Texte intégral
Monsieur le Gouverneur général,
Mesdames et Monsieur les ministres,
Monsieur l'ambassadeur,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec émotion que je participe avec vous à cette « cérémonie de l'aube ». En cet instant, je mesure l'honneur qui est le mien de prendre la parole devant vous, en ce lieu qui rappelle le sacrifice de tant des vôtres, au service d'une victoire si chèrement payée. Aujourd'hui, nous honorons la mémoire des soldats de l'ANZAC, de ces centaines de milliers d'hommes qui traversèrent les océans pour partager, avec les soldats de France et d'Angleterre, le terrible privilège de la fraternité des armes.
Il y a bientôt cent ans, à l'aube du 25 avril 1918, trois ans après la bataille de Gallipoli, à l'heure et au lieu où nous nous trouvons, les bataillons australiens partaient à l'assaut des lignes allemandes, pour briser une offensive ennemie que rien ne semblait pouvoir arrêter. En accomplissant cet exploit, ils ouvraient la voie à la contre-offensive alliée qui devait mettre fin à quatre années de l'un des affrontements le plus tragique de notre Histoire, et dont nous commémorons en ce moment le centenaire.
Venus de si loin, ces jeunes hommes avaient quitté leurs foyers. Ils avaient laissé derrière eux leurs familles et leurs projets. Ils avaient ainsi répondu à l'appel du devoir, avec un courage qui force l'admiration. Commencée dans le port d'Albany où j'ai eu l'honneur de me rendre il y a deux ans pour le centenaire des premiers départs des troupes de l'ANZAC, le 1er novembre 1914, l'odyssée de ces volontaires d'Océanie les mènera du détroit des Dardanelles aux tranchées de la Somme, du front d'Orient aux derniers affrontements de l'automne 1918. Partout, on les verra affronter la dureté extrême des combats avec ce sens de la camaraderie, la fameuse « mateship », qui est entré depuis dans la légende.
Avec l'opération des Dardanelles, le corps d'armée australien et néo-zélandais fait l'épreuve du feu. Je n'oublie pas que le jour de l'ANZAC marque d'abord l'anniversaire du débarquement de Gallipoli. Au point du jour, le 25 avril 1915, avec la détermination de ceux qui brûlent de prouver leur valeur, les « diggers » australiens s'élancent à l'assaut des positions ottomanes, retranchées sur les hauteurs de la péninsule et bien préparées par des années de coopération avec l'armée allemande. Par ce fait d'armes, l'Australie a fait savoir au monde entier qu'il devrait désormais compter avec elle. C'est au feu des combats d'Orient que votre nation a forgé, monsieur le Gouverneur général, une part glorieuse de son identité. Aujourd'hui, dans le calme retrouvé du promontoire qui surplombe la Mer Egée, là où reposent tant de héros, la jeunesse d'Australie vient régulièrement se recueillir, à la mémoire de ses anciens.
A partir du printemps 1916, les divisions de la Première Force Impériale australiennes parviennent en France. Elles participent d'abord à la bataille de la Somme, dont nous commémorons cette année le centenaire. Nous leur devons ensuite quelques-unes des plus belles victoires des années 1917 et 1918 : Pozières, Fromelles, Bullecourt, Villers-Bretonneux, Le Hamel. A chaque fois, les pertes consenties sont terribles. A chaque fois, la bravoure des troupes australiennes sous le feu allemand permet d'emporter la décision.
Née de tant d'épreuves partagées, la fraternité qui unit l'Australie et la France est ancienne et pérenne. J'ai visité avec émotion, il y a deux mois, le mémorial Franco-Australien, érigé en 1961 à Canberra en l'honneur des soldats qui ont péri pendant la Grande Guerre. Des soldats de l'ANZAC aux combattants de la seconde guerre mondiale, qui aidèrent à la libération de la France, il y a, pour nos deux pays, la continuité d'une amitié qui n'a jamais failli, même dans les tragédies de l'Histoire. Les commémorations de la Grande Guerre nous le rappellent, mais aussi notre combat commun, aujourd'hui, contre le terrorisme et notre engagement commun, partout dans le monde au service de nos valeurs. Les avions australiens et français travaillent en lien étroit au Moyen-Orient. Nos bâtiments de surface et nos sous-marins coopèrent plus que jamais ensemble dans l'océan Indien. Nos avions de transport, nos hélicoptères, et nos forces terrestres agissent de concert dans le Pacifique pour venir en aide à ceux que des désastres naturels ont privé de tout.
Votre présence, si nombreux aujourd'hui, chers amis australiens, affirme la force du lien qui unit nos deux peuples, au service d'un idéal commun de paix, de justice et de solidarité.
En ce lieu de mémoire où la France se rappelle ce qu'elle doit à la jeunesse d'Australie qui par deux fois en un siècle est venue se battre sur son sol, pour que vive la liberté, je forme le vu que notre fraternité grandisse dans les mains des générations à venir, elles qui, après nous, célébreront à leur tour la légende des soldats de l'ANZAC.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 10 mai 2016