Interview de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports à Europe 1 le 12 février 2015, sur la candidature de Paris aux jeux Olympiques de 2024.

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Média : Europe 1

Texte intégral


THOMAS SOTTO
Je reçois le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Patrick KANNER bonjour.
PATRICK KANNER
Bonjour.
THOMAS SOTTO
Alors déjà vous le ministre des Sports, vous le gouvernement, vous les voulez vraiment ces jeux à Paris en 2024 ou pas ?
PATRICK KANNER
Je crois que l'intention a été très claire, elle a été exprimée tant par le président de la République, que par le Premier ministre, et le ministre des Sports naturellement y est potentiellement favorable si la candidature effectivement est souhaitée.
THOMAS SOTTO
Potentiellement favorable, ça veut dire quoi potentiellement favorable ?
PATRICK KANNER
On est prudent. Nous sommes au début d'une démarche. Une démarche, la démarche c'est d'abord la remise du rapport ce jour, je le recevrais ce soir officiellement avec Thierry BRAILLARD, le secrétaire d'Etat chargé des Sports.
THOMAS SOTTO
Vous savez déjà ce qu'il y a dedans à peu près ?
PATRICK KANNER
Je lis la presse.
THOMAS SOTTO
Mais au-delà de la presse, c'est quoi le rapport il dit, il faut y aller, il faut tenter la chance ?
PATRICK KANNER
Oui, oui, oui, le rapport est plutôt positif et d'ailleurs la Maire de Paris l'a dit elle-même il y a 48 heures, donc aujourd'hui j'ai envie de dire, les astres sont alignés autour de ce beau projet et cela est tant mieux, mais il y a encore des étapes à franchir et d'ailleurs je tiens à préciser puisqu'on parle des jeux olympiques, permettez-moi aussi de dire que c'est aussi les jeux paralympiques et je crois que c'est important d'insister sur ce sujet.
THOMAS SOTTO
Et vous avez raison de le faire. Mais on gagnerait quoi à organiser ces jeux à Paris, on n'a pas besoin de ça pour attirer les touristes dans la capitale ?
PATRICK KANNER
Le rayonnement de la France se construit année après année, l'année prochaine nous aurons l'euro 2016 de foot en matière sportive, cette année déjà l'euro de basket 2015, en 2018 la Ryder Cup de Golf, on est candidat pour la Coupe du Monde de football féminin. Vous savez, c'est de l'investissement, c'est comme dans une entreprise, le rayonnement de la France, il s'investit tous les ans en tant que tel et aujourd'hui nous avons une candidature qui me paraît très raisonnable et qui correspond aux nouveaux critères du développement durable du CIO.
THOMAS SOTTO
Donc vous estimez la raison à 6 milliards d'euros, c'est ce que couterait cette candidature parisienne a priori, est-ce qu'on en a les moyens financiers, il y a beaucoup d'argent public là-dedans ?
PATRICK KANNER
Je vous interromps Thomas, ce n'est pas nous estimons, le gouvernement, c'est les rapporteurs, le comité français du sport international, le CNOS…
THOMAS SOTTO
Du coup c'est une équipe, si on y va, tout le monde y va ensemble.
PATRICK KANNER
C'est une équipe avec une démarche essentielle, c'est Anne HIDALGO, qui a donné des critères bien précis, l'éthique des jeux, le développement durable pour les jeux, la maitrise financière des jeux et donc ces trois critères que je partage totalement manifestement sont intégrés dans ce rapport.
THOMAS SOTTO
Mais est-ce qu'on a les moyens financiers de mettre 6 milliards d'euros pour organiser les jeux ?
PATRICK KANNER
Prenons la base, 6 milliards d'euros, trois milliards d'euros, c'est le COJO, c'est-à-dire le Comité d'Organisation des Jeux, les jeux financent les jeux, c'est-à-dire tout ce qui est partie sportive avec une subvention de deux milliards de dollars du CIO aujourd'hui.
THOMAS SOTTO
C'est de l'argent privé ça.
PATRICK KANNER
C'est de l'argent privé, totalement privé. Il reste trois milliards sur la base des six pour le reste de l'opération. Dans les trois milliards il y a près de deux milliards pour le village olympique, qui restera naturellement, on a besoin de logements.
THOMAS SOTTO
Là c'est de l'argent public, il y a deux milliards d'argent public.
PATRICK KANNER
C'est de l'argent public et de l'argent privé, il y aura des investisseurs qui après vendront ces logements. Et puis après il y a les équipements, qu'est-ce qui nous reste à faire en terme d'équipement ? Des transports, les transports ne sont pas utiles que pour les JO, ils seront aussi utiles dans le cadre du Grand Paris et la fameuse piscine olympique qui nous manque cruellement dans la région parisienne et en plus cette piscine sera en partie démontable pour ce qui concerne les gradins. Donc très concrètement on peut dire aujourd'hui que sur les six milliards en argent public, il y aura moins de deux milliards d'euros.
THOMAS SOTTO
Donc vous dites, ça veut le coup de tenter, ça les vaut ?
PATRICK KANNER
Vous avez vu le sondage, les Français veulent ces jeux. 73 %.
THOMAS SOTTO
Vous gouvernez avec les sondages alors ? Non, non…
PATRICK KANNER
Vous savez, je les regarde de temps en temps quand même…
THOMAS SOTTO
Ça joue sincèrement, ça va jouer dans la décision d'y aller ou pas ces 75 % de Français qui sont favorables ?
PATRICK KANNER
Je prends l'exemple de Tokyo, au début de la candidature de Tokyo qui recevra les jeux en 2020, les Japonais étaient favorables à 40 %. Ils étaient favorables à 90 %. Si je fais une équation, on sera favorable à 120 %.
THOMAS SOTTO
Si on regarde les jeux de Montréal en 76, vous vous souvenez des jeux de Montréal ?
PATRICK KANNER
Oui.
THOMAS SOTTO
Ils ont fini de les payer en 2006 les Québécois tellement ça a débordé, c'est un peu ça aussi le problème des jeux olympiques, c'est qu'on a un chiffre de départ, une estimation, 12 milliards de dollars pour Sotchi en 2014, ardoise finale 50 milliards.
PATRICK KANNER
Oui, c'est une période qui est révolue.
THOMAS SOTTO
Ca ne pourra pas arriver à Paris ?
PATRICK KANNER
Non, pour une simple et bonne raison, c'est que l'essentiel des équipements existent déjà. Ils sont derrière nous. Roland Garros, ça existe, le Stade de France, ça existe, Paris Bercy ça existe, le vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines, ça existe, le golf, qu'à partir de 2020 le golf sera une compétition olympique, ça existe. Donc il n'y a pas de danger de débordement puisque nous n'avons qu'un seul grand équipement en dehors du village olympique à construire.
THOMAS SOTTO
Bon alors visiblement à vous entendre il n'y a que des avantages à présenter cette candidature.
PATRICK KANNER
Exactement.
THOMAS SOTTO
Mais est-ce que la capitaine de l'équipe n'est pas un peu trop prudente, Anne HIDALGO. C'est vrai qu'elle a un peu fléchi sa position avant-hier, mais globalement, elle semble freiner des quatre fers quand même non ? Est-ce qu'on ne perd pas un temps précieux, est-ce qu'on ne perd pas un peu d'image aussi par rapport au CIO en disant, oui on va peut-être y aller, c'est pas mal finalement ?
PATRICK KANNER
C'est vous qui l'interprétait tel que, nous on respecte le calendrier.
THOMAS SOTTO
J'ai juste écouté ce qu'elle dit depuis quelques mois.
PATRICK KANNER
Ecoutez, ce qu'elle a dit il y a 48 heures, c'est très intéressant. Moi, je pense qu'aujourd'hui Anne HIDALGO a voulu montrer que le calendrier ne pouvait pas s'imposer à elle, qu'elle avait la maitrise, ce qui est normal du calendrier. Aujourd'hui elle reçoit ce rapport, je le recevrais encore une fois ce soir et ensuite un travail va être fait de conviction auprès des maires et du Grand Paris, puisque c'est une candidature de Paris mais aussi de toute une agglomération, de toute une région.
THOMAS SOTTO
Corinne BOULLOUD nous disait à 6h30 qu'il va falloir aussi quelque chose d'important, ce qui avait fait la réussite de Londres pour 2012, c'est que le mouvement sportif se lève, que des stars, des vedettes portent haut l'étendard d'une candidature française. Nous, pour l'instant on a Tony ESTANGUET et Bernard LAPASSET qui sont de grands champions, mais qui ne sont pas des vedettes.
PATRICK KANNER
C'est une question essentielle, je veux dire, vous savez comme moi que Sébastian COE a été un élément majeur dans la victoire de Londres pour 2012.
THOMAS SOTTO
C'est une immense star en Angleterre.
PATRICK KANNER
Exactement, c'est une star avec des valeurs d'éthique extraordinaire, donc il nous faudra trouver cette grande figure du sport français, il est un peu tôt à ce stade…
THOMAS SOTTO
Vous pensez à qui, nous mais là honnêtement, il y en a quand même quelques-unes des figures du sport, vous pensez à qui, vous aimeriez qui vous ?
PATRICK KANNER
Il y en a beaucoup, si vous voulez, si je vous disais qui, j'ai quelques idées, eh bien ça pourrait plomber, pardonnez-moi l'expression cette candidature. Ce sera un choix collectif.
THOMAS SOTTO
Si le ministre des Sports dit qu'il a envie que des sportifs se jettent dans l'aventure…
PATRICK KANNER
En tout cas, ce ne sera pas moi je ne suis pas assez sportif.
THOMAS SOTTO
Vous pensez à qui, allez quelques noms, c'est ZIDANE, c'est des gens comme ça…
PATRICK KANNER
En tout cas c'est des gens de ce niveau-là. C'est des gens de ce niveau-là qui ont marqué l'histoire du sport français par leurs résultats bien sûr, par aussi l'éthique qu'ils ont porté, par l'image peut-être de la diversité, qui ont été la leur. Voilà moi très très honnêtement il est trop tôt.
THOMAS SOTTO
Teddy RINER ce serait bien.
PATRICK KANNER
On est au stade du début.
THOMAS SOTTO
Vous ne voulez pas nous dire à qui vous pensez ?
PATRICK KANNER
Non, mais tout ce que vous dites est très bien.
THOMAS SOTTO
C'est vrai ?
PATRICK KANNER
Donc il n'y a aucun problème. Mais laissez au mouvement sportif premièrement, à Anne HIDALGO et un peu à nous le soin de choisir, en tout cas pour en arriver là, c'est que vous êtes déjà assez convaincu vous-même, ce qui est formidable.
THOMAS SOTTO
Moi je vous le dis, moi j'aimerai bien qu'il y ait les jeux olympiques 2024 à Paris, mais après il faut les avoir. Est-ce que vous avez un peu travaillé pour être un peu ficelle, faire un peu de lobbying comme a su le faire Londres pour 2012, on se souvient que Paris était candidat pour 2012 et qu'on avait dit, ils sont beaucoup plus malins que nous. Ça vous le travaillez aussi, vous allez le travailler ?
PATRICK KANNER
C'est un des éléments majeurs de la candidature, en 2012 peut-être, je le dis, nous avons été collectivement, peut-être un peu trop suffisant pour 2012 en tout cas, nous avons été un peu trop suffisant en pensant que c'était fait, parce que c'était le tour de Paris, non, ça n'a pas été le tour de Paris. Aujourd'hui la France n'a jamais accueilli de jeux olympiques depuis 1924. 1924/2024, 100 ans, je crois que tout est jouable.
THOMAS SOTTO
En sport on ne triche pas, on répond franchement, oui ou non la France et Paris va-t-elle déposer un dossier pour la mi-septembre, oui ou non ?
PATRICK KANNER
En sport on participe, on essaie de gagner, en tout cas je considère aujourd'hui que le dossier nous donne de bonnes chances d'aller vers cette candidature.
THOMAS SOTTO
Donc vous dites oui il faut y aller, le ministre des Sports dit oui, il faut y aller.
PATRICK KANNER
Moi, je dis oui naturellement, mais ce n'est pas moi qui décide, c'est Anne HIDALGO et le mouvement sportif.
THOMAS SOTTO
Comme vous nous avez dit qu'elle était convaincue maintenant puisqu'elle l'a dit il y a deux jours, c'est qu'on devrait y aller.
PATRICK KANNER
Elle le dira elle-même tout à l'heure.
THOMAS SOTTO
Merci Patrick KANNER d'être venu en direct sur Europe 1 ce matin. Dernier jeux olympiques d'été en France, c'était 1924.
PATRICK KANNER
Exactement.
THOMAS SOTTO
Ça ferait 100 ans, ça sonne bien.
PATRICK KANNER
Exactement.
THOMAS SOTTO
Merci, bonne journée à vous.
PATRICK KANNER
Merci au revoir.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 février 2015