est l'inverse. Moi je veux vous remercier pour ce que vous faites, pour ce que vous êtes, parce que si la France a une influence et une image forte dans le monde, c'est, pour une bonne part, grâce à vous.
Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 juillet 2015