Interview de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé à BFM-TV le 22 mars 2016, sur l'épidémie du virus Zika et les mouvements sociaux des infirmières et des professions paramédicales.

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Média : BFM TV

Texte intégral


JEAN-JACQUES BOURDIN
Marisol TOURAINE est avec nous, bonjour.
MARISOL TOURAINE
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Marisol TOURAINE, nous sommes à la radio. Sur BFMTV, les images viennent de Bruxelles : double explosion à l'aéroport Zaventem. Pour l'instant, nous n'avons pas de précisions suppléments. Il y aurait des blessés mais nous parlerons au conditionnel. Il est évident que nous donnerons ces précisions tout au long de votre interview.
MARISOL TOURAINE
Bien sûr. Et nous sommes tous très attentifs à la situation dans cet aéroport. Nous vivons une période où chaque accident oblige à redoubler de vigilance. Nous voyons que nous ne sommes pas sortis de la période difficile que nous avons connue en 2015. Le terrorisme est là et, d'ailleurs, le président de la République l'a rappelé lorsqu'il y a eu l'arrestation il y a quelques jours d'ABDESLAM. C'est une victoire qui a été remportée mais d'autres batailles sont à mener.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une double explosion s'est donc produite ce matin dans le hall des départs de l'aéroport de Bruxelles sans que l'origine de l'incident ait été déterminée pour l'instant. Plusieurs personnes auraient été blessées dans cet incident. L'aéroport a été fermé et les liaisons ferroviaires à destination de cet aéroport de Zaventem ont été suspendues. Encore une fois, dès que nous avons de nouvelles informations, nous vous les donnons. Marisol TOURAINE, j'ai une première question concernant le virus Zika. Est-ce que vous confirmez un premier cas de microcéphalie lié à Zika en France ?
MARISOL TOURAINE
Nous avons une suspicion très sérieuse. Je vous rappelle que le virus Zika, qui aujourd'hui a touché plus de quinze mille personnes aux Antilles et en Guyane, représente un risque particulier pour les femmes enceintes. Pas uniquement pour elles, mais principalement pour les femmes enceintes. Il y a environ cent trente femmes enceintes qui, dans ces départements, ont été identifiées comme ayant été touchées par le virus du Zika. Pour l'une d'entre elles, nous avons des éléments laissant penser que son bébé est atteint de microcéphalie et que cette microcéphalie est directement liée à son infection par le virus Zika. Je ne veux pas me prononcer de manière définitive car nous sommes en attente des résultats des derniers examens, mais disons que tous les éléments dont nous disposons vont dans ce sens-là aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Où ? A quel endroit ?
MARISOL TOURAINE
En Martinique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
En Martinique. Je rappelle que la microcéphalie est une anomalie de la croissance de la boîte crânienne avec un diamètre de la tête inférieur à la normale.
MARISOL TOURAINE
C'est cela, oui. Et nous l'avons constaté de façon très répétée en Polynésie lorsqu'il y a eu une épidémie de Zika. On l'a constaté au Brésil et nous avons désormais semble-t-il un cas en Martinique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Savez-vous comment le virus a été transmis ?
MARISOL TOURAINE
Le virus a été transmis a priori par le moustique, c'est-à-dire de la manière la plus classique qui soit. C'est face aux moustiques qu'il faut d'abord se protéger, même si d'autres modes de contamination sont probables. Mais le mode de contamination principal, c'est le moustique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Autre actualité du jour, journée de grève nationale des infirmières et infirmiers anesthésistes. Est-ce que vous allez accorder aux infirmières et infirmiers anesthésistes le statut de profession intermédiaire ?
MARISOL TOURAINE
Les infirmiers anesthésistes, ce sont des collaborateurs tout à fait nécessaires des médecines anesthésistes réanimateurs dans les blocs opératoires. Ils souhaitent que soit revue la définition de leur exercice professionnel. Des discussions ont été engagées depuis plusieurs mois, depuis le mois d'octobre, au ministère de la Santé. Les représentants de ces anesthésistes seront reçus cet après-midi par mon cabinet, les représentants des infirmiers anesthésistes. Nous allons poursuivre le travail et j'espère qu'à l'été prochain, nous serons en mesure de voir les éléments à partir desquels nous pourrons faire évoluer la profession.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Attendez ! Vous avez les éléments cet après-midi. Vous les connaissez. Ça fait des semaines et des semaines qu'ils manifestent, qu'ils sont en grève, qu'ils écrivent.
MARISOL TOURAINE
Non. Ça fait des semaines qu'ils demandent…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sept ans de formation. Sept ans de formation, on est bien d'accord.
MARISOL TOURAINE
Vous savez, nous avons eu des débats avec d'autres professionnels.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Etudes au niveau Mastère mais le salaire n'est pas au niveau Mastère. Est-ce normal ?
MARISOL TOURAINE
Il y a des discussions de natures différentes. Il y a des discussions sur l'organisation du métier, la manière dont s'organisent les relations entre les médecins et les infirmiers anesthésistes et il y a des discussions sur les salaires. C'est de tout cela dont nous discutons mais les discussions doivent aussi avoir lieu avec les médecins puisque, par définition, les infirmiers anesthésistes et les médecins anesthésistes réanimateurs travaillent ensemble. Le travail se poursuit et un travail est prévu jusqu'à l'été. Je souhaite que ce travail se poursuive.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous souhaitez qu'on leur accorde le statut de profession intermédiaire ?
MARISOL TOURAINE
Le travail se poursuit. Des discussions…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous, est-ce que vous le souhaitez ?
MARISOL TOURAINE
Ecoutez, des négociations sont engagées, Jean-Jacques BOURDIN. Moi, je ne vais pas aujourd'hui, avant même qu'ils ne soient reçus, avant même que les discussions ne soient terminées, clore le débat. Des discussions sont engagées et je suis très attentive à leur situation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les infirmières et infirmiers libéraux maintenant. Je lis simplement deux messages que j'ai reçus. Le premier est de Jessica : « J'ai ouvert mon cabinet il y a trois ans dans la Manche, en pleine campagne, et je vois les conditions de travail se dégrader au fil des années pour des économies à faire. La population vieillie et de moins en moins peuvent se déplacer au centre de soins. Les soins infirmiers à domicile sont essentiels dans la conjoncture actuelle où on manque de médecins. » « Trouvez-vous normal qu'une infirmière libérale, c'est ce que nous dit Christine, soit indemnisée 2,50 euros de déplacement alors qu'un médecin touche dix euros ? Trouvez-vous normal que pour une toilette d'une heure, nous gagnons 15,90 euros bruts moins les charges ? Cela équivaut à 7,95 euros nets, le taux le plus bas parmi toutes les professions. »
MARISOL TOURAINE
Les infirmières et d'autres professionnels d'ailleurs font un travail absolument indispensable pour maintenir à domicile des malades, des personnes âgées. C'est la raison pour laquelle d'ailleurs des ressources complémentaires ont été dégagées pour faire en sorte que nous puissions prendre en charge ces soins à domicile, parce que si les personnes ne sont pas prises en charge à domicile, elles le sont à l'hôpital. Et on sait que ça coûte très cher, et que ça n'est pas nécessairement bon ni pour le moral ni d'ailleurs pour la santé. Quand vous regardez l'évolution des dépenses de l'assurance maladie, Jean-Jacques BOURDIN, les dépenses qui ont le plus augmenté ce sont celles des professions paramédicales à domicile. Cela prouve bien qu'il y a un engagement de la Sécurité sociale pour ces professionnels parce qu'il y a de plus en plus de déplacements.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors pourquoi est-ce qu'il y a tant de colère ? Pourquoi est-ce qu'il y a tant d'incompréhension ?
MARISOL TOURAINE
Mais il y a des demandes que j'entends. Il y a la volonté d'être parfaitement reconnu dans son métier et j'entends ces demandes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
2,50 euros le déplacement contre dix euros pour un médecin, est-ce que c'est normal ?
MARISOL TOURAINE
Régulièrement, il y a des discussions avec l'assurance maladie sur le montant des tarifs et des discussions s'engagent régulièrement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez revaloriser ? Est-ce que vous souhaitez que ce soit revalorisé ?
MARISOL TOURAINE
Il n'y a pas de discussion. En ce moment, nous sommes en train de négocier avec les médecins. La Sécurité sociale est en train de négocier avec les médecins et, vous le savez, c'est la Sécurité sociale qui négocie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On en est où d'ailleurs ?
MARISOL TOURAINE
La négociation vient de commencer et l'aboutissement est attendu à la fin de l'été. Nous avons plusieurs mois de négociation devant nous et nous sommes attentifs, la Sécurité sociale, l'assurance maladie, nous sommes tous attentifs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc rien de nouveau aujourd'hui pour les infirmières et infirmiers libéraux.
MARISOL TOURAINE
Aujourd'hui il n'y a pas de discussion qui est engagée. Lorsque viendra la négociation avec les infirmières, nous verrons ce qui est possible de faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le prix des médicaments. Ce matin j'avais un professeur d'hématologie, l'un des signataires de la tribune publiée dans la presse récemment.
MARISOL TOURAINE
Oui, Jean-Paul VERNANT.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, Jean-Paul VERNANT, sur le prix des médicaments. Ce qu'il nous a dit, c'est que c'est vrai qu'aujourd'hui les traitements sont tellement lourds, tellement lourds qu'ils sont rendus parfois inaccessibles pour certains. Heureusement, il y a encore la Sécurité sociale en France donc la solidarité, mais ça ne peut pas durer. Ça ne peut pas durer, Marisol TOURAINE.
MARISOL TOURAINE
Il faut dire, et vous le faites d'ailleurs, qu'en France personne ne se voit privé de traitement pour des raisons financières.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour l'instant.
MARISOL TOURAINE
Pour le moment. C'est en tout cas la volonté d'inscrire cela dans la durée. En France, on ne dit pas non à un malade pour des raisons financières. Nous avons aujourd'hui le fait qu'il y a une innovation comme il n'y en a pas eu depuis des années dans le domaine des médicaments. De nouveaux médicaments arrivent qui peuvent soigner mieux, parfois guérir – c'est le cas du médicament contre l'hépatite C – mais ils arrivent à des prix qui sont des prix insoutenables – je le dis, insoutenables – dans la durée.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Insoutenables ou scandaleux ?
MARISOL TOURAINE
Ce que je dis à ce micro, je l'ai dit aux industriels notamment lors du forum de Davos. Je leur ai dit : « Nous devons discuter de la manière de définir les prix d'une façon qui soit supportable pour la Sécurité sociale française ou pour les autres systèmes dans les autres pays, et qui évidemment garantissent le retour sur investissement pour les industriels. » C'est normal que ces industriels souhaitent avoir un retour sur investissement. Aujourd'hui, ils pratiquent des prix où ils annoncent des prix qui ne peuvent pas être tenus par les systèmes d'assurance maladie. Donc le président de la République devrait annoncer demain qu'il va porter ce sujet au niveau des chefs d'Etat du G7. C'est une initiative forte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et que va-t-il demander ?
MARISOL TOURAINE
Qu'il y ait une coopération entre les pays. Aujourd'hui, chaque pays négocie dans son couloir si j'ose dire, et nous ne pouvons pas échanger des informations les uns avec les autres.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc négociations globales sur les prix des médicaments.
MARISOL TOURAINE
Pas forcément une négociation globale mais nous devons déterminer un processus, voir comment ensemble être plus forts pour faire pression sur les prix des médicaments. Lorsqu'est arrivé le médicament contre l'hépatite C, j'avais saisi mes homologues européens. Je leur avais dit : « Nous ne pouvons pas rester tous seuls, chaque pays isolé. » Des mesures peuvent être prises au niveau national et j'en ai pris, Jean-Jacques BOURDIN. Dans la loi, j'ai inscrit un mécanisme de régulation qui veut dire que plus on augmente la dépense en médicaments, plus la marge qui est donnée à l'industriel diminue. J'ai indiqué que nous n'allions pas consacrer davantage d'argent qu'un certain montant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aujourd'hui les laboratoires pharmaceutiques font plus de bénéfices que d'investissements dans la recherche. Est-ce normal ? Est-ce correct ?
MARISOL TOURAINE
Là, nous nous retrouvons. Il faut que les industriels comprennent qu'ils ne pourront pas tenir. Il n'est même pas dans leur intérêt de maintenir des prix ou d'annoncer des prix qui seraient des prix inaccessibles. Je crois que nous devons trouver un terrain d'entente, un terrain de discussion. En tout cas au niveau national, je fais tout ce qui est possible de faire. La France a négocié de manière extrêmement dure et âpre le prix du médicament contre l'hépatite C. Ce médicament reste trop cher en France mais il est moins cher en France que dans d'autres pays.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les vaccins maintenant. Où est-ce qu'on en est avec le DTPolio ? Est-ce qu'on va pouvoir le retrouver dans les pharmacies ? Est-ce qu'il va être à nouveau utilisable à la disposition des parents ?
MARISOL TOURAINE
Il y a eu des périodes de pénurie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'elle est terminée cette période de pénurie ?
MARISOL TOURAINE
Nous sommes rentrés dans une période où les vaccins sont disponibles et je suis extrêmement vigilante. J'ai été préoccupée au point que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Attendez ! Quels vaccins disponibles ?
MARISOL TOURAINE
L'ensemble des vaccins.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même le DTPolio ?
MARISOL TOURAINE
Le DTPolio est disponible dans certains lieux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour l'instant il ne l'est pas, d'après tous les messages que j'ai reçus.
MARISOL TOURAINE
Nous faisons en sorte que les stocks soient évalués. J'ai convoqué l'ensemble des industriels producteurs de vaccins et je leur ai dit qu'il n'était pas acceptable que les vaccins ne soient pas disponibles dans les pharmacies lorsque les parents le souhaitent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils le seront quand ?
MARISOL TOURAINE
Ils sont disponibles régulièrement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non.
MARISOL TOURAINE
Il faut parfois attendre quelques jours pour en disposer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Plus que quelques jours : plusieurs semaines même.
MARISOL TOURAINE
Normalement c'est quelques jours, mais nous sommes attentifs et je suis la situation des stocks. Il y a eu des tensions d'approvisionnement mais les industriels remettent l'état de leurs stocks désormais au ministère et doivent présenter d'ici l'été un plan de mobilisation pour garantir l'approvisionnement régulier des pharmacies françaises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc avant l'été, les pharmacies françaises seront approvisionnées en DTPolio. On est bien d'accord ?
MARISOL TOURAINE
Normalement elles le sont actuellement avec parfois quelques difficultés à quelques jours près, mais nous devons avoir une visibilité à plusieurs semaines et à plusieurs mois, et c'est cela que j'ai demandé aux industriels : de me proposer, de me présenter un plan, si vous voulez, de perspective pour l'avenir des vaccins.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Autre sujet…
MARISOL TOURAINE
Le tabac.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, le tabac. Le paquet neutre sera chez les buralistes le 20 mai. On est bien d'accord ?
MARISOL TOURAINE
A partir du 20 mai.
JEAN-JACQUES BOURDIN
A partir du 20 mai.
MARISOL TOURAINE
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Jusqu'à quand les buralistes pourront écouler leurs paquets non-neutres ?
MARISOL TOURAINE
Jusqu'à la fin de l'année. Quelle est la situation ? Aujourd'hui, j'ai décidé – enfin, il y a quelques mois j'ai décidé que nous allions introduire le paquet neutre en France. Pourquoi est-ce qu'on a introduit le paquet neutre ? Parce que nous nous apercevons que dans notre pays, les jeunes fument de plus en plus. Et les jeunes sont particulièrement sensibles au marketing des paquets de cigarettes. Ils sont sensibles aux couleurs, à la forme des paquets. Le paquet neutre, l'objectif c'est précisément de casser l'attrait que représente la pub en quelque sorte sur le paquet de cigarettes. Les paquets neutres, à partir du 20 mai prochain, les fabricants de tabac seront obligés de les produire pour la France. Donc les fabricants, à partir du 20 mai prochain, ne pourront plus fabriquer des paquets comme on en a aujourd'hui. Ils disposeront de six mois pour écouler leurs stocks et les distributeurs aussi de six mois, puis les bureaux de tabac auront quelques semaines supplémentaires pour écouler leurs stocks. Tout cela nous amène au 31 décembre de cette année, ce qui veut dire qu'entre le 20 mai et le 31 décembre 2016, il y aura progressivement une coexistence des paquets d'aujourd'hui et des paquets neutres dans les bureaux de tabac. A partir du 1er janvier 2017, il n'y aura plus que des paquets neutres et cela représente une avancée. Mais vous savez, Jean-Jacques BOURDIN, je voudrais dire aussi que moi je me réjouis de voir tout le débat qui a entouré le paquet neutre. Parce que cela prouve que la question de la lutte contre le tabac…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais moi, je ne me réjouis pas. Je ne comprends pas pourquoi le paquet de cigarettes n'est pas encore à dix euros. A cause de Bercy ? A cause de Bercy, Marisol TOURAINE ?
MARISOL TOURAINE
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment non ?
MARISOL TOURAINE
Il y a eu un plan global et j'ai été extrêmement claire lorsque j'ai présenté ce plan. Attendez Jean-Jacques BOURDIN, laissez-moi m'exprimer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Allez-y, allez-y.
MARISOL TOURAINE
J'ai dit : « Nous mettons en place le paquet neutre et nous maintenons un prix du tabac qui, après une augmentation significative, plus un euro, restera stable à quelques dizaines de centimes près ».
JEAN-JACQUES BOURDIN
Attendez ! Vous allez pouvoir finir mais je vous pose une question complémentaire. Est-ce que le prix du tabac va augmenter avant la fin du quinquennat ? Oui ou non ?
MARISOL TOURAINE
Je le souhaite, mais Jean-Jacques BOURDIN...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le souhaitez, d'accord, mais Bercy ne le souhaite pas.
MARISOL TOURAINE
Je le souhaite mais ce que je veux dire, c'est que je trouve formidable que le débat sur le prix du tabac arrive dans l'espace public. Parce qu'il y a un an, il y a deux ans, on me disait lorsque je parlais d'augmenter le prix du tabac ou lorsque je l'ai fait, on me disait : « Mais c'est scandaleux ! Vous favorisez le commerce illicite. Vous favorisez la contrebande. » Et depuis que j'ai annoncé que nous mettions en place le paquet neutre, alors on m'explique : « Le paquet neutre, ce n'est pas ce qu'il fallait faire. Ce qu'il fallait faire, c'est augmenter le prix du tabac ». Donc je trouve formidable que le débat se soit installé dans notre pays et je le prends pour le gage d'une volonté d'avancer. Il y a le paquet neutre et pour ma part, je l'ai déjà dit…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il y aura une augmentation avant la fin du quinquennat ?
MARISOL TOURAINE
Je le souhaite. Nous allons discuter. Nous verrons lorsque les textes financiers arriveront. Nous allons discuter. Je ne suis évidemment pas seule…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il suffit de le décider. Il suffit que le gouvernement le décide. Pas vous seule.
MARISOL TOURAINE
Il suffit de le décider, pas moi seule. Et donc moi je porterai - j'ai déjà eu l'occasion de le dire -, je porterai la nécessité d'une augmentation du prix du tabac.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous poserons la question à Michel SAPIN alors.
MARISOL TOURAINE
Mais en tout cas, aujourd'hui nous mettons en place le paquet neutre et ce paquet neutre représente une avancée extrêmement importante et un changement très important. La France sera le premier pays européen dans lequel il y aura les paquets neutres, suivie de très près par la Grande-Bretagne et l'Irlande quelques semaines après.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai deux questions. L'autisme, parce qu'on m'a demandé. SOS Autisme a lancé hier une grande campagne de sensibilisation : « Je suis autiste et alors ». Dix mesures demandées, notamment la gratuité des soins et de la prise en charge, la généralisation de l'accueil des enfants autistes dans les écoles, la création d'une filière spécialisée pour former des auxiliaires de vie scolaire à la prise en charge des enfants autistes et puis la création de filières universitaires pour former des psychologues. Qu'est-ce que vous allez annoncer ? Qu'est-ce que vous leur dites ?
MARISOL TOURAINE
Un gros effort a été engagé en direction des enfants autistes, même s'il n'est pas suffisant, puisque nous ne sommes pas encore à une prise en charge complète de 100 % des enfants autistes. Mais ce gouvernement a fait des efforts comme il n'y en avait pas eu précédemment, notamment pour mettre en place dans les écoles des auxiliaires de vie scolaire et des personnes qui accompagnent…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui ne sont pas assez nombreux, mais enfin, bon…
MARISOL TOURAINE
Qui ne sont pas assez nombreux, mais qui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et pas assez bien formés…
MARISOL TOURAINE
Qui sont formés et qui sont désormais plus de 800.000 dans les écoles. Nous avons mis en place des classes spécialisées pour les enfants autistes, avec un faible nombre d'enfants accueillis, avec des enseignants qui ont été formés. Honnêtement, ce gouvernement, notamment à l'Education nationale, a réalisé un engagement extrêmement fort…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais quand j'entends les associations…
MARISOL TOURAINE
Vous savez, oui, mais les associations, je les entends, et elles sont dans le rôle…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais garantie des soins et de la prise en charge, vous dites : non, vous dites : non !
MARISOL TOURAINE
Si, mais bien sûr qu'il faut garantir les soins. Quel est le sujet, parce que dans notre pays, les soins sont pris en charge pour tout le monde…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, eh oui !
MARISOL TOURAINE
Notamment à 100 %. Le sujet, quel est-il ? Il est difficile, il y a eu une tradition de prise en charge par les psychiatres des enfants autistes. Désormais, il est considéré que cette prise en charge n'est pas celle qui convient, et la Haute Autorité de Santé a émis des recommandations il y a quelques années disant qu'il fallait d'autres prises en charge. Et donc comme il n'y avait pas les autres structures de prise en charge, mais qu'il y avait des structures psychiatriques, le passage, la transition d'une prise en charge par les psychiatres vers une prise en charge différente met un peu de temps, et c'est cela qui est en jeu, mais je veux dire ma volonté, ma détermination à faire en sorte que la meilleure prise en charge puisse être accordée…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une aide fiscale pour les parents, une aide fiscale pour les parents d'enfants autistes ?
MARISOL TOURAINE
Ecoutez, les prises en charge de santé sont réalisées, c'est dans ce domaine social que nous essayons de trouver les meilleures réponses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, merci. Un mot quand même sur la réforme du code du travail, juste un mot, colère, là encore, il y a beaucoup de colère, colère là encore des médecins, des médecins du travail, eh bien, évidemment, puisque le texte du gouvernement prévoit de supprimer la visite systématique d'aptitude à l'embauche.
MARISOL TOURAINE
Vous savez, aujourd'hui, elle n'a pas toujours lieu, des discussions ont eu lieu avec les professionnels. L'enjeu, c'est de se donner les moyens de véritablement identifier ceux qui ont des difficultés, ceux qui souffrent dans le cadre de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous gardez la suppression de cette visite ?
MARISOL TOURAINE
Il s'agit d'avoir une visite ciblée, adaptée aux personnes qui sont malades ou en situation de souffrance, c'est de la responsabilité – je tiens à le dire – du ministère du Travail, la médecine du travail dépend du ministère du Travail et pas du ministère de la Santé. Et donc la préoccupation qui est la mienne, comme ministre de la Santé, c'est que les médecins du travail aient la capacité de détecter, d'identifier à la fois les personnes qui sont malades, qui sont en souffrance, qui sont en difficulté dans leur environnement professionnel.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, merci Marisol TOURAINE, c'était un peu bousculé ce matin parce que l'actualité nous a bousculés. A Bruxelles, on n'a pas de bilan pour l'instant, il y aurait un mort et des blessés, explosion à l'aéroport de Zaventem, qui est fermé.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 23 mars 2016