Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invitée ce matin est Najat VALLAUD-BELKACEM, ministre de l'Education nationale. Bonjour.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça y est, vous revalorisez les enseignants.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
820 000 enseignants mais pas que les enseignants, j'ai vu : personnels d'encadrement, d'orientation, psychologues scolaires, l'enseignement public et le privé sous contrat.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui. Pour être plus précise, le PPCR
JEAN-JACQUES BOURDIN
PPCR ! Alors là !
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, c'est comme ça que ça s'appelle : Parcours de Carrière et Rémunérations - qu'on est en train de présenter en ce moment-même aux organisations syndicales - concerne les personnels d'éducation, d'orientation et enseignants. Voilà. Parce que les personnels d'encadrement seront vus un peu plus tard mais ils seront vus aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors des augmentations. Quel niveau d'augmentation ? Allez-y. Prenez-moi deux, trois exemples.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Des augmentations, d'abord une vision générale. L'idée, c'est que nous étions à la traîne en France s'agissant du traitement de nos enseignants. Je vais dire enseignants, mais à chaque fois entendez enseignants, personnels d'orientation et d'éducation. On était à la traîne par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE. Moi je veux faire passer le traitement de nos enseignants en haut de la moyenne de l'OCDE et c'est ce que nous allons faire grâce à ce programme, à ce plan qui va s'étaler entre 20174 et 2020, qui va coûter un milliard d'euros dont 500 millions d'euros dès l'année 2017.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire dès le 1er janvier 2017.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Exactement, dès le 1er janvier 2017. Une deuxième augmentation des rémunérations à tous les échelons pour tous les personnels concernés interviendra au 1er janvier 2019 et donc, du coup, tous les enseignants seront concernés en effet en début de carrière, comme en milieu de carrière, comme en fin de carrière. Pour vous donner quelques exemples précis, par exemple un enseignant stagiaire, c'est-à-dire la première année où il va commencer à enseigner, en début de carrière gagnera 1 400 euros bruts supplémentaires par rapport à aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Par an.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Par an. Par exemple en fin de carrière, mettons un directeur d'école qui aurait exercé en éducation prioritaire pendant une dizaine d'années, qui arrive en fin de carrière, par rapport à aujourd'hui il gagnera mille euros de plus par mois. Donc vous voyez, en fonction des situations
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mille euros de plus par mois en fin de carrière, oui.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Voilà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous récompensez la fidélité.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
On récompense l'engagement d'un directeur d'école, donc mission de responsabilité, qui ait passé dix ans en éducation prioritaire, mission qu'on veut valoriser tout particulièrement, la rémunération va avec. Donc ce n'est pas simplement qu'on augmente les rémunérations de tout le monde, c'est qu'on les augmente, en effet, mais on les pense aussi pour valoriser l'engagement des enseignants.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est presque la rémunération au mérite. C'est presque ça. C'est un peu ça franchement.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est une rémunération qui tient compte de l'engagement et des fonctions que les gens ont accepté d'occuper car nous savons pertinemment que dans l'éducation nationale
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc c'est une prime au mérite.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est une prime à l'engagement. Moi je préfère dire prime à l'engagement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. C'est quand même une révolution philosophique, intellectuelle quand même. Culturelle.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, oui. Parce qu'encore une fois, dans l'éducation nationale, ce n'est pas exactement la même chose que de consacrer plusieurs années à aller enseigner en éducation prioritaire on sait à quel point c'est difficile, on sait à quel point ces postes sont peu attractifs ce n'est pas la même chose d'exercer des missions de directeur d'école ou, pour vous donner quelques exemples, de conseillers pédagogiques, de formateurs, de chefs de travaux. Toutes ces missions, toutes fonctions sont ouvertes à tous les enseignants. Chaque enseignant qui le voudrait peut y accéder. La question c'est est-ce qu'ils sont nombreux à vouloir y accéder. Aujourd'hui pas nécessairement parce que c'est difficile. Pour rendre cela plus attractif, on le rémunère mieux et on le reconnaît mieux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et à cela s'ajoutera la revalorisation de point d'indice des fonctionnaires. On est bien d'accord.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Voilà, absolument. 1,2 % en deux fois, donc 0,6-0,6. Et à cela s'ajoute aussi, pour être tout à fait complète, l'annonce que nous avions faite il y a quinze jours je crois, au sujet des professeurs des écoles dont on alignait enfin l'indemnité dite ISAE sur le montant de celle touchée par les professeurs du secondaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui représente je crois 1 200 euros par an.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Qui passe ce faisant de 400 euros à 1 200. Donc c'est vrai que ce sont des augmentations importantes ; c'est pour ça que je vous dis qu'à la fin de ce protocole PPCR, nous aurons enfin en France en 2020 des enseignants qui seront non seulement au-delà de la moyenne des pays de l'OCDE en termes de traitement mais même, pour les fins de carrière, dans les tous premiers à côté de pays comme l'Allemagne.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce qui m'intéresse aussi, c'est l'évaluation des profs tout au long de leur carrière. Aujourd'hui, il y a des inspections régulières. Comment ça va se passer ? Ça va changer ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors aujourd'hui, vous connaissez en effet le système des inspections, même si entre l'image qu'on s'en fait puis la réalité, il y a souvent un décalage. C'est-à-dire que d'ores et déjà, les corps d'inspection ont été incités par nous à recentrer un peu plus leur rôle autour de missions de pilotage pédagogique, d'accompagnement des enseignants, de formation. Mais enfin, il n'en reste pas moins que l'inspection, c'est toujours ce qu'on imagine, c'est-à-dire l'inspecteur qui arrive un beau matin, qui se met au fond de la salle et puis qui note l'enseignant avec un système de notation qui du coup impacte l'avancement de l'enseignant. Un système de notation et son impact sur l'avancement qui est assez opaque, qui paraît souvent inique, les enseignants ne sont pas inspectés à la même fréquence. Il y en a qui sont inspectés très souvent, d'autres moins souvent en fonction du lieu géographique où ils se trouvent. Bref, tout ce système très administratif, très technocratique, j'ai voulu le remplacer - c'était l'occasion, ce PPCR par un système de véritable gestion des ressources humaines. C'est-à-dire que les corps d'inspection et les personnels de direction seront désormais davantage mobilisés à suivre les enseignants tout au fil de leur carrière pour aller les voir dans leur classe, pour les former
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà. Le chef d'établissement va s'intéresser encore plus à l'évolution de la carrière de ceux qui travaillent dans l'établissement.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Aux côtés des corps d'inspection pour accompagner, conseiller, suivre les enseignants.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Là aussi, c'est une forme d'autonomie. Un peu plus d'autonomie donnée au chef d'établissement quand même. Un peu plus de responsabilités.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Les chefs d'établissement en effet voient leur rôle en matière de management confirmé et, à côté de cela, l'expertise pédagogique appartient au corps d'inspection. Mais les deux ensemble, en effet, doivent suivre au fil de l'eau les enseignants durant toute leur carrière et tout particulièrement durant les sept premières années de prise de métier parce que c'est là que c'est difficile pour un enseignant. Ensuite, pour revenir à la question de l'évaluation à proprement parler car là je viens de vous parler d'un suivi au long cours, l'évaluation se produira lors de quatre rendez-vous de carrière qui seront les mêmes pour tous les enseignants, qui se dérouleront pour le premier au bout de sept ans de métier, pour le deuxième au bout de treize ans de métier, pour le troisième au bout de vingt ans de métier. Et puis enfin, ceux qui auront fait preuve d'un engagement parfaitement remarquable, pourront accéder à une classe exceptionnelle. Donc en fait, tout au long de leur métier les enseignants seront vus dans ces rendez-vous de métier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une valorisation de la carrière.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Et à chacun de ces rendez-vous de métier, ils auront la possibilité pour ceux qui ont eu l'engagement le plus remarquable encore une fois, de gagner un an dans leur avancement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça c'est du mérite. C'est ce que je disais.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est une reconnaissance de la valeur, une valorisation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une nouvelle organisation.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais je crois que c'est important. Si je peux me permettre simplement, il a souvent été dit au sujet des enseignants : mais finalement, qu'on s'implique, qu'on s'engage ou qu'on ne le fasse pas, qu'on innove ou qu'on n'innove pas, c'est pareil, on a tous la même carrière. Non, ce ne sera plus le cas. Aujourd'hui ceux qui innovent, ceux qui s'engagent, ceux qui acceptent des fonctions difficiles, seront reconnus comme tels.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un vrai changement. Mais Najat VALLAUD-BELKACEM, ça va coûter 500 millions d'euros dès 2017, un milliard jusqu'en 2020, on est bien d'accord. D'où vient cet argent ? D'abord 2017, on a tous en tête l'élection présidentielle. C'est un beau cadeau fait aux enseignants, aux personnels de l'éducation nationale qui en général votent à gauche.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Moi j'entends souvent ce commentaire
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. C'est une question que je vous pose, vous y avez pensé ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Mais honnêtement, si on veut faire preuve d'un peu de bonne foi, il faut d'abord se souvenir de deux choses. Il faut se souvenir de ce que 2012, élection présidentielle je me souviens, j'étais l'une des porte-parole du candidat à l'époque François HOLLANDE que dit-il exactement ? Il dit : ce quinquennat, la moitié du temps sera consacrée à redresser les finances de ce pays, à redresser le pays d'ailleurs ; la deuxième moitié du temps, celle qui suivra, donc la fin du quinquennat, sera consacrée à redistribuer. C'est exactement ce qui est en train de se produire et ce qui me fascine, c'est que derrière le commentaire et l'analyse autour des cadeaux, on oublie complètement cet engagement-là qui pourtant était simple, limpide. Donc oui, nous avons passé la première partie du quinquennat à redresser le pays. Aujourd'hui de fait les choses commencent à s'améliorer d'un point de vue économique, je ne vais pas y revenir, le président y revient souvent. Et donc, enfin nous pouvons tenir notre engagement de redistribution. La deuxième chose, c'est que ce n'est pas vrai de dire que nous avons attendu la fin du quinquennat pour mener ces différentes augmentations très légitimes, notamment des traitements des enseignants. Regardez par exemple s'agissant des enseignants en éducation prioritaire : quand j'ai mené la réforme de l'éducation prioritaire, on était à l'automne 2014. Que j'ai décidé déjà d'augmenter les enseignants en éducation prioritaire. C'est une mesure qui date de l'automne 2014. Quand Vincent PEILLON en son temps a créé cette fameuse indemnité ISAE que nous avons décidé d'augmenter, on est en 2013. Donc en fait, tout ça s'est fait de façon progressive et très cohérente.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. 640 millions d'euros, vous avez vu le chiffre que vous demande le président de l'Association des maires de France, François BAROIN ? 640 millions d'euros pour financer la réforme des rythmes scolaires. Vous allez le satisfaire ou pas ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
D'abord il n'y a rien de surprenant dans ce que dit François BAROIN si je peux me permettre, puisqu'il disait déjà exactement la même chose il y a un an. C'est son estimation du coût pour les communes de la réforme des rythmes scolaires. D'abord, comme le dit très justement la sénatrice Françoise CARTRON, qui a mené une grande enquête sur les rythmes scolaires ces derniers temps et je vous invite à lire son rapport, cela représenterait donc à peu près 1 % des 63 milliards d'euros de dépenses du bloc communal. Je ferme la parenthèse. Mais en tout état de cause oui, l'Etat n'a jamais dit que c'était gratuit pour les communes que de mettre en place les rythmes scolaires. C'est précisément pour cette raison que nous avons mis en place un fonds de soutien pour les y accompagner et que j'ai pris la décision de le pérenniser ce fonds de soutien. Parce qu'à l'origine, il avait été mis en place de façon temporaire pour impulser les rythmes et nous avons décidé de le pérenniser donc tous les ans, nous versons de l'argent aux communes pour les accompagner.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais les communes vous disent : on n'a pas assez d'argent, on ne peut pas tenir. D'abord, est-ce qu'il y a eu une évaluation de cette réforme ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors d'abord, « on n'a pas assez d'argent, on ne peut pas tenir ». Franchement, moi qui fais le tour vraiment de France pour aller voir les projets divers et variés, je peux vous dire que d'une commune à une autre, on trouve comment s'organiser. On n'est pas obligé de faire des projets luxueux pour que ça ait un intérêt pédagogique pour les enfants. Je constate tout de même qu'aujourd'hui, alors qu'avant la réforme des rythmes scolaires vous aviez à peine 25 % d'enfants qui avaient accès à une activité périscolaire en dehors du temps scolaire, aujourd'hui grâce à la réforme des rythmes scolaires, vous avez 85 % d'enfants qui ont accès à une activité périscolaire et dans ces 85 % d'enfants, c'est essentiellement des enfants de classe populaire. Ça veut dire qu'on a rempli notre mission avec le périscolaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez la rendre publique cette évaluation promise ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
En fait l'évaluation, pour qu'elle soit intéressante, il faut qu'elle réponde à plusieurs questions. La première, c'est combien de communes mettent en place du périscolaire. Elles sont de plus en plus nombreuses aujourd'hui, 92 % des communes écoutez-moi, c'est important 92 % des communes se sont engagées dans ce qu'on appelle un plan éducatif territorial qui garantit qu'il y a bien du périscolaire de qualité qui est mis en place. Première évaluation. Deuxième évaluation, est-ce que de fait ça donne accès à davantage d'enfants à du périscolaire ? Oui, c'est ce que je viens de vous répondre. Troisième évaluation, est-ce que notre réforme des rythmes scolaires qui se voulait d'abord pédagogique a un effet intéressant en termes d'apprentissage des enfants ? L'étude est en train d'être menée sur un échantillon très important d'enfants. Les résultats seront produits en 2017 mais sans attendre
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais quand en 2017 ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
En 2017, ne vous inquiétez pas, ça arrivera assez prochainement mais sans attendre
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une échéance électorale en 2017, donc avant la présidentielle.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est pour ça que je vous dis que l'idée, ce n'est pas de repousser aux calendes grecques. Sans attendre, point d'étape en juin là. Dans quelques jours, je ferai un point d'étape sur les premiers résultats que nous avons dans le cadre de ces enquêtes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que donnent les premiers résultats ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Vous serez agréablement surpris car je ne doute pas que vous souteniez cette réforme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça, c'est votre jugement. 60 000 postes dans l'éducation, c'était la promesse de François HOLLANDE. On en sera où à la fin du quinquennat ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
On en sera bien à 60 000 en tout, c'est-à-dire
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il manque 26 417 postes à pourvoir. C'est ça ? En un an.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Juste une précision rapide parce qu'après, sinon, on est poursuivi par la brigade du fact checking.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais c'est normal. Il a fait son boulot et on a besoin de ça.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Absolument donc une précision rapide. Quand on dit 60 000 postes pour l'éducation, c'est ç'a toujours été dit comme ça 54 000 pour l'éducation nationale, 5 000 pour l'enseignement supérieur et 1 000 pour l'enseignement agricole. Voilà. Donc reprenons les 54 000 pour l'éducation nationale, les autres sont évidemment tenus aussi mais reprenons les 54 000 pour l'éducation nationale. Oui, ils seront tenus. Je connais l'argument qui consiste à dire : oui, mais vous avez peut-être ouvert les postes mais comme il y a eu un déficit de candidatures en 2013 pas aujourd'hui, en 2013 ça fait un manque à gagner. Mais non, pas du tout. Parce que même quand il y a eu un déficit de candidatures, ce que je ne conteste pas ce dont il ne faut pas s'étonner puisque je vous rappelle qu'avant 2012, on supprimait des postes dans l'éducation nationale donc pour créer de l'appétence chez les étudiants pour ce métier d'enseignant, c'était compliqué. Donc il nous a fallu, nous, du temps pour recréer cette appétence. Un étudiant, le temps qu'il pense à s'engager dans ces concours, ça prend deux ans au minimum. Bref. Donc c'est vrai qu'en 2013, on a eu du mal à pourvoir tous les postes. Pour autant, les postes en question n'ont pas été rendus à Bercy. Vous comprenez, ça ? Ils ont quand même été ouverts, on a mis des contractuels dessus et évidemment maintenant qu'enfin les candidatures enfin, les concours font le plein à nouveau, on va pouvoir mettre des vrais titulaires à la place des contractuels. Donc à la fin du quinquennat, les 54 000 seront bel et bien là.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'enseignement de l'arabe à l'école, j'ai vu la petite polémique autour de la langue arabe. Rentrée 2016, des cours donc intégrés au temps scolaire. On est bien d'accord, Najat VALLAUD-BELKACEM ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, vous parlez d'une polémique, une polémique très intéressante je trouve, à moins que vous ne vouliez la traiter par la légère. Enfin, libre à vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, je l'ai traitée. Pardonnez-moi mais si vous écoutez RMC, je l'ai traitée ici.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Non, non, non, ce n'était pas une critique. Je vous demande
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'arabe une langue communautaire, c'est la remarque qui a été faite par une députée Les Républicains. On l'a traitée et on a bien expliqué que l'arabe était enseigné dans 26 pays dans le monde. On est bien d'accord. Mais moi ce qui m'intéresse, c'est l'enseignement de l'arabe en France aujourd'hui.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Tout à fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et ce qui va se passer. Qui va enseigner l'arabe ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Voilà. En fait le sujet d'abord, plus généralement, c'est celui de l'enseignement des langues vivantes étrangères dans notre pays. En gros je ne vais pas être trop longue mais là aussi on est à la traîne, la France, soyons clairs. On est mauvais dans les résultats de l'OCDE ou les résultats internationaux en termes de maîtrise par nos jeunes des langues vivantes étrangères. Donc pour répondre à cela, nous avons décidé dans nos réformes éducatives de faire en sorte qu'on commence plus tôt l'apprentissage des langues vivantes étrangères. C'est ce qui nous conduit à partir de la rentrée prochaine, à faire commencer la langue vivante une dès la classe de CP, et la langue vivante deux dès la classe de 5ème. Auparavant il fallait attendre un an de plus à chaque fois. Donc plus grande précocité de l'apprentissage des langues vivantes étrangères, et deuxième point, je viens à votre sujet, diversité de l'offre de langue vivante étrangère.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Diversité, ça veut dire
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'arabe à partir de quelle classe, si les parents le demandent ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Qui peut être enseigné dès la classe de CP, dès lors qu'on a évidemment les moyens humains pour le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais par qui ?
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Alors, les moyens humains pour le faire, d'ailleurs ça vaut pour toutes les langues vivantes étrangères.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais là
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Soit nous avons des professeurs d'école, capables, si c'est en première langue que c'est choisi, de le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais aujourd'hui, ce sont des professeurs qui viennent de l'étranger.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Je vais poursuivre. Soit nous avons des professeurs d'école capables de le faire, soit nous n'en avons pas mais qu'il y a une demande quand même, auquel cas nous faisons appel à des intervenants étrangers. Mais c'est le cas aussi sur l'allemand, si vous voulez, c'est ça qu'il faut comprendre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, d'accord, non mais
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
C'est le cas sur toutes les langues. La question s'agissant d'un certain nombre de langues, d'une dizaine de langues, pour être plus précise, donc l'arabe, et le turc, et le serbe, et le croate, et le portugais, etc., c'est que jusqu'à présent, notre pays était engagé dans des conventions dites ELCO, avec les pays en question, dans le cadre desquelles on faisait venir des enseignants étrangers de ces pays pour enseigner ces langues chez nous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est fini.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Et ma volonté, c'est de mettre fin à ce système. Mais c'est en cela que la polémique avec Annie GENEVARD est absurde.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, parce que le Haut conseil à l'intégration nous parle de risques de dérives communautaristes, ça peut arriver, vous le savez bien.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Oui, oui, oui. Pourquoi ? Parce que ces enseignants qu'on faisait venir de l'étranger n'étaient globalement pas ou très peu contrôlés, académiquement, par notre système Education nationale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous allez former des enseignants .
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Donc notre idée c'est que désormais on va passer à un système où on continuera à faire appel à des intervenants étrangers, parce que sinon on n'aura pas suffisamment de professeurs des écoles formés pour enseigner cette diversité de langue vivante. Mais, ces intervenants étrangers, c'est nous qui concocteront le programme, qui le vérifierons, qui l'évaluerons, nous inspecterons ces enseignants, ils seront intégrés aux équipes pédagogiques, ils seront recrutés sur un certain nombre de critères, dont la maitrise de la langue française, tous sujets qui n'étaient pas réglés avant. Donc on passe vraiment à un tout autre système, beaucoup mieux maitrisé, beaucoup mieux contrôlé, mais dans lequel on donne quand même la possibilité aux enfants d'avoir accès y compris à des langues dites rates, et se faisant, je ne parle pas de l'arabe, car je ne considère pas que ce soit une langue rare.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Najat VALLAUD-BELKACEM d'être venue nous voir.
NAJAT VALLAUD-BELKACEM
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 1er juin 2016