Texte intégral
Madame la Ministre,
Messieurs les directeurs généraux,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'être avec vous, pour faire le bilan du retour d'expérience de la mobilisation du système de santé français contre la maladie à virus EBOLA.
Permettez-moi d'abord de signaler que l'amphithéâtre Rouvillois, où nous nous retrouvons cet après-midi, est le cur battant d'une école qui est plus que jamais le creuset de la formation médicale militaire. Ces lieux portent ainsi le souvenir d'un brillant chirurgien, Henri Rouvillois, et plus largement de ceux qui ont développé la médecine d'aujourd'hui. Le Service de Santé des Armées, le SSA, assume cet héritage d'une manière magistrale, que je veux saluer pour commencer.
Les principes qui soutiennent l'action du SSA s'ancrent dans une longue histoire, qui porte la marque d'un engagement sans faille, » Forte de cette extraordinaire expérience acquise notamment sur les théâtres d'opérations extérieures, la médecine militaire est prête à répondre dans l'urgence aux crises les plus graves. La récente épidémie EBOLA en a fait de nouveau la démonstration.
L'épidémie EBOLA laisse un bilan terrible en Afrique de l'Ouest.. Il a fallu une réponse énergique sur place, notamment de la communauté internationale, en soutien des organisations non gouvernementales, pour enrayer cette épidémie.
C'est un fait désormais établi que cette crise sanitaire de grande ampleur a d'abord mis en évidence plusieurs difficultés dans l'organisation de la réponse internationale. L'alerte épidémiologique a été assez tardive, à l'été 2014. Par ailleurs, il nous a fallu répondre, dans l'urgence, avec des moyens qui n'étaient pourtant pas toujours disponibles dans l'immédiat.
Pour cette raison, s'agissant de la Guinée, la réponse de la France a fait appel aux moyens de la défense. Réactivité et adaptabilité ont été les clefs de la réussite de l'action du SSA et des armées. La conception innovante d'un centre de traitement à Conakry et la mise en uvre de procédures de prise en charge des patients infectés à Bégin ont permis en six mois au SSA d'agir efficacement sur le terrain, aux côtés des autres acteurs. De ce point de vue, l'opération, que nous avons baptisée « Tamarin », est une réussite. Elle nous interroge cependant, il faut en être conscient, sur notre lacune commune de transport médicalisé par voie aérienne pour des patients infectieux.
Sur le territoire national, bien évidemment la réponse à une crise sanitaire relève d'abord du ministère de la santé. La stratégie qu'il met en uvre associe une veille épidémiologique, qui est primordiale pour détecter et pour suivre l'évolution, et des centres hospitaliers de référence pour la prise en charge des cas confirmés. C'est un véritable défi que de s'organiser face à l'émergence de ces maladies infectieuses qui peuvent être hautement transmissible. C'est tout l'intérêt du retour d'expérience auquel est consacrée cette journée.
L'épidémie EBOLA dans son ensemble est révélatrice de l'attention que nous devons porter à ce type de crise. La réponse fait appel à de multiples compétences et à de nombreuses capacités de réponse. Les armées ont les compétences nécessaires ; elles ont aussi des capacités, dans la limite bien sûr des moyens dont elles disposent et des autres missions qui leur incombent.
Devant ce type de menaces sanitaires, la Défense peut donc apporter une contribution précieuse. C'est ce que cette crise a confirmé. Mais c'était déjà ce que la crise de la grippe avait mis en évidence en 2009. Ensemble, nous devons tirer profit de ces expériences pour voir comment améliorer encore la gestion de crise sanitaire, en la pensant de façon concertée, et ce dès les travaux préparatoires. C'est là le premier message que je voulais vous porter aujourd'hui.
Si à Paris, les capacités hospitalières civiles sont importantes, les attentats du 13 novembre ont démontré que les hôpitaux des armées parisiens disposaient de capacités complémentaires qui pouvaient s'avérer indispensables.. La mobilisation immédiate des hôpitaux de Bégin et de Percy a permis la prise en charge de 52 victimes dont 17 en urgence absolue. J'ai personnellement rendu visite aux blessés dans ces hôpitaux militaires et j'ai pu constater la forte mobilisation du personnel. L'implication de tous face à cette catastrophe a été immédiate. Pour le SSA, elle a fait appel à son savoir-faire collectif acquis sur les théâtres d'opérations extérieures au profit de nos blessés militaires. Ils ont trouvé tout leur sens dans cette situation, du reste caractérisée par des blessures qui étaient voisines de blessures de guerre et ont mis en uvre les principes de la médecine militaire.
Dans ces circonstances exceptionnelles, avoir recours aux moyens spécialisés des armées était une évidence, et les personnels du SSA se sont montrés une fois de plus à la hauteur de la confiance que nous plaçons en eux.
Ces deux exemples de crises, de situations sanitaires exceptionnelles, si différentes bien sûr, appellent cependant une réflexion commune sur le rôle résilient de chacun de nos ministères et la recherche d'une nécessaire complémentarité.
Le SSA dispose, au sein d'une organisation spécifique, d'un réseau de soins dimensionné pour le soutien des forces armées. Des compétences particulières étayent ces capacités, comme la préparation spécifique à la prise en charge des blessés de guerre, la surveillance épidémiologique et la veille sanitaire, l'expertise médicale NRBC, ou encore le développement et la production de contre-mesures médicales NRBC, de produits de santé, de dispositifs médicaux ou de produits sanguins labiles spécifiques.
Sous réserve de la priorité qu'il doit accorder en tout temps à la satisfaction des besoins des armées, le SSA valorise ses savoir-faire dans un esprit d'ouverture volontaire, en mettant ses capacités et compétences à la disposition de la Nation, en continuité de l'action de l'Etat sur le territoire national, dans le respect des principes et des engagements que vous avez pris dans le contrat général interministériel. Dans cette perspective, je suis tout à fait favorable à la proposition de Madame Marisol Touraine d'établir un accord-cadre entre nos services.
C'est aussi pour concilier l'ensemble de ces enjeux que je soutiens avec détermination la réforme portée par le le directeur central du service de santé des armées, le médecin général des armées Jean-Marc Debonne, à travers le nouveau modèle SSA 2020. Chacun le sait ici, la réussite de cette réforme est impérative pour préserver le cur du savoir-faire du SSA au profit des forces armées.
Cette démarche nécessite de votre part, bien sûr, une attention particulière.
Garantir l'efficacité opérationnelle du soutien médical de nos armées au bénéfice de la résilience de la Nation implique que les acteurs de la santé sur le territoire national travaillent en harmonie avec le SSA. En effet, pouvoir compter sur le SSA en situation de crise, c'est aussi vouloir le pérenniser dans ses activités sur le territoire national en situation courante de fonctionnement. C'est un des enjeux majeurs du modèle SSA 2020.
A cette fin, le service multiplie les accords-cadres avec les agences régionales de santé et les partenariats dans les territoires de santé notamment avec les centres hospitaliers.
Nous avons revu notre organisation hospitalière militaire en densifiant les plateformes parisiennes et en région PACA. La nouvelle loi de santé publique dans son article 55 nous permettra, par ordonnance, de valider le positionnement du SSA dans toutes ses composantes au sein des territoires de santé, dans l'esprit de la nouvelle stratégie nationale de santé. Il y a là de beaux et importants enjeux, qui doivent nous occuper pour les mois à venir.
Bravo à tous. A de nombreuses reprises, j'ai eu l'occasion de dire la fierté que m'inspire le service de santé français, la confiance que je veux lui marquer en retour. Je vous renouvelle aujourd'hui cette fierté et cette confiance.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 3 décembre 2015