Texte intégral
Monsieur le Secrétaire général,
Madame la Directrice générale,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec un grand plaisir que je vous retrouve, en ce début d'année 2016.
J'ai souhaité associer Monsieur le Secrétaire général et les directeurs des autres directions de notre ministère, lors de ce moment traditionnellement réservé aux agents de la DGM, car toutes les directions concourent d'une façon ou d'une autre à la politique de développement de la France et au rayonnement de la Francophonie. Vos relations de travail, quotidiennes, participent de la richesse de notre maison. N'ayant pu participer aux voeux hier soir avec Laurent Fabius, Matthias Fekl et Harlem Désir, c'est un réel plaisir de tous vous retrouver en cette nouvelle année.
L'année 2015 a été, pour notre pays, terriblement douloureuse. Il y a un an, jour pour jour, Charlie Hebdo était attaquée. La France était frappée. Dans ses valeurs.
La commémoration, cette semaine, des attentats de janvier 2015, et la mémoire encore présente de ceux du 13 novembre sonnent comme un appel à la solidarité - et nous avons connu en janvier dernier un formidable élan national et international.
Un appel à se réunir autour de valeurs fortes et d'un projet commun, pour notre République mais aussi dans nos relations avec nos partenaires étrangers.
Pour les professionnels du développement durable et de la solidarité internationale, l'année aura été riche en avancées et cet horizon commun, que j'évoquais, c'est l'agenda post-2015, que nous avons dessiné tout au long de l'année.
À Addis-Abeba, nous avons posé les bases d'un nouveau modèle pour le financement du développement.
Ce rendez-vous a marqué un tournant. S'il a permis de rappeler le rôle central de l'aide publique au développement, il a aussi mis en avant la nécessité de changer d'échelle dans la mobilisation du secteur privé, des collectivités territoriales et des associations.
À New York, nous avons montré avec force que l'humanité était consciente qu'on ne sortirait pas de la pauvreté sans prendre en compte les limites de notre planète.
Les 17 Objectifs de développement durable écrivent pour la première fois une histoire universelle pour éradiquer l'extrême pauvreté, combattre les inégalités et protéger notre planète.
Cette histoire, c'est celle d'un 21ème siècle où les valeurs de solidarité, de responsabilité et de justice viennent réparer et prévenir la masse de conflits, de guerre et de tension que nous connaissons. Cela peut paraître présomptueux, mais l'enjeu qui sous-tend notre action est de ce niveau et nous devons en être conscients.
En 2015, nous avons franchi une étape dans la lutte contre la maladie à virus Ebola, après plus de 18 mois de lutte acharnée. Cette crise aura démontré toute la pertinence de notre plaidoyer pour l'intégration de la couverture sanitaire universelle dans l'agenda du développement durable.
Enfin, à Paris, lors de la COP21, nous avons pris un virage dans la lutte contre le dérèglement climatique. Vous avez été au sein de l'équipe de France les premiers artisans de ce succès. Je tiens à vous en remercier une fois encore, comme Laurent Fabius l'a fait hier.
Mais comme moi vous savez que nos combats pour un monde plus juste, plus solidaire et plus durable ne s'arrêtent pas là.
Si les grandes réunions internationales sont fondamentales, parce qu'il faut faire des bilans et se projeter dans le monde de demain, elles ne constituent pas une fin en soi.
Commence désormais le chantier de la mise en oeuvre, qui nous appelle à amplifier nos efforts vers les pays et les populations les plus pauvres et les plus vulnérables, pour construire, à leurs côtés, le monde, notre monde de 2030.
Quelles sont nos priorités et comment agir ?
Être plus actifs dans les régions les plus vulnérables. Je pense notamment au Sahel, qui reste aujourd'hui, malgré les efforts des États concernés et de la Communauté internationale, un carrefour de crises. La fin de l'année 2015 a été marquée par des annonces fortes pour cette région du monde, à la fois lors du sommet de La Valette et lors de la COP21.
Être précis et concrets. Les annonces, qu'il s'agisse des enjeux liés à la jeunesse pour le fonds Sahel, ou encore de l'accès à l'énergie ou de la préservation du Lac Tchad, doivent se transformer rapidement en projets concrets.
Être rapides. Les premiers projets doivent être tangibles pour les populations dès cette année 2016, il en va de notre crédibilité. En ce qui me concerne, je puis vous assurer que je ne ménage pas ma peine pour que les choses avancent, notamment à Bruxelles.
Et bien évidemment se concentrer en 2016 sur les ODD et le climat.
Je suis particulièrement fière que la COP21 ait inscrit l'adaptation au dérèglement climatique, mais aussi de manière plus générale le soutien aux pays vulnérables, au coeur de l'accord de Paris. Nous avons, là aussi, pris de nombreux engagements envers ces pays.
Nous porterons à 1 milliard nos financements pour l'adaptation en 2020. C'est le triple de la somme actuelle ! Nous devons donc, là encore, nous mettre à l'ouvrage.
Je n'oublie pas les systèmes d'alertes, CREWS, que nous avons portés ensemble tout au long de cette année, grâce à vos efforts, et qui ont été inscrits au coeur même de l'accord de Paris.
Nous nous sommes aussi engagés à ouvrir un grand débat sur la question de la vulnérabilité face au dérèglement climatique, à la demande de nos partenaires africains. L'AFD et nos instituts de recherche, l'IRD et le CIRAD en tête, nous aideront à alimenter la réflexion sur ce thème.
Mais nous ne devons pas oublier non plus que la France a elle aussi du chemin à faire dans la mise en oeuvre des ODD. Je m'y attelle avec le MEDDE pour qu'un travail soit engagé avec tous les ministères et instances concernés.
Pour être en cohérence avec nos ambitions, nous ne devrons pas laisser de côté les enjeux d'éducation, de sensibilisation et de mobilisation, et notamment des plus jeunes. C'est pourquoi je souhaite que nous nous mobilisions en 2016 sur ce volet sur deux axes :
Celui de l'éducation tout d'abord, et je souhaite que notre ministère développe de concert avec le ministère de l'éducation nationale une grande campagne d'information et de sensibilisation sur les ODD.
Au-delà, je crois profondément, vous le savez, dans les vertus des échanges entre les jeunes du Sud et du Nord. Dans la période que nous traversons, l'ouverture de la jeunesse sur le monde est plus que jamais essentielle.
C'est pourquoi j'ai engagé une réforme de l'engagement citoyen des jeunes à l'international. Je souhaite le rendre plus accessible à des profils diversifiés, mieux valorisé et reconnu dans les parcours universitaires et professionnels et renforcer la réciprocité des échanges avec les volontaires des pays du Sud. C'est un chantier sur lesquels nous aurons des premiers résultats dès ce début d'année.
Un autre cadre va nous permettre de traduire en actes les ODD. Je veux parler du «post-Cotonou». La redéfinition du partenariat ACP-UE doit nous permettre de faire évoluer la politique européenne de développement et de solidarité.
Je n'en fais pas mystère, je ne suis pas complètement convaincue par l'efficacité de la politique européenne de développement. Nous aurons là une vraie occasion de moderniser nos outils et nos priorités.
Je pense en particulier à la question du climat, mais aussi à la priorité que j'accorde à la jeunesse, qui doit se retrouver dans ce nouveau cadre qui régit les relations économiques et de solidarité avec les pays ACP.
Pour tout cela, nous avons de nouveaux moyens.
Un budget du développement en hausse, pour la première fois depuis 5 ans, c'est essentiel. C'est plus de bonifications et plus de subventions. Les moyens seront à la hauteur de l'ambition.
Une trajectoire définie, en hausse elle aussi : + 4 milliards d'euros pour le développement d'ici à 2020, dont deux sur le climat. +370 millions de dons.
Et des outils renouvelés. Comme vous le savez, le Président de la République a annoncé fin août une réforme importante : le rapprochement de l'AFD et de la Caisse des dépôts et consignations afin de renforcer les moyens pour le financement international du développement et du climat.
Cette nouvelle étape stratégique, ce renforcement attendu de notre capacité d'action, offre des opportunités nouvelles à notre politique de développement.
Cette réforme permet de refléter le nouveau partenariat pour le développement que nous avons signé à Addis Abeba.
Elle ouvre des perspectives de collaboration entre tous les acteurs ; les États, les collectivités territoriales, les entreprises et les associations. Elle dégage ainsi des synergies nouvelles.
Ce nouvel outil est au service de la vision universelle du développement adoptée à New York, tant au plan international que national.
Mais cette réforme suppose un pilotage politique fort de la politique de développement, et je veux en être la garante.
Le président de la République détaillera prochainement le schéma institutionnel, juridique et financier retenu, et en définira la mission et les objectifs.
2016 sera également l'année où vont se concrétiser des réformes importantes pour la DGM. Je n'en évoquerai que quelques-unes :
Le transfert de la mise en oeuvre des projets bilatéraux dans le domaine de la gouvernance va venir parachever un mouvement entamé depuis dix ans. Je n'ignore pas ce que de telles mutations impliquent pour les personnels concernés au sein de la DGM et je salue leur engagement.
Cette réforme doit être vécue comme une chance de moderniser et de renforcer notre action dans ce domaine, y compris sur le plan financier. Les ressources que l'AFD y consacrera seront, de fait, plus élevées que celles que le ministère pouvait y engager. Je sais que vous partagez cette conviction et il faut maintenant veiller à une transition harmonieuse vers le nouveau dispositif.
Il en va de même en ce qui concerne le transfert de la gestion de nos experts techniques internationaux à Expertise France. Là aussi, l'association étroite de nos postes diplomatiques et le caractère progressif de la transition seront essentiels au succès de la réforme. Au bout du compte, nous disposerons d'un dispositif d'expertise plus unifié, cohérent et adapté aux besoins.
Ces réformes auront naturellement une incidence sur le fonctionnement de notre réseau. Il nous faudra y réfléchir en 2016. Mais soyez sûrs que je veillerai à ce que ce réseau continue à marcher sur ses deux jambes, la culture et le développement.
Je voudrais évoquer aussi la nouvelle organisation de la DGM, mise en place au 1er janvier.
Je me félicite que l'avènement de la direction du développement durable affiche aussi clairement sa mission, qui est de piloter la mise en oeuvre internationale des nouveaux ODD.
La création de la DCE2R va aider à dynamiser l'animation du réseau en renforçant l'articulation des actions de développement avec nos politiques culturelles et d'influence.
Mais je n'oublie pas les autres services, la DEEIT bien sûr, dont l'action recoupe souvent nos objectifs en matière climatique, de développement durable et de francophonie économique.
Enfin, je souhaite signaler l'importance des trois délégations de la DGM :
La nouvelle délégation des programmes et des opérateurs, véritable cheville ouvrière de la mise en oeuvre de nos programmes et de l'exercice de la tutelle.
La délégation à l'action extérieure des collectivités territoriales de plus en plus importante dans le cadre des grandes régions.
Enfin la délégation aux relations avec la société civile, dont la COP21 a encore montré la place cruciale.
Last but not least, comment je l'entends si souvent, parce que le français est d'abord fragilisé par les Français eux-mêmes...
Je souhaite que la promotion de la francophonie reste une priorité pour notre ministère et plus largement dans l'ensemble des politiques publiques. Nous devons être conscients de ce que notre pays peut et doit apporter dans ce domaine, tant en faveur de ses propres citoyens - et je pense en particulier à ceux des Outre-Mer - qu'en direction du reste du monde.
Mes déplacements à l'étranger sont pour moi l'occasion de constater sur le terrain la qualité de l'action de nos opérateurs et de saluer leur inventivité. Je pense par exemple au dispositif d'accès au livre électronique lancé par l'Alliance française de Bangui ou à l'effervescence d'activités proposée par l'Institut français de Phnom Penh récemment rénové.
Je n'ai cessé de marteler, depuis que je suis en poste, que la Francophonie ne continuera à progresser que si elle est ressentie comme une chance par les francophones. 2016 doit être une année d'action pour avancer dans ce sens, notamment dans le cadre de la semaine de la Francophonie et du sommet de Tananarive.
La francophonie doit être utile !
La maîtrise du français est notamment un atout dans la mondialisation. Nous devons donc avancer afin de rendre plus attractive et efficace l'offre éducative française à l'étranger, afin de faire de notre langue un outil de valorisation professionnelle.
Le français est la troisième langue des affaires. Nous devrons encore renforcer la francophonie économique, après le Forum d'octobre 2015. Mobilisons les milieux économiques francophones, construisons avec eux un écosystème en vue d'un développement durable en faveur de l'entrepreneuriat, de l'emploi, pour les jeunes.
La francophonie, c'est aussi un espace de culture. Je remercie Olivier Poivre d'Arvor qui nous emmènera dès le 14 janvier dans son ?Grand Tour' visant à promouvoir et valoriser l'attractivité culturelle française, en lien étroit avec l'ensemble des opérateurs.
La Francophonie, c'est aussi une communauté d'intérêt. C'est une voix plus forte dans les enceintes internationales pour défendre nos valeurs. Nous l'avons vu à Paris en décembre, au Sommet de La Valette ou à Dakar.
Nous nous devons de changer de regard sur la francophonie. Soyons actifs, portons cette ambition.
2015 a permis de placer la barre très haut sur des ambitions communes pour la prochaine décennie. À nous, ensemble, de concrétiser cet élan dès cette année.
Année que je souhaite heureuse et réussie à chacun d'entre vous et à tous vos proches.
Vous voyez que j'ai fait plus court que l'année dernière. Personne ne s'est évanoui ! C'était ma première bonne résolution.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 janvier 2016