Conférence de presse de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, sur le nécessaire renforcement de l'architecture financière internationale, Paris le 31 mars 2016.

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Circonstance : Séminaire sur les questions financières internationales "De Nankin à Paris", Paris le 31 mars 2016

Texte intégral

Bonjour à tous,
Merci tout d'abord de vous être déplacés pour la conférence de presse qui conclut ce séminaire sur l'architecture financière internationale.
Permettez-moi de revenir tout d'abord rapidement sur les raisons qui m'ont poussé à organiser ce séminaire ici même à Bercy. La présidence chinoise du G20 a tout d'abord décidé de remettre la question de l'architecture financière internationale à l'agenda de travail du G20 qui retrouve ainsi l'un de ses sujets coeur.
Je m'en félicite : il est clair que nous avons progressé depuis 2008 dans la connaissance des flux de capitaux et dans les instruments et la doctrine pour faire face à des mouvements financiers brutaux. Mais le travail qui nous reste pour améliorer le fonctionnement du système financier international ne doit pas être sous-estimé. Nous devons par ailleurs continuer à réfléchir à ce que signifie le mouvement vers un monde monétaire plus multipolaire, et à ce que cela implique comme action pour les décideurs économiques que nous sommes.
Ce qui est en jeu, c'est la capacité d'assurer un financement porteur de croissance, et d'éviter les excès de flux qui deviennent par leur excès de volatilité déstabilisants.
C'est dans ce contexte que nous avons décidé, en lien avec la présidence chinoise, qu'il était nécessaire d'échanger dans un format restreint et confidentiel, en particulier hors du cadre formel du G20, afin que les participants puissent avoir des discussions franches et directes. Ce format explique d'ailleurs qu'il n'y a ni communiqué ni décision à attendre de ce séminaire.
Cette réflexion collective doit en revanche alimenter les travaux du G20 des mois à venir avec en point de mire le G20 des chefs d'Etats et de Gouvernement du mois de septembre. Je rendrai d'ailleurs compte de nos travaux au G20 lors des assemblées de printemps du FMI mi-avril.
Voilà donc ce qui a motivé l'organisation de ce séminaire. Et on peut dire aujourd'hui qu'il a été un véritable succès : nous avons pu compter sur une représentation de 37 pays avec la présence de 24 ministres des Finances et Gouverneurs de banque centrale, dont le Gouverneur ZHOU, ici présent, une vingtaine d'académiques ainsi que Valdis DOMBROVSKIS, Vice-Président de la Commission européenne, Angel GURRIA, secrétaire général de l'OCDE, et bien entendu Christine LAGARDE, la Directrice Générale du FMI, ici à nos côté. La richesse des participants nous a permis d'avoir des discussions franches et candides entre des participants qui, pour un grand nombre d'entre eux, sont parmi les principaux preneurs de décisions sur les questions d'architecture financière internationale.
Dernier point, et pas le moins important, de quoi avons-nous discuté ?
Le séminaire a été organisé en trois temps. Après une première session plénière, qui a permis de cadrer les débats, nous avons eu ensuite trois sessions de travail parallèles sur les sujets :
- des flux de capitaux internationaux ;
- (des filets de sécurité financiers ;
- des évolutions au sein du système monétaire international avant de nous retrouver à nouveau en session plénière pour échanger tous ensemble.
Comme j'ai pu le dire dans mon propos introductif de ce matin, nous avons encore beaucoup de progrès à faire sur la connaissance des flux de capitaux internationaux. L'information est encore beaucoup trop parcellaire alors que le système financier international est en constante évolution : les produits dérivés et la finance non bancaire, le fameux "shadow banking system" occupent une place de plus en plus importante. Il est crucial de pouvoir les surveiller plus efficacement.
Nous avons également trop peu d'information concernant les flux de capitaux qui transitent par les places financières offshore. Nous devons résoudre ce problème qui, lui, n'est pas nouveau, il y a clairement un consensus sur ce point. Nous avons ensuite abordé la question de la gestion des flux de capitaux. Je pense que les discussions progressent sur ce sujet et tout le monde s'accorde sur le fait qu'il faut privilégier la libre circulation des capitaux, mais que ceci nécessite des institutions adaptées, qu'il est important sans doute de faire la distinction entre les différents types de capitaux, que les politiques macroéconomiques constituent la première des réponses, que les décisions macroprudentielles ont aussi leur rôle à jouer, et enfin que des mesures de contrôle de capitaux, peuvent être utiles en dernier ressort pour se prémunir contre une volatilité excessive.
La question des filets de sécurité financiers internationaux, c'est-à-dire des instruments à notre disposition pour prévenir et traiter les crises, est également une question essentielle de l'architecture financière internationale. Certains pays exportateurs de pétrole éprouvent aujourd'hui de grandes difficultés à faire face à la baisse des prix du pétrole, d'autant que cet effondrement et surtout son ampleur étaient largement non-anticipés. Les instruments d'assistance financière pour ces pays, et de manière plus générale, sont-ils adaptés, sont-ils bien utilisés ?
Les participants se sont également accordés sur le besoin de travailler l'articulation du FMI avec les autres strates des filets de sécurité financière mondiaux, soit les Accords Financiers Régionaux, les lignes de swap et les réserves.
Nous avons enfin discuté du système monétaire international.
Le système monétaire international deviendra lui aussi de plus en plus multi-monétaire. Quelles sont les implications pour la stabilité financière internationale, pour le marché des changes, quel doit être le rôle du DTS ? Il a été suggéré que ceci confère une responsabilité particulière des autorités monétaires des principales monnaies du monde, dont les politiques jouent un rôle sur la stabilité financière mondiale. Ce sont certes des questions importantes, et les participants s'accordent sur le fait que nous avançons inexorablement vers un monde multi-monétaire dans lequel les questions de coordination et de coopération seront cruciales.
Ce sont des sujets complexes et le format de ce séminaire était idéal pour avoir un échange en profondeur et bénéficier de l'apport du monde académique.
Je laisse maintenant au Gouverneur ZHOU, puis à Christine LAGARDE, le soin de vous présenter les enseignements qu'ils ont tirés de ce séminaire.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 4 avril 2016