Texte intégral
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Ce matin, j'étais à Bruxelles, et le travail qui est le mien aujourd'hui au sein du gouvernement, c'est de défendre une certaine idée de l'Europe.
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Je suis là pour vous faire entendre ce que nous défendons, et justement, aujourd'hui, nous étions réunis avec tous les pays de l'Union européenne, pour défendre aussi une certaine idée de l'Europe. Face à l'horreur de cette crise des réfugiés, qui fuient la misère, qui fuient surtout la guerre, qui fuient la dictature, l'honneur de l'Europe, c'est le droit d'asile. C'est cela que la France, avec l'Allemagne en particulier, défend aujourd'hui.
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Q - Je repense justement à ce tribun qui a emmené tant de monde contre le racisme, pour l'accueil et pour l'ouverture, et je me dis que vous avez un rôle particulier à jouer, j'ai tort ?
R - Mais je le joue, je le joue au sein du gouvernement, je le joue aux côtés d'autres ministres - aujourd'hui, c'est Bernard Cazeneuve qui, avec moi, était à Bruxelles -, comme je le joue auprès du président de la République quand il va dans les Conseils européens pour rencontrer les autres chefs d'État et de gouvernement, ou avec le Premier ministre avec lequel nous serons en Suède à la fin de la semaine. Donc c'est un travail qui est peut-être plus dans l'ombre, vous avez raison, c'est une autre étape, mais dans la vie, ce qui compte, c'est la continuité des valeurs que l'on défend, et surtout, la recherche d'être utile pour les Français.
Q - Alors Angela Merkel a suspendu provisoirement les accords de Schengen et elle a réintroduit le contrôle à ses frontières avec l'Autriche. Vous le regrettez ça ou vous le comprenez ?
R - Écoutez, c'était une décision qui était devenue - je crois - pour l'Allemagne nécessaire, parce qu'il n'y a pas justement...
Q - Donc vous comprenez ?
R - Nous sommes avec l'Allemagne depuis plusieurs mois dans la même demande vis-à-vis de l'Europe : c'est qu'il y ait une solidarité dans l'accueil des réfugiés.
Q - Eh bien, ils en ont accueilli 63.000 en deux semaines, là...
R - Voilà, et qu'il y ait des décisions qui soient prises pour que tous les pays accueillent, comme la France a décidé de le faire, une partie de ces hommes, de ces femmes, de ces enfants, qui viennent, là, parce que c'est la paix, parce que c'est la démocratie, et que, eux viennent de Syrie ou d'Afghanistan...
Q - C'est normal qu'elle ait fermé ses frontières, Harlem Désir ? C'est normal ?
R - L'Allemagne s'est retrouvée avec 20.000, c'est ce que nous a expliqué notre collègue allemand aujourd'hui, 20.000 réfugiés qui arrivaient notamment de Hongrie, de pays qui n'ont pas voulu avoir une attitude coopérative. Elle n'a pas décidé de remettre en cause les principes de la liberté de circulation, elle a rétabli des contrôles aux frontières, et on voit bien que...
Q - Elle a le droit, au sein de l'Union européenne, absolument...
R - Oui, si on veut préserver ce qui est un grand acquis de la construction européenne, c'est-à-dire cet espace de liberté de circulation entre les pays de l'Union européenne, il faut qu'on assure mieux ensemble le contrôle aux frontières extérieures, et l'accueil des réfugiés dès qu'ils se présentent à un pays d'arrivée, que ce soit la Grèce, que ce soit l'Italie, que ce soit la Hongrie par exemple...
Q - Vous parlez de la Hongrie, Viktor Orban, le Premier ministre, a construit un mur entre la Hongrie et la Serbie. Nous appartenons à la même Europe ?
R - Non, je crois que l'Europe, ce n'est pas de construire des murs.
Q - Alors comment fait-on ?
R - Justement, quand un pays qui, dans sa propre histoire, s'est battu pour abattre un mur, pour abattre le rideau de fer, pour pouvoir rejoindre cet espace de démocratie et de liberté qu'est l'Europe, on ne peut pas accepter que, aujourd'hui, face à cette urgence qui est une urgence commune, la réponse, ce soit de bâtir un mur. La réponse, c'est qu'ensemble, on puisse mettre en place là où les réfugiés arrivent, quand ils se présentent à la frontière de l'Europe, par exemple en Grèce, en Italie ou en Hongrie, qu'il y ait des centres d'enregistrement de ces réfugiés qu'on appelle à Bruxelles des hotspots. Je ne sais pas si c'est très compréhensible pour les Français, mais ce sont des centres d'accueil, des centres d'enregistrement des réfugiés. À partir du moment où des gens sont des réfugiés et ont droit à l'asile en Europe, ils doivent être accueillis dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, non pas simplement en Italie, en Grèce ou en Allemagne, puisque, aujourd'hui, beaucoup d'entre eux vont en Allemagne. Il faut une réponse collective et solidaire.
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Q - Est-ce que c'est à la hauteur ?
R - Non, ce que nous voulons obtenir aujourd'hui à Bruxelles, c'est un engagement sur 120.000 réfugiés supplémentaires, qui sont aujourd'hui justement dans ces pays de première arrivée, c'est-à-dire la Grèce, l'Italie, la Hongrie. Donc ça fera 160.000 au total. C'est pour ça que la France a accepté d'en accueillir au moins 30.000 dans ce cadre-là, dans les deux prochaines années. Mais ce que nous voulons, encore une fois, si nous voulons être capables d'accueillir ces réfugiés, c'est qu'il y ait cette organisation commune du contrôle de nos frontières, et pas 28 politiques différentes, parce qu'on n'y arrivera pas, et qu'à ce moment-là, ce n'est plus l'Europe. (...).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 septembre 2015