Interview de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports à Europe 1 le 5 août 2016, sur la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Rio de Janeiro.

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Média : Europe 1

Texte intégral


JOURNALISTE
Voici l'interview politique d'Europe 1. Samuel, vous recevez ce matin Patrick KANNER, le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.
SAMUEL ETIENNE
Et nous sommes en ligne avec le ministre depuis le Brésil, où s'apprêtent à débuter les Jeux Olympiques de Rio. Bonjour Patrick KANNER, merci d'être avec nous ce matin.
PATRICK KANNER
Bonjour à vous toutes et à vous tous.
SAMUEL ETIENNE
Vous y serez, bien sûr, ce soir, à la cérémonie d'ouverture, aux côtés du président HOLLANDE, je suppose.
PATRICK KANNER
Oui, tout à fait, et ce sera notre deuxième journée sur Rio.
SAMUEL ETIENNE
Vous êtes arrivé effectivement il y a 24 heures au Brésil. Dites-nous, quelle est l'ambiance ? Certains correspondants de médias étrangers constatent que pour l'heure, cette ambiance est morose, que les Brésiliens estiment avoir payé beaucoup trop cher pour ces jeux.
PATRICK KANNER
Vous savez, c'est un investissement d'avenir, les Jeux Olympiques, naturellement il y a un coût au départ, mais en même temps, je vois bien les transformations qui ont été réalisées. Nous étions hier sur Bara (phon), qui est un site très important dans ces Jeux Olympiques, avec de nouvelles constructions, de nouveaux bâtiments, de nouveaux logements, de nouveaux services à la population, donc naturellement il y a un coût au départ, et puis après il y a la satisfaction de pouvoir accueillir le plus grand évènement mondial, suivi par la population. Donc voilà, je peux comprendre, dans un pays qui est en crise sur le plan économique, qui a des difficultés sur le plan social, que l'on puisse se dire : « Mais, est-ce qu'il fallait le faire ? ». J'espère qu'à un moment donné, les Brésiliens reconnaitront que cela a été utile pour la reconnaissance de leur pays, deux ans après avoir accueilli la Coupe du monde de football.
SAMUEL ETIENNE
Patrick KANNER, le jour même de l'ouverture de ces Jeux, le CIO a enfin indiqué le nombre de Russes qui allaient pouvoir participer à ces Jeux, ils sont 271 contre 389 sportifs qui étaient initialement sélectionnés, c'est le résultat des arbitrages des fédérations internationales, réalisés à la demande du CIO. Monsieur le Ministre, le rapport McLaren avait conclu à un système de dopage généralisé en Russie, et finalement, près de 70 % des athlètes russes sont autorisés à aller aux Jeux. Vous n'avez pas le sentiment que c'est un message de faiblesse qui vient d'être envoyé ?
PATRICK KANNER
Je pourrais vous répondre que 30 % des athlètes russes n'iront pas aux Jeux et que le travail a été fait, et je n'en doute pas, bien fait par les Fédérations internationales, qui ont ainsi sanctionné des athlètes sur lesquels on pouvait avoir des doutes, très concrètement, de dopage. Le CIO a appliqué une règle, que je considère comme étant équilibrée, à savoir reconnaitre qu'il y a du dopage en Russie, et d'ailleurs les autorités russes devront faire, permettez-moi l'expression, le ménage, à un moment donné, et je pense que la prise de conscience est réelle. Aujourd'hui, quand je vois les déclarations du ministre russe des Sports, ou quand je vois les déclarations du président du Conseil national olympique russe, donc c'est plutôt un signe encourageant, mais il est clair que la Russie a commis des irrégularités. Quand je dis la Russie, je ne parle pas de l'Etat en tant que tel, mais je parle globalement d'un système qui a été extrêmement défaillant par rapport au dopage. Vous savez, le dopage c'est une course contre la montre, c'est une course de vitesse, il faut avoir un principe de zéro tolérance en matière de dopage, c'est ce que nous pratiquons d'ailleurs en France, et moi je me félicite d'être le ministre des Sports, qui dispose d'un système antidopage particulièrement performant pour notre pays, et qui d'ailleurs nous sera très utile dans la candidature que nous allons porter pour les J.O de 2024. Donc, le CIO a pris une...
SAMUEL ETIENNE
Et on va en parler. Vous n'auriez pas voulu que le CIO et les fédérations internationales envoient un message tout de même plus ferme à l'encontre du dopage ?
PATRICK KANNER
Eh bien vous savez, le message qui aurait été « plus ferme », pour reprendre votre expression, c'est d'interdire à tout athlète russe de pouvoir participer aux Jeux. Mais c'est une sanction collective qui ne tient pas compte des réalités individuelles. Là, il y a eu un travail, qui a été fait de manière extrêmement rapide, je vous le concède, peut-être trop rapide, diront certains, mais en tout cas un travail de tri vis-à-vis des athlètes. J'espère que ce travail a été bien fait, et que les Jeux seront propres et que notamment les athlètes russes qui seront présents, auront toutes les qualités pour pouvoir concourir.
SAMUEL ETIENNE
Patrick KANNER, vous êtes venu soutenir la délégation française, est-ce que vous avez un chouchou, des chouchous, un ou des sportifs que vous allez soutenir particulièrement ? Le podium de coeur des Français, selon un sondage de L'Equipe, c'est Teddy RINER, Florent MANAUDOU et Renaud LAVILLENIE.
PATRICK KANNER
Ah, ce sont de très très bons chouchous, mais pour moi, j'ai 395 chouchous, c'est-à-dire...
SAMUEL ETIENNE
C'est le nombre d'athlètes français.
PATRICK KANNER
C'est-à-dire tous les athlètes, voilà, tous les athlètes qui vont concourir, c'est la plus belle, la plus grande délégation de l'histoire de l'olympisme français aux Jeux modernes d'été. Donc cela montre que le sport français est de très très grande qualité et que nous pouvons espérer un gain de médailles non négligeable, je l'espère même supérieur à celui de Londres. A partir de là, ils méritent tous notre soutien. Donc, vraiment, pour moi, les 27 fédérations sur 28, olympiques, potentielles, qui sont présentes pour la France, eh bien méritent tout le soutien de la population française, j'espère qu'il y aura de belles images sur ces victoires.
SAMUEL ETIENNE
Vous êtes également à Rio pour porter la candidature de notre pays, vous en parliez tout à l'heure, aux J.O. de 2024. Rassurez-nous, notre pays est mieux préparé qu'en 2005, lorsque la candidature de Paris pour les Jeux de 2012 a connu l'échec ?
PATRICK KANNER
Nous étions très bien préparés, vous savez, pour préparer 2012. Simplement, voilà, nous avons été battus à quatre voix, ça signifie qu'à un moment donné, quelque chose n'a pas marché, et donc nous avons tiré les conséquences de cela.
SAMUEL ETIENNE
Est-ce que c'est un lobbying insuffisant ? C'est ce qu'avait déclaré Jean-François LAMOUR, l'ancien ministre des Sports, ancien champion olympique aussi, il avait dit qu'on n'avait pas su faire assez de lobbying.
PATRICK KANNER
On a fait du lobbying, mais peut-être pas dans le bon sens, à savoir qu'à un moment donné, les sportifs n'étaient pas suffisamment sur le devant de la scène, et cette fois-ci, avec Bernard LAPASSET, avec Tony ESTANGUET, avec Guy DRUT, avec l'ensemble du monde sportif célèbre français, eh bien nous tenons je crois les bonnes méthodes. Vous savez, François HOLLANDE est présent aujourd'hui, comme il l'était hier sur Rio, Anne HIDALGO sera présente tout au long des Jeux, je suis présent pour presque une semaine, Thierry BRAILLARD, secrétaire d'Etat, me rejoindra dans quelques jours, donc nous faisons notre travail de contacts, nous ne sommes pas en campagne, nous n'avons pas le droit de faire campagne à ce stade, je dirais, de la compétition, entre les quatre villes qui sont aujourd'hui candidates, par contre voilà, être disponible, être proche des membres du CIO, savoir convaincre sur les qualités de notre candidature, c'est ce travail de fond que nous menons, sans arrogance, sans suffisance. Vous savez, avoir les J.O. en 2024, c'est pas un droit, ce n'est pas parce que nous ne les aurions pas eus depuis 100 ans à cette date-là, que nous aurions un droit sur les autres candidatures. Il faut donc être non pas humble, mais déterminé, et surtout conscient que c'est une compétition qui se gagnera sur le temps. C'est un marathon finalement, permettez-moi cette comparaison, un marathon qui se termine par un 110 m haie. C'est deux compétitions en une.
SAMUEL ETIENNE
Et François HOLLANDE est à Rio justement pour mettre toutes les chances du côté de la France. François HOLLANDE c'est votre champion à vous, Patrick KANNER, pour 2017, cette fois, vous avez déclaré être sûr que c'est lui qui allait remporter la primaire en vue de la présidentielle.
PATRICK KANNER
Eh bien écoutez, c'est mon chouchou, pour reprendre l'expression de tout à l'heure, parce que je crois que voilà, il incarne aujourd'hui une autorité qui est nécessaire à notre pays, et une sérénité dans une difficulté que nous connaissons toutes et tous, voilà, la France a la tête haute et la France est debout, cela passe aussi par l'autorité du président de la République, je le dis très simplement et la présence, pendant 48 heures, du président de la République auprès des autorités olympiques, montre que non seulement il sait tenir la barre quand il est en métropole, naturellement, quand il est en France, mais aussi défendre les intérêts de la France à l'étranger, et je crois que c'est ça qu'on attend aujourd'hui d'un président de la République.
SAMUEL ETIENNE
François HOLLANDE votre chouchou pour 2017, s'il se présente, bien sûr, mais vous en semblez persuadé.
PATRICK KANNER
Oh, la primaire en décidera, moi je souhaite qu'il se présente et que les conditions soient réunies pour qu'une primaire à gauche soit faite, soit réalisée dans de bonnes conditions, et qu'il puisse être bien sûr le champion de cette primaire, pour combattre celui qui aura été désigné quelques semaines précédemment par la droite.
SAMUEL ETIENNE
Patrick KANNER, une dernière chose, vous, le ministre de la Ville également, que pensez-vous du débat en cours dans de nombreuses municipalités, comme Besançon, par exemple, d'armer ou non les polices municipales ? Quelle est votre position dans ce débat ?
PATRICK KANNER
Vous savez, la loi actuelle permet d'armer les polices municipales, ce sont les choix des maires, en l'occurrence, ce que je sais, c'est qu'aujourd'hui nous avons intérêt à avoir une police nationale parfaitement organisée, complétée en termes de nombre, et vous savez qu'il y a plus de 10 000 postes qui seront créés dans ce quinquennat, alors que 13 000 avaient été supprimés dans le quinquennat précédent, donc nous avons trouvé une situation qui était affaiblie pour les forces de police, les forces de sécurité de notre pays, ces forces aujourd'hui sont rétablies, après, ce n'est pas choquant que des villes puissent se dire « mais nous voulons participer à cette mission de service public que représente la sûreté, avec des moyens adaptés », en fonction des décisions des maires, c'est l'autorité des maires de le décider en tant que telle, en tout cas ça ne peut pas se substituer à l'autorité première qui est celle de la police nationale et de la gendarmerie.
SAMUEL ETIENNE
Merci beaucoup Patrick KANNER d'avoir été notre invité ce matin. Je rappelle que vous étiez en ligne, avec nous, depuis Rio.
JOURNALISTE
Et c'était l'interview politique d'Europe 1.
source : Service d'information du Gouvernement, le 8 août 2016