Texte intégral
Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire général pour ladministration,
Monsieur le chef détat-major de la marine,
Mesdames et Messieurs les officiers généraux, officiers, sous-officiers et soldats,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux dêtre parmi vous ce soir. Ce colloque, qui célèbre les soixante ans de la Commission armées-jeunesse, et que je suis honoré de conclure, me donne loccasion de mexprimer sur un sujet qui me tient particulièrement à cur : celui de la jeunesse.
Nous en sommes tous convaincus, la jeunesse est essentielle à la pérennité et au succès de nos armées ; elle lest aussi à lunité de la nation. Comme elle la fait par le passé, comme elle le fera demain, la jeunesse de notre pays prend aujourdhui toute sa part des défis que notre pays doit relever pour sa défense. Votre présence à tous ici, ce soir, est un témoignage fort de cet engagement.
Je veux remercier tous les intervenants de ce colloque. Je salue tout particulièrement Marie Récalde, Dominique Schnapper, Tristan Lecoq.
Je veux aussi remercier ceux qui ont la responsabilité de faire vivre notre ambition pour la jeunesse au sein du ministère de la défense : Gérard Gachet, délégué ministériel à la jeunesse, et François Le Puloch, notre directeur du service national.
Je salue les élus, les autorités civiles et militaires qui uvrent, chacun à leur place, au développement de lesprit de défense et contribue ainsi à la cohésion dont notre nation a besoin.
Je veux aussi saluer les responsables et les représentants de tous les organismes qui siègent à la CAJ : ministères, syndicats, fédérations, associations, toutes celles et tous ceux qui portent le sujet jeunesse au sein de la Défense et qui portent la Défense auprès de la jeunesse.
Je veux aussi saluer les nombreux jeunes de tous horizons qui sont présents ce soir, et qui sont la raison dêtre de cette Commission. La diversité de notre assemblée témoigne de lesprit qui anime la CAJ depuis sa création, un esprit que je veux voir, moi aussi, perdurer dans les années à venir.
Il y a soixante ans, dans un après-guerre marqué par les efforts de la reconstruction, les épreuves de la décolonisation et les menaces de la guerre froide, cette Commission a été créée pour que la jeunesse puisse connaître les impératifs de la défense nationale, pour que notre institution puisse comprendre les aspirations de la jeunesse.
Cette Commission a été voulue par Pierre Mendès-France, à qui je souhaite rendre hommage. En 1955, il adressait à la jeunesse ce magnifique message : « penser constamment à vous, cest la seule manière de construire toujours en fonction du futur, cest la seule méthode pour être certain de ne jamais sacrifier lavenir au présent, ce qui est en définitive le devoir suprême de lhomme dEtat. » Ce message est, je le crois, la raison dêtre de la CAJ et il continue à nous inspirer aujourdhui.
Depuis six décennies, cest avec conviction et énergie que la CAJ contribue à la politique de notre ministère en direction de la jeunesse. Son action sest dabord portée sur les conditions de réalisation du service militaire ; mais elle a aussi, dès sa création, imaginé, proposé et mis en uvre de nombreux dispositifs complémentaires, qui ont tous permis de conforter le lien entre la jeunesse et nos armées.
Si la Commission a pu être, durant toutes ces années, une force de proposition et un véritable laboratoire didées au service de lesprit de défense, cest notamment grâce à la diversité de ses membres. Je veux ici rendre hommage à leur formidable travail. Composée de lensemble des organismes qui sont au contact de la jeunesse, les travaux de cette Commission se sont enrichis de cette pluralité de sensibilités. La Défense est le seul ministère à disposer, encore aujourdhui, dune telle institution capable de faire se rencontrer la diversité de la société civile, et de la faire travailler dans un véritable esprit collégial, avec pour objectif la recherche de lintérêt général, afin daméliorer notre action globale à légard de la jeunesse.
Face aux risques et aux menaces auxquels notre pays est confronté, la mission de la Commission armées-jeunesse est plus que jamais dactualité. Elle agit, certes, dans un contexte bien différent de celui de sa création, le contexte dune armée professionnalisée, dune société et dune jeunesse qui ont profondément évolué, le contexte de menaces dun type nouveau. Mais ses missions fondamentales demeurent dactualité : la nécessité pour nos armées de connaître et de comprendre de manière approfondie notre jeunesse ; la nécessité, en retour, pour nos jeunes de comprendre et de connaître les impératifs de la Défense nationale et la part quils peuvent y prendre.
Cest pourquoi je souhaite à présent partager, avec vous, ma vision de la politique de ce ministère à légard de la jeunesse. Cette politique se décline selon deux axes.
Le premier axe est directement lié aux besoins de la Défense : cest le défi de lattractivité de notre institution. Les armées réclament du personnel jeune et dynamique, dans une multitude de métiers et selon des types dengagement très variés. Cest la condition première du succès des opérations. Cest la garantie de lavenir de nos armées et de la défense de la nation. Chaque année, le ministère dont jai la charge recrute environ 20000 jeunes, et jusquà 25000 actuellement. Cest donc une fraction importante dune classe dâge qui passe par cette institution, au sein dun système de ressources humaines à peu près unique en son genre par sa diversité.
Ce constat est valable, bien sûr, pour lactive. Il lest aussi pour la réserve. Je rappelle que conformément à la décision du Président de la République, nous allons passer de 28000 à 40000 réservistes opérationnels, afin de pouvoir disposer, dès 2019, dune capacité de 1000 réservistes, employés au quotidien pour la protection du territoire national. Dans ce nouveau modèle de réserve, la jeunesse est appelée à prendre toute sa place.
Cest aussi la volonté dengagement des jeunes qui doit être confortée. Nous devons y parvenir notamment en consolidant les dispositifs qui font connaître linstitution militaire et qui servent, bien souvent, de lieu pour mûrir un engagement futur. Je pense notamment aux cadets de la défense, aux périodes militaires, qui furent dailleurs proposées par la CAJ et créées dans les années 1960. Jai aussi à lesprit les stages, lapprentissage ou les partenariats avec les filières professionnelles de lEducation nationale ; je pense aussi au domaine fondamental de la recherche stratégique, et aux partenariats existant entre les grandes écoles militaires et les établissements de lenseignement supérieur et les centres de recherche.
Je souhaite que puissent être lancées des actions permettant dencourager certains dispositifs, comme les préparations militaires. Ils uvrent en effet pour lattractivité des armées, tout en permettant à la défense de rester présente sur des territoires qui disposent moins, ou ne disposent plus dimplantations militaires.
Le deuxième axe de notre politique, cest la transmission de la culture de défense. Cette exigence tient une place essentielle dans léducation civique et citoyenne de notre jeunesse. Le succès de nos armées, leur efficacité, implique en effet que chaque nouvelle classe dâge soit sensibilisée à lhistoire de notre défense nationale comme à ses engagements présents. Cest la possession commune de cette culture de défense qui permet le maintien de lesprit de défense au cur de la nation.
Je me félicite à cet égard que lenseignement de défense fasse désormais partie du socle fondamental de connaissances, de compétences et de culture défini par lEducation nationale.
Cest précisément le sens du parcours citoyen institué par la loi de 1997 portant réforme du Service national. Il inclut en effet lenseignement de défense, le recensement et la Journée de défense et de citoyenneté dont le contenu a été recentré sur les enjeux de défense, conformément à la volonté du Président de la République. Je veux aussi souligner la contribution de cette Journée à la lutte contre lillettrisme et le décrochage scolaire, par la détection des jeunes en difficulté et leur orientation vers des structures spécialisées.
En la matière, nous avons déjà beaucoup accompli : je pense, par exemple, aux trinômes académiques, ou aux classes de sécurité globale, créées en 2011. Il sagit à présent, il sagira demain, de consolider et délargir ce socle. Cest la raison pour laquelle, avec les ministres de lEducation nationale et de lAgriculture, nous venons de signer un protocole qui vise notamment à développer cet enseignement de défense y compris dans lenseignement supérieur et la recherche. Je tiens dailleurs à saluer les Recteurs et les référents défense des Universités et des établissements denseignements supérieurs qui sont présents aujourdhui. Vous êtes, Mesdames et Messieurs, des ambassadeurs indispensables de la défense auprès de la jeunesse étudiante, et je tiens à vous remercier chaleureusement de votre engagement.
Je tiens aussi à souligner, à lapproche de lanniversaire de la bataille de Verdun, limportance de la politique mémorielle que le ministère de la défense met en uvre. Savoir doù nous venons, se souvenir des drames endurés et des heures glorieuses vécues, voilà la condition indispensable pour décider ensemble où nous souhaitons aller. Le Secrétaire dEtat aux Anciens combattants et à la Mémoire est particulièrement actif dans ce domaine, à travers de nombreux partenariats : avec le monde éducatif, avec les associations danciens combattants, qui, heureusement, se tournent de plus en plus vers les jeunes. Et je me réjouis de ce dialogue entre générations ; cest le gage de la cohésion nationale à laquelle la Défense doit contribuer.
La Défense sengage aussi dans le grand chantier du Service civique voulu par le Président de la République. La Commission armées-jeunesse a été une véritable force de proposition pour que nous soyons pleinement acteurs de ce projet. Depuis le 7 janvier 2016, mon ministère est agréé par lAgence du Service civique, qui fait désormais partie du Haut-commissariat à lengagement. Depuis plusieurs semaines, nous accueillons des jeunes volontaires pour des missions de service civique au sein de tous les organismes de ce ministère. Ces missions contribuent à la fois à leur éducation citoyenne et à leur acculturation aux enjeux et aux réalités de la défense.
Outre des actions éducatives et des partenariats avec les établissements denseignement, la Défense développe de nombreuses actions visant à aller à la rencontre du public. Cest le cas des journées sport armées-jeunesse organisées par la CAJ, des journées portes ouvertes, des parrainages entre unités militaires et collectivités ou établissements scolaires. Nous devons ouvrir toutes grandes les portes de la Défense et aller résolument à la rencontre de la jeunesse. Il sagit tout autant dune action citoyenne que dune nécessité pour une armée professionnelle qui doit se faire connaître et faire connaître ceux qui la servent, leurs missions, leurs qualités, la force de leur engagement.
Lattractivité et léducation civique et citoyenne sont les deux piliers de notre politique de la jeunesse. Ils soutiennent, je veux le dire avec force, une politique de légalité, de la diversité et de la solidarité. Vous le savez, les armées ont toujours eu cette vocation. Les armées ont toujours accueilli des jeunes sans qualification, des jeunes peu favorisés, avec pour ambition de leur donner accès aux mêmes espérances, aux mêmes possibilités professionnelles.
Chaque année sont promus jusquaux plus hautes responsabilités, des militaires qui ont commencé leur carrière comme simple soldat, marin ou aviateur. Cette politique-là doit être poursuivie et jy veillerai.
Comment, en effet, une armée démocratique peut-elle rester reconnue, respectée et soutenue par la population si elle nest pas inclusive, si elle ne donne pas à tous les mêmes opportunités ? Si elle ne reflète pas toutes les composantes de la jeunesse et de la société dans sa diversité ? Comment une armée, a fortiori professionnalisée, peut-elle rester attractive si elle ne reste pas le vecteur de promotion sociale quelle a toujours été? Cette ambition de justice sociale, qui passe à la fois par léducation civique et lattractivité, cest la part que le ministère de la Défense prend dans la politique nationale dégalité des chances, de formation et dintégration professionnelle de la jeunesse.
Héritières dune longue histoire au sein de la défense, légalité des chances, la diversité et la promotion sociale qui y prévalent doivent être plus que jamais encouragées. La défense doit se tourner vers tous les jeunes qui sont confrontés à des difficultés de parcours scolaire afin de les aider à saccomplir.
Cest pourquoi, nous devons renforcer ce qui a été créé ces dernières années, à travers notre plan « égalité des chances ». Je pense à ladmission de jeunes boursiers au sein des lycées de la défense, en leur permettant laccès aux classes préparatoires aux grandes écoles, via une année spécifique de préparation à lenseignement supérieur. Jai à lesprit les filières de recrutement spécifiques, en partenariat avec les missions locales dinsertion, à limage de lEcole des mousses qui forment des jeunes connaissant des difficultés scolaires et sociales à devenir des quartiers-maîtres de la flotte embarquée et au-delà ! Fort de son succès, une deuxième école des mousses va dailleurs ouvrir cet été à Cherbourg. Cest un exemple dintégration sociale qui contribue efficacement à la cohésion nationale.
Je pense aussi au réseau des réservistes locaux à la jeunesse et à la citoyenneté qui uvrent dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Je noublie pas le tutorat de jeunes élèves par des élèves officiers au sein du programme des « cordées de la réussite ». Je pense à la contribution au service militaire adapté outre-mer, proposé par la Commission armées-jeunesse dès 1960. Et bien sûr le service militaire volontaire, sujet sur lequel la Commission avait également travaillé, que jai créé lan passé et dont les premières promotions ont intégré les centres de formation à lautomne dernier.
Mesdames, messieurs, la contribution de la défense à léducation civique et citoyenne et les actions visant à développer lattractivité de la Défense sont les deux piliers de la politique jeunesse du ministère, politique pleinement ouverte sur la société civile daujourdhui. Cette ambition na de sens et ne peut atteindre ses objectifs sans les acteurs extérieurs au ministère, eux qui ont à cur de faire vivre lesprit de défense, et dont je salue une fois encore la présence et laction.
Les efforts conduits en interne au ministère au cours de ces dernières années pour répondre à ces nouveaux défis sont dimportance. Les besoins de la défense et les nécessités de la cohésion nationale exigent des efforts constants et une cohérence renforcée. La Défense doit encore aller de lavant sur ce sujet. Cest pourquoi jai demandé que la politique jeunesse du ministère, ainsi que sa gouvernance, soient renforcées et rénovées. Ce renforcement devra favoriser la visibilité du sujet « jeunesse » dans tout le ministère, les synergies internes et externes et lanticipation des actions pour le plus grand bénéfice de tous devront intégrer cette visibilité. Jai dailleurs décidé de nommer dès cet été le général Pontiès, que je salue et que je remercie davoir accepté ce défi, à la tête dune Direction du service national dont les attributions seront élargies. Cette nouvelle direction, qui intégrera les attributions de la délégation ministérielle à la jeunesse et à légalité des chances, et à laquelle je souhaite que la CAJ puisse être adossée, sera chargée du pilotage densemble des actions jeunesse du ministère en étroite liaison avec tous les acteurs du ministère.
En 1955, date de création de la CAJ, les défis étaient considérables : maintenir un lien solide entre la jeunesse et les armées ; maintenir la culture de défense dans les générations qui allaient construire la nouvelle société, fondée par les grands pactes sociaux noués à la Libération.
En 2016, les défis sont autres, mais ils restent tout aussi majeurs : maintenir dans la durée le modèle de larmée professionnelle ; préserver le pays des menaces multiples auxquelles nous sommes confrontés, par une culture de défense partagée par les jeunes générations ; fortifier la cohésion nationale par une politique de défense inclusive et soucieuse de ceux qui sont les moins favorisés. Je demande à la Commission armées-jeunesse de rester cette porte ouverte entre la Défense et tous les acteurs qui travaillent avec la jeunesse de notre pays, au bénéfice de tous les jeunes et au profit de chaque jeune.
La Défense a toujours été laffaire de tous et de chacun, et notamment des jeunes. Elle doit le rester, cest notre ambition commune.
Vive la République ! Vive la France !
Source http://www.defense.gouv.fr, le 27 mai 2016