Texte intégral
Cette réunion du comité de pilotage intervient alors que nous venons à nouveau d'être frappés par le terrorisme, que nous devrons apprendre à vivre désormais avec cette menace permanente, sans rien perdre de notre exigence et de notre capacité de réponse collective.
À nouveau, la France a été frappée au cœur. Ainsi qu'un pays ami, dont le peuple entretient un lien très fort avec le peuple français, la Tunisie, presqu'au même moment.
Je veux ici affirmer avec force que face à cette volonté de destruction qu'est le terrorisme, nous devons restés unis et mobilisés. À cette barbarie, nous devons répondre par la fermeté, mais aussi par la fraternité et par l'intelligence.
Pour ces ignobles attentats sur notre sol, comme pour ceux de janvier ou ceux de Tunisie, c'est le mécanisme de l'embrigadement, sur les réseaux sociaux notamment, qui a trouvé un terrain favorable chez des personnes mal armées pour y faire face.
L'éducation aux médias et à l'information, dont la semaine de la presse et des médias dans l'école est un moment phare, a été élevée au rang de priorité du ministère en devenant un élément à part entière du parcours citoyen.
Elle doit l'être également, tout au long de l'année, pour les acteurs des médias et de la société, dont vous, les partenaires du Clemi, êtes les représentants.
C'est une urgence à laquelle nous répondons collectivement. Soyez-en remerciés. Notre mobilisation ne doit pas fléchir.
Telle est la mission principale de la presse, cette invention magnifique de l'humanité : faire s'épanouir toujours davantage la liberté.
Son exercice plein et entier est indissociable de notre démocratie. Avec l'éducation aux mécanismes de la presse et des médias, à leur manière d'aborder le monde quand ils sont au meilleur niveau d'eux-mêmes, chaque élève doit pouvoir se faire l'acteur et l'émissaire de leur liberté de penser et d'expression.
Nos élèves doivent comprendre qu'il n'y a rien de plus cher que la liberté de critiquer, de blâmer, de remettre en question et d'accueillir avec circonspection tout ce qui nous arrive : indissociable de la pratique de la prise de distance et même de l'impertinence, la liberté de penser est, en France, en même temps qu'une valeur universelle, une véritable tradition.
Je ne suis pas inquiète quant à l'avenir de cette belle tradition de l'humour et de l'ironie : lors de mes déplacements, je constate qu'elle trouve une relève chez les jeunes générations.
Mais les jeunes doivent aussi être équipés pour ne pas être emportés dans le flux de l'information et surtout de la désinformation en libre service sur le net.
Décrypter, mettre à distance, replacer l'intelligence au centre du rapport au monde, en chasser la peur et la haine : le défi est de taille.
Si seule une infime minorité tombe dans la radicalisation ou la violence, il faut penser au beaucoup plus grand nombre de jeunes qui adhèrent à des thèses complotistes, qui rejettent en bloc ce qui vient de ce qu'ils appellent le système, et qui, surtout, s'en sentent rejetés. C'est aussi à eux qu'il faut s'adresser lorsque nous développons l'éducation aux médias.
Car c'est par l'intelligence également que l'on prévient et défait les amalgames, que l'on peut contribuer à résoudre les fractures de la société. Contre les simplifications funestes, nous devons être des professeurs de nuances, de distinctions fines.
Nous avons beaucoup avancé depuis la dernière réunion du conseil d'orientation et de perfectionnement du Clemi, que j'ai réuni juste après les attentats de janvier.
Tout d'abord, le choix de faire porter la semaine de la presse sur "La liberté d'expression, ça s'apprend !" en référence aux tragiques événements, a fait de l'édition 2015 de la semaine de la presse un événement exceptionnel.
La mobilisation des enseignants a atteint des records et je les en remercie : ils étaient 210 000 à y participer cette année.
J'ai eu l'occasion de me déplacer dans un collège exemplaire en la matière, le collège Guy Flavien dans le XIIème à Paris.
J'ai pu constater l'excellente qualité des projets interdisciplinaires, associant les professeurs et les professeurs documentalistes à l'animation d'un atelier autour de la presse.
Je souhaite que l'édition 2016 se prépare avec la même ambition et la même mobilisation que celle de 2015, très marquée par les attentats contre Charlie Hebdo. Je souhaite que, comme il est habituel, le thème retenu le soit sur deux années consécutives, et que le thème de la liberté d'expression puisse à nouveau être au cœur de la semaine de la presse 2016.
Au-delà, nous avons voulu que l'esprit de la semaine de la presse, semaine portée par une dynamique exemplaire générée et accumulée au fil des années, et reposant sur l'engagement personnel des uns et des autres, puisse se continuer tout au long de l'année.
C'est pourquoi nous avons développé de nouveaux partenariats avec vous, les acteurs des médias, et avancé sur trois grands objectifs communs :
Premièrement, le renforcement des ressources et de la formation des enseignants à l'EMI. Cela passe notamment par la création d'outils audiovisuels de formation (type MOOC) dans le cadre de la convention que nous avons signée avec France télévisions ainsi que par les conventions passées avec Arte et la BBC, qui entrent dans le portail de ressources Eduthèque. Nous travaillons aussi avec Le Monde et le Centre de Formation des Journalistes (CFJ) à une offre de formation sur l'EMI pour les enseignants.
Il y a ensuite, le développement des interventions de journalistes dans les classes. Ces interventions sont favorisées par la réserve citoyenne, mais également par la convention signée avec Radio France, ainsi que par "Inter class'", le partenariat avec France Inter, qui débute à la rentrée, par la convention que nous avons passé avec France télévisions pour le développement de masterclasses, ou encore par la convention que nous préparons avec France Médias monde.
Enfin, dans le cadre du parcours citoyen, nous travaillons ensemble à la présence, dans chaque établissement, de médias collégiens et lycéens. Là aussi, nous comptons pleinement sur nos partenaires associatifs, comme le Syndicat national des Radios libres, avec qui nous préparons une convention. Mais nous comptons également sur le Clemi, dont nous souhaitons renforcer les capacités d'action. Comme je l'ai annoncé lors de la réunion des recteurs et des Dracdu 9 juin dernier, un coordinateur du Clemi sera désormais présent à temps plein dans chaque académie à cette fin, de même qu'un référent pour l'éducation aux médias et à l'information pour ce qui est du primaire.
Nous devons ainsi mettre un accent tout particulier sur le renforcement de ces partenariats dont la semaine de la presse est la plus belle concrétisation.
Une convention sur l'EMI sera signée entre le ministère de l'Éducation nationale, le ministère de la Culture et Canopé avant la fin de l'année pour décliner tous ces objectifs qui doivent être partagés.
Ces partenariats doivent également se déployer à l'international. La signature d'une convention est en préparation avec France médias monde. Le réseau de l'enseignement français à l'étranger sera également pleinement mobilisé à travers l'AEFE.
Nous devons mettre toutes nos énergies au service d'une véritable mobilisation collective pour la transmission d'une culture de la presse et de la liberté d'expression.
Je tiens à cette occasion à saluer Evelyne Bevort ici présente qui a fait énormément pour la semaine de la presse depuis plus de vingt ans et dont l'expertise sur l'éducation aux médias est extrêmement précieuse pour nous.
La semaine de la presse doit en constituer un moment privilégié dont l'esprit doit porter ses effets sur l'ensemble de l'année.
Je sais que je peux compter sur vous et sur l'ensemble de nos partenaires pour faire progresser la liberté de penser et de s'exprimer dans l'École et dans l'ensemble de notre société.
Source http://www.education.gouv.fr, le 16 juillet 2015