Interview de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports à RTL le 14 mars 2016, sur la réforme du code du travail, notamment l'emploi des jeunes.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral


YVES CALVI
« 6 minutes pour trancher ». Si notre jeunesse française est une génération sacrifiée, vous le savez, c'est un slogan qu'on a entendu notamment dans les manifestations ces derniers jours, et nous avons deux invités pour en débattre ce matin : Patrick KANNER, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, et Alexandre LEROY, qui est président du syndicat étudiant la FAGE. Merci à tous les deux d'être présents. Alexandre LEROY, ma première question sera pour vous.
(…)
YVES CALVI
Alors, vous avez en face de vous le ministre de la Jeunesse, vous êtes-vous déjà vus et qu'aimeriez-vous, très simplement, lui dire aujourd'hui ?
ALEXANDRE LEROY
Alors oui, on s'est déjà vu, parce que moi, mon travail, en tant que président de la FAGE, c'est justement d'aller voir le ministre et de l'ennuyer assez régulièrement, avec nos demandes. Ce que j'aimerais lui dire, c'est…
PATRICK KANNER
Vous ne m'ennuyez jamais.
YVES CALVI
Ça commence bien, là.
ALEXANDRE LEROY
Je suis très content de l'apprendre. Non mais, typiquement, ça fait des années qu'on réclame des dispositifs assez simples, pour faciliter le dialogue, notamment des instances et des procédures, des instances comme un Conseil d'orientation des politiques jeunesse. Aujourd'hui il n'y a pas énormément d'endroits où on arrive à mettre ensemble les pouvoirs publics et les jeunes pour discuter de ce qu'on pourrait faire, et puis des mesures, on voit que dans certains pays il existe des clauses d'impact jeunesse, enfin, c'est quelque chose de très simple, c'est-à-dire qu'à chaque fois qu'on fait un projet de loi, on crée une étude d'impact qui va servir à se demander comment ça va impacter les jeunes, comment ce projet de loi peut être utile pour répondre aux défis et aux enjeux pour la jeunesse.
YVES CALVI
Patrick KANNER, ce que je comprends de la première intervention d'Alexandre LEROY, c'est qu'en fait il voudrait qu'il y ait un dialogue permanent, notamment quand il a des politiques qui visent la jeunesse française, avec nos responsables gouvernementaux.
PATRICK KANNER
Oui, et il a raison. Il a raison. Je veux dire, en tant que ministre de la Jeunesse, je peux vous dire que j'ai des rencontres extrêmement régulières avec l'ensemble des organisations de jeunesse, qu'elles soient syndicales, politiques ou organisations associatives, tout simplement. J'ai un projet de loi qui en préparation, projet de loi égalité et citoyenneté, et il est co-construit, je parle sous votre témoignage, Alexandre, et je vous en remercie, parce qu'on doit tenir compte, moi qui suis un fervent défenseur de la notion des démocraties participatives, ayant créé des rencontres territoriales l'année dernière, de la jeunesse, je sais qu'on est plus fort quand on co-construit, et donc aujourd'hui, même si nous le savons, sur la loi travail il a pu y avoir des incompréhensions, des malentendus, on est en train de reprendre la main, pour que ce dialogue soit le plus constructif possible.
YVES CALVI
Alors, des incompréhensions, c'est le moins que l'on puisse dire, mais Patrick KANNER, la jeunesse c'était quand même la priorité de François HOLLANDE, elle était au coeur de son projet. Est-ce que vous avez le sentiment d'avoir échoué ? C'est en tout cas une partie de ce que la jeunesse française vous crie en ce moment dans les rues.
PATRICK KANNER
Le sentiment que j'ai, c'est que peut-être nous n'avons pas assez communiqué, et de manière quasiment personnalisée en direction des jeunes. Mais dire que…
YVES CALVI
C'est une question de communication, ça n'est qu'une question de communication ?
PATRICK KANNER
Je vais vous dire pourquoi, je vais vous dire pourquoi. Parce que jamais on n'a fait autant pour la jeunesse de ce pays. Jamais, jamais. Tout d'abord, le chômage diminue, je crois qu'il faut le rappeler, et on va atteindre très rapidement le niveau de 2012, et je pense qu'à la fin du quinquennat, il y aura moins de jeunes au chômage qu'il n'y en avait en 2012, premièrement. Deuxièmement, nous avons mis en place un dispositif…
YVES CALVI
Pardonnez-moi, mais on peut se satisfaire de ça, de dire, il y avait moins de jeunes au chômage…
PATRICK KANNER
Non, je ne me satisfais pas de cela.
YVES CALVI
…J'ai le projet qu'on ait moins de jeunes au chômage à la fin du quinquennat.
PATRICK KANNER
Je préfère qu'on en ait moins, qu'il y en ait plus.
YVES CALVI
Il y en a 25 %, c'est monstrueux.
PATRICK KANNER
25 % de jeunes qui ne sont pas en situation scolaire ou universitaire, je crois qu'i faut le dire, et quand vous ramenez ça au nombre de jeunes actifs, on est à moins de 10 %, donc il y a moins de chômage chez les jeunes que chez les actifs, globalement. A partir de là, qu'est-ce qu'on a fait ? Je voudrais vous le dire quand même. Je prends un dernier exemple, parce que je sais qu'on n'a pas beaucoup le temps, mais la prime d'activité, qui a été ouverte aux jeunes cette prime d'activité c'est du pouvoir d'achat en plus en direction des jeunes. Je me suis battu pour qu'elle puisse être ouverte aux jeunes de moins de 25 ans, même s'il y a, comme le dit souvent Alexandre, des angles morts en la matière. Mais 225 000 jeunes qui ont la prime d'activité, un million potentiellement, je peux vous dire que ceux qui travaillent aujourd'hui et qui sont modestes, et qui sont parfois en CDD, ont cela en plus dans leur pouvoir d'achat.
(...)
RAPHAEL, AUDITEUR
On nous promet une flexibilité, voilà, il faut mettre des guillemets énormes, mais qu'est-ce que ça veut dire la flexibilité ? Il va falloir le définir une bonne fois pour toutes !
YVES CALVI
Le gouvernement nous explique, cher Raphael, que c'est vous aider à accéder plus aisément à un travail qui visiblement inquiète aussi une partie de la jeunesse française. Patrick KANNER, vous pouvez les rassurer, vous êtes en moyen de les rassurer ?
PATRICK KANNER
Aujourd'hui, 90 % des jeunes qui rentrent dans le monde du travail, entrent en CDD ou en intérim. Eh bien voilà, je crois que ça c'est inacceptable, il faut que le Code du travail soit au service de l'emploi. Après, on peut discuter de la manière pour que ce soit le cas, mais moi je suis favorable, et là je rejoins mon interlocuteur, à la généralisation des dispositifs qui fonctionnent bien, que nous avons mis en place, et je pense en particulier à la garantie jeunes, pour les jeunes les plus en difficultés.
(…)
ALEXANDRE LEROY
Il y a des choses pour la jeunesse qui ont été faites sous ce quinquennat, moi je me rappelle de ce qu'a dit François HOLLANDE à son élection, « Je veux être jugé sur une chose : est-ce que les jeunes vivront mieux en 2017 qu'en 2012 ? », là je pense qu'avec l'extension, la généralisation, l'universalisation de la garantie jeunes, la balle est dans le camp du Président de la République.
PATRICK KANNER
Elle le sera et on pourra en témoigner.
YVES CALVI
En tout cas, aujourd'hui, en 2016, apparemment, elle ne se perçoit pas comme allant mieux. Alexandre LEROY, vous serez donc dans le bureau du Premier ministre à 14h30, vous venez de nous le rappeler, aux côtés de l'UNEF.
PATRICK KANNER
Et dans le mien à 12h15.
YVES CALVI
Eh bien parfait, dès 12h15 chez Patrick KANNER, aux côté de l'UNEF, l'autre syndicat étudiant, que nous avions aussi sollicité pour débattre, mais qui a refusé de débattre avec vous, Monsieur le Ministre.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 mars 2016