Déclaration de Mme Pascale Boistard, secrétaire d'Etat aux droits des femmes, sur l'égalité entre les femmes et les hommes et l'action sur le changement climatique dans le cadre de la COP21, Paris le 3 décembre 2015.

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Texte intégral


Permettez-moi de souligner une nouvelle fois à quel point la France est fière d'accueillir cette conférence, pour écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire commune.
Le président de la République l'a rappelé, dans son discours d'ouverture : près de 65 ans après l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, signée ici, à Paris, en 1948, la France accueille « tous les pays pour une nouvelle étape des droits ».
Le premier engagement de la France c'est donc d'accueillir la Cop21.
Le second engagement de la France, en tant que présidente de la COP21 c'est la responsabilité de faire de ce rendez-vous un succès, qui reposera sur la volonté collective, sur l'engagement de toutes les parties.
Le président de la COP21, Laurent Fabius, a défini les quatre critères de succès qui fondent ce que nous appelons communément l' « Alliance de Paris pour le climat ». Celle-ci doit marquer une transition, un point de bascule dans la lutte contre le réchauffement climatique et le développement durable.
Ainsi nous aurons réussi :
- si nous parvenons à un accord universel, robuste et contraignant, ce qui serait une première historique dans les négociations climatiques ;
- si l'accord permet de favoriser la mise en œuvre de contributions nationales toujours plus ambitieuses ;
- si la mobilisation des financements et des technologies est à la hauteur afin de concilier lutte pour le climat et développement économique ;
- si la mobilisation de la société civile permet d'agir dès maintenant.
Pour ma part, je voudrais ajouter un autre critère, qui est l'objet de notre mobilisation et de la mienne en particulier au sein du gouvernement français: l'égalité femmes-hommes.
Nous aurons réussi si dans ces quatre composantes de l'Alliance de Paris pour le climat, l'égalité entre les femmes et les hommes est prise en compte, pleinement intégrée :
- dans l'Accord de Paris,
- dans les contributions nationales,
- dans les mécanismes de financements,
- dans l'agenda des solutions.
C'est aussi l'engagement de la France.
La France est mobilisée sur cet objectif et le gouvernement français porte cette revendication, à travers les différents rendez-vous internationaux et nationaux :
- à New York, j'ai présidé un événement de haut niveau, « Agir pour le climat, pour et avec les femmes », en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies.
- à Paris, avec Laurent Fabius, Marisol Touraine et Annick Girardin, nous avons organisé la conférence de haut niveau « Femmes engagées pour le climat ».
Permettez-moi de préciser rapidement ce que nous attendons sur ces composantes
L'ambition que nous portons est de parvenir à un accord dont le caractère sera universel, différencié et juridiquement contraignant. Dans cet accord, il faut que les références à l'égalité femmes-hommes et à la prise en compte du genre dans le réchauffement climatique soient présentes. Au sortir de la session de négociation de Bonn, le document contenait 8 références liées à la prise en compte du genre dans le réchauffement climatique. Ces références sont toutes utiles et pertinentes :
Elles sont utiles, car elles permettent de lutter efficacement contre le réchauffement climatique qu'il s'agisse d'atténuation ou d'adaptation.
Elles sont pertinentes parce qu'elles recouvrent – à mon sens- toutes les dimensions nécessaire à une vraie prise en compte du genre.
Sur le plan des principes il est fondamental de que l''égalité femmes-hommes figure dans le préambule… En effet comment définir des règles sans s'être entendu sur les principes qui les régissent au préalable ?
Sur le volet opérationnel, le texte souligne la nécessité de mettre en œuvre des politiques d'atténuation ou d'adaptation qui soit sensible au genre, de l'inscrire dans les mécanismes de financements et de renforcement des capacités.
Il faut ajouter que ces références présentent un autre avantage – elles sont toutes très concises ! Je n'irai pas jusqu'à m'en féliciter mais pour tout négociateur, c'est un argument de poids…
Sur les contributions nationales :
Aujourd'hui, 184 pays ont remis leur contribution nationale. Elles couvrent plus de 97% des émissions mondiales de gaz à effet de serre depuis 2011.
Elles ouvrent la voie à des changements majeurs dans l'économie mondiale.
La transition vers un monde décarboné et un développement durable est déjà en marche, et Paris doit être l'accélérateur de cette transition.
Cependant je dois aussi faire un autre constat : parmi ces contributions, seulement une cinquantaine ont intégré des dispositions concernant l'égalité femmes-hommes. Une fois encore, le rôle des femmes dans le changement, dans la décision, dans les solutions n'est pas pris en compte. Il est temps que le monde s'adapte et prenne en compte les aspirations des femmes, la moitié de l'humanité.
En France, le gouvernement est d'ores et déjà mobilisé sur cette question. Nous lancerons dès 2016 une étude prospective sur les emplois et formations prioritaires pour la transition énergétique, sous l'angle de l'égalité professionnelle. L'objectif est de créer des modalités opérationnelles pour favoriser la mixité des métiers à l'horizon 2020.
Sur les financements :
La barre des 100 milliards de dollars par an d'ici à 2020, n'a jamais paru aussi atteignable. La France prendra toute sa part à ces efforts, en mobilisant dès à présent 3 milliards d'euros par an, puis, à partir de 2020, 5 milliards d'euros par an.
La France assurera le plaidoyer pour une intégration systématique du genre dans les mécanismes de financement de la lutte contre le réchauffement climatique.
Le Fonds vert pour le climat, le premier à avoir inclus cette dimension dans ses modalités de fonctionnement, devrait servir d'exemple. Tous les acteurs, l'Union européenne, les États mais aussi les banques multilatérales de développement et le secteur privé, doivent s'investir sur cette question.
Sur la société civile :
S'il revient aux responsables politiques de mettre en place le cadre approprié, c'est l'ensemble de la société civile qui sera chargée de sa mise en œuvre et de son suivi.
Chaque jour, les femmes agissent pour développer des solutions dans tous les domaines. Les femmes sont engagées dans le changement, elles sont porteuses de solutions innovantes. Il est temps de leur laisser une place plus importante dans la prise de décisions et la définition des solutions. Il est donc primordial d'impliquer la société civile engagée en faveur des femmes dans le processus d'élaboration et de mise en œuvre des politiques dédiées. Nous nous y engageons en France comme vous avez peut-être pu le constater à travers vos passages au sein de l'espace génération climat. La société civile française est bien présente. C'est un motif de fierté et d'encouragement.
Cette société civile, nous l'avons vue défiler, ce week-end. De Johannesburg à Genève, de Ouagadougou à Sydney, ou de New Delhi à New York, ce sont plus de 2 300 marches qui se sont déroulées dans près de 157 pays. Elle nous demande d'agir, de prendre nos responsabilités, et de l'associer, bien sûr. Elle nous demande de repenser nos sociétés : elle est prête. Prête aussi pour l'égalité entre les femmes et les hommes.
Il faut encourager ces changements. Ils permettent de réinventer des modèles économiques, de repenser les relations entre les sexes. Ils permettent d'innover. Car le président de la République l'a dit « Notre plus grand défi, c'est de passer d'une mondialisation fondée sur la compétition à un modèle basé sur la coopération, où il sera plus rentable de protéger que de détruire ».
Je vous remercie.
Source http://femmes.gouv.fr, le 7 décembre 2015