Texte intégral
* Initiative pour la paix au Proche-Orient
(...)
Q - Est-ce qu'on peut arriver ou avancer sur cette fameuse paix au Proche-Orient ? Vous avez réuni, vous l'avez dit, une trentaine responsables aujourd'hui, mais quand même sans les acteurs principaux, sans les Israéliens qui sont très sceptiques et qui ont même dit que cette réunion éloignait les perspectives de paix ; et par les Palestiniens qui eux plutôt approuvaient cette réunion, même si il n'était pas présents. Est-ce qu'on peut, nous, Français, régler un tel problème ?
R - On ne réglera pas tout tout seul, c'est clair. Ce que nous voulons c'est créer les conditions pour reprendre les négociations de paix, et ces négociations de paix ce n'est pas nous qui les feront, c'est les Israéliens et les Palestiniens. Mais aujourd'hui qu'est-ce que l'on constate ? Nous avons tous constaté la même chose, les 30 pays représentés, plus le secrétaire général des Nations unies, plus la haute représentante pour la paix et la sécurité en Europe et qui était présente, c'est-à-dire qu'il n'y a plus de discussions, il y a plus d'échanges, il n'y a plus de négociation entre Israéliens et Palestiniens. Cela fait neuf ans la dernière fois qu'il y a eu une initiative internationale pour essayer de recréer un climat favorable, c'était aux États-Unis ...
Q - Qu'est-ce qui aura changé ce soir ?
R - Ce qui a changé ce soir, c'est d'abord une première chose que je voudrais vous dire. Je suis en fonction depuis presque quatre mois. Quand je suis arrivé, j'ai repris ce dossier, celui d'une initiative pour créer un contexte favorable pour des négociations, pour que l'objectif de deux États soit à nouveau sur la table : un État palestinien à côté de l'État d'Israël. Eh bien, beaucoup disaient : «vous n'allez pas y arriver ; cette réunion vous ne pourrez pas la tenir». Elle a eu lieu, c'est une première étape.
Q - Est-ce qu'il y en aura une deuxième ?
R - Évidemment que nous souhaitons qu'il y en ait une deuxième, mais avant qu'il y en ait une deuxième - on ne va pas s'arrêter à la réunion d'aujourd'hui, qui est une réussite - on met en place des groupes de travail, thème par thème sur la question de la sécurité pour les deux pays et, dans cette région, la question du développement économique, la question du dialogue, de la réconciliation, de la lutte contre tout ce qui peut inciter à la haine et à la violence. On met tout cela sur la table.
D'ailleurs, je m'étais engagé, aussitôt la réunion terminée, à appeler mon homologue ministre des affaires étrangères, mais aussi Premier ministre, Benjamin Netanyahu et Mahmoud Abbas, le président palestinien. Je viens d'avoir Mahmoud Abbas, je lui ai fait le compte rendu de nos travaux. Je lui ai donné le climat et je lui ai dit «notre désir que vous vous remettiez dans un jeu sincère de négociations». En tout cas, la réunion d'aujourd'hui n'a accusé ni Israël ni la Palestine. Nous avons simplement constaté que nous étions dans une impasse et que nous voulions retrouver la voie du dialogue de la négociation.
Q - Et Benjamin Netanyahu vous l'avez eu ?
R - Bien sûr, je l'ai eu au téléphone. Nous avons parlé franchement. Vous connaissez ses positions, vous connaissez la manière dont il s'exprime, avec netteté. Il m'a dit : «je vais vous parler franchement». Je lui ai dit : «moi aussi je vais vous parler franchement. Ce n'est pas parce que vous avez une différence d'appréciation, d'approche avec nous, que vous voulez uniquement une négociation directe, que nous allons nous décourager pour vous aider, mais on ne le fera pas votre place».
Vous savez, autour de la table, il y avait des gens très différents. Il y avait, bien sûr, John Kerry, l'Américain, qui partage le même constat que nous, mais il y avait aussi les pays arabes, il y avait l'Égypte, l'Arabie saoudite....
Q - Justement, est-ce que vous n'aviez pas envie que justement nos relations avec l'Arabie saoudite notamment, privilégiées en ce moment, ne devaient pas permettre qu'un certain nombre de ces pays reconnaisse l'État d'Israël de façon claire afin de forcer peut-être l'État d'Israël à reconnaitre l'État palestinien ? Est-ce que ce n'était pas ça le plan secret ?
R - C'est très juste comme question, parce qu'il y a ce qu'on appelle l'initiative de paix arabe qui avait cet objectif, mais le représentant de l'Arabie saoudite a dit : «nous avons fait cette proposition, il y a déjà un certain temps, et nous n'avons pas eu de réponse de la part du gouvernement israélien». Donc, là, il y a sans doute peut-être un chemin. Notre réunion d'aujourd'hui a pour but de faire bouger les lignes, de faire comprendre qu'il faut que cela change, parce que si cela ne change pas, qu'est-ce qui se passe ? La situation actuelle c'est la violence, c'est le désespoir et c'est dangereux pour les Palestiniens, c'est dangereux pour Israël, pour sa sécurité, c'est dangereux pour toute la région. Et vous savez ce qui se passe ? C'est que la propagande de Daech est en train de prospérer dans cette région. C'est extrêmement dangereux et tout le monde en est conscient.
Q - Oui, mais ce n'est pas seulement à cause de ce conflit, la propagande de Daech et les conflits au Proche-Orient...
R - La propagande de Daech utilise toutes les frustrations, toutes les déceptions, et vous savez bien que la perspective et l'espoir pour les Palestiniens c'est d'avoir un État qui puisse vivre en sécurité, avec un vrai développement, à côté de l'État d'Israël dont on doit aussi continuer à garantir la sécurité. Donc, ce que j'ai dit à Benjamin Netanyahu, c'est que les vrais amis d'Israël - et j'en fais partie, la France en fait partie - ce n'est pas de vous attaquer, de vous critiquer, je ne fais pas de commentaire sur les choix de la politique gouvernementale israélienne, je dis c'est pour vous aider dans la durée à assurer votre sécurité et cela passe par un accord de paix avec les Palestiniens.
(...).
* Tourisme - Euro 2106
(...)
Q - La grève est reconduite ce soir.
R - Oui la grève est reconduite. Elle est annoncée dans son principe mais si vous demandez aux cheminots ou aux agents d'EDF s'ils doivent prendre telle ou telle initiative pour que tout fonctionne bien en France... Je crois qu'on peut dire avec l'expérience - vous vous souvenez des périodes d'hiver, etc, des tempêtes - que l'on a affaire à des gens formidables. Donc, je pense qu'il faut positiver et faire confiance.
Q - L'image de la France quand même en ce moment, alors qu'on est à dix jours de l'Euro, entre les attentats, les grèves, les dépôts d'essence, et maintenant les inondations... Vous qui travaillez sur l'image de la France, aujourd'hui, on est ...
R - J'ai réuni aujourd'hui 30 représentants de différents pays du monde. Ils sont venus sans problème à Paris, et pas par des avions spéciaux pour la plupart d'entre eux, par les vols internationaux, commerciaux. Et puis certains sont arrivés la veille, et repartent tout à l'heure ; donc ils ont bien vu que notre pays fonctionnait. Ils ont d'ailleurs fait preuve de compassion, de solidarité parce qu'ils savent ce que c'est qu'une inondation. Quand je vois mon collègue canadien, avec les incendies qui ont eu lieu ces derniers temps, eh bien je peux vous dire qu'on peut se comprendre quand on parle de ce type de problèmes naturels. Et personne ne va imputer cela à un gouvernement...
Q - Oui mais c'est l'accumulation vous voyez, on est à dix jours de l'Euro, on a l'impression que la France est en difficulté ?
R - Je pense que la France est capable de faire face et nous allons démontrer que nous faisons face. L'Euro aura lieu...
Q - Une semaine de l'Euro.
R - Oui, l'Euro aura lieu, vous verrez, et je crois que les choses se passeront bien. Nous avons mis tous les atouts de notre côté. Il y a un sujet qui est très important, notamment pour le tourisme dont vous parliez à l'instant, c'est de faire passer le message - il y a eu les attentats de l'année dernière, notamment le 13 novembre, qui ont fait chuter à la fin de l'année les chiffres du tourisme ; les choses ont bien remonté depuis -, c'est de leur dire que nous prenons nos responsabilités. Nous mettons tous les atouts de notre côté, notamment pour assurer la sécurité. La mobilisation des forces de police, vous avez du interroger déjà Bernard Cazeneuve, est extraordinaire, sans parler de tous les autres acteurs notamment autour du football, dans les collectivités locales...
Q - Mais là ils peuvent être épuisés.
R - Oui mais, justement, c'est cela qu'il faut saluer, c'est que quand on sait qu'on a une action à mener qui est prioritaire de réussir un événement les gens ne ménagent pas leurs forces, ils y vont, ils foncent.
(...)
Q - J'ai une toute dernière question de sécurité, on a appris que les Américains avaient dit à leurs concitoyens de ne pas venir à l'Euro parce que la France ne serait pas sécurisée. Est-ce que c'est «fair play» ?
R - Alors je vais vous dire quelque chose de très précis. Vous-même quand vous voyagez, vous allez voir la rubrique «conseils aux voyageurs » sur le site du ministère des affaires étrangères. Ce dont vous parlez, c'est la rubrique «conseils aux voyageurs» destiné aux Américains qui pourraient venir en France notamment à occasion de l'Euro. Il leur a été rappelé qu'il y avait eu des attentats en France, mais ce que je puis vous dire c'est que John Kerry a au contraire adressé un message de sympathie à l'égard de la France. D'ailleurs il vient souvent à Paris, il aime beaucoup Paris. Et je vous donne un scoop, demain je prends le petit déjeuner avec lui et il dira du bien de la France.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 7 juin 2016