Texte intégral
* Traité transatlantique
Q - Bonjour, parlons du TAFTA, le Traité transatlantique. J'ai lu ce qu'avait déclaré le ministre allemand de l'économie, le TAFTA est mort-né. La discussion autour de ce Traité transatlantique est-elle terminée ?
R - J'avais dit ici, il y a plus d'un an que les choses étaient très mal engagées. Sigmar Gabriel a confirmé hier ce que j'ai dit avant l'été, c'est-à-dire que nous en étions au point mort. Il reste beaucoup de pressions pour parvenir à un accord du côté des États-Unis, du côté de Mme Merkel.
Ce qui est vrai, c'est que la France considère que nous sommes aujourd'hui à un moment de vérité et à un moment de décision.
Q - Cela veut-il dire que la France va se retirer des discussions ?
R - Cela veut dire qu'à la fin du mois de septembre, lorsque les ministres du commerce extérieur se réuniront à Bratislava pour avoir un échange sur ce sujet comme sur d'autres, je demanderai au nom de la France l'arrêt des négociations sur le TAFTA. Pour être totalement clair, l'arrêt, cela veut dire la fin. Parce que certains peuvent être tentés de suspendre les négociations : des élections approchent des deux côtés de l'Atlantique, certains peuvent se dire «on va reporter cela à plus tard». Mais on ne reporte pas à plus tard, il y a, après des débats fondamentaux, des sujets sérieux. Ce que demande la France, c'est l'arrêt pur, simple et définitif de ces négociations. Pourquoi ? Parce qu'elles ont été engagées dans l'opacité, qu'elles ont créé beaucoup de méfiance, de défiance, partout des peurs, certaines infondées, d'autres parfaitement justifiées. Le rôle des États-Unis et de l'Union européenne, c'est de fixer ensemble les règles pour le commerce mondial du XXIe siècle si nous ne voulons pas que ce soit d'autres qui le fassent. Encore faut-il fixer les meilleures règles possibles sur l'alimentation, sur l'énergie, sur la santé, sur le service public, sur la culture. Ce n'est pas la direction qu'ont pris ces négociations, elles doivent donc se terminer maintenant. On peut continuer de commenter, dire que les choses ne vont pas et qu'elles sont enlisées, mais les négociateurs continuent à se retrouver, à négocier parfois dans le vide, parfois sur du concret. Il faut un coup d'arrêt clair, net et définitif pour ensuite pouvoir reprendre des discussions sur de bonnes bases modernes, avec les États-Unis notamment, en prenant en compte l'environnement, l'écologie, le social, les PME.
Q - La France va demander l'arrêt des négociations à la fin du mois de septembre, c'est ce que vous nous annoncez ce matin, mais c'est une négociation conduite par l'Europe. La France seule peut-elle demander l'arrêt et se retirer des négociations ?
R - Nous verrons si d'autres nous emboîtent le pas. Je sais aussi que nous parlons au nom d'un certain nombre de pays qui ne peuvent pas s'exprimer en ce sens car leur diplomatie, leur Histoire et leurs relations dans le monde ne sont pas les mêmes mais qui n'en pensent pas moins. Une majorité de citoyens européens, j'en suis convaincu, pensent cela. C'est le rôle et l'honneur de la France d'assumer cette responsabilité.
Q - Qu'est-ce que cela veut dire concrètement ?
R - D'un point de vue des procédures, la Commission a parfaitement la possibilité de continuer à négocier jusqu'à la fin des temps et personne ne peut juridiquement s'y opposer. Cela fait partie des miracles de l'Union. Il n'y a plus de soutien politique de la France à ces négociations.
Q - Vous ne voulez donc plus de ces négociations ?
R - La France considère que ces négociations doivent s'arrêter et qu'il ne doit plus y avoir de rencontre entre les négociateurs.
Q - Ces négociations sont-elles mortes ?
R - Elles doivent l'être et la France ne les soutient plus. Vous savez, les Américains sont nos plus vieux alliés et nous sommes leurs plus vieux partenaires. Nous avons toujours été côte-à-côte dans les moments difficiles, mais entre amis, il faut aussi savoir se dire les choses. Aujourd'hui, les négociations ne sont pas à la hauteur de la relation historique d'amitié qui existe entre la France et les États-Unis, entre l'Europe et les États-Unis. Il faut reprendre plus tard les choses sur de bonnes bases, c'est-à-dire en faisant d'emblée la transparence, en mettant d'emblée les parlementaires et les citoyens devant les informations, en arrêtant de créer la défiance et en concluant des accords modernes, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Il faut donc en tirer toutes les conséquences.
Q - Mais c'est la Commission européenne qui négocie au nom de la France, il n'y a pas de négociateurs français.
R - La France suit les négociations, c'est moi qui ait l'honneur d'être en charge de ce dossier sur lequel j'ai bâti depuis deux ans une stratégie. Cela a été en permanence confirmé par le président de la République, par le Premier ministre, par le ministre des affaires étrangères, mais, à la table des négociations, c'est la Commission européenne qui siège.
Q ? Donc, vous ne soutenez plus la Commission européenne ?
R - La France ne soutient plus ces négociations. La Commission a été très offensive dans ces négociations et nous l'avons toujours soutenue dans sa volonté d'obtenir des États-Unis des concessions.
Q - Et maintenant c'est fini ?
R - Les Américains ne donnent rien ou alors des miettes. Très sincèrement, ce n'est pas comme cela qu'entre égaux, qu'entre partenaires et entre alliés on doit négocier. Ce n'est pas la Commission qui est en cause dans cette affaire.
Q - Et le Traité de libre-échange avec le Canada ?
R - Nous considérons que c'est un bon Traité, que sur beaucoup de sujets, c'est l'anti TAFTA, sur ce qu'il donne aux PME, sur ce qu'il donne en ouverture des marchés publics pour les entreprises européennes, sur la fin de l'arbitrage privé qui est remplacé par la proposition française de Cour de justice commerciale internationale, sur la reconnaissance de notre agriculture, de nos appellations contrôlées et sur beaucoup de points qui sont critiqués à juste titre dans le TAFTA, l'accord avec le Canada est l'anti-TAFTA et la France soutient cet accord.
Q - Cet accord sera-t-il signé ?
R - C'est la Commission européenne qui doit indiquer le calendrier mais nous discuterons très certainement de ce sujet à Bratislava à la fin du mois de septembre.
Q - Donc, CETA oui, TAFTA non.
R - Oui, parce que ce n'est pas le même accord, ce qui compte dans un accord, c'est le contenu, c'est le concret et c'est ce qui est bon pour l'économie européenne et aussi pour un certain nombre de valeurs européennes car les deux sont en cause dans ces négociations.
Q - C'est donc officiel, la France demande l'arrêt de ces négociations.
R - La France demande l'arrêt de ces négociations. (...).
* Tourisme - Chiffres de fréquentation
(...)
Q - Vous êtes aussi en charge de la promotion du tourisme. Cette année, les touristes étrangers en France sont beaucoup moins nombreux. Qu'allez-vous faire ?
R - Jean-Marc Ayrault a annoncé les chiffres la semaine dernière, moins 7%, avec une grosse concentration de la baisse sur Paris et sa région. Nous sommes totalement mobilisés avec le gouvernement, avec les collectivités partout en France.
Q - Comment faire ?
R - D'abord, la promotion de la France : je le fais dans chacun de mes déplacements, nous le faisons tous, pour dire quelle est la réalité de la situation française. Des images fausses ont pu être véhiculées car il y a eu par ailleurs des drames effroyables qui ont frappé notre pays et tout cela a marqué les esprits. Il faut indiquer qu'en France on peut continuer à passer des vacances extraordinaires, dans la première destination touristique au monde. Il y a un plan de promotion qui est financé avec un million 500.000 euros qui sont sur la table. Par ailleurs, nous avons mis en place un fonds d'un milliard d'euros pour investir dans le tourisme, accompagner les projets, l'investissement, l'information, la montée en gamme et la diversification. Nous travaillons étroitement avec les professionnels et Jean-Marc Ayrault réunira un comité d'urgence sur le tourisme prochainement et les assises du tourisme à la fin de l'année, comme elles le font depuis plusieurs années, rassemblent les professionnels du tourisme, les mobilisent et prennent leurs bonnes idées pour les mettre en oeuvre.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 septembre 2016