Déclaration à la presse de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur le terrorisme et le tourisme en France, à Chambord le 26 juillet 2016.

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Circonstance : Déplacement en région sur le thème du tourisme (Châteaux de la Loire), le 26 juillet 2016

Texte intégral

Les circonstances sont terribles. Nous venons en effet d'apprendre cette terrible nouvelle d'un prêtre catholique attaqué, assassiné, avec des fidèles catholiques dans une église, menacés.
Je voudrais d'abord exprimer ma totale solidarité avec les victimes et avec tous ceux qui se recueillaient pacifiquement dans une église, comme cela doit être le cas partout dans notre pays.
Je voudrais aussi dire que, dans ces circonstances, il n'y a qu'un seul message : restons unis.
L'enquête est commencée et elle dira exactement ce qui s'est passé et les motivations de cet acte barbare, qui vient s'ajouter à d'autres actes barbares et qui touche profondément notre pays.
Restons unis, c'est le message que je voudrais adresser encore et souligner davantage. Car ceux qui sont à l'origine de tous ces attentats - je pense à celui de Nice mais encore, ces derniers jours, en Allemagne - veulent diviser nos sociétés, nos démocraties, notre «vivre ensemble» entre croyants et incroyants, entre catholiques et musulmans, entre laïcs et croyants. Donc ce qui fait notre spécificité, notre démocratie, notre force, c'est cela aussi qui est attaqué. Il faut donc rester unis et continuer à nous mobiliser.
Pour ma part, je vais donc retourner à Paris, reporter cette visite ici qui venait à un moment où les professionnels du tourisme sont particulièrement engagés, avec énormément de compétence et de talent, de capacités d'innovation. Donc, je voulais venir sur place pour saluer cet engagement dans une région qui est mondialement connue ; c'est la région des châteaux de la Loire et c'est une région dont une grande partie de son patrimoine est classée au patrimoine mondial de l'humanité à l'UNESCO, avec des initiatives touristiques les plus diverses et qui font que l'emploi dans cette région, pour une grande partie, dépend du tourisme. C'est d'ailleurs une des régions les plus dynamiques sur le plan du tourisme.
C'est ce message de soutien aux professionnels, qui ont d'ailleurs été durement touchés par les inondations ces derniers mois, que j'étais venu apporter ici. Mais je reviendrais parce que ce message est toujours d'actualité.
Et je dis à tous les touristes qui sont dans cette région, comme dans toutes les régions de France que tout le maximum est fait pour assurer leur sécurité, assurer leurs conditions d'accueil et que cette mobilisation pour les aider à passer de bonnes vacances, de bons séjours, c'est la mobilisation de tous les professionnels, de tous les Français, de tous les pouvoirs publics. Ce partenariat est celui que j'ai évoqué, notamment, en installant, le 13 juillet, le comité d'urgence pour le tourisme.
Donc, notre bataille va continuer, notre mobilisation va continuer ; c'est celle de la France, c'est celle de notre mode de vie, c'est celle de notre modèle de société. Mais aujourd'hui, vous comprenez que la visite n'était plus tout à fait d'actualité.
Je vais donc retourner pour mener mon action comme ministre des affaires étrangères. J'étais la semaine dernière à Washington lors de la réunion de la coalition contre Daech.
Cette mobilisation contre le terrorisme est à la fois internationale - en Irak, en Syrie, en Libye, encore ces derniers jours des débats au conseil de sécurité -, mais aussi en Europe, parce que les Européens doivent se protéger et encore davantage - car tous les pays sont concernés - et puis, bien sûr, elle est en France. C'est à la fois l'affaire bien sûr de l'État, qui doit être plus que jamais mobilisé et c'est aussi l'affaire de tous les Français.
C'est pourquoi je redis mon souhait que, face à l'horreur, c'est notre capacité à nous rassembler qui sera aussi la meilleure réponse.
Q - Après Nice, c'est compliqué de faire venir des touristes en France, d'attirer encore des touristes ?
R - Il y a beaucoup de touristes en France. La France est un des pays qui accueille le plus de touristes, vous le savez : 85 millions l'année dernière. Il y avait eu une chute à la fin de l'année après les attentats du 13 novembre, surtout à Paris. Là, il y a évidemment la région de Nice qui est touchée particulièrement ; hier, le ministre de l'économie, accompagné du secrétaire d'État auprès de moi, Matthias Fekl, Martine Pinville, secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, se sont rendus sur place. Aujourd'hui, il y avait cette visite que j'ai effectuée ici pour rappeler les engagements qui sont pris, les mesures supplémentaires qui sont prises pour aider notamment les professionnels mais aussi adresser un message de confiance aux touristes et aux Français d'abord qui partent en vacances, qui sont nombreux et qui doivent aussi se sentir protégés et accueillis.
C'est cela l'enjeu, c'est un combat. Nous savons que ce combat n'est pas terminé, il est devant nous. Et, en même temps, nous devons continuer à vivre. C'est, je crois, le sentiment de beaucoup de Français, combien ont dit qu'ils voulaient continuer à aller voir leurs amis, continuer à prendre des vacances ? Donc, il faut que ce message soit encore plus fort parce que c'est aussi la réponse que nous devons apporter, c'est une des réponses. C'est celle de la sécurité mais c'est celle aussi de la vie, du combat pour la vie et de notre mode de vie, de notre modèle de société ; on ne va pas le laisser défaire, pour cela il n'y a qu'une réponse, c'est notre unité.
Q - Les lieux de culte doivent-ils être particulièrement sécurisés ?
R - Ils sont très protégés par le ministère de l'intérieur, police et gendarmerie, l'opération Sentinelle de l'armée. Mais, finalement, vous savez bien qu'une sécurisation à 100% est très difficile à assurer. Et il sera temps, je crois, dans le cadre de ce nouveau drame, de tirer tous les enseignements. Et c'est l'enquête judiciaire qui commence qui va nous éclairer. Je crois qu'il faut à la fois apporter tout notre soutien aux forces de police et de gendarmerie, à l'opération Sentinelle, tous ces hommes et femmes qui font un travail remarquable, souvent parfois dangereux, nous avons en mémoire l'attaque contre le commissariat de Joué-lès-Tours, nous n'avons pas oublié les policiers blessés qui ont su réagir aussi. Donc, ils ont besoin de tout notre soutien. Et, en même temps, je crois que c'est la société tout entière qui doit être mobilisée et vigilante.
Q - Les étrangers pourraient déserter la France ?
R - Il ne faut pas tirer de conclusions trop rapides. Je pense que c'est au bout de la période estivale qu'il faut tirer des enseignements. Car nous avons des capacités d'observations mensuelles qui montrent qu'il y a des montées et des descentes. Donc, il faut tirer les enseignements sur la durée. Et je crois que la période qui a joué en défaveur de cette région a été très liée notamment aux inondations qui ont été très perturbantes, qui ont mobilisé beaucoup d'énergie, de moyens. Les choses étaient en train de se redresser, je dois dire. Donc, il faut aussi rester mobilisé.
Quand j'ai réuni les professionnels dans le comité national d'urgence que j'ai mis en place la semaine dernière, les professionnels ne souhaitaient pas un discours où tout va mal, ils souhaitaient un discours : on est capable de vous accueillir. C'est ce que les élus qui m'accompagnent me disent ici, les professionnels aussi qui souhaitent avoir un message positif et encourageant, pour dire : on peut vous accueillir et on pourra le faire dans les meilleures conditions possibles.
Donc, la question des touristes étrangers ne se pose pas qu'à la France, elle se pose dans de nombreux pays. Je crois qu'il faut garder raison. C'est un combat, je le dis ; ce combat, il faut le mener avec la clairvoyance, la sérénité nécessaire mais aussi une vigilance nécessaire. C'est ce que nous faisons et ce que nous allons continuer à faire. Il ne s'agit pas de baisser les bras. Baisser les bras, ce serait abandonner le combat. Chacun à son poste ; celui qui travaille dans le tourisme est à son poste, comme le policier, le gendarme est à son poste, comme l'éducateur est à son poste. Nous devons, tous, Françaises, Français, continuer à nous mobiliser pour notre pays. J'ai confiance dans nos capacités, même si c'est dur, même si c'est douloureux, même si c'est dangereux, même si cela fait peur, même si cela peut provoquer de l'angoisse mais de la colère aussi, mais il faut que l'on garde ce que nous sommes. Plus nous renoncerons à ce que nous sommes, plus nous nous affaiblirons par rapport à ceux qui veulent nous détruire. Merci.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 juillet 2016