Interview de M. Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "Europe 1" le 4 mai 2016, sur le discours bilan du président de la République au colloque "la gauche et le pouvoir" et sur les débats autour du projet de loi de réforme du code du travail.

Prononcé le

Média : Europe 1

Texte intégral

THOMAS SOTTO
Il est ministre de l'Agriculture et porte-parole du gouvernement, Jean-Pierre ELKABBACH vous recevez ce matin Stéphane LE FOLL pour l'interview politique d'Europe 1, messieurs c'est à vous.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et en plus c'est l'ami de François HOLLANDE. Le 3 mai 2016, une date à retenir, François HOLLANDE se définit comme l'héritier des BLUM, MENDES FRANCE, MITTERRAND, MAUROY, DELORS, JOSPIN, pas à JAURES d'ailleurs. Bienvenue, Stéphane LE FOLL bonjour.
STEPHANE LE FOLL
Parce que JAURES n'a pas exercé le pouvoir.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
François HOLLANDE a prononcé un beau discours…
STEPHANE LE FOLL
Parce qu'il a cité JAURES à la fin quand même.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
François HOLLANDE a prononcé hier un beau discours, de candidat. C'est donc parti ?
STEPHANE LE FOLL
Il a fait un beau discours, ça je ne sais pas, je n'y étais pas, mais…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous l'avez lu.
STEPHANE LE FOLL
Pour ce que j'en sais, le retour que j'en ai eu, c'est vrai qu'il a fait un beau discours…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Non, mais j'ai dit de candidat.
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais il est président de la République et ça ne doit pas l'empêcher de faire des discours qui soient des analyses, qui soient aussi des mises en perspective et qui soient aussi des références historiques.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Non, mais on remarque le « Hé oh la gauche », c'est contagieux alors, ça atteint même François HOLLANDE ?
STEPHANE LE FOLL
Je ne sais pas si c'est contagieux, mais c'est simplement aussi une manière de dire mais dans ce moment-là - toutes les critiques, j'en entends, et j'entendais hier soir des débats sur la loi de Myriam EL KHOMRI qui font des références ou qui sont des caricatures – dans ces moments-là où, en même temps, comme le disait Monsieur CANTELOUP, il y a quand même des nouvelles qui montrent que ce pays a du potentiel et qu'il se redresse, il faut quand même rappeler les choses.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Non, non, Nicolas CANTELOUP l'a dit, allez, ça va !
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais est-ce qu'il y a un pays en Europe, c'est ce qu'a dit hier le président de la République, qui…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui en 4 ans a fait autant de progrès ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, et surtout qui a préservé son modèle social. Il n'y en n'a pas beaucoup !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On a l'impression que, comme Cyrano de Bergerac, il le dit lui-même avec assez de verve pour que personne ne le lui serve. Alors, est-ce que ce sont les prémices là, la vraie candidature, est-ce que c'est avant Noël ?
STEPHANE LE FOLL
J'ai vu ça avant Noël, c'est à la fin de l'année, c'est ce qu'a dit le président de la République.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Non, mais vous ne pouvez pas répondre là, directement ?
STEPHANE LE FOLL
Non.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Allez, hop, hop, on se chauffe…
STEPHANE LE FOLL
C'est avant Noël par définition puisque c'est à la fin de l'année, à moins qu'entre Noël et le nouvel An on considère qu'il y a un temps pour pouvoir le faire…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais le petit Poucet met des traces ?
STEPHANE LE FOLL
Le petit Poucet… le président de la République défend ce qu'il a fait et les choix qu'il a fait pendant cette période…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ce sera lui ?
STEPHANE LE FOLL
Quand on fait de la politique…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est dur à arracher ! C'est dur…
STEPHANE LE FOLL
On commence par défendre et valoriser ce qui a été fait, et ce qu'il a fait lui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ce sera lui ?
STEPHANE LE FOLL
Moi je pense, vous me posez la question, donc vous le savez très bien puisque vous avez commencé par dire que j'étais un ami du président de la République.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ce sera lui ? Allez, allez…
STEPHANE LE FOLL
Moi je pense, très clairement, que dans une république française, Ve du nom, il y a un président sortant et qu'il doit défendre ce qu'il a fait et, en même temps, parce qu'il défend ce qu'il a fait, eh bien être le candidat du camp qu'il représentera le moment venu.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le président de la République aimerait bien baisser les impôts pour les plus modestes en 2017. Est-ce qu'il va le décider ?
STEPHANE LE FOLL
Alors sur les plus modestes, il faut qu'on soit très clair Jean-Pierre ELKABBACH. Est-ce que vous savez qu'un célibataire au SMIC, est-ce qu'il paye des impôts aujourd'hui ? Il n'en paye plus. Et 9 millions…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quels sont les ménages les plus modestes ?
STEPHANE LE FOLL
Les ménages les plus modestes c'est ceux qui, autour du SMIC et jusqu'à 1,5 fois, 2 fois, 2,5 fois le SMIC, ont bénéficié, et continueront à bénéficier, de baisse d'impôt. Il y a 17 millions de personnes qui payent l'impôt, plus de la moitié, on est autour de 12 millions, qui auront connu une baisse d'impôt.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc d'ici à 2017 il y aura une baisse d'impôt.
STEPHANE LE FOLL
On est sur une phase de redistribution, qui fait, comme l'a dit le président de la République, qu'une partie des efforts qui ont été demandés aux Français sont maintenant redistribués.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Très bien, mais qu'est-ce que vous allez redistribuer ? Pour être de gauche, est-ce qu'il faut redistribuer de l'argent qu'on n'a pas ? Vous, vous êtes ministre de l'Agriculture, est-ce qu'il faut vendre la récolte avant de l'avoir semée ?
STEPHANE LE FOLL
Je vous rappellerai, Jean-Pierre ELKABBACH, parce que tout le monde l'oublie, que sur la crise agricole la France et le gouvernement a décidé autour – avec l'ensemble des crises que nous connaissons – autour d'1 milliard d'euros pour aider les agriculteurs. 1 milliard d'euros, 800 millions d'euros pour revaloriser aussi…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Justement, les enseignants, vous additionnez en ce moment les dépenses supplémentaires, les enseignants, les jeunes, les fonctionnaires, les lycéens, etc., ça s'élèverait entre 4 milliards disent les uns, 6 milliards et même davantage disent les autres, quel est le vrai chiffre Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Je ne sais pas qui, mais c'est plus de 4 milliards, et j'intègre dedans la question des agriculteurs, j'intègre dedans la revalorisation des policiers et des gendarmes, qui sont des choses très importantes, et j'intègre dans tout ça, pour que chacun ait bien les choses en tête, le fait que depuis 3 ans nous avons engagé une réduction de la dépense publique, de combien ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quatre milliards.
STEPHANE LE FOLL
De 50 milliards d'euros, sur les 3 ans. Voilà comment on équilibre et on finance des dépenses supplémentaires, en faisant en sorte qu'on essaye de redistribuer ce qu'on économise d'un côté, voilà l'objectif.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous vous comportez comme s'il n'y avait pas de déficit et pas d'endettement.
STEPHANE LE FOLL
On a un déficit qui a été réduit à 3,5 % du PIB…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais il est toujours important.
STEPHANE LE FOLL
Il est toujours important, mais attendez, on était à plus de 5 % en 2011, on était à 7 % en 2010, je m'en rappelle parce que j'ai des chiffres en tête, le déficit de la France c'était 140 milliards d'euros, c'est-à-dire c'était supérieur au budget de l'Europe à l'époque, en 2010. On est passé donc de 7…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et quand vous partirez, vous laisserez, en 2017 ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, à moins de 3 %.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, mais…
STEPHANE LE FOLL
C'est quand même très important.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous n'avez pas de cagnotte, Michel SAPIN le répète, vous avez des noisettes cachées quelque part ?
STEPHANE LE FOLL
C'est une gestion sérieuse qui est faite et qui permet de dégager, avec des économies, la possibilité de faire des dépenses supplémentaires.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça veut dire que vous allez laisser l'addition, l'ardoise à la droite, si vous partez.
STEPHANE LE FOLL
Alors, quelle est l'addition que nous avons eue ? 20 milliards de déficit de la Sécurité sociale. il est à combien aujourd'hui ? Moins de 10 milliards. Quel était le niveau du déficit budgétaire ? Parce que, si on veut parler de ce que nous avions eu, nous, en termes de legs de la précédente majorité, c'est là la réalité. Qu'est-ce qu'on va céder ? Un déficit qui sera passé sous la barre des 3% du Produit Intérieur Brut, une Sécurité sociale qui aura vu son déficit passer de 20 à moins de 10 milliards…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Très bien, Stéphane LE FOLL…
STEPHANE LE FOLL
Non, mais Jean-Pierre ELKABBACH, devant les Français c'est très important.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous savez ce que vous êtes en train de faire là, vous êtes en train de dire voilà ce qu'on a laissé, donc vous allez partir ! Vous êtes battu, vous vous dites ce matin que vous êtes battu…
STEPHANE LE FOLL
Mais non…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous avez le candidat et vous êtes battu, vous dites voilà ce qu'on va laisser.
STEPHANE LE FOLL
C'est une Matinale d'Europe 1…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Je ne vous lâche pas.
STEPHANE LE FOLL
Oui, vous ne me lâchez pas. Vous me dites on va laisser, non, ce qu'on a trouvé c'était trois fois pire, on va laisser un pays dans un état, en 2017, et il y aura une élection présidentielle, j'ai parfaitement compris, qui fera que les Français auront à choisir, mais nous on a redressé la France.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Autre chose. A l'Assemblée nationale le marathon sur la loi Travail, est-ce qu'il va encore durer 14 jours comme prévu ? Vous sentez bien que les Français en ont assez, est-ce que vous gouvernez ou pas, est-ce que vous la retirez ou vous l'imposez ? Le choix est simple.
STEPHANE LE FOLL
Non, on la discute, d'abord…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, pour aboutir à quoi ?
STEPHANE LE FOLL
C'est la première des choses à faire. Personne ne comprendrait que sur un débat qui porte sur le travail et sur les grandes questions qui engagent les Français, qui les concernent directement, on le voit, on n'est pas une discussion, l'objectif il est toujours le même : favoriser, par de la souplesse, l'embauche en CDI, des gens, et des Français…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça passe durement !
STEPHANE LE FOLL
Et deuxièmement, donner sécurité aux salariés.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce que votre gouvernement, Stéphane LE FOLL, dont vous êtes le porte-parole, peut renoncer à sa loi ?
STEPHANE LE FOLL
Non.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc la loi sera votée.
STEPHANE LE FOLL
Tout sera fait pour que cette loi soit votée, avec une discussion qui permette de l'améliorer, mais d'avoir comme objectif à la fois la sécurité pour les salariés et plus de facilités pour embaucher pour les entreprises.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Deux remarques, très vite, pour l'anecdote, et une autre un peu plus sérieuse. Pour l'anecdote, votre collègue du Nord, Patrick KANNER, vous a invité pour un meeting, en vedette, à Lille. Martine AUBRY a été oubliée. Est-ce que c'est vous qui l'avez gommée ?
STEPHANE LE FOLL
Non. J'ai demandé à Patrick KANNER d'inviter Martine AUBRY, de manière très claire, et moi je ne rentrerai pas dans les débats spécifiques du Nord. J'ai essayé, avec ce que nous avons fait, de réveiller simplement, et de faire prendre conscience à chacun, que ce que nous avons fait mérite d'être défendu.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous n'avez pas peur de Martine AUBRY ?
STEPHANE LE FOLL
Ce n'est pas que je n'ai pas peur de Martine AUBRY, au contraire, mais moi je connais Martine AUBRY, et je respecte Martine AUBRY.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Question sérieuse. Alain ACCO disait tout à l'heure, et c'est vraiment grave, les casseurs veulent blesser, même tuer du flic. Les policiers sont à bout de nerfs, à bout de force, on peut tout craindre. Qu'est-ce que vous faites ?
STEPHANE LE FOLL
Qu'est-ce qu'on fait, c'est qu'on a mis en place, et vous l'avez rappelé, des mesures extrêmement strictes contre les casseurs, on les a condamnés, la justice doit passer, et il y a plusieurs arrestations qui ont été faites. La détermination du gouvernement à lutter contre ces casseurs est totale. Et j'aimerai, et je le dis ce matin, que ceux qui accusent ou qui souhaitent accuser le gouvernement, le ministre de l'Intérieur, comme je l'ai entendu hier, se rappellent une chose, les mêmes n'ont pas condamné les affiches qui ont été sorties par la CGT, qui mettent en cause les forces de l'ordre, et là il n'est plus acceptable d'avoir ce type de comportement. On doit tous être responsables maintenant, tous.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci d'être venu.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 mai 2016