Texte intégral
Je veux vous dire quelques mots qui reprendront sans doute des éléments déjà traités par Christiana Figueres, ne m'en veuillez pas. Ensuite nous serons à votre disposition, mais ce sera bref car nos emplois du temps sont très chargés pour répondre à vos questions.
C'est le deuxième lundi de la Conférence de Paris sur le climat et, comme je l'ai dit ce matin devant l'Assemblée, c'est le début de la semaine que j'ai appelé la semaine de l'espoir.
Je veux souligner brièvement les avancées puisque notre dernière rencontre, c'était vendredi et ensuite je vous donnerai quelques éléments sur les jours à venir que Christiana Figueres a certainement dû abordés.
Avant cela, un mot pour saluer le succès remarquable de l'«Action Day» qui a eu lieu samedi au Bourget. Cet événement a confirmé la réussite du plan d'action Lima-Paris qui avait été lancé fin 2014, pour mobiliser l'ensemble des acteurs non-gouvernementaux sur des engagements concrets. Il a montré que la société civile du monde entier était en mouvement pour préserver notre planète et cela continue de se traduire par toute une série d'événements au sein-même de la COP. Ainsi, dès que notre point de presse sera terminé, je me rendrai auprès de collègues pour conclure l'initiative spectaculaire qui s'appelle «Énergies renouvelables en Afrique» qui va permettre très concrètement de mobiliser 10 milliards de dollars d'ici 2020 pour fournir au continent africain 10 Gigawatts supplémentaires d'énergies renouvelables d'ici 2020, c'est donc un très grand succès.
Mais je reviens à la négociation sur le projet d'accord.
La journée de samedi a constitué une journée charnière de cette COP21, le groupe que nous appelons ADP a conclu ses travaux en adoptant un projet d'accord, les coprésidents que j'ai félicités me l'ont remis lors d'une session plénière samedi en fin de journée, les délais ont donc été parfaitement tenus. Ce projet comporte encore beaucoup d'options, ce qui va donc demander un travail important dans la semaine qui s'ouvre, mais il constitue un progrès. Nous disposons désormais d'une nouvelle base de négociations acceptée par tous et qui est plus aboutie que le texte qui était en discussion au début de la semaine dernière. Les formulations sont plus synthétiques, le nombre d'options a été réduit et je dirais qu'avec ce nouveau projet, un pas a été franchi vers le compromis final.
Samedi, l'autre avancée de la journée, c'est la définition d'une méthode pour l'organisation des travaux d'ici la fin de cette Conférence.
J'ai proposé - et cette proposition a été adoptée par les parties - de constituer une instance unique, ouverte à tous, afin de mener des consultations informelles. L'objectif de ces consultations est d'avancer sur le texte de l'accord et de faciliter les compromis. Les travaux de cette instance, comme le disait Christiana Figueres - nous l'appelons le Comité de Paris - que je présiderai, devront aboutir à un projet d'accord et de décisions. Celui-ci sera ensuite transmis à l'instance formelle qui est la COP en vue d'une adoption le vendredi 11 décembre.
Afin de progresser rapidement, j'ai proposé, et les parties ont bien voulu l'approuver, qu'une série de quatre groupes de travail informels soit constituée sur les questions transversales dont la résolution conditionne largement l'obtention d'un accord. Les thèmes retenus sont la différenciation, l'ambition, les moyens de mise en oeuvre, ce qui inclut les finances, les technologies et les capacités, et enfin l'action pré-2020, hormis les finances pré-2020 qui sont traitées dans le cadre du groupe moyens de mise en oeuvre.
Sur chacune de ces quatre thématiques, j'ai souhaité que deux ministres facilitateurs conduisent au nom de la présidence les consultations informelles. J'ai également nommé trois facilitateurs sur les thèmes de l'adaptation et du préambule, et trois autres dont je préciserai les missions ce soir.
Au total, cela fait donc une équipe de 14 ministres dont les noms vous ont été communiqués, qui m'appuieront dans le travail des jours à venir. Ils sont issus des différents groupes et zones géographiques, ils disposent tous de la compétence et de la légitimité requise pour faire avancer les sujets dont ils ont la charge.
Je les remercie chaleureusement parce que c'est un très gros travail qu'ils mèneront, à la fois le jour et la nuit puisque nous avons peu de temps, et dans les jours à venir, cette équipe de facilitateurs, ce sont les ambassadeurs du compromis.
Nous nous sommes réunis hier matin dimanche afin, avec eux, de préciser leur mandat, de fixer le calendrier. Les travaux sur les quatre thèmes transversaux ont commencé dès hier après-midi, ils se poursuivent aujourd'hui. Les consultations sur les autres thèmes seront engagées très rapidement et je réunirai les facilitateurs une fois par jour pour faire le point.
Par ailleurs, chaque soir vers 19 heures, les facilitateurs présenteront l'état de leurs consultations devant le Comité de Paris réuni sous ma présidence.
La première réunion aura lieu aujourd'hui, ces séances doivent permettre, sur la base des rapports des facilitateurs, de dégager une vision partagée sur les principaux points à régler. L'objectif est, si les parties en sont d'accord, de pouvoir disposer mercredi d'une première vision d'ensemble de l'accord final.
Voilà la méthode, elle est claire et il y a un calendrier qui est précis avec un objectif qui est fixé. Maintenant, bien sûr, il faut collectivement continuer à travailler et à avancer. À partir d'aujourd'hui, l'implication dans la négociation des ministres d'une large majorité de pays va permettre de donner l'impulsion nécessaire aux arbitrages proprement politiques. En témoignent les déclarations prononcées par les ministres dans le cadre du segment de haut niveau qui a commencé ce matin, qui se déroule aujourd'hui et demain et que j'ai ouvert ce matin.
Cette semaine de travail est brève et il nous reste peu de jours pour conclure l'accord que le monde attend. Car, compte tenu des délais nécessaires aux vérifications juridiques finales et à la traduction dans les six langues des Nations unies, il sera en fait nécessaire de disposer d'un texte dès jeudi, afin de pouvoir l'adopter vendredi.
Le temps est donc limité, le travail à accomplir est important mais je veux souligner que l'esprit général est positif, il est au travail, à la concentration et à la détermination. Il existe, et c'est un élément essentiel pour la suite des négociations, une véritable volonté collective. Et maintenant, il faut transformer cette volonté en un bon accord, c'est le travail de cette semaine.
Q - (en anglais) Sur le rôle de John Kerry dans ces négociations.
R - Je viens de voir M. Kerry, qui connaît bien ces problèmes auxquels il s'intéresse depuis longtemps. Et, de même que je le fais depuis le début de la conférence avec d'autres responsables, d'autres pays, j'ai fait un tour d'horizon avec lui pour voir où nous en sommes : quelles sont les avancées ? Quelles sont les difficultés ? Il a, d'autre part, comme vous le savez, un négociateur permanent, M. Todd Stern, qui est également très compétent.
Donc, je ne vais pas entrer dans le détail de telle ou telle prise de position mais, bien évidemment, il est parfaitement au fait des questions. S'agissant en général des États-Unis, j'ai eu l'occasion, ainsi que le président français, d'en discuter très directement avec le président Obama qui, comme vous le savez, est très engagé personnellement pour trouver un accord à Paris parce que la lutte contre le dérèglement climatique est vraiment une des priorités qu'il a assignée à son pays. Donc, les rapports sont bons. Et, justement, il se trouve, c'est le hasard des calendriers, qu'il arrivait de Washington et que je viens de le voir ce matin.
Q - (en anglais) Sur les disponibilités des financements pour les pays moins développés.
R - Il y a plusieurs autres questions qui se posent, mais une autre question est : qui va contribuer ? Et, là, il y a bien sûr la liste des pays qui, aujourd'hui, contribuent mais il y a l'idée que les contributions pourraient être d'origine plus vaste sur une base cette fois-ci volontaire ; ceci est un autre aspect qui fait l'objet de discussions. Tout ce que nous répondons, Christiana et moi-même, sur le contenu même des textes est bien sûr soumis à discussions. C'est la tâche des facilitateurs, du secrétariat et de la présidence de tenir compte de ce que nous aurons entendu de la part des uns et des autres pour faire une proposition de synthèse. Et elle devrait, si c'est possible, être sur les tables mercredi.
Q - (en anglais) Sur l'évolution des discussions et le pré rapport remis samedi.
R - Vous avez certainement tous beaucoup à faire et vous avez déjà pris des engagements.
Au début de votre question, j'ai cru comprendre que vous me disiez : «pourquoi est-ce que le texte qui vous a été remis était-il meilleur que le texte initial ?» Et, à la fin de la question, j'ai compris que c'était plutôt : «que va-t-il se passer maintenant et quel est le calendrier ? »
Oui, le texte qui nous a été remis par l'ADP et qui a été transmis à la COP est un texte un peu plus court que le précédent qui comporte un peu moins d'options et, de ce point de vue-là, c'est un progrès. Mais il est vrai qu'il y a encore beaucoup de sujets qui sont entre parenthèses et tout le travail, entre samedi, au moment où il m'a été remis, et vendredi, au moment où nous devons adopter le texte, c'est de faire de ces différences un compromis unique et que ce compromis soit approuvé.
Pourquoi ces dates ? Pourquoi cette méthode ? Parce que je pense qu'il faut respecter les buts que nous nous sommes fixés à nous-mêmes. La conférence de Paris, COP21, il est prévu, y compris très matériellement, qu'elle se termine le vendredi 11 décembre. Chacun a prévu non seulement son emploi du temps mais surtout ses interventions et son plan de travail par rapport à cela. C'est évidemment une contrainte mais, comme vous le savez, les contraintes sont à la fois des obstacles et, en même temps, ce qui permet de franchir les obstacles.
Donc, si vous faites un calcul en arrière, ce qui n'est pas très difficile puisque nous avons les contraintes juridiques, il faut que, entre samedi et dimanche où nous avons commencé l'exercice, et puis jeudi, nous progressions, ce qui impliquera de travailler - c'est déjà le cas d'ailleurs - avec les ministres jour et nuit. Nous devons arriver à une solution, comme l'ont répété encore le secrétaire général des Nations unies, beaucoup d'intervenants et les ministres ce matin, à une solution d'un accord universel à la fin de cette semaine. Je crois que la méthode est assez claire.
Bien sûr, il faut être pragmatique parce que le pragmatisme fait partie de la vie, mais les objectifs sont clairs ; la méthode et les calendriers aussi. Ce qui est très important, c'est que tout cela est évidemment en accord en permanence avec les parties ; il ne s'agit pas de faire tomber, de je ne sais quel empire céleste qui n'existe pas, une solution. Il s'agit de faire en sorte que, parce que les philosophes grecs l'appelaient la maïeutique, nous progressions vers une solution de compromis qui soit acceptée.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 décembre 2015