Interview de Mme Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable, à France 2 le 28 avril 2016, sur le projet de loi réformant le Code du travail et la stratégie politique d'EELV.

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Texte intégral

ROLAND SICARD
Bonjour à tous, bonjour Emmanuelle COSSE.
EMMANUELLE COSSE
Bonjour.
ROLAND SICARD
Il y a une nouvelle journée d'actions aujourd'hui contre la loi sur le travail, il y en aura une autre le 1er mai. Est-ce que vous avez le sentiment que cette loi, finalement, elle arrivera à son terme ?
EMMANUELLE COSSE
Ecoutez, cette loi, elle va être présentée la semaine prochaine par Myriam El KHOMRI à l'Assemblée nationale. Il y a eu la discussion avec les députés en commission il y a 15 jours, maintenant c'est la discussion en séance plénière, et il me semble que maintenant on est dans une phase justement où on est, après les interrogation, un texte de loi qui a été enrichi, des syndicats qui le soutiennent, et que maintenant ce texte de loi va vivre sa vie législative.
ROLAND SICARD
Mais il y a aussi des syndicats qui réclament encore son retrait.
EMMANUELLE COSSE
Oui, absolument, et vous l'avez dit, il y a une journée d'actions aujourd'hui, mais ils ont le droit d'être sur cette position, mais on voit aussi que maintenant il y a une volonté de la ministre du Travail d'aller au bout de cette loi, et y compris de répondre aux questions du renforcement du dialogue social de renforcement des droits des salariés, un certain nombre de sujets, et ça me semble important que ce débat ait lieu à l'Assemblée, dans de très bonnes conditions.
ROLAND SICARD
C'est pas une loi d'inspiration libérale ?
EMMANUELLE COSSE
Ah écoutez, on dit toujours ça dès qu'il y a une critique sur cette loi. Il y a une volonté, et cette loi est arrivée au moment du remaniement, au moment duquel je suis rentrée dans ce gouvernement. Il y a eu une discussion très forte sur un avant-projet de loi, des semaines supplémentaires de dialogue avec les syndicats, y compris avec les syndicats représentant la jeunesse, et il me semble que maintenant, surtout cette loi, elle dit une chose très simple, c'est : comment on fait pour que le marché du travail s'ouvre plus et que plus de personnes puissent y rentrer, mais aussi qu'on puisse avoir des garanties supplémentaires, sur la question du dialogue social, sur la question du syndicalisme en entreprise, sur la question aussi d'une flexisécurité ou d'une protection en tout cas dans cette flexisécurité que l'on voit aujourd'hui et aussi faire face au nouveau marché du travail, parce que quand vous voyez ce qui se passe dans le numérique, on ne peut pas être non plus dans un marché du travail où il n'y a aucune protection pour les salariés.
ROLAND SICARD
Vous parliez tout à l'heure de votre entrée dans le gouvernement, c'était il y a un petit peu plus de deux mois, en même temps vous quittiez la Direction d'Europe écologie les Verts, aujourd'hui, Europe écologie les Verts a décidé de ne pas faire d'accord avec les socialistes, pour les prochaines législatives. Est-ce que c'est une gauchisation, on pourrait dire, de ce parti ?
EMMANUELLE COSSE
Ecoutez, vous interrogerez le nouveau dirigeant de ce parti. Moi, ce que je sais en tout cas, c'est que les écologistes, dans toute leur histoire en France, ont toujours été les plus forts quand ils étaient aux responsabilités, et quand ils étaient dans l'action, pour mettre en oeuvre leurs idées, que ça soit dans les villes, il suffit de se rappeler ce que les écologistes ont fait quand ils s'occupaient des transports à Paris, c'est eux qui ont porté la grande révolution des transports, à Paris, d'ailleurs comme à Nantes et comme dans un grand nombre de métropoles, ce qu'on a fait au gouvernement, sous Lionel JOSPIN ou sous Jean-Marc AYRAULT et aujourd'hui sous Manuel VALLS. Et EELV peut faire ce qu'il souhaite, c'est son affaire.
ROLAND SICARD
Mais, est-ce qu'il y a gauchisation ou pas, selon vous ?
EMMANUELLE COSSE
Je n'en sais rien, ce que je vois c'est qu'il y a une volonté…
ROLAND SICARD
Vous avez une petite idée quand même.
EMMANUELLE COSSE
Il y a une volonté en tout cas de ne plus vouloir construire avec d'autres partis de la gauche, pour des échéances électorale, et moi je le regrette, parce que je vais vous dire, c'est un peu ce qui m'a amené à rentrer dans ce gouvernement. Il y a une urgence écologique, nous le savons très bien, c'est pas pour rien qu'il y a eu la Conférence sur le climat en décembre à Paris. Nous devons avoir des politiques qui changent radicalement sur ces sujets-là, et on ne peut pas être constamment dans la demande d'un changement de politique, sur la prise en compte de l'écologie, de l'environnement, de la protection de la nature, et refuser d'être aussi dans le jeu des responsabilités. Moi je préfère être aujourd'hui dans la place dans laquelle je suis en termes de… en qualité de ministre du Logement, m'occuper de ces questions-là, de la rénovation énergétique des logements, qui est un chantier immense pour le pays, plutôt que d'être à côté, en dehors, et de regarder les choses se passer.
ROLAND SICARD
S'il n'y a pas d'accord, il n'y aura pas de député écologiste à l'Assemblée en 2017.
EMMANUELLE COSSE
Il n'y aura pas de députés de ce parti, et je peux vous dire que l'écologie ne se résume pas à ce parti, et je pense qu'il y aura beaucoup de députés écologistes dans la future Assemblée, en tout cas moi je l'espère, parce qu'il faut aussi que cette Assemblée se modernise, se féminise, se rajeunisse et qu'il y ait aussi beaucoup plus d'idées représentées dans cet hémicycle.
ROLAND SICARD
Est-ce qu'il faut un candidat écologiste à la présidentielle ?
EMMANUELLE COSSE
Je pense surtout, je vous dis franchement, qu'il faut absolument que la question de l'Ecologie soit représentée dans la campagne présidentielle. En 2012, il y avait une candidate écologiste, Eva JOLY, et je ne suis pas certaine que ça fut le meilleur moyen pour porter les idées de l'écologie, vu le résultat que nous avons obtenu. Moi, ce que je souhaite véritablement, en tant qu'écologiste, en tant que femme engagée en politique, c'est qu'en 2017 il y ait un candidat qui représente mes idées, qui se batte pour la réduction de la part du nucléaire, qui agisse contre la pollution de l'air et les problèmes de santé qui sont liés, par exemple au diesel, par exemple à la prolifération des pesticides, et c'est pour cette raison que je pense qu'il faut surtout que ce soit ces idées, un programme, des engagements très forts qui soient pris, et ça passe en tout cas par quelqu'un qui aura, en soi, les idées défendues par les écologistes.
ROLAND SICARD
Ce quelqu'un, ça pourrait être François HOLLANDE ?
EMMANUELLE COSSE
Ça peut évidemment être François HOLLANDE, et le je dis en plus, avec un passé de discussions avec lui sur ces sujets-là, il l'a d'ailleurs toujours dit, qu'il n'était pas écologiste, c'est un socialiste, il s'est ouvert à des sujets sur lesquels il était beaucoup moins ouvert il y a quelques années, moi j'ai travaillé, y compris avant la Conférence environnementale qui s'est tenue lundi et mardi dernier, et maintenant je pense qu'il y a eu une évolution très forte de la classe politique en général, du gouvernement en particulier, pour avancer sur ces sujets-là. Je le redis, ce qui s'est passé en décembre avec l'accord sur le climat, un accord international, signé la semaine dernière par plus de 170 pays à l'Assemblée des Nations Unies, est un moment crucial pour notre planète, c'est un moment crucial aussi pour notre pays. Et donc, maintenant, notre rôle à nous, c'est que le gouvernement, moi-même, l'ensemble des membres du gouvernement, sous la responsabilité de Manuel VALLS et de François HOLLANDE, nous mettions en oeuvre ce programme-là. Il y a beaucoup à faire, il y a beaucoup à faire. Rien qu'en matière de logement, ce que je vous disais tout à l'heure, aider l'ensemble des Français à rénover leur logement, à réduire leurs factures d'énergie, à sortir d'un habitat qui n'est pas durable, à changer leurs conditions de vie, est un enjeu extrêmement important et en particulier pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
ROLAND SICARD
Mais quand vous voyez par exemple que Fessenheim ne sera vraisemblablement pas fermée avant la fin du quinquennat, est-ce que vous êtes pas un peu déçue ?
EMMANUELLE COSSE
Mais, vous êtes extraordinaire de lancer comme ça ces grandes vérités. Je me bats depuis 2012 pour que Fessenheim soit fermée, en 2016, comme l'a dit François HOLLANDE. Lundi dernier, François HOLLANDE, dans son discours à la Conférence environnementale a été très clair, il a dit : le décret de fermeture de Fessenheim va être pris dans les mois prochains. Donc cette centrale va fermer. C'est la première fois qu'en France…
ROLAND SICARD
Mais pas en 2016.
EMMANUELLE COSSE
Mais je suis désolée, le décret va être pris. Et je le redis, c'est extraordinaire comme l'ensemble des gens dans ce pays qui ne sont pas antinucléaire, contrairement à moi, me demandent à moi pourquoi ça fermerait pas plus vite. Ce qu'il faut, c'est que l'on réduire le nombre et la part du nucléaire dans notre production énergétique, qu'on commence par fermer Fessenheim, parce que cette centrale est ancienne, qu'elle est au-dessus d'une nappe phréatique, la plus importante d'Europe, et qu'en plus il y a de gros problèmes de sûreté et de sécurité. Et par la suite, je veux bien qu'après on puisse dire « ça ne va pas assez vite », mais par la suite, d'ici 2025, il va falloir fermer d'autres centrales. Moi, j'aimerais que vous me rappeliez combien de centrales nous avons fermées par le passé, combien ? Dans le pays le plus nucléarisé du monde. Est-ce que par le passé on a réussi à contingenter l'énergie nucléaire, je ne le crois pas. Ça s'est fait avec la loi de transition énergétique en 2015, et moi maintenant je veux que les engagements aillent au bout, et j'ai maintenant l'assurance, par François HOLLANDE, par Manuel VALLS, par Ségolène ROYAL, que les choses vont se faire.
ROLAND SICARD
Merci Emmanuelle COSSE.
EMMANUELLE COSSE
Merci beaucoup.
ROLAND SICARD
William, c'est à vous.
WILLIAM LEYMERGIE
Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 mai 2016