Texte intégral
GUILLAUME DURAND
Je le disais tout à l'heure vous êtes chargée des Personnes âgées et de l'Autonomie dans ce gouvernement, est-ce que vous considérez que l'évacuation de la place de la République - on va prendre les choses dans l'ordre dans l'actualité ce matin est une bonne chose ?
PASCALE BOISTARD
Je crois que c'était demandé par la maire de Paris, par le maire de l'arrondissement, c'était demandé par d'autres aussi et je crois qu'à un moment donné il fallait faire place nette - et peut-être que ce soir ça reprendra mais en tous les cas c'était à un moment
GUILLAUME DURAND
Enfin ce peut-être est j'allais dire est peut-être de trop, parce qu'on est en plein état d'urgence et on laisse des gens s'installer pendant des semaines
PASCALE BOISTARD
Oui ! C'est vrai, c'est vrai c'est une vraie question
GUILLAUME DURAND
C'est complètement contradictoire ?
PASCALE BOISTARD
C'est vrai que c'est une vraie question, c'est une vraie question. Comment est- ce qu'on trouve un équilibre entre la liberté de pouvoir s'exprimer et c'est essentiellement une liberté d'expression qui organise sur la place même s'il y a eu des groupes
GUILLAUME DURAND
Ils font de la cuisine, ils font de la musique, enfin bon
PASCALE BOISTARD
Voilà. Mais après il y a comment on peut accepter aussi qu'à un moment donné un espace public telle que la place de la République soit en quelque sorte privatisé, en tout en cas n'appartient pas à tous les Parisiens et à toutes les parisiennes.
GUILLAUME DURAND
Je ne comprends pas ! C'est ils déposent donc la possibilité de refaire une manifestation ce soir, donc dès facto si la République est évacuée le nouvel endroit qui pourrait être désigné par les manifestants va être évacué aussi et ils ne vont pas se promener dans Paris de place de la République qui est en face de la Bastille
PASCALE BOISTARD
Ecoutez, ils ont apparemment déposé une autre demande pour pouvoir se regrouper, on attend la réponse.
GUILLAUME DURAND
Se promener ou plutôt aller vers le domicile de Manuel VALLS et être arrêté par les forces de l'ordre
PASCALE BOISTARD
Ça c'est d'une autre nature je dirais que ce que majoritairement
GUILLAUME DURAND
Oui, sauf que c'est très ambigu, parce qu'il y a des parents qui disent : « ce ne sont pas nos enfants » et, en même temps, on voit dans cette foule se fondre des gens qui sont qui sont différents ?
PASCALE BOISTARD
Ce sont des gens très différents, d'ailleurs il n'y a pas que des jeunes, d'ailleurs il y a aussi plus âgées
GUILLAUME DURAND
Je sais que vous en parlez en connaissance de cause puisque vous habitez le quartier ?
PASCALE BOISTARD
Oui, tout à fait. Mais vous savez ce quartier il a une habitude aussi de dialoguer, de parler, il y a beaucoup de cafés sur différents thèmes, des cafés philosophiques, des cafés politiques qui se tiennent dans ce quartier. Bon ! Là c'est un espace beaucoup plus grand et je dirais qui monopolise un petit peu la place et qui peut aussi contrevenir à des libertés autres que ceux par exemple qui vivent dans ce quartier et qui peuvent considérer qu'à un moment donné voilà tout le monde ne peut pas quelques personnes, un groupe de personnes ne peut pas privatiser un espace public. Mais je trouve intéressant cette démarche c'est que ça dénote un besoin de dialogue, un besoin de faire de la politique et un besoin aussi de se poser des questions pour l'avenir...
GUILLAUME DURAND
Oui, mais il y a des structures : il y les partis politiques
PASCALE BOISTARD
Mais il y a une demande.
GUILLAUME DURAND
Il y a des syndicats
PASCALE BOISTARD
Les partis politiques font partie de la vie démocrate comme la
GUILLAUME DURAND
Il y a des organisations comme TERRA NOVA
PASCALE BOISTARD
Oui. Enfin ça c'est très important, mais ce n'est pas vous savez bien que c'est entre spécialistes. Que les gens se saisissent de la politique moi je trouve ça bien, après tout ce qui s'est passé autour avec quelques groupes qui sont venus faire quelques violences et qui ont eu cette démarche assez violente
GUILLAUME DURAND
Ca va coûter 20 à 25 millions pour reconstituer la place de la République
PASCALE BOISTARD
Ah ! Non, mais moi je considère que chacun
GUILLAUME DURAND
Est-ce que vous condamnez ça ce matin ?
PASCALE BOISTARD
Moi je considère qu'on ne peut pas privatiser l'espace public comme ça et que la durée est trop longue si vous voulez. Qu'il y ait des rassemblements spontanés de temps en temps pour parler, se rencontrer, moi je trouve ça très bien - parce qu'on est dans une société démocratique et une société libre - où en plus
GUILLAUME DURAND
Mais on est en état d'urgence, c'est ça la contradiction, FILLON l'a dit.
PASCALE BOISTARD
Je sais bien ! Je sais bien.
GUILLAUME DURAND
FILLON a dit : « on ne peut pas demander aux Français d'être prudents dans les gares et en même temps laisser des gens
PASCALE BOISTARD
Eh bien c'est toute cette question qu'il y ait toujours de l'équilibre entre cette liberté et aussi d'être conscient quon est dans une période extrêmement dangereuse.
GUILLAUME DURAND
Evidemment c'est très compliqué pour vous de répondre à cette question, mais est-ce que vous croyez à la candidature de François HOLLANDE, parce que tout à l'heure on écoutait Bernard SANANES qui expliquait que si on reprend tous les sondages de la Vème République jamais un président n'a été dans une situation pareille en termes d'impopularité et il ne voit pas très bien donc le patron d'ELAB les conditions dans lesquelles cette candidature pourrait redémarrer ?
PASCALE BOISTARD
Je crois que cette décision lui revient :
GUILLAUME DURAND
Oui.
PASCALE BOISTARD
Elle lui revient cette décision, d'ailleurs on est dans une
GUILLAUME DURAND
Non mais lui il va dire oui évidemment, il dit oui, il le laisse entendre ?
PASCALE BOISTARD
Alors il sera candidat, mais c'est à lui de déterminer s'il souhaite être candidat et le moment dans lequel il s'inscrira dans cette candidature. Pour l'instant, il est à la tête du pays, il a un gouvernement qui travaille aussi à ses côtés et, nous, nous travaillons aujourd'hui non pas à la Présidentielle mais nous travaillons pour les Français.
GUILLAUME DURAND
Et vous la souhaitez cette candidature, vous ?
PASCALE BOISTARD
Mais moi je souhaite qu'il puisse prendre sa décision et moi j'ai dit que le soutiendrai s'il souhaite aller à la candidature et s'il souhaite être candidat aux Présidentielles.
GUILLAUME DURAND
Mais est-ce qu'il n'est pas mort ou est-ce qu'il n'est pas - je parle politiquement bien évidemment est-ce qu'il n'est pas mort, est-ce qu'il n'est pas le seul à s'en rendre compte, je parle en termes de
PASCALE BOISTARD
Mais moi je ne pense pas cela ! Je pense qu'aujourd'hui on est, effectivement vous l'avez dit sur le sujet précédemment, dans une période extrêmement troublée, extrêmement tendue, parce qu'il y a des choix difficiles à faire aujourd'hui et qu'on est un peu à la croisée des chemins. On est un pays où la solidarité a toujours été intrinsèquement ce qui qualifiait la République telle qu'on la conçoit en France, c'est-à-dire beaucoup de solidarité, de fraternité, d'égalité, mais aussi de la liberté et, aujourd'hui, c'est vrai que le monde évolue et il faut pouvoir prendre des décisions et qu'il y a des interrogations, il y a des peurs dans le pays parce que peut-être qu'il y a un manque d'explication aussi et c'est pour ça que le 14 avril il pourra répondre à la fois à des François mais aussi des journalistes sur à la fois ce qu'il a fait, pourquoi il l'a fait et ce qu'il veut faire encore.
GUILLAUME DURAND
Vous me parlez de la République dans un contexte qui est celui de la mondialisation mais la mondialisation
PASCALE BOISTARD
Oui, ce n'est pas d'aujourd'hui d'ailleurs ce sujet.
GUILLAUME DURAND
Mais voilà c'est pour ça que je vous on a l'impression que, pas vous, mais que globalement on est en train de découvrir que le monde d'aujourd'hui c'est la compétition et non pas le monde des Bisounours ?
PASCALE BOISTARD
Mais parce que vous avez une compétition qui aujourd'hui s'organise parfois sans règle, c'est l'ubérisation par exemple de la société économique qui a besoin à un moment donné de règle, parce qu'il ne s'agit pas parce que le concept même de la France, il me semble et qui est assez partagé d'ailleurs au-delà des clivages politiques c'est qu'à un moment donné ce n'est pas marche ou crève la France, vous voyez, il faut qu'il puisse y avoir des énergies nouvelles qui se développent mais que ça puisse être aussi à un moment donné un minimum encadré pour qu'il n'y ait justement pas de rupture brutale dans notre pays.
GUILLAUME DURAND
Et il y a une certaine forme de paradoxe, puisque vous êtes chargée des Personnes âgées au gouvernement et nous parlons ensemble des jeunes, mais il y a une chose franchement
PASCALE BOISTARD
Oui, mais il n'y a pas de paradoxe justement.
GUILLAUME DURAND
Non, non, mais il y a une chose que je ne comprends pas c'est comment à 25 ans aujourd'hui des organisations syndicales ont rendez-vous avec Manuel VALLS pour demander j'allais dire la non précarisation de la jeunesse, mais de qui
PASCALE BOISTARD
Non, ce qu'ils demandent je vais vous dire c'est d'avoir
GUILLAUME DURAND
Ca c'est la prolongation des bourses à la fac, on n'a jamais connu ça, même les gens de notre génération ?
PASCALE BOISTARD
Mais oui, mais parce que je vais vous dire une chose
GUILLAUME DURAND
On faisait des stages avant de trouver du travail et ça pouvait durer un certain temps, donc ce n'est pas nouveau ?
PASCALE BOISTARD
Oui, et d'ailleurs ce gouvernement il a réglementé les stages parce qu'on devenait stagiaire ad vitam aeternam et qu'on n'était jamais salarié, vous voyez ce que je veux dire ?
GUILLAUME DURAND
Mais il y a de moins en moins de salariés ?
PASCALE BOISTARD
Non mais oui salariés ou en capacité de pouvoir construire sa propre vie si vous voulez, de pouvoir se projeter dans l'avenir, c'est-à-dire avoir un logement, pouvoir s'installer, pourquoi pas avoir un enfant et ainsi de suite, vous voyez ? Moi j'appartiens déjà à une génération qui a commencé à être impactée par cela, où il y avait le Sida qui arrivait, il y avait le chômage qui était notre avenir - qui était devant nous - et on faisait des études et tout le monde nous disait : « de toute façon ça ne sert à rien, vous n'allez pas avoir de travail », j'ai même connu un président de la République
GUILLAUME DURAND
Oui, mais enfin vous êtes ministre. Mais vous êtes ministre, donc ça va ? On devrait tous l'affronter ce genre de chose ?
PASCALE BOISTARD
Oui, mais cest un parcours d'engagement que j'ai eu...
GUILLAUME DURAND
C'est assez bizarre que les jeunes aillent demander à un gouvernement de régler leurs problèmes dans la vie ?
PASCALE BOISTARD
Et très honnêtement là d'où je viens personne n'aurait pu prévoir que j'aurais pu appartenir à un gouvernement un jour, voilà, donc ce n'est pas moi je n'en fais pas un constat personnel, d'une gloire personnelle, c'est un parcours que j'ai eu d'engagement. Moi ce que je sais aujourd'hui et les jeunes en discutent aujourd'hui avec le Premier ministre c'est qu'il y a un besoin aussi de voir comment cette jeunesse elle peut être accompagnée déjà sur sa santé, déjà qu'elle puisse faire ses études, parce qu'on a besoin d'excellence dans notre pays et on sait très bien ce qu'on doit développer en termes économiques doit faire partie de l'excellence parce qu'on est concurrencés sur d'autres niveaux par ailleurs, donc on se doit d'être excellents et, pour ça, on a besoin des plus belles intelligences dans notre pays.
GUILLAUME DURAND
Mais alors vous vous rendez compte que dans cette situation, encore une fois c'est mon rôle de faire un peu le procureur
PASCALE BOISTARD
Oui.
GUILLAUME DURAND
Vous vous rendez compte que l'Unef n'en veut pas de la loi El Khomri, la gauche de la gauche n'en veut pas, les frondeurs n'en veulent et le patronat dit que maintenant la troisième version ça suffit, ça n'existe plus, donc le résultat de tout ça c'est qu'on parle mais qu'il n'y a plus de loi ?
PASCALE BOISTARD
Non ! Il n'y a plus de loi. Par exemple sur les jeunes la Garantie jeunes
GUILLAUME DURAND
Enfin si le Medef n'en veut plus, qu'est-ce que ça a comme intérêt ?
PASCALE BOISTARD
Oui, enfin le Medef ce n'est pas l'alpha et l'oméga du pays non plus.
GUILLAUME DURAND
Eh bien c'est les entreprises !
PASCALE BOISTARD
Non. D'abord, attendez, moi je crois qu'à un moment donné aussi il faut se rappeler que dans ce pays chacun a des responsabilités, il y a les politiques qui ont de grandes responsabilités à avoir mais il y a aussi le Medef et les organisations syndicales, et là on est en train de discuter dans cette loi de savoir comment on s'adapte aussi à ce fameux nouveau monde qui doit prendre en compte certaines réalités, je pense par exemple au droit - qui peut être futile comme ça mais qui change la vie des gens - le droit à un moment donné de décrocher des mails, des SMS qu'on nous envoie dans les week-end
GUILLAUME DURAND
Mais, ça, c'est un problème personnel ?
PASCALE BOISTARD
Non, ce n'est pas un problème personnel, c'est un problème
GUILLAUME DURAND
Moi j'ai éteint mon portable avant d'arriver, je n'ai pas demandé au gouvernement si je dois éteindre.
PASCALE BOISTARD
Oui, mais si votre patron demain vous dit : « dites donc, je vous ai envoyé trois SMS et vous ny avez pas répondu pendant votre week-end »
GUILLAUME DURAND
C'est ce que j'ai fait d'ailleurs !
PASCALE BOISTARD
Oui, eh bien c'est très bien, vous avez beaucoup de chance, ce nest pas le cas de millions de Français vous voyez.
GUILLAUME DURAND
Est-ce que vous considérez que justement, Emmanuel MACRON que vous connaissez bien et que semble-t-il vous aimez beaucoup, est-ce que vous considérez que finalement c'est lui la relève de la gauche, c'est-à-dire quelqu'un qui dit : « faisons table rase, réfléchissons, faisons du porte-à-porte et trouvons les solutions » ?
PASCALE BOISTARD
Ce n'est pas moi qui vais dire si c'est la relève de quoi que ce soit, ce seront, s'il s'engage en politique, ce seront
GUILLAUME DURAND
Ah ! C'est fait ?
PASCALE BOISTARD
Non, enfin non, s'engager en politique c'est éprouver le suffrage à un moment donné. Donc, s'il va jusqu'au bout d'une démarche qui est politique qui de faire un dialogue démocratique avec les citoyens avec une élection, ce seront les citoyens et les citoyennes qui en décideront, ce n'est pas moi qui en déciderait
GUILLAUME DURAND
Bien sûr !
PASCALE BOISTARD
Voilà !
GUILLAUME DURAND
Non ! Mais vous savez il y a une phrase du Général de GAULLE que je cite souvent, c'est : « il y a toujours un moment où il faut se mettre en accord avec ses arrière-pensées », son arrière-pensée est claire, c'est si HOLLANDE n'y va pas j'y vais.
PASCALE BOISTARD
Je n'en sais rien et ce n'est pas ce qu'il a dit hier au 20 h !
GUILLAUME DURAND
Il ne va pas le dire, il ne va pas le dire comme ça avec une pancarte, il est sophistiqué ce garçon.
PASCALE BOISTARD
On n'en sait rien pour l'instant ! Il a envie de faire vivre des idées, il a envie d'agréger apparemment autour de lui un certain nombre de personnes pour justement aller sur le terrain faire du porte-à-porte a-t-il dit hier soir voilà, moi tous les week-end je le fais
GUILLAUME DURAND
Mais ça vous intéresse ou pas cette démarche ?
PASCALE BOISTARD
Pour l'instant je ne sais pas quelle est la ligne politique, je ne sais pas quels sont ses vous voyez, je ne sais pas ce que c'est. Donc moi pour m'engager en politique j'ai besoin de contenu, j'ai besoin de faire vivre des idées, j'ai besoin de me battre pour des idées et c'est ce que je fais au sein du gouvernement.
GUILLAUME DURAND
Donc, c'est qui Emmanuel MACRON si on devait donner ce matin une définition ?
PASCALE BOISTARD
C'est un ministre de l'Economie, a qui on peut dailleurs reconnaître des talents, maintenant son travail est très difficile au sein du gouvernement pour le pays parce qu'on est comme je le disais dans un moment extrêmement important où les mutations économiques sont nombreuses et il y a beaucoup de travail à faire sur le sujet.
GUILLAUME DURAND
Merci beaucoup donc Pascale BOISTARD dêtre venue ce matin sur l'antenne de Radio classique et de Paris première, bonne journée à vous.
PASCALE BOISTARD
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 14 avril 2016