Texte intégral
Monsieur le préfet,
Monsieur le maire de Saint-Laurent-des-Arbres,
Monsieur le commandant du camp militaire, mon colonel,
Messieurs représentants des associations des anciens combattants,
Messieurs les porte-drapeaux,
Mesdames et messieurs,
La France fait aujourd'hui face à son histoire et face à sa vérité. Le Président de la République a reconnu officiellement la responsabilité de l'Etat dans l'abandon, il y a un demi-siècle de cela, des anciens membres des formations supplétives et de leurs familles.
La France ne masque rien des tragédies du passé. Elle a reconnu l'abandon des harkis, de ces hommes courageux envers lesquels elle n'a tenu ni ses promesses ni ses engagements.
En 2016, la France commémore la guerre d'Algérie avec le souci de la paix des mémoires. Elle veut honorer les souvenirs de chacun : ceux des militaires et des civils victimes des massacres et des conflits, ceux des rapatriés et ceux des harkis.
Pourchassés comme des traîtres alors qu'ils avaient été fidèles à leur engagement pour la France, victimes d'une répression aveugle et féroce, les harkis, trouvèrent refuge en France. C'est ainsi que 2189 familles de harkis furent replacées dans des hameaux forestiers, dans lesquels elles vécurent et travaillèrent.
Le camp de Saint-Maurice a une longue histoire, contrastée et douloureuse. Retracer son histoire, c'est se replonger au cur de ces phases noires et douloureuses de la dernière partie du XXème siècle.
Mais surtout, et c'est cela que je suis venu rappeler aujourd'hui, le camp, à partir du 29 octobre 1962, devient le 4ème camp d'accueil pour les harkis. En janvier 1963, considéré comme un camp de transit, il compte 5542 occupants dont près de la moitié sont des enfants.
Près de 10 000 personnes passent à Saint-Maurice entre le 29 octobre 1962 et le 1er décembre 1963.
Les conditions de vie y sont particulièrement précaires et insalubres. « Les baraquements sont abominables, sales et froids », témoigne un harki. « Tentes et baraques voguent sur une mer de boue quand il pleut ou à la fonte de la neige ». Les baraques sont sinistres. Il n'y aucune végétation, aucune herbe. L'hygiène est déplorable.
La discipline est sévère. Dans le camp est installée une prison. Le directeur y enferme arbitrairement ceux qu'il juge alcoolique, chahuteur ou contestataire. Ceux qui eurent à connaitre ces traitements indignes étaient souvent des jeunes.
En 1965, le camp devient une cité d'accueil et d'hébergement pour des personnes jugées psychiquement ou psychologiquement inaptes au monde professionnel, dépourvues de ressources et fragiles. Une véritable petite ville parallèle se constitue, avec foyer, salles de réunion, des salles de jeux et de café. Mais les tensions y sont toujours vives, les conditions de vie indignes de la France, les souffrances sociales indéniables.
A l'été 1975, le camp a été, avec ceux de Bias, Rivesaltes, et Bourg-Lastic, le principal foyer du mouvement de révolte des « harkis », qui s'est étendu à tout le pays, ce qui conduit le gouvernement de l'époque à décider de sa fermeture. Les familles sont relogées dans le Gard et dans le département voisin. Le camp reprend son usage premier de camp militaire.
Il a fallu du temps pour que ce lieu de souffrance devienne un lieu de mémoire.
En 1992, une plaque en hommage aux harkis est apposée dans le camp. Aujourd'hui, nous poursuivons sur ce chemin parfois douloureux, mais ô combien nécessaire, de la mémoire.
Le « plan harkis », annoncé par le Premier Ministre en septembre 2014, prévoit l'inauguration de stèles du souvenir dans les anciens hameaux de forestage des harkis.
Le 16 juillet 2015, je me trouvais en Corse, à Zonza, afin inaugurer la première plaque officielle portant reconnaissance des lieux de vie et de travail des harkis et de leur famille. Je me suis également rendu dans les hameaux de Lapradelle et de Magland, et je me rendrai demain au hameau d'Ongles.
Je voudrais remercier, pour leur engagement au service de la mémoire harkie, l'Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre et l'Office National des Forêts. Les deux Offices ont signé une convention qui leur permet d'assurer au mieux la pose de plaques mémorielles dans les hameaux.
Je veux également remercier, pour sa mobilisation au service de la mémoire du territoire, la commune de Saint-Maurice l'Ardoise.
Nous avons un double engagement à tenir envers les harkis : un engagement matériel et un engagement mémoriel.
Sur le plan matériel, l'allocation de réparation des harkis ou encore l'aide au rachat de trimestre de cotisations de retraites pour les enfants de harkis ont été revalorisées. Pour simplifier les démarches, l'Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre est devenu le guichet unique pour tous les harkis.
Dans le Gard, le service départemental de l'Office continue de former des cadres pour promouvoir le dispositif des emplois réservés aux harkis et fils de harkis. 186 dossiers ont été d'ores et déjà traités dans le département et 19 candidats ont été recrutés dans les services de l'Etat.
Sur le plan mémoriel, nous avons mené de nombreuses actions dont la promotion, partout en France, de l'exposition « Parcours de Harkis et de leurs familles ».
Dans le Gard, l'exposition a déjà été présentée cinq fois. Elle inclut de nombreux témoignages, dont celui d'un fils de harkis qui a vécu dans le camp de Saint-Maurice.
Ensemble, nous devons continuer à faire vivre la mémoire des harkis. Elle mérite notre attention. Elle mérite notre compassion. Comme le disait le Premier Ministre en septembre 2014, « la France sait ce qu'elle vous doit. Elle accueille votre histoire dans la mémoire nationale. Elle vous manifeste, ( ) toute sa reconnaissance et toute sa fraternité. »
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 7 juillet 2016
Monsieur le maire de Saint-Laurent-des-Arbres,
Monsieur le commandant du camp militaire, mon colonel,
Messieurs représentants des associations des anciens combattants,
Messieurs les porte-drapeaux,
Mesdames et messieurs,
La France fait aujourd'hui face à son histoire et face à sa vérité. Le Président de la République a reconnu officiellement la responsabilité de l'Etat dans l'abandon, il y a un demi-siècle de cela, des anciens membres des formations supplétives et de leurs familles.
La France ne masque rien des tragédies du passé. Elle a reconnu l'abandon des harkis, de ces hommes courageux envers lesquels elle n'a tenu ni ses promesses ni ses engagements.
En 2016, la France commémore la guerre d'Algérie avec le souci de la paix des mémoires. Elle veut honorer les souvenirs de chacun : ceux des militaires et des civils victimes des massacres et des conflits, ceux des rapatriés et ceux des harkis.
Pourchassés comme des traîtres alors qu'ils avaient été fidèles à leur engagement pour la France, victimes d'une répression aveugle et féroce, les harkis, trouvèrent refuge en France. C'est ainsi que 2189 familles de harkis furent replacées dans des hameaux forestiers, dans lesquels elles vécurent et travaillèrent.
Le camp de Saint-Maurice a une longue histoire, contrastée et douloureuse. Retracer son histoire, c'est se replonger au cur de ces phases noires et douloureuses de la dernière partie du XXème siècle.
Mais surtout, et c'est cela que je suis venu rappeler aujourd'hui, le camp, à partir du 29 octobre 1962, devient le 4ème camp d'accueil pour les harkis. En janvier 1963, considéré comme un camp de transit, il compte 5542 occupants dont près de la moitié sont des enfants.
Près de 10 000 personnes passent à Saint-Maurice entre le 29 octobre 1962 et le 1er décembre 1963.
Les conditions de vie y sont particulièrement précaires et insalubres. « Les baraquements sont abominables, sales et froids », témoigne un harki. « Tentes et baraques voguent sur une mer de boue quand il pleut ou à la fonte de la neige ». Les baraques sont sinistres. Il n'y aucune végétation, aucune herbe. L'hygiène est déplorable.
La discipline est sévère. Dans le camp est installée une prison. Le directeur y enferme arbitrairement ceux qu'il juge alcoolique, chahuteur ou contestataire. Ceux qui eurent à connaitre ces traitements indignes étaient souvent des jeunes.
En 1965, le camp devient une cité d'accueil et d'hébergement pour des personnes jugées psychiquement ou psychologiquement inaptes au monde professionnel, dépourvues de ressources et fragiles. Une véritable petite ville parallèle se constitue, avec foyer, salles de réunion, des salles de jeux et de café. Mais les tensions y sont toujours vives, les conditions de vie indignes de la France, les souffrances sociales indéniables.
A l'été 1975, le camp a été, avec ceux de Bias, Rivesaltes, et Bourg-Lastic, le principal foyer du mouvement de révolte des « harkis », qui s'est étendu à tout le pays, ce qui conduit le gouvernement de l'époque à décider de sa fermeture. Les familles sont relogées dans le Gard et dans le département voisin. Le camp reprend son usage premier de camp militaire.
Il a fallu du temps pour que ce lieu de souffrance devienne un lieu de mémoire.
En 1992, une plaque en hommage aux harkis est apposée dans le camp. Aujourd'hui, nous poursuivons sur ce chemin parfois douloureux, mais ô combien nécessaire, de la mémoire.
Le « plan harkis », annoncé par le Premier Ministre en septembre 2014, prévoit l'inauguration de stèles du souvenir dans les anciens hameaux de forestage des harkis.
Le 16 juillet 2015, je me trouvais en Corse, à Zonza, afin inaugurer la première plaque officielle portant reconnaissance des lieux de vie et de travail des harkis et de leur famille. Je me suis également rendu dans les hameaux de Lapradelle et de Magland, et je me rendrai demain au hameau d'Ongles.
Je voudrais remercier, pour leur engagement au service de la mémoire harkie, l'Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre et l'Office National des Forêts. Les deux Offices ont signé une convention qui leur permet d'assurer au mieux la pose de plaques mémorielles dans les hameaux.
Je veux également remercier, pour sa mobilisation au service de la mémoire du territoire, la commune de Saint-Maurice l'Ardoise.
Nous avons un double engagement à tenir envers les harkis : un engagement matériel et un engagement mémoriel.
Sur le plan matériel, l'allocation de réparation des harkis ou encore l'aide au rachat de trimestre de cotisations de retraites pour les enfants de harkis ont été revalorisées. Pour simplifier les démarches, l'Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre est devenu le guichet unique pour tous les harkis.
Dans le Gard, le service départemental de l'Office continue de former des cadres pour promouvoir le dispositif des emplois réservés aux harkis et fils de harkis. 186 dossiers ont été d'ores et déjà traités dans le département et 19 candidats ont été recrutés dans les services de l'Etat.
Sur le plan mémoriel, nous avons mené de nombreuses actions dont la promotion, partout en France, de l'exposition « Parcours de Harkis et de leurs familles ».
Dans le Gard, l'exposition a déjà été présentée cinq fois. Elle inclut de nombreux témoignages, dont celui d'un fils de harkis qui a vécu dans le camp de Saint-Maurice.
Ensemble, nous devons continuer à faire vivre la mémoire des harkis. Elle mérite notre attention. Elle mérite notre compassion. Comme le disait le Premier Ministre en septembre 2014, « la France sait ce qu'elle vous doit. Elle accueille votre histoire dans la mémoire nationale. Elle vous manifeste, ( ) toute sa reconnaissance et toute sa fraternité. »
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 7 juillet 2016