Interview de M. Matthias Fekl, secrétaire d'État au commerce extérieur, à la promotion du tourisme et aux Français de l'étranger, dans le quotidien iranien «Financial Tribune daily» du 19 septembre 2015, sur les relations économiques franco-iraniennes.

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Q - Quels sont les objectifs de votre prochaine visite ?
R - Je viens adresser un message politique fort pour le développement de nos liens économiques avec l'Iran. La levée des sanctions consécutive à l'accord de Vienne a créé de formidables opportunités, tant pour les entreprises françaises qu'iraniennes, dans l'intérêt mutuel de nos deux pays.
Le potentiel de la relation de la France avec l'Iran dépasse largement la dimension strictement économique et commerciale. Respect et relance sont les deux mots clés caractérisant la phase actuelle de nos relations bilatérales. Vous savez, la relation entre la France et l'Iran, c'est avant tout une relation profonde ancrée dans l'histoire. Elle lie nos deux pays sur tous les sujets aussi bien politiques que culturels, économiques, stratégiques, intellectuels.
Lors de cette visite, je rencontrerai avec le ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll plusieurs ministres iraniens pour évoquer tous les sujets clés de notre futur partenariat. Nous serons d'ailleurs accompagnés de la plus importante délégation d'entreprises étrangères venue en Iran depuis l'accord de Vienne.
La France a par ailleurs décidé de renforcer son dispositif local d'appui aux entreprises : dès cette rentrée, le service économique de l'ambassade sera renforcé et un bureau BusinessFrance sera inauguré lors de cette visite. Le ministre Laurent Fabius a également nommé l'ambassadeur Nicolas Niemtchinow afin d'assurer le suivi politique au jour le jour du développement de nos relations économiques.
Q - Quels sont les secteurs de votre économie dont vous faites plus particulièrement la promotion ?
R - Ce déplacement est la première visite d'un ministre du commerce extérieur ou d'un ministre économique français en Iran depuis de nombreuses années. Je souhaite que nous puissions relancer des relations économiques et commerciales durables, respectueuses et pérennes dans une logique partenariale.
C'est d'ailleurs pourquoi j'ai souhaité que se tienne le premier forum d'affaires franco-iranien, avec une séquence de rencontres B to B entre entreprises françaises et iraniennes, afin d'élargir les perspectives, d'approfondir les opportunités existantes, et pour travailler à partir des besoins exprimés par nos amis et partenaires iraniens.
À l'occasion de ce déplacement, une grande diversité de secteur est représentée, qui correspond à l'excellence de l'offre française : agroalimentaire, industrie, infrastructures, transports, santé, énergies, aéronautique, biens de consommation et distribution...
Q - Dans ces secteurs, quel est l'avantage de la France sur les autres pays désireux de commercer de nouveau avec l'Iran, notamment l'Allemagne?
R - Nos industriels et nos entreprises apportent leur expertise depuis longtemps dans des secteurs tels que l'automobile, où les constructeurs français ont représenté jusqu'à 30% du marché iranien, et dans l'aéronautique. De même, la France peut répondre à la forte demande de la population iranienne en matière médicale et en matière d'agroalimentaire. Enfin, d'autres secteurs où l'offre française est mondialement connue pour son excellence ont un fort potentiel, qu'il s'agisse d'infrastructures, de transport, d'environnement, de NTIC ou d'énergie.
Q - En quoi un futur partenariat Téhéran-Paris bénéficiera-t-il à l'économie iranienne ?
R - Paris comme Téhéran ont la volonté d'inscrire leurs relations dans la durée et de susciter des partenariats durables. La France est aux côtés de l'Iran pour contribuer à son développement économique. Cela signifie concrètement pour l'économie iranienne des joint-ventures, de l'investissement pour les secteurs clés de son développement économique, de la formation et de la création d'emploi pour les iraniens.
Q - Reuters a cité le vice-président du MEDEF, Yves-Thibault de Silguy qui a déclaré que les entreprises françaises avaient pris du retard sur leurs principaux concurrents européens, américains et asiatiques pour relancer les liens économiques avec l'Iran. Quel est votre commentaire à ce propos ?
R - Tous les entrepreneurs le savent : il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Un partenariat global de qualité à la dimension du potentiel économique de nos deux pays requiert du sérieux. Rappelons tout de même que cette visite fait justement suite à une première délégation du MEDEF dès février 2014. Je me félicite de l'intérêt de nos entreprises pour les potentialités du marché iranien.
Q - Comment envisagez-vous de rétablir la situation alors que la France, peut-être à tort, a été considérée comme le «méchant flic» durant les négociations nucléaires en raison de la position de M. Laurent Fabius ?
R - La France a toujours souhaité le règlement de long terme de cette crise par la voie diplomatique. Nous avons initié, dès 2003, en partenariat avec l'Allemagne et le Royaume-Uni - avant d'être rejoint par la Chine, les États-Unis et la Russie en 2006, le dialogue avec les autorités iraniennes.
La position de la France dans les négociations nucléaires a été claire et constante. Elle est fondée sur des critères objectifs de non-prolifération nucléaire, critères dont je tiens à rappeler qu'ils ne s'appliquent pas uniquement à l'Iran.
Nous voulions un accord mais un accord solide, qui soit une vraie garantie de paix. Si la France a défendu une ligne jugée exigeante lors de ces discussions, ce n'était pas pour se faire le représentant de tel pays ou de tel intérêt, mais pour s'assurer que nous obtiendrions un accord qui réponde de manière crédible aux préoccupations de la communauté internationale. Tout autre accord aurait été conclu aux dépens de la stabilité de la région et de la sécurité de la population iranienne.
Les sanctions ont effectivement entravé, pendant plusieurs années, le commerce entre l'Iran et la France, mais aussi avec tous les autres partenaires européens de l'Iran. Aujourd'hui, les conditions d'une relance à la fois réaliste et ambitieuse de nos échanges économiques sont réunies. C'est le sens de mon message à Téhéran.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1er octobre 2015