Déclaration de Mme Martine Pinville, secrétaire d'Etat au commerce, à l'artisanat, à la consommation et à l'économie sociale et solidaire, sur le bilan d'application de la loi sur l'économie sociale et solidaire, Paris le 1er octobre 2015.

Prononcé le 1er octobre 2015

Intervenant(s) : 

Circonstance : Convention annuelle de l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (UDES), à Paris le 1er octobre 2015

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Cher Président,
Bonjour à tous!
Tout d'abord, merci pour cette invitation.
Comme j'ai eu l'occasion il y a quelques jours de vous le dire, Monsieur le Président, il était important pour moi d'être présente ce matin.
A l'occasion de cette convention, je tenais à vous faire partager l'engagement du Gouvernement en faveur du développement de ce que vous avez nommé « un autre mode d'entreprendre, créateur de valeurs », qu'est l'économie sociale et solidaire.
Il y a quelques jours à peine, François Hollande introduisait à New York, le groupe pilote sur l'Économie Sociale et Solidaire présidé par la France. Ce fut l'occasion pour lui, d'insister sur la contribution de l'ESS à la satisfaction des objectifs de développement durable pour la planète.
J'associe à cet engagement de notre Président, mon investissement en faveur du développement de cette économie, mais aussi mon complet soutien à ses acteurs qui en font toute la valeur.
Aussi, il me parait essentiel de pouvoir reconnaitre l'UDES comme un véritable interlocuteur engagé dans une relation de confiance réciproque, en faveur d'un dialogue social équilibré, portant les revendications du monde de l'ESS.
J'entends vos interpellations, et je sais que la Ministre du travail Myriam El Khomri saura, à l'occasion de son intervention de fin de journée, vous témoigner de la juste prise en compte de vos préoccupations.
L'UDES et les employeurs de l'ESS doivent être des interlocuteurs exemplaires pour les confédérations syndicales compte tenu des valeurs de l'économie sociale et solidaire.
La démocratie participative et la recherche de l'utilité sociale doivent indiscutablement inspirer les accords que vous concluez tant au niveau multiprofessionnel, qu'au niveau des branches. C'est cette cohérence qui est garante d'un progrès social dans l'ESS.
Ce matin, je tiens à vous donner la mesure de mon ambition pour l'ESS : en faire un véritable moteur national en faveur de l'économie et de l'emploi.
Les chiffres sont impressionnants et vous les connaissez comme moi :
- l'économie sociale et solidaire représente à elle seule près de 10 % du PIB et 12,7 % des emplois privés, qui par ailleurs sont le plus souvent non-délocalisables !
- les entreprises de l'ESS représentent par ailleurs 1 emploi privé sur 8 en France.
- sans négliger enfin le vivier d'emplois qu'elle offrira d'ici 2020, avec 600 000 emplois à renouveler en raison des départs en retraite.
Voilà pourquoi il était essentiel d'engager un véritable changement d'échelle de cette économie, et d'en faire, grâce à l'investissement de tous, un vrai facteur d'innovation sociale et de développement économique.
C'est ce que la loi de 2014 a rendu possible.
Un an après l'adoption de la loi, bien des évolutions ont été engagées et il faut les poursuivre :
1) Tout d'abord accompagner la structuration de l'ESS.
Les acteurs de l'ESS sont regroupés par grandes familles : les associations, les coopératives, les mutuelles, les fondations, les entreprises sociales.
Chaque famille a sa propre tête de réseau nationale et ses propres antennes locales.
Pour la première fois, toutes sont réunies au sein d'une même instance de promotion nationale de l'ESS : la Chambre française de l'ESS.
Née au début de cette année elle doit désormais engager des actions de communication, de sensibilisation pour faire connaître l'ESS de nos concitoyens et notamment des jeunes
Par ailleurs j'installerai les 5 et 8 octobre prochains les Conseil supérieur de la coopération puis le Conseil supérieur de l'ESS, dans un format renouvelé.
L'ensemble des instances pourra alors oeuvrer pour concerter et oeuvrer au développement de l'ESS !
Au niveau local, les chambres régionales de l'ESS, qui passeront à 13, comme les régions, en 2016, sont en charge de la promotion et de la stratégie de développement de l'ESS.
Cette stratégie sera élaborée avec les acteurs au sein des conférences régionales.
Les propositions de ces conférences serviront de base à la stratégie ESS des schémas régionaux de développement économique.
Le Gouvernement fait de l'ESS une priorité et la loi NOTRE a pris en compte cette dimension.
Il restera à coordonner ces institutions, les acteurs et leurs têtes de réseaux, mais vous pouvez compter sur moi pour que les rôles soient clairement répartis.
2) Par la loi, le gouvernement a mis en place un cadre favorable à l'ESS qu'il faut désormais concrétiser en activités et en emplois.
La définition de l'ESS donnée par la loi réunit désormais sous le vocable « entreprises de l'ESS », l'ensemble des familles historiques et y a même ajouté les « sociétés commerciales ». Toutes ces entreprises ont vocation à créer une activité économique pour répondre aux besoins sociaux et environnementaux.
Mais au-delà de la recherche de l'impact social, il s'agit bien d'un véritable modèle économique, propre à l'ESS, visant l'efficacité économique au service de l'intérêt général.
C'est pourquoi de nouveaux instruments financiers ont été imaginés : les SCOP d'amorçage, l'évolution des titres associatifs, ou encore les régimes de fusion des fondations.
Ce renforcement de la culture financière des entreprises de l'ESS, il doit avant tout permette de dynamiser leur développement.
Pour se développer, pour grandir, changer d'échelle, ces entreprises ont besoin d'un environnement financier spécifique, capable d'appréhender le risque inhérent à l'entreprise ESS.
Aussi, nous avons attiré des acteurs comme le Commissariat général à l'investissement auprès duquel je milite en faveur d'un maintien de programmes spécifiques dédiés à l'ESS ou encore la Banque publique d'investissements qui multiplie ses outils, comme le fonds impact coopératif de 75 millions d'euros, montant jamais égalé pour l'ESS.
Par mon action, je vais m'assurer que vous bénéficierez d'un environnement financier favorable.
Cependant, il vous faut investir, il vous faut embaucher pour confirmer les bons chiffres de l'ESS des années précédentes.
J'attends de vous que nous allions plus loin encore que les 24% de croissance de l'emploi depuis 2000 et les presque 1% de l'année dernière.
3) Parmi les avancées permises par la loi de 2014, la reprise d'entreprises par les salariés est un outil qui me tient particulièrement à coeur, et que j'aimerais voir plus souvent mobilisé.
Le courage des salariés qui décident de prendre en mains le destin de leur entreprise doit être accompagné par l'Etat.
Cet accompagnement requiert une connaissance de l'ESS, notamment du modèle coopératif et la capacité à mobiliser un réseau d'acteurs spécialisés comme la CGSCOP, ou France Active.
J'étais très fière il y a seulement quelques jours d'être présente pour la première livraison de produits SCOP TI, ou bien cet été encore, aux côtés des salariés de la Compagnie alpine d'aluminium à Cran Gevriers.
C'est le sens du droit d'information préalable des salariés sur les conditions de reprise et les orientations générales de votre entreprise. Mieux informés, ils pourront construire des projets de reprise plus tôt, et plus aboutis.
Il vous appartient, à vous chefs d'entreprise, d'instaurer cet échange au sein de votre entreprise, qui mette en capacité vos salariés.
C'est un exemple que l'ESS peut donner au reste du secteur privé.
4) Dans le cadre de la loi, nous nous sommes également engagés à produire un véritable « choc coopératif ».
L'objectif politique était ambitieux : doubler le nombre d'emplois coopératifs. Passer, de 40 000 à 80 000.
Ce défi, nous sommes en passe de le réaliser, en soutenant le modèle coopératif, dont la résilience et la gouvernance a fait ses preuves en termes de création d'emplois et d'animation démocratique.
Il repose sur la modernisation de 3 types de coopératives : les SCOP, les sociétés coopératives d'intérêt commercial : les SCIC et les coopératives d'activité et d'emploi : les CAE.
Néanmoins, si nous avons engagé un véritable changement culturel, beaucoup reste encore à faire pour bénéficier pleinement de l'investissement fait dans ce secteur :
5) Ma priorité dans les toutes prochaines semaines : l'installation d'une administration de l'ESS à Bercy
Maintenant que l'ESS a sa loi, des outils nouveaux, une gouvernance efficace, il reste à réussir l'encrage et l'acculturation de l'administration qui lui est dédiée, à Bercy.
6) Nous avons également un autre défi à relever, celui de l'implication des jeunes dans cet écosystème.
Il me tient à coeur qu'ils profitent bien sûr de ce potentiel d'emplois que représente l'ESS mais aussi qu'ils investissent les instances de gouvernance.
C'est pourquoi j'ai pris l'engagement cet été lors du Comité interministériel de la jeunesse de Besançon qu'au moins 15 jeunes figurent parmi les 70 membres du Conseil supérieur de l'ESS.
Il est un autre objectif qui me tient à coeur également et je sais que vous le partagez : c'est celui de l'égalité hommes/femmes, qui doit s'illustrer dans une parité parfaite au sein des instances.
J'ai pu observer la difficulté à satisfaire ces deux objectifs, pourtant je suis heureuse de pouvoir vous annoncer que nous avons réussi.
7) Concernant la gamme des outils financiers, là encore je souhaite poursuivre l'effort qui a été engagé, en faisant des « investisseurs ordinaires », les nouveaux financeurs de l'ESS :
Après la mise en place de financements publics via BpiFrance, via la Caisse des Dépôts et Consignations, il est nécessaire à présent de développer le financement de l'impact social, via les investisseurs institutionnels et privés ordinaires.
Le politique doit mener une action en direction des investisseurs patients qui auront choisi l'ESS non seulement pour sa robustesse et son image positive, mais aussi pour son impact social positif.
8) Pour finir, ce changement d'échelle de l'ESS je ne l'engagerai pas seule, depuis mon bureau, à Bercy. Je tiens à associer les collectivités locales à cette démarche afin de valoriser ces politiques territoriales de développement local de l'ESS.
Le politique doit mettre en place un cadre favorable aux stratégies locales de développement local de l'ESS.
Il s'agit notamment de mettre en oeuvre des partenariats avec les centres de formation de la fonction publique pour que les agents territoriaux soient sensibilisés aux sujets de l'ESS et qu'ils aient une version transversale des implications.
Une Convention avec le CNFPT a été signée à cet effet.
Je pense également aux pôles de coopération, qui connaissent désormais un beau succès, comme vous pourrez en juger début novembre avec l'annonce des nouveaux lauréats de l'appel à projets.
9) Cette vision, toute française, de l'ESS, je souhaite également la promouvoir au niveau international et européen
La France développe une vision ambitieuse de l'ESS. Elle est fondée sur la promotion d'un modèle économique durable, patient et participatif, mêlant utilité sociale et performance économique.
La France peut incarner un rôle de leader en incitant les partenaires européens à reconnaître réciproquement leurs entreprises de l'ESS et initier la naissance d'un marché intérieur de l'ESS européen ou avec nos partenaires méditerranéens.
Pour cela, je serai dès le mois prochain tour à tour à Lisbonne, Rabat, Berlin, et bien d'autres, pour encourager la diffusion de notre modèle.
Je vous remercie pour votre écoute, et vous souhaite une journée riche et stimulante.
Merci à tous et à très bientôt !
Source http://www.fegapei.fr, le 7 octobre 2015