Interview de M. Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "France 2" le 19 août 2015, sur la rentrée gouvernementale et la crise agricole.

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Média : France 2

Texte intégral

THIERRY BECCARO
… Mais pour l'instant c'est l'heure des « 4 vérités » et Guillaume DARET reçoit aujourd'hui monsieur Stéphane LE FOLL, il est porte-parole du gouvernement et ministre de l'Agriculture, bonjour messieurs.
GUILLAUME DARET
Bonjour à tous, bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
GUILLAUME DARET
Vous faites votre rentrée, le gouvernement, aujourd'hui, puisque vous, on en parlera après, vous avez travaillé pendant toutes ces vacances - avec la crise agricole, la crise du porc - pour cette rentrée du gouvernement, premier conseil des ministres dans deux heures, quel est le mot d'ordre pour cette rentrée ?
STEPHANE LE FOLL
Le mot d'ordre il est assez simple, on va avoir une mobilisation sur plusieurs fronts, à la fois sur celui de la rentrée scolaire, celui aussi de la rentrée économique de manière globale et puis pour ce qui concerne le ministre de l'Agriculture, vous l'avez dit – mais ce n'est pas une rentrée puisque c'est une continuité – c'est le fait qu'on est dans une crise, une triple crise même au niveau de l'élevage français et européen, donc on a là aussi à être mobilisés et ce matin il y aura un point qui sera fait au conseil des ministres sur cette situation.
GUILLAUME DARET
La rentrée économique elle est moins bonne que prévu, 0 % de croissance au deuxième trimestre…
STEPHANE LE FOLL
Oui !
GUILLAUME DARET
La croissance est là, mais pourtant, dit François HOLLANDE, est-ce que ce n'est pas un cinglant désaveu ?
STEPHANE LE FOLL
Oui ! Il faut faire attention à tous ces chiffres trimestriels, il y a eu…
GUILLAUME DARET
Pourtant, quand les chiffres sont bons, vous avez dit : « regardez, ça redémarre ».
STEPHANE LE FOLL
Oui ! Oui, oui, mais justement. Combien au premier trimestre ? + 0,7, ça été révisé, c'était 0,6 - 0,7, 0 au deuxième, on va attendre le troisième, ce qu'il faut c'est que sur l'année on atteigne – et Michel SAPIN l'a dit – l'objectif est 1 %, selon la terminologie des économistes on a un acquit de croissance, il y a une dynamique qui est là et qui doit faire en sorte qu'on atteigne, voire, le Premier ministre l'a dit, qu'on dépasse le 1 %. Mais c'est vrai que, après avoir fait + 0,7, faire 0, il vaut mieux continuer à progresser. Donc, tout l'objectif de cette rentrée c'est aussi de progresser et la baisse des impôts de cette rentrée est aussi un élément important en termes de pouvoir d'achat pour les Français.
GUILLAUME DARET
Est-ce que justement l'an prochain les Français bénéficieront à nouveau de baisses d'impôts, est-ce que c'est envisageable ?
STEPHANE LE FOLL
Ecoutez ! Les discussions là, il y aura de discussions sur la loi de finance, je ne vais pas m'engager sur ce que seront ces discussions, ce que je sais c'est qu'à cette rentrée-là il y a des baisses d'impôts pour neuf millions de foyers.
GUILLAUME DARET
L'an prochain ce n'est pas exclu, alors ?
STEPHANE LE FOLL
Mais rien n'est exclu, il y a des discussions, mais en tout cas je rappelle que cette rentrée est marquée par la baisse d'impôts.
GUILLAUME DARET
François REBSAMEN, le ministre du Travail, va officiellement donner sa démission ce matin, est-ce qu'il sera remplacé dès aujourd'hui ?
STEPHANE LE FOLL
En tout cas il va donner sa démission dès ce matin, je n'ai pas d'information qui indiquerait qu'il serait remplacé dès aujourd'hui.
GUILLAUME DARET
Vous faites partie des noms qui sont cités pour le remplacer, vous avez dit que vous étiez pleinement à l'Agriculture, est-ce que ça veut dire Stéphane LE FOLL que ce matin vous pouvez nous assurer que vous ne quitterez pas le Ministère de l'Agriculture dans les semaines à venir ?
STEPHANE LE FOLL
Eh bien, écoutez, dès la semaine prochaine, 28 Madrid, la semaine d'après 31 août Berlin, la semaine suivante Bruxelles 7 septembre et puis ensuite un voyage en Iran qui est prévu pour justement aussi ouvrir là des possibilités de marchés à l'exportation, donc si vous voulez mon calendrier il est parfaitement tracé.
GUILLAUME DARET
Même si le président de la République vous demande de remplacer François REBSAMEN ?
STEPHANE LE FOLL
Je n'ai aucune information de ce côté-là, moi mon calendrier est prêt, il est inscrit, il est déjà publié.
GUILLAUME DARET
Justement cette crise agricole, le marché a repris hier, les cotations ont repris à Plérin à un prix qui est inférieur au prix moyen, rien n'est résolu disent les éleveurs.
STEPHANE LE FOLL
Non ! Mais rien n'est résolu, parce qu'on est dans une crise à l'échelle européenne qui est extrêmement profonde. Je regardais des chiffres hier pour essayer de travailler à la préparation précise du prochain sommet européen et, quand j'ai eu le commissaire européen je lui ai dit clairement, même si l'Europe a augmenté ses exportations vers la Chine, globalement, le fait que le marché russe soit fermé, c'est autour de 100 à 150.000 tonnes de porc supplémentaires qu'il y a sur le marché européen aujourd'hui.
GUILLAUME DARET
Ça veut dire que vous allez pousser au niveau européen pour faire en sorte que l'embargo russe…
STEPHANE LE FOLL
Ça veut dire que l'embargo russe…
GUILLAUME DARET
Sur le marché du porc soit levé ?
STEPHANE LE FOLL
Oui ! Parce que dans l'embargo russe il y a deux choses, il y a la partie diplomatique de l'embargo qui est lié aux sanctions, qui a été lié à la question de l'Ukraine, mais, avant cet embargo, il y a eu un embargo sanitaire lié à une question de peste porcine qui avait été diagnostiquée dans l'Est de l'Europe, donc on va….
GUILLAUME DARET
Et vous allez pousser pour que cet embargo soit levé aujourd'hui ?
STEPHANE LE FOLL
Oui ! Je vais essayer de faire en sorte qu'on ait des discussions solides et sérieuses parce que, je le rappelle, c'est plus de 100 à 150.000 tonnes supplémentaires qui restent par rapport à une année comme 2013 où il y avait des exportations en Russie en 2015, même si, je le rappelle, on a augmenté nos exportations vers la Chine, mais ça n'a pas compensé ce qui était des exportations vers la Chine + la Russie, on a perdu en gros autour de 100 à 150.000 tonnes. Ca, cela pèse aujourd'hui, ça pèse.
GUILLAUME DARET
Qui est responsable aujourd'hui de cette crise ? Comment on fait ? Les deux principaux industriels ne sont pas revenus hier au marché, COOPERL et BIGARD, comment on fait pour résoudre cette crise aujourd'hui…
STEPHANE LE FOLL
Comment on fait ? On essaie de tenir deux bouts…
GUILLAUME DARET
On a une responsabilité, quoi, européenne de l'Etat…
STEPHANE LE FOLL
Oui !
GUILLAUME DARET
Des consommateurs Français ?
STEPHANE LE FOLL
On peut toujours chercher un responsable - c'est ce qu'il y a de plus facile à faire – et, une fois qu'on l'a trouvé, on l'accroche, on le traite de tous les noms et c'est lui qui doit assumer. C'est plus compliqué que ça, la responsabilité il y en a partout, il y a en bien sûr pour le gouvernement, l'Etat et le ministre - je l'ai toujours dit – et au niveau européen aussi, donc on fera le travail. En même temps, qu'est-ce qu'il faut ? C'est tenir deux bouts d'une chaîne, celui qui consiste à soutenir le revenu des producteurs aujourd'hui parce que plusieurs années de suite… et quand je dis que la perte de compétitivité ça fait plusieurs années, elle est parfaitement datée sur tous les chiffres, c'est en 2003 qu'on perd par rapport à l'Allemagne, que la France commence à décrocher, jusqu'en 2012 - donc, tout ça vient de loin - donc tenir et soutenir les producteurs, c'est le soutien aux prix ; et en même temps on a un appareil industriel qui transforme ce qui est produit et qui a, lui, une concurrence à l'échelle européenne et internationale, donc il faut qu'on arrive à tenir ces deux bouts de la chaîne ; et la grande distribution a une responsabilité puisque c'est elle qui au final vend les produits et elle assume cette responsabilité aujourd'hui et, ça, je tiens à le dire ; et je rappelle aussi que dans cette crise hier a été annoncé par un opérateur, qui est sur le marché du Cadran, qui s'appelle INTERMARCHE, l'investissement de 55 millions dans la modernisation des abattoirs et, ça, c'est un plan qu'il faut qu'on mette en place avec le P.I.A (phon) qu'on a débloqué, plus de 20 millions, parce qu'on a besoin de moderniser cette partie qui est la plus sensible et la moins compétitive aujourd'hui en France.
GUILLAUME DARET
Stéphane LE FOLL, l'ancien président Nicolas SARKOZY fait lui aussi sa rentrée aujourd'hui, il va à la rencontre des agriculteurs dans l'Yonne, il estime que vous n'avez pris que des mesures banales pour l'instant et ce qu'il faut c'est des mesures structurelles, baisse notamment des charges.
STEPHANE LE FOLL
Oui ! Mais alors Nicolas SARKOZY, je l‘ai dit, la Droite peut dire tout ce qu'elle veut, tous les chiffres sont très têtus, toute la perte de compétitivité - et je le rappelle, 2003 pour ce qui est du porc jusqu'en 2012 c'est une descente pour la France de plus de 100.00 tonnes de production quand en Allemagne sur cette période l'Allemagne fait plus d'un million de tonnes de production…
GUILLAUME DARET
Il dit aussi globalement que ça fait trois ans que Manuel VALLS et François HOLLANDE mentent aux Français !
STEPHANE LE FOLL
Baisse, baisse du… avec le pacte de responsabilité, que ce soit le CICE + les baisses des charges, c'est 40 milliards, a été évoqué souvent vous savez cette fameuse TVA sociale qu'il n'a jamais mis en place Nicolas SARKOZY, eh bien cette TVA sociale pour avoir 40 milliards de baisse de charges comme c'est le cas aujourd'hui – et ça profite aujourd'hui à l'abattage et au niveau des filières de l'agroalimentaire – pour avoir ce niveau-là, il faudrait plus de 8 ou 10 points de baisse de… 5 ou 6 de TVA. Qu'est-ce qu'a fait Nicolas SARKOZY ? Rien ! Donc aujourd'hui il peut se déplacer, c'est normal - ce n'est pas le sujet – mais, si on doit avoir un débat, il faut l'avoir avec des chiffres et de manière objective et objectivement la perte de compétitivité de la France, en particulier dans l'agriculture et l'agroalimentaire, elle date, elle est parfaitement datée, 2003 jusqu'en 2012.
GUILLAUME DARET
Merci beaucoup Stéphane LE FOLL, c'est à vous Thierry.
THIERRY BECCARO
Merci beaucoup, bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 août 2015