Interview de M. Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "Europe 1" le 7 décembre 2015, sur les résultats du premier tour des élections régionales.

Prononcé le

Média : Europe 1

Texte intégral

JEAN-PIERRE ELKABBACH
Stéphane LE FOLL est avec nous. Bonjour.
STEPHANE LE FOLL, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT
Bonjour.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Avec une telle percée historique du Front national, beaucoup de Français ont la gueule de bois ; le gouvernement aussi, non ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, oui, bien sûr. Je ne vais pas mésestimer le choc qu'il y a eu hier soir avec les résultats qu'on connaît.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Entre nous, c'était prévisible et même annoncé, cette percée du Front national.
STEPHANE LE FOLL
Oui, absolument. Je vais donc faire de la pédagogie. Oui, il y a un choc parce que ce qui était prévu est arrivé. Malgré tout, on peut toujours penser que ce qui était annoncé par les sondages pouvait ne pas se passer. Ça s'est passé et ça se passe. A partir de là, il faut regarder l'ensemble et essayer de se déterminer par rapport à ce qui est la réalité des rapports de force maintenant dans les régions. J'appelle encore une fois au rassemblement de la gauche. Juste un point, j'entendais madame CALMELS. C'est la première fois que je l'entends et ça me frappe, je vais le dire…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Elle est déterminée.
STEPHANE LE FOLL
Elle est déterminée mais ce qui me frappe, c'est que tous ceux qui veulent un jour incarner une autre manière de faire de la politique…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ils font comme les autres.
STEPHANE LE FOLL
C'est les pires ! Et j'ai trouvé très ringard son discours.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Elle doit vous écouter et elle pensera que le vôtre l'est aussi.
STEPHANE LE FOLL
C'est un petit message pour elle.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Tout de suite pour en finir, le Parti socialiste et Jean-Christophe CAMBADELIS ont demandé à deux et ce matin au troisième socialiste de se faire hara-kiri, de se sacrifier, de se retirer, et caetera, pour éviter que le Front national gagne. Jean-Pierre MASSERET ne peut pas rester longtemps là encore là où il est.
STEPHANE LE FOLL
Je crois que Jean-Pierre MASSERET, compte tenu des résultats, devra prendre la mesure de la situation et, comme l'a demandé Jean-Christophe CAMBADELIS, se retirer comme ç'a été demandé à Christophe CASTANER et Pierre de SAINTIGNON.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est douloureux pour eux.
STEPHANE LE FOLL
Mais vous n'imaginez pas ! Je vais vous dire cela d'autant plus que j'ai fait trois, quatre meetings dont deux, un dans le Var à La Seyne-sur-Mer et l'autre à Strasbourg. J'étais dans ces salles où il y avait quatre cents personnes, quatre cents militants de gauche sympathisants. Je sais ce qu'ils pensent et je sais ce qu'ils doivent penser ce matin. Mais à chaque fois, une élection c'est aussi des valeurs qu'on défend et dans ces valeurs, le PS a toujours été au rendez-vous de la République. Il faut qu'il y soit encore cette fois-ci.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Stéphane LE FOLL, le président de la République a sans doute tout suivi. Il paraît que vous étiez en contact hier.
STEPHANE LE FOLL
Je l'ai eu hier soir, oui. C'est normal.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il est inquiet, surpris ou indifférent ? Ou il dit que ça ne le regarde pas, ça ne touche pas le statut présidentiel ?
STEPHANE LE FOLL
Il n'est pas indifférent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Justement, il est touché ?
STEPHANE LE FOLL
Je n'ai pas de commentaires à faire sur ce que pense le président de la République.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais pourquoi pas ?
STEPHANE LE FOLL
Il aura, s'il le souhaite, à s'exprimer mais moi, je n'ai pas de commentaires à faire sur ce que pense le président de la République.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous ne dites pas s'il est touché, s'il se sent affecté ou s'il pense que…
STEPHANE LE FOLL
Le président de la République, vous le savez, regarde les affaires de la France et les questions électorales comme quelqu'un qui connaît ce pays, qui le connaît bien et il regarde tout ça avec beaucoup d'attention.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et qu'est-ce que va faire maintenant le Premier ministre Manuel VALLS ? Je sais qu'il va intervenir ce soir.
STEPHANE LE FOLL
Ce soir.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. Est-ce qu'il y a des décisions nouvelles à prendre ?
STEPHANE LE FOLL
Non. Là les décisions, on va essayer d'avoir de la méthode. Première chose : on peut emporter de nombreuses régions, ce qui n'était pas prévu.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
A votre avis, combien vous pouvez encore garder de régions ?
STEPHANE LE FOLL
Garder ? Je pense que sur les trois qui étaient annoncées comme pouvant être gardées – la Bretagne, la Grande Aquitaine avec Limousin, Poitou-Charentes et Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées – on est en position de pouvoir concerner ces régions. Puis, il y a beaucoup d'autres régions où, je l'ai dit hier soir, le total de la gauche et des écologistes, c'est un rapport de force qui existe.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Là, vous nous avez beaucoup fait rire. Pardon de vous le dire, mais vous nous avez fait beaucoup rire.
STEPHANE LE FOLL
Beaucoup rire, oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça, c'est une astuce comptable qui est une illusion parce que c'est un calcul théorique et peut-être une consolation.
STEPHANE LE FOLL
Je vais essayer d'expliquer à ceux qui nous écoutent et pas à vous, Jean-Pierre ELKABBACH.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Non, non. Vous dites : 36,6 nous reviennent, c'est-à-dire que vous additionnez des partis qui ont toujours été en désaccord avec vous.
STEPHANE LE FOLL
Alors, on va donner une explication. Il y a en France un premier et un deuxième tour. Regardez la présidentielle : vingt-huit pour François HOLLANDE au premier tour, vingt-sept pour Nicolas SARKOZY, dix-sept pour le Front national, onze pour Jean-Luc MELENCHON. Qu'est-ce qui se passe au deuxième tour ? Il y a un choix qui est différent. Quand même, moi ce que je fais c'est un peu de politique, mais rationnellement. On est en train de parler ; or une réalité, la rationalité c'est qu'il a deux tours.
STEPHANE LE FOLL
Comme il y a un deuxième tour, on rassemble ces forces. Ç'a toujours été comme ça.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. C'est-à-dire que la carte électorale évolue, elle est en cours de transformation peut-être bleu marine mais elle va se fixer le 13 décembre.
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais le rempart - je l'ai dit hier soir -, il faut que la gauche en prenne conscience, c'est elle : la gauche et les écologistes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, chacun dit. Xavier BERTRAND dit : « Le rempart, c'est moi » mais est-ce que vous ne croyez pas que le rempart, faire barrage au Front national, les électeurs en ont assez de ces arguments poussiéreux ? Qu'il faut peut-être trouver autre chose pour combattre le Front national ? Donner les réponses, parler de la France, trouver des solutions et avoir des résultats ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense que parler de la France, on ne peut pas aujourd'hui reprocher au président de la République et au Premier ministre de ne pas parler de la France et de ne pas défendre la France. La vraie question qui est posée, c'est quelle est la France dont on parle ? Si c'est la France qui consiste à dire : pour être la France, on va fermer nos frontières, on va quitter l'Europe, ce n'est pas notre France. Ce n'est pas celle qu'on veut, donc c'est ça qu'il faut qu'on défende et qu'il faut qu'on défende avec beaucoup de force.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Stéphane LE FOLL, ça va être votre campagne de deuxième tour.
STEPHANE LE FOLL
Non, non, c'est ce que je vous dis.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Votre campagne collective. Ce matin, le parti Les Républicains pourrait confirmer, même s'il y a de la grogne en son sein, la décision annoncée par Nicolas SARKOZY ni fusion, ni retrait. Qu'est-ce que vous en pensez ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense qu'ils vont confirmer, parce que je ne vois pas comment Nicolas SARKOZY, après ce qu'il a dit hier soir, reviendrait sur sa décision prise hier soir. Il a été d'ailleurs plus dur encore que ce qu'avait été son expression précédente. Il n'y a pas de surprise de ce côté-là mais j'imagine qu'il va y avoir confirmation de cette décision.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. Et comment vous la jugez ? C'est ça qui nous intéresse.
STEPHANE LE FOLL
Je l'ai toujours dit. Le PS, le Parti socialiste, a toujours été au rendez-vous de la République. Il a toujours fait le choix de la République et des Républicains.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous croyez que Nicolas SARKOZY se met hors de la République ?
STEPHANE LE FOLL
Je n'ai pas dit cela mais le choix de la République, nous le faisons. Nous retirons des listes quand il y a un danger Front national.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci.
THOMAS SOTTO
Merci Stéphane LE FOLL. Demain c'est Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, qui fait déjà entendre une petite musique différente de Nicolas SARKOZY, qui sera votre invitée à huit heures vingt pour l'interview politique d'Europe 1.
source : Service d'information du Gouvernement, le 8 décembre 2015