Interview de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports à I-Télé le 25 février 2016, sur la situation politique, notamment la politique économique du gouvernement de Manuel Valls.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral


MICHAËL DARMON
Patrick KANNER, bonjour.
PATRICK KANNER
Bonjour.
MICHAËL DARMON
Vous êtes donc le ministre de Jeunesse, Sport, Ville, mais également vous avez été un proche de Martine AUBRY, vous allez donc tenter de nous donner un petit peu de lumière sur ses motivations, mais tout d'abord une réaction, elle vient de s'exprimer chez nos confrères de RTL il y a quelques minutes. On écoute, on regarde, on y revient.
MARTINE AUBRY
Je pense, je le dis très simplement, que pour que un d'entre nous, quelqu'un qui représente la gauche, ait une chance de gagner, il faut d'abord régler le présent. Aujourd'hui, il faut qu'il y ait des résultats.
MICHAËL DARMON
Alors, AUBRY première opposante au gouvernement ?
PATRICK KANNER
J'espère bien que non. J'espère bien que non. Martine AUBRY s'exprime régulièrement, comme elle le fait, parfois avec des petites phrases, on peut faire allusion à son « Macron ras-le-bol », ou, pendant les régionales…
MICHAËL DARMON
Qu'elle a répété aujourd'hui.
PATRICK KANNER
Qu'elle a répété aujourd'hui, ou pendant les régionales « foutez-nous la paix », ou aujourd'hui « trop c'est trop », je ne suis pas sûr qu'on fasse beaucoup avancer les choses par des petites phrases. En tout cas, ce dont je suis certain c'est que ce n'est pas dans la nuisance qu'on crée un projet politique. En même temps, la parole de Martine AUBRY mérite d'être écoutée, à condition qu'elle soit constructive.
MICHAËL DARMON
Aujourd'hui elle exerce, pour vous, un pouvoir de nuisance, elle commet une faute politique, comme le dit Jean-Marie LE GUEN ?
PATRICK KANNER
Jean-Marie LE GUEN a évoqué la notion de faute politique, aussi Bruno LE ROUX a été sur cette même tonalité, ce dont je suis certain c'est qu'elle fait partie de cette gauche, et il y a plusieurs gauches dans notre pays, il y a la gauche qui pétitionne et la gauche qui gère, qui transforme, il y a la gauche qui prend des risques et celle qui est du statu quo, moi je n'ai pas à juger. Je dis simplement attention de ne pas taper contre son camp, parce que nous avons besoin de solidarité aujourd'hui, nous avons besoin d'avancer, et les Français ont besoin de clarté. Le cap du président de la République et du gouvernement est clair.
MICHAËL DARMON
Alors on va y revenir, parce que attention à ne pas taper contre son camp, c'est un peu déjà fait. Pourquoi aurait-elle tort de vouloir porter également la parole des électeurs de gauche déçus par François HOLLANDE ?
PATRICK KANNER
Tout d'abord, les électeurs de gauche ne sont pas si déçus. Il y a des sondages sur votre antenne qui ont été évoqués hier soir même, qui montrent que, sur la déchéance de nationalité, ou sur bien d'autres sujets, il y a aujourd'hui une adhésion des électeurs de gauche. Après il y a le positionnement personnel de Martine AUBRY, qui un jour devra nous dire ce qu'elle souhaite exactement. Est-ce qu'elle souhaite aller aux primaires ? Manifestement ce n'est pas le cas.
MICHAËL DARMON
Elle vient de répéter, ce n'est pas son projet, elle vient de le dire.
PATRICK KANNER
Voilà, alors quelque part, vous savez, au moins cette tribune a un élément de clarification, c'est qu'on se demandait où était vraiment Martine AUBRY au congrès de Poitiers, elle était présente physiquement, mais elle ne s'est pas exprimée. Finalement, quand je vois les signataires, j'ai une forme, devant moi, de reconstitution de ligue dissoute, mais cette fois-ci autour du courant B, autour de la motion B, donc celle des « frondeurs », et je crois que c'est bien que Martine AUBRY puisse clarifier sa position. Il y a la position majoritaire du Parti socialiste, Martine AUBRY l'avait soutenu à une époque, j'ai le sentiment que depuis hier ce n'est plus le cas.
MICHAËL DARMON
Alors effectivement, si on passe en revue quelques-unes de ses critiques, elle a évoqué notamment le spectacle, dit-elle, le débat désolant de l'hiver 2015 sur la révision constitutionnelle, mais en hiver 2015 il y a eu également les élections régionales. Est-ce qu'elles se sont aussi bien passées que ça dans le Nord pour qu'elle puisse aussi vous donner des leçons ?
PATRICK KANNER
Merci de rappeler cet épisode, c'est vous qui le faites, ce n'est pas moi.
MICHAËL DARMON
Je vous pose la question.
PATRICK KANNER
Je dis simplement que, ma position a toujours été la même, moi j'ai toujours souhaité que Martine AUBRY puisse être notre tête de liste aux élections régionales. Je l'avais dit à une époque, j'ai arrêté de le dire en suite quand Pierre de SAINTIGNON avait été désigné par les militants, et à l'époque je me souviens que les journalistes me disaient « mais Martine AUBRY n'a pas envie d'être candidate aux régionales », et d'ailleurs elle l'a démontré puisqu'elle n'a pas été candidate, et moi j'avais répondu « à côté de l'envie il y a le devoir. » Et il est vrai que, aujourd'hui, peut-être que nous n'en serions pas là dans cette région, parce que cette élection a été dramatique pour la gauche, nous le savons bien.
MICHAËL DARMON
Alors, elle a porté également le fer sur la politique économique menée, on va l'écouter et on va en parler quelques minutes ensemble.
MARTINE AUBRY
J'ai lu le blog de Manuel VALLS, je suis prête au débat avec lui, il y a beaucoup de contrevérités et de méconnaissance…
OLIVIER MAZEROLLE
Si on l'invite à venir débattre avec vous sur RTL, vous venez ?
MARTINE AUBRY
Oui, bien sûr ; sur cette question sur les licenciements, on ne me fera pas croire qu'on rendra les entreprises plus compétitives en fragilisant les salariés.
MICHAËL DARMON
Alors, elle dit on a donné 40 milliards au patronat, est-ce que les 35 heures n'ont pas aussi coûté beaucoup d'argent à l'Etat ?
PATRICK KANNER
Aujourd'hui le rétablissement des marges, et donc de la compétitivité des entreprises, était absolument nécessaire, avec le CICE, avec le Pacte de responsabilité et de solidarité, donc je crois qu'il ne faut pas regretter ces choix. Simplement, ce qui est vrai, ce qu'a dit Manuel VALLS, c'est qu'il est temps maintenant que, aussi, les entreprises, le MEDEF, s'engagent à mettre en oeuvre les dispositions qui étaient prévues dans cet accord gagnant-gagnant, à savoir réinvestir dans notre pays et donc recréer de l'emploi au travers des richesses ainsi manifestées. Donc moi je souhaite vraiment que chacun prenne ses responsabilités. Manuel VALLS a mis un point d'arrêt il y a quelques jours, vous le savez bien, pour dire « il n'y aura pas de nouvelles avancées en la matière si on ne tire pas d'abord le bilan de la période précédente », et c'est comme cela qu'on fera avancer ce dossier insupportable qu'est aujourd'hui le chômage. Moi je me félicite naturellement, permettez-moi de le dire quand même, des chiffres hier, je sais qu'il y a peut-être quelques éléments de contestation, mais en tout cas il y a une baisse du chômage, en tout cas au moins une stabilisation du chômage, et surtout dans un domaine qui m'intéresse particulièrement comme ministre de la Jeunesse, celui du chômage des jeunes.
MICHAËL DARMON
On y reviendra dans quelques minutes, mais pour l'instant regardez ce dessin paru ce matin dans le quotidien l'Opinion, « C'est une révolte ? » demande François HOLLANDE, « Non, une décomposition » répond Manuel VALLS. Patrick KANNER, est-ce que la machine à perdre est enclenchée ?
PATRICK KANNER
Sûrement pas.
MICHAËL DARMON
Ce n'est pas le sentiment que ça donne pour l'instant.
PATRICK KANNER
Les élections territoriales n'ont pas été bonnes, rarement d'ailleurs pour un gouvernement en place, même si je pense qu'on a vu, y compris avec des membres du gouvernement, que les élections régionales ont été, non pas satisfaisantes, mais en tout cas ont arrêté sûrement l'hémorragie. Donc il faut faire de l'année 2016 une année utile en la matière…
MICHAËL DARMON
Vous croyez que c'est la meilleure démonstration de faire l'année utile, ce à quoi on assiste ? Ce qui est programmable c'est la compétition officielle de la droite et on assiste aux divisions de la gauche, est-ce que c'est une année utile pour vous ?
PATRICK KANNER
Martine AUBRY a pris ses responsabilités hier en signant cette tribune, je pense qu'elle ne rend pas service à son camp, je vous l'ai dit tout à l'heure, en parlant de nuisance par rapport au projet politique. Donc, aujourd'hui, il est clair que la réforme doit avancer, c'est le cap porté par le gouvernement. Martine AUBRY, aujourd'hui, estime que ces réformes, ou vont trop loin ou vont dans le mauvais sens. C'est son avis, ce n'est pas, naturellement, celui que je porte. Et d'ailleurs, une majorité de Français aujourd'hui vont plutôt dans l'autre sens.
MICHAËL DARMON
Tout ça pendant que François HOLLANDE est à des milliers de kilomètres de cela, en Argentine il n'a pas voulu commenter le tango, je dirais, de Martine AUBRY, deux pas en avant, ce matin peut-être une sorte de petit pas en arrière, mais ses proches lui demandent de réagir et donc, l'avocat Jean-Pierre MIGNARD est de ceux-là. On écoute, on regarde.
JEAN-PIERRE MIGNARD
Depuis des mois et des mois, ces deux courants, ces deux forces politiques, toute deux très légitimes à l'intérieur de la gauche, ne se parlent plus. C'est au président de jouer son rôle, c'est à lui de prendre ses responsabilités, et pas seulement d'ailleurs à l'intérieur de sa famille politique, il est président des Français.
MICHAËL DARMON
Est-ce que François HOLLANDE doit arrêter de se laisser cogner par ses amis ?
PATRICK KANNER
Je vous ai parlé tout à l'heure de propos durs de Martine AUBRY, y compris de propos de porte-flingue je dirais, en tant que tel, mais quand on a un porte-flingue il faut savoir auprès de qui on veut travailler, et c'est vrai qu'il y a aujourd'hui un doute. J'entends ce qui vient d'être dit. François HOLLANDE doit être au-dessus de la mêlée, il n'a pas à commenter, permettez-moi cette expression, ce type de débat interne, quand il est à l'étranger.
MICHAËL DARMON
… pas commenter, mais au moins prendre les décisions, prendre des mesures, dire des choses, faire passer des messages.
PATRICK KANNER
Mais, François HOLLANDE est le président de la République, il y a un chef de gouvernement qui gère le quotidien, il va s'exprimer en tant que tel. Moi je suis intimement convaincu que cet élément de polémique, porté pendant quelques jours peut-être, un peu plus éventuellement, mais il n'y a pas de congrès en perspective…
MICHAËL DARMON
Pardon, élément de polémique ou deux gauches irréconciliables, comme le dit Manuel VALLS encore il y a quelques jours ?
PATRICK KANNER
Ce sont des gauches qui ont peut-être des traditions différentes, en tout cas il y a la gauche qui aujourd'hui gouverne, qui prend ses responsabilités, et il y a une gauche qui commente. Martine AUBRY manifestement, aujourd'hui, est dans le commentaire, et j'attends de voir si elle, ou ses amis, décideront d'aller plus loin. Ce soir il y a un débat à Lille sur la question des primaires, avec ce que j'ai entendu, ce que j'ai lu, de la tribune cosignée par Martine AUBRY, on pourrait se dire la logique voudrait que Martine AUBRY soutienne ceux qui souhaitent une primaire…
MICHAËL DARMON
Ou la logique voudrait qu'elle quitte aussi le Parti socialiste un jour finalement.
PATRICK KANNER
Vous savez, le Parti socialiste a toujours été composé de différentes sensibilités, qui ont fait des majorités, des minorités, et donc c'est la richesse du Parti socialiste, nous n'appelons pas à une sorte d'explosion générale du PS, qui a toujours su avoir ce type de sensibilités différentes. Par contre, ce qui est absolument nécessaire aujourd'hui, c'est qu'on sache qui est vraiment la majorité autour du premier secrétaire Jean-Christophe CAMBADELIS.
MICHAËL DARMON
Et vous disiez, ce soir Martine AUBRY participe à une réunion sur la primaire et n'a pas l'intention…
PATRICK KANNER
Oui, elle participe pour saluer, sans pour autant dire qu'elle soutiendra la primaire, mais à un moment donné, vous avez parlé tout à l'heure de tango, un pas dedans, un pas dehors, il faudra quand même trancher, on ne peut pas en permanence prendre les Français à témoin sans aller jusqu'au bout de la logique.
MICHAËL DARMON
Alors, vous vous êtes à l'intérieur de ce gouvernement VALLS, vous n'avez pas l'impression de participer à un gouvernement traître à vos valeurs ?
PATRICK KANNER
Non, sûrement pas, et puis je vais vous dire, moi j'aurais aimé que dans la tribune que j'ai lue hier dans Le Monde, pour ne pas le citer…
MICHAËL DARMON
… rappelé des succès quand même aussi du gouvernement, l'action de François HOLLANDE.
PATRICK KANNER
Oui, enfin les succès, surtout sur les questions de sécurité, mais moi j'aurais aimé par exemple qu'il y ait un mot sur une mesure qui a été prise depuis le 1er janvier, qui est la prime d'activité. Prime d'activité, 1,5 million de Français qui la touchent aujourd'hui, dont 225.000 jeunes, c'est une première en France, on a mis de côté le RSA Activité qui était un échec flagrant, la PPE, la Prime Pour l'Emploi, qui ne marchait pas, en tout cas qui était payée 1 an après, voilà, ça c'est des mesures vraiment profondément sociale qui aujourd'hui méritent d'être valorisées. Et, quelque part, ce que je reproche, c'est d'avoir cette vision tout à fait de division de ce qu'est le gouvernement, ce gouvernement, et les gouvernements précédents, ont beaucoup agi pour le progrès social, et ça mérite aussi d'être rappelé de temps en temps.
MICHAËL DARMON
Alors, il y a au mois de mars pas seulement la loi El Khomri, comme on dit, qui va être présentée au Conseil des ministres, mais également le texte que vous portez sur Egalité et citoyenneté, et une sorte de nouvelle loi logement social. Qu'est-ce que ça va changer ?
PATRICK KANNER
C'est un texte qui va s'appeler, comme vous le dites, projet de loi Egalité et citoyenneté. C'est la mise en oeuvre des mesures de différentes réunions de travail que nous avons portées après les attentats notamment du mois de janvier, avec le Premier ministre Manuel VALLS. Je puis vous dire que ce texte va s'articuler autour de trois grands thèmes. Jeunesse et engagement, et la reconnaissance de l'engagement - par exemple la création d'un congé en engagement pour les salariés. Mais aussi une partie sur le logement et notamment pour favoriser la mixité sociale dans les quartiers. Puis une partie sur la lutte contre les discriminations. Donc ce sera un très beau texte.
MICHAËL DARMON
C'est pour rééquilibrer un peu la loi El Khomri, un peu trop libérale aux yeux de certains à gauche ?
PATRICK KANNER
Ecoutez, la loi El Khomri, qui d'ailleurs pour l'instant n'est qu'un avant-projet de loi qui n'est pas encore celui du Conseil d'Etat, elle suivra son cours. Nous le verrons bien. Non, nous sommes dans la continuité de l'action menée. Il n'y a pas d'un côté un coup de barre à droite, un coup de barre à gauche : il y a une action cohérente du gouvernement.
MICHAËL DARMON
Rapidement, vous organisez également du côté ministériel la compétition de l'Euro de football 2016 qui aura donc lieu en France au printemps. C'est un grand événement de football mais également un grand enjeu de sécurité. Est-ce que les supporters vont pouvoir se réunir librement, en toute sécurité, dans les villes, dans les lieux des matchs ?
PATRICK KANNER
C'est notre préoccupation principale. Ce sera un grand événement sportif, un grand événement populaire, mais il faut qu'il se déroule dans la sécurité. Je rappelle que nous allons accueillir deux millions et demi de personnes dans les stades, entre sept et huit millions de personnes dans ce qu'on appelle les fan zones, c'est-à-dire autour des grands écrans géants. A partir de là, nous devons nous sécuriser.
MICHAËL DARMON
Ce sera autorisé ?
PATRICK KANNER
Ce sera autorisé et les villes, les dix villes hôtes, vont l'organiser. Il y a aussi des villes qui souhaitent le faire quand elles ne reçoivent pas la compétition. Dans ce cadre-là, nous allons créer des milliers de postes d'agents de sécurité dans le secteur privé. D'ailleurs, j'en profite pour vous dire que sur les cinq cent mille formations portées par Myriam EL KHOMRI, de formations professionnelles dans le cadre du Pacte d'urgence pour l'emploi, près de dix mille formations seront consacrées aux agents de sécurité parce qu'on en a besoin.
MICHAËL DARMON
C'est à pourvoir. Des postes à pourvoir. C'est ce que vous nous dites ce matin, vous l'annoncez et donc c'est un appel à projet.
PATRICK KANNER
C'est un appel à projet et c'est très important de dire qu'en lien avec Pôle emploi, nous allons former des citoyens qui vont pouvoir ainsi trouver de l'emploi au travers, et bien sûr après, parce que malheureusement la question de sécurité sera encore largement devant nous.
MICHAËL DARMON
Est-ce qu'il a été envisagé que ces fan zones soient interdites ou soient concentrées dans des lieux fermés ?
PATRICK KANNER
Une fan zone est un lieu automatiquement circonscrit. Si vous voulez, il y aura de la sécurité à l'entrée.
MICHAËL DARMON
C'est à ciel ouvert.
PATRICK KANNER
Quand je dis circonscrite, je veux dire que ce sera à ciel ouvert mais barrieré, avec des portiques d'entrée, des palpations pour vérifier qu'il n'y a pas de danger. C'est la fête mais la fête organisée dans la sécurité pour les supporters.
MICHAËL DARMON
Vous allez réussir à coacher le gouvernement ? Finalement, vous organisez cet événement sportif. Vous souhaitez que la France gagne l'Euro 2016 mais est-ce que la France peut gagner, votre équipe de France à vous peut gagner 2017 ?
PATRICK KANNER
Je pense que nous avons un très bon entraîneur, un très bon capitaine et je pense que l'équipe est soudée, donc on y va pour la gagner.
MICHAËL DARMON
Qu'est-ce qu'il faut vraiment changer ? Parce que finalement les questions posées par Martine AUBRY posent quand même des questions légitimes. Est-ce qu'il y a des choses à changer pour pouvoir gagner en 2017 ? Parce que les faits aussi sont là. Les chiffres ne sont pas bons, les sondages ne sont pas bons. En ce moment, François HOLLANDE est impopulaire. On est à quatorze mois de l'élection présidentielle.
PATRICK KANNER
Il faut des résultats, notamment des résultats sur le chômage. Vous verrez que le moment venu, quand il y aura plusieurs mois – ce que je souhaite, je ne suis pas devin – plusieurs mois de résultats satisfaisants en matière de chômage, les Français se souviendront de tout ce qui a été réalisé depuis quatre ans. La retraite à soixante ans pour les carrières longues, la prime d'activité que j'ai évoquée, le compte personnel d'activité dans la future loi El Khomri, le remboursement de l'IVG à 100 % pour les femmes, la refondation de l'école, le développement du service civique, la garantie jeune. Je ne vais pas vous faire une liste à la Prévert mais tout cela aujourd'hui semble oublié alors que ça a été porté par ce gouvernement de gauche.
MICHAËL DARMON
C'est un peu le décalage. On entend des gens comme vous au sein du gouvernement qui ont la motivation, défendent le bilan, et puis quand on entend le président de la République, il dit : « Peut-être que je ne serai pas candidat » et toutes les conditions pour un 21 avril sont réunies, en clair pour son élimination. Il n'y a pas là un décalage ? Vous ne vous dites pas : « Il faut se ressaisir » ?
PATRICK KANNER
Pensez-vous un seul instant que le président doit dire aujourd'hui s'il sera candidat.
MICHAËL DARMON
Est-ce que ça mobilise son camp quand on parle comme ça ?
PATRICK KANNER
Le président de la République est dans son rôle. Il préside aux destinées du pays. Il n'a pas aujourd'hui à être dans une logique de candidature. Laissons la droite s'écharper comme elle est en train de le faire en tant que telle.
MICHAËL DARMON
Là, ils doivent vous envoyer des cartes de remerciement à droite.
PATRICK KANNER
Espérons que la gauche ne dérapera pas en la matière comme ç'a été le cas hier. En tout cas, ce n'est pas en tirant contre son camp qu'on fait avancer les choses. Moi, je suis intimement convaincu que les Français mais aussi les militants socialistes ont besoin d'unité autour du président de la République et autour du gouvernement.
MICHAËL DARMON
Quand même, quand même, au-delà des éléments de langage que vous me servez, quand vous entendez le président de la République dire : « Toutes les conditions sont réunies pour être éliminé ou en tout cas pour que le 21 avril existe à nouveau », après presque cinq ans au pouvoir, c'est effrayant, non ?
PATRICK KANNER
La situation n'a jamais été aussi difficile dans ce pays, on le sait bien, y compris avec les attentats que nous avons subis en 2015. Aujourd'hui, nous sommes sur un chemin qui est un chemin pour rassurer les Français, pour développer l'emploi dans notre pays, pour développer toutes les politiques en matière justement de développement durable, d'écologie. Je crois que ces trois priorités qui ont été affichées par le président méritent d'être confortées mais il est vrai que les Français nous jugeront sur le bilan définitif. Il nous reste quatorze, quinze mois, c'est court – je vous le concède – mais en tout cas, vous avez devant vous un membre du gouvernement qui est déterminé à aller jusqu'au bout du mandat que les Français lui ont confié au travers du président de la République et du Premier ministre.
MICHAËL DARMON
Patrick KANNER, merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 février 2016