Texte intégral
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Bonjour, Najat VALLAUD-BELKACEM.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bonjour.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
L'Europe, ça ne marche pas, les 28 n'ont pas réussi à s'entendre sur les quotas de migrants, vous êtes ministre du gouvernement, qu'est-ce que c'est que cette Europe ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non pas encore réussi à s'entendre, les discussions vont se poursuivre et moi je voudrais commencer par dire d'abord
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Ca n'en finit pas de se poursuivre.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, sans doute mais enfin, il faut avoir conscience d'une chose, c'est que la situation à laquelle nous sommes confrontées est inédite par sa gravité, c'est la plus grave crise migratoire que l'Europe ait connu depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Donc que les discussions puissent être arides, ce n'est pas surprenant et hier soir dans le conseil justice et affaires intérieures, il y a quand même eu des avancées qui ont été obtenues, qu'il faut saluer, par exemple le fait qu'enfin on va mettre en place ces centres d'accueil et d'enregistrement à l'entrée de l'Europe, qui sont absolument essentiels pour pouvoir accueillir dans de bonnes conditions ces populations de réfugiés parce qu'il faut pouvoir à l'entrée de l'Europe constater si ceux qui arrivent sont des persécutés qui sont légitimes à demander la protection internationale, ou ce sont d'autres types de migrants qu'on doit pouvoir faire repartir quand ce n'est pas possible de les accueillir. Et si on n'a pas ces centres d'accueil, eh bien on est dans le désordre le plus complet. Donc avoir obtenu ça hier ça alors que ce n'était pas
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Une avancée
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est déjà une avancée.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Madame MERKEL s'est trompée ? Vous voyez l'Allemagne qui ferme ses frontières, ces pays qui ferment ces frontières, membres de l'Union ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
L'Allemagne ne ferme pas ses frontières, l'Allemagne a rétabli des contrôles
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
A changé d'avis.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
A rétabli des contrôles provisoires à sa frontière avec l'Autriche. L'Allemagne et la France dans cette affaire marchent main dans la main, j'insiste sur ce point, en toute responsabilité. La responsabilité, c'est quoi ? C'est de dire, on ne peut pas fermer les yeux devant cette crise humanitaire grave, et nous devons, nous l'Europe prendre nos responsabilités, accueillir. Mais, une fois qu'on a dit ça, ça ne peut pas être deux, ou trois, ou quatre pays simplement en Europe qui prennent cette responsabilité, il faut se la répartir, d'où la nécessité d'avoir des règles claires, de relocalisation et c'est ce sur quoi la France et l'Allemagne travaillent depuis le début. Si un accord, comme vous le disiez, n'a pas été obtenu de la part des 28 hier soir, en revanche c'est bien une majorité qualifiée de pays qui a adopté ce principe d'une répartition des réfugiés en Europe. Donc ça va se poursuivre et c'est l'occasion, pardonnez-moi mais, c'est l'occasion, enfin ayons conscience aussi qu'on vit un moment historique, c'est l'occasion aussi de tester la solidité de l'Union européenne sur ces questions fondamentales et donc de la faire progresser.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Alors Najat VALLAUD-BELKACEM, ça va se poursuivre et pendant ce temps des enfants continuent d'arriver d'Irak, de Syrie, d'Afghanistan, de la Corne de l'Afrique, il y a la barrière de la langue, qu'elles sont les dispositions prises par l'Education nationale pour leur accueil dans les écoles ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ecoutez, s'il y a un service public qui est relativement bien armé pour faire face en effet à cette arrivée de réfugiés, c'est l'Education nationale.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Même massive ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors, on l'estime s'agissant de l'Education nationale à, à peu près 4 500 mineurs qui seraient accueillis par an, puisque sur les 24 000 qu'a annoncés le président de la République sur deux ans, il y en a peut-être un tiers qui seront sans doute mineurs. Mais ce que je veux dire, c'est que l'Education nationale dispose en son sein de professionnels qui ont une expérience et un savoir faire en la matière. Ca date en réalité des années 70, lorsque nous avions accueilli en nombre des boat people et que des dispositifs avaient été créés à ce moment là dans l'école, qui s'appellent les Centres académiques de scolarisation des enfants allophones, c'est-à-dire qu'on sait prendre en charge des enfants qui ne parlent pas le Français, d'ailleurs on en accueille d'ores et déjà aujourd'hui sans parler de la situation des réfugiés actuels, on en accueille 45 000 d'enfants allophones. Donc rajouter 4 500 par an ces 45 000, c'est faisable et nous y travaillons.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Pas d'effectif supplémentaire particulier pour cette crise des réfugiés ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors nous ferons appel et d'ailleurs beaucoup d'entre eux se sont spontanément proposés aussi à des bénévoles parce que nous avons, par exemple des enseignants à la retraite qui nous ont d'ores et déjà écrit pour proposer de donner un coup de main. La fameuse réserve citoyenne que j'ai créé cette année qui permet à des citoyens de bonne volonté d'aller aider l'école, eh bien ce sont toutes ces personnes
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Elles vont être mobilisées pour l'accueil des enfants de migrants.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Si l'afflux est particulièrement important, nous pourrons en effet y faire appel.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Alors Najat VALLAUD-BELKACEM, oui allez-y.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Pardon juste un dernier mot pour finir sur ce qu'il advient ensuite de ces enfants, l'idée c'est que dans un premier temps, ils aient cet accueil spécifique qui permette de leur apprendre le français et puis aussi les valeurs de la République, c'est important, mais qu'ensuite le plus rapidement possible, quelques mois plus tard, ils puissent intégrer des classes ordinaires parce que c'est important de ne pas non plus ségréguer ou de ghettoïser ces enfants à part dans des classes.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
D'accord l'idée de Nicolas SARKOZY de créer un statut de réfugiés de guerre et ensuite renvoyer les familles dans les pays d'origine, vous en pensez quoi, une fois que les enfants sont scolarisés ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je crois que c'est assez utopique en réalité, enfin je ne sais pas d'ailleurs, ce n'est pas non plus ma définition de l'utopie, mais ce que je veux dire par là, c'est qu'on sait bien ce qu'il va advenir de ces personnes qui vont venir s'installer en France après avoir été persécutées dans leur pays, elles vont créer de nouvelles racines ici. Peut-être que certaines d'entre elles seront amenées à repartir, ça dépend aussi de la durée du conflit, d'ailleurs plus vite on contribuera à régler le conflit syrien en l'occurrence, et plus certaines d'entre elles voudront repartir. Mais pour beaucoup elles s'installeront sans doute ici, elles se marieront ici, les enfants grandiront ici, donc partons du principe que nous avons vocation à bien les accueillir, à bien les intégrer.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Pour l'instant c'est l'accueil. Najat VALLAUD-BELKACEM, plusieurs syndicats de l'Education nationale hostiles à la réforme des collèges appellent à la grève ce jeudi, une idée sur la mobilisation qui se profile, qui se dessine ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, parce que je ne lis par dans le marc de café, mais ce que je peux vous dire c'est que l'intersyndicale, donc composée des organisations syndicales qui restent hostiles à la réforme du collège avait annoncé avant l'été qu'elle referait un mouvement de grève, voilà donc il n'y a pas de surprise particulière.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Pas plus que ça pour vous ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est légitime.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
On a l'impression que les problèmes ne sont pas réglés, vous savez, c'est toujours pareil, le latin et le grec relégué dans l'enseignement
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, c'est légitime que l'intersyndicale continue à s'exprimer, c'est son rôle, cela étant puisque les débats sont un peu plus apaisés qu'au printemps dernier, c'est l'occasion pour moi de rappeler à quel point cette réforme du collège est fondamentale. Fondamentale pour trois raisons au moins, si vous me le permettez.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Je vous en prie.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Fondamentale parce qu'il faut mieux accompagner les collégiens, quand on voit les résultats qui n'ont cessé de se dégrader ces dernières années, pour les bons élèves comme pour les moins bons élèves, on voit bien qu'il y a un problème d'accompagnement individualisé et que la réforme du collège, elle permet cela en créant 4 000 postes, de l'accompagnement personnel, du travail en petit groupe. Elle permet cette réforme de donner plus d'autonomie aux établissements parce que les collèges doivent pouvoir d'adapter
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Ca, c'est contesté aussi par les syndicats, par certains syndicats.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bien sûr mais enfin vous savez une réforme et notamment dans l'Education nationale, jamais ne fait l'unanimité, jamais.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Vous savez ce qui revient souvent, c'est la fin
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je termine juste, pardonnez-moi sur ces deux points. Donc plus d'autonomie au collège pour qu'ils s'adaptent aux difficultés de leurs élèves et les fassent réussir. Et puis enfin de nouvelles compétences qui sont développées chez les élèves, je pense par exemple à la maitrise du numérique ou aux langues vivantes qu'il faut apprendre de façon plus précoce, dont ils auront besoin dans le monde qui les attend.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Ce qui agace beaucoup, c'est la fin des classes bilangues, on revient au même débat, pour ceux qui prisaient l'enseignement de l'Allemand très tôt, l'Allemagne notre partenaire, le couple franco-allemand, vous savez ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui et à nouveau moi je répète, j'espère qu'à force de répéter je serais entendu.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Ca, ça ne passe pas.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Qu'à partir du moment où pour l'ensemble des collégiens la possibilité d'apprendre une langue vivante 2 dès la classe de 5ème et sans attendre la classe de 4ème comme c'est le cas actuellement, donc où l'ensemble des collégiens accéderont à cette opportunité, pourquoi réserver cette opportunité à une minorité d'élèves ?
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Vous ne reviendrez pas sur ces mesures, elles sont là, elles sont installées.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
La réforme du collège a été adoptée, elle sera appliquée et cette année 2015-2016 va être une année fondamentale pour y préparer les enseignants, pour faire en sorte que les choses entrent en vigueur dans les meilleures conditions possibles à la rentrée prochaine.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Dans l'actualité ce matin Najat VALLAUD-BELKACEM, il est question de la rentrée du gouvernement, DSK reçu par une quinzaine de blogueurs au Kremlin Bicêtre le jour de la conférence de presse de François HOLLANDE, la semaine dernière, information signée Yaël GOOSZ, notre chef du service politique sur France Info, ce gouvernement navigue à vue, il n'y a pas de vision a expliqué DSK, et le PS est un astre mort. Commentaire sur cette façon de voir les choses de la part de cette personnalité.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, aucun commentaire.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
C'est no coment, à chaque fois qu'on parle de Dominique STRAUSS-KAHN, personne ne commente.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
A ma connaissance il n'a pas fait ces déclarations de façon publique, donc moi j'ai toujours du mal à commenter des choses qu'on rapporte.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Une fois sur deux ce n'est jamais public et ça commente quand même, mais bon, sa voix compte toujours, son expertise compte selon vous ou pas ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Pour certains j'imagine, puisqu'un certain nombre de pays font appel à ses services.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Ce gouvernement, cette rentrée, Najat VALLAUD-BELKACEM, vous la sentez plutôt positive. On vous a vu hier vous promener à Vesoul avec le chef de l'Etat pour parler ruralité, on a parlé de beaucoup de choses, médecin, borne électrique, haut débit, je n'ai pas vraiment entendu beaucoup de choses sur les écoles en déshérence, vous savez les classes qui ferment ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Pourtant il en a été question vraiment et d'ailleurs j'ai eu le plaisir moi en Haute-Saône où nous étions d'aller dans un pôle éducatif, donc
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
un problème
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Un regroupement pédagogique, qu'est-ce qu'un regroupement pédagogique ? C'est lorsque précisément on remplace des toutes petites écoles éparpillées, dispersées dans des communes rurales isolées par une école pour plusieurs communes avec de meilleurs services.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Vous y mettez les moyens sur la désertification dans les écoles ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Absolument puisque nous avons par exemple fait en sorte que les départements ruraux qui perdent de la démographie, qui perdent des élèves, ne soient pas, comme c'était le cas par le passé sanctionnés directement à la rentrée suivante par moins d'enseignants. Nous leur laissons trois ans dans le cadre de convention qu'on appelle les conventions ruralité, pour anticiper, pour faire des regroupements pédagogiques qui sont vraiment, qui ont une vertu, ces regroupements pédagogiques, c'est que d'abord les élèves y sont plus nombreux, ils ne sont plus à plusieurs niveaux dans une seule classe. Les enseignants y sont moins isolés dans les toutes petites écoles. On peut y mettre du numérique. Bref c'est une bonne chose et on y travaille avec les collectivités
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Ultime question et on ferme, vous serez candidate effectivement aux législatives Villeurbanne en 2017, c'est vrai ça ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je serais candidate, oui bien sûr, mais enfin après vous connaissez ça par coeur, il y a des procédures de désignation par les militants etc
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Bon ça mis à part, vous voulez y aller ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Ce qui est vrai c »'est que je suis installée à Villeurbanne depuis plus d'un an et que c'est là bas que je souhaite continuer à militer et à m'impliquer dans la vie locale.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Et bye bye l'Education nationale dans deux ans grosso modo.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais pas du tout, l'Education nationale, je pense que c'est un temps long et si vous me demandez mon avis, je pense qu'il faut laisser les ministres de l'Education nationale longtemps au poste, mais ça c'est les Français qui en décideront.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Merci Najat VALLAUD-BELKACEM.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 septembre 2015