Déclaration de Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, sur le mécénat et le milieu associatif, Paris le 5 septembre 2013.

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Circonstance : Commémoration des 10 ans de la loi sur le mécénat à Paris le 5 septembre 2013

Texte intégral


C’est un immense plaisir pour moi d’être ici aujourd’hui au ministère de la Culture et de la Communication pour célébrer le lancement de ce timbre commémorant 10 ans de mécénat. Je souhaite tout d’abord féliciter Aurélie Filippetti pour son travail, et je me réjouis que nos deux ministères travaillent ensemble sur un sujet aussi important que celui-là. Je tiens aussi à saluer l’engagement et la générosité des entreprises mécènes et bien sûr des associations et fondations. Elles mènent, ensemble, d’innombrables actions au profit de la culture et de la cohésion sociale.
Rien de cela n’aurait été possible sans la loi du 1er août 2003 : elle a soutenu et amplifié la coopération entre entreprises et associations, alors que nous étions bien en retard sur nos voisins européens ! Elle a enfin développé une vraie culture du mécénat à l’échelle nationale ! La société civile a pris un rôle nouveau et l’occasion se présente donc aujourd’hui de témoigner toute la reconnaissance que nous devons à l’ensemble de ces acteurs, pour s’être engagés si souvent à nos côtés.
Je ne m’étendrai pas sur les dispositions de la loi, sur des faits et chiffres connus de tous. Je voudrais surtout insister sur le principal acquis de cette loi : depuis 10 ans, nous avons appris à construire l’intérêt général d’une autre manière. Car l’adoption de la loi de 2003 a créé une nouvelle distribution des rôles entre Etat, associations et entreprises.
Parlons d’abord des entreprises. Elles ont su trouver leur place, au sein d’un réseau de relations qui étaient depuis longtemps nouées entre l’Etat et le mouvement associatif. On connait l’engagement historique inébranlable des associations dans l’amélioration de notre « vivre ensemble ». Ce que nous ont apporté ces 10 dernières années, c’est un engagement croissant des entreprises privées, avec des partenariats plus systématiques avec les associations. Malgré une conjoncture difficile, ces entreprises ont été à l’écoute des besoins de la société, au-delà de leurs activités marchandes ! Elles ont acquis un véritable rôle dans la construction de l’intérêt général. Un rôle ? Je devrais même dire une responsabilité ! Car il ne suffit pas de débloquer des fonds pour faire du mécénat ! Il faut aussi un projet, pensé par l’entreprise tout autant que par le bénéficiaire. Il faut un engagement fort, de l’efficacité, afin que le résultat ait une véritable valeur ajoutée. Nombreuses sont les entreprises qui soutiennent aujourd’hui quotidiennement des associations, ou font œuvre utile par le biais de fondations. Elles recréent du lien social et donnent vie à un nouveau projet de société !
Voilà où est le vrai progrès. Mais, bien sûr, tout cela ne pouvait se faire sans un repositionnement de l’Etat. Un repositionnement (j’insiste sur ce terme), et non un retrait. A travers la mise en œuvre des dispositions de la loi de 2003, l’Etat engage chaque année une dépense fiscale de 800 millions d’euros environ. Et grâce à cela, nous disposons à présent de l’un des régimes du mécénat les plus incitatifs au monde.
Permettez-moi maintenant de revenir rapidement sur les apports de cette loi pour chacune des parties.
L’expansion du mécénat a d’abord eu un « effet de levier » incontestable pour les associations.
Grâce au mécénat, qui mobilise aujourd’hui un tiers des entreprises françaises, des activités d’intérêt général ont été financées à moindre coût. L’investissement des entreprises, relayé par l’engagement bénévole, génère une activité économique qui démultiplie l’impact du don initial. Une logique d’entraînement se crée et les actions se construisent dans la durée, car les entreprises souhaitent pérenniser leur soutien et structurent leur projet dans ce sens. Bien entendu, le mécénat n’est pas la seule source de financement des associations, ni même la plus importante. Il ne représente avec les dons que 5% environ de leurs ressources totales . Mais il leur permet de diversifier leurs financements, dans un contexte économique et budgétaire peu favorable.
On a pu constater que le mécénat d’entreprise était aussi un formidable facteur d’innovation. Les projets associatifs sont souvent sélectionnés par les entreprises pour leur originalité et pour leur capacité à répondre à des besoins nouveaux de la société. Les associations sont incitées à réfléchir sans cesse aux évolutions en cours, à détecter de nouveaux besoins sociaux et à mettre au point des programmes inédits.
De plus, on a vu émerger de nouvelles modalités de mécénat, comme le mécénat de compétence. Dans ce cas, les entreprises ne sont plus seulement pourvoyeuses de fonds. Elles mettent à disposition des associations les compétences de leurs salariés, proposent leurs conseils, leur expertise ou leur assistance. Les membres des associations profitent bien sûr de cette coopération pour accroître leurs propres compétences, leur efficacité et développer au mieux leur structure.
Mais on ne peut parler des associations sans citer au moins quelques unes de leurs réalisations, soutenues par du mécénat d’entreprise. Durant ces 10 années, de nombreux projets innovants sont apparus. Un constat encourageant : 25% d’entre eux sont consacrés aux jeunes. Or, vous le savez, la jeunesse est la priorité du Président de la République et nous souhaitons impliquer les associations dans la politique que nous menons. Deux exemples m’ont particulièrement intéressée : « Passeport d’avenir », créée à l’initiative d’une entreprise de téléphonie mobile, accompagne des jeunes des quartiers populaires engagés dans des filières d’excellence. L’association soutient ainsi près de 4000 étudiants et a su mobiliser autour d’eux une quinzaine d’entreprises. L’association « Sport dans la ville » a aussi retenu mon attention, car elle favorise l’insertion sociale et professionnelle des jeunes des quartiers sensibles grâce au sport. 3000 jeunes bénéficient de ce programme et ils travaillent en réseau avec des entreprises de secteurs très divers, dont La Poste. J’en profite ici pour saluer l’investissement de la fondation La Poste, e m’adressant à M. le Délégué Général du Groupe La Poste : avec des projets aussi variés que pérennes - tels que le soutien à l’organisation d’ateliers d’écriture - vous donnez un excellent exemple de ce que peut être un partenariat fructueux avec le monde associatif.
D’ailleurs, ce dispositif législatif et fiscal est aussi un facteur d’innovation pour les entreprises. En prenant conscience de la contribution qu’elles peuvent apporter à la société, elles ont développé en leur sein une culture citoyenne, une culture solidaire, qu’il est important d’encourager à l’avenir. Les associations amplifient ce phénomène en interpellant parfois les entreprises sur leur propre fonctionnement ou leurs finalités. Elles les incitent à s’interroger, à changer leurs comportements, notamment en matière de développement durable.
Enfin, en répondant aux besoins nouveaux de la population, il est évident que le mécénat constitue un précurseur, un complément et un amplificateur de l’action publique. Un précurseur, car il propose de nouvelles façons de faire. A titre d’exemple, le mécénat culturel est de plus en plus couplé avec des actions éducatives ou sociales. On voit aussi se développer un mécénat territorial, s’appuyant sur les collectivités locales. Un complément, car un nombre important de bénéficiaires du mécénat restent des structures publiques. L’action de l’Etat s’en trouve à la fois renouvelée et soutenue. Un amplificateur enfin, car les actions menées génèrent souvent de l’emploi, et vont dans le sens des améliorations souhaitées par les pouvoirs publics.
Les 10 ans qui viennent de s’écouler nous amènent donc à la conclusion suivante : nous devons conserver ce modèle vertueux qui associe, au bénéfice de tous, l’Etat, les entreprises et les organismes non lucratifs. Certes, il faut l’améliorer pour mieux connaître ses acteurs, pour renforcer « l’effet de levier » que j’évoquais tout à l’heure, en deux mots pour faire mieux. C’est d’ailleurs une préoccupation constante des politiques publiques que d’adapter en permanence nos outils aux besoins sociaux.
En fonctionnant main dans la main, entreprises et associations amorcent une toute nouvelle relation fonctionnant comme un cercle vertueux, où chacune des deux parties tire l’autre vers le haut. Et vous pouvez compter sur l’engagement sans faille d’Aurélie Filippetti et sur le mien, pour encourager et conforter cette dynamique.
Nous avons la preuve que la société civile a un rôle important à jouer à nos côtés. C’est pour nous un partenaire précieux avec lequel nous refondons aujourd’hui un véritable dialogue civil.
Et je citerai pour terminer, Pierre Waldeck-Rousseau, l’artisan de la loi de 1901 : « L’homme ne peut rien faire en bien ou en mal qu’en s’associant. Il n’y a pas d’armure plus solide contre l’oppression ni d’outils plus merveilleux pour les grandes œuvres ».
Nous continuerons à travailler ensemble.
Merci à tous.
Source http://www.sports.gouv.fr, le 6 septembre 2013