Déclaration de M. André Vallini, secrétaire d'Etat au développement et à la francophonie, sur le Fonds mondial de la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, à Montréal le 16 septembre 2016.

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Circonstance : Conférence mondiale de reconstitution du Fonds mondial de la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, à Montréal (Canada) le 16 septembre 2016

Texte intégral


Monsieur le Premier Ministre du Canada,
Mesdames et Messieurs les chefs d'État et de gouvernement,
Monsieur le Secrétaire général des Nations unies, M. Ban Ki-moon,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Président du conseil d'administration du Fonds mondial,
Monsieur le Directeur exécutif du Fonds mondial,
Mesdames, Messieurs,
C'est pour moi un honneur d'être ici à Montréal et de représenter la France à cette conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Je tiens à remercier les autorités du Canada et du Québec pour leur accueil chaleureux.
Vous connaissez l'engagement de longue date de la France dans la lutte contre les grandes pandémies, et son attachement particulier au Fonds mondial, qu'elle a contribué à mettre en place. Avec près de 4,5 milliards de dollars versés depuis sa création, la France en est le deuxième contributeur.
Grâce à cet instrument de coopération, nous sommes parvenus à répondre à une situation qui, il y a quelques années, semblait insurmontable et à retourner une tendance qui paraissait irréversible. Le Fonds a su jouer son rôle et catalyser l'engagement des États mais aussi de la société civile.
Grâce à l'action du Fonds mondial, près de 20 millions de vies ont été sauvées, plus de 9 millions de personnes ont désormais accès à un traitement antirétroviral contre le sida, plus de 15 millions de personnes ont été testées et traitées contre la tuberculose, et 659 millions de moustiquaires destinées à prévenir le paludisme ont été distribuées.
Ces résultats qui sont exceptionnels démontrent qu'il est possible à l'action collective d'endiguer une menace de santé publique internationale.
Ces résultats, le Fonds mondial les a atteints car il a su évoluer, adapter ses méthodes, et sa stratégie 2017-2022 est à la hauteur des défis d'un contexte sanitaire international en évolution.
Le premier de ces défis est la nécessité de renforcer les systèmes de santé. C'est une exigence qui s'est imposée comme une évidence lors de la crise sanitaire liée au virus Ebola en 2014 et elle a pris une place essentielle, jusqu'à constituer l'une des cibles majeures des Objectifs de développement durable.
Le Fonds mondial en a tiré toutes les leçons en se fixant pour objectif de pérenniser les bénéfices de ses interventions au-delà des seules grandes pandémies. Par une démarche plus centrée sur l'individu, il participe de manière concrète à la mise en place de la couverture sanitaire universelle qui est indispensable pour permettre l'accès de tous à des services de santé de qualité. Cela va dans le sens du travail mené par les autres partenariats mondiaux, dans lesquels nous sommes également fortement engagés, à savoir l'Alliance pour le vaccin GAVI, et bien sûr UNITAID que la France a mis en place. J'en profite pour saluer le travail remarquable accompli par Philippe Douste-Blazy à sa tête depuis 10 ans.
Ces objectifs sont aussi les nôtres et c'est pourquoi la France a mis en place un mécanisme d'assistance technique, l'Initiative 5%, afin de faire du renforcement des capacités sanitaires dans l'espace francophone notre priorité. Ces dernières années nous y avons dédié près de 18 millions d'euros par an. Les succès enregistrés et les attentes de nos partenaires nous ont encouragés à réviser cet engament à la hausse. C'est désormais 7% de notre contribution au Fonds mondial, soit plus de 25 millions d'euros par an, que nous allons investir ainsi dans les systèmes de santé au cours de ce triennium.
La poursuite des efforts de tous est indispensable pour atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés collectivement. Les défis sont en effet immenses, mais nous savons qu'il est possible d'éradiquer ces trois pandémies dans les 15 ans qui viennent à condition d'approfondir notre engagement et de surmonter un certain nombre d'obstacles. Je vous propose 4 évolutions :
1 - Cibler davantage notre action
Je veux d'abord parler de certaines populations particulièrement vulnérables et exposées qui restent en marge de la lutte contre les trois pandémies. Ces populations-clés, et je pense en particulier aux hommes qui ont des rapports sexuels avec les hommes, aux travailleurs du sexe, aux prisonniers et aux usagers de drogue, sont encore trop souvent victimes de discrimination et de violations de leurs droits qui les empêchent d'accéder aux soins et à la prévention. La situation des femmes et des jeunes filles est également très préoccupante du fait des inégalités, des discriminations et des violences liées au genre dont elles sont les victimes.
La France a fait de ces questions une priorité de son action. Elle a financé notamment des projets à hauteur de 6,8 millions d'euros visant à promouvoir les droits reproductifs et sexuels et à offrir des diagnostics et des solutions adaptés aux défis et aux spécificités du genre.
Nous n'insisterons jamais suffisamment sur le rôle essentiel de l'éducation des filles dans la lutte contre les pandémies, et notamment contre le VIH. Ce point sera l'objet de nos discussions demain matin et j'y reviendrai, car c'est un axe critique d'intervention à exploiter.
2 - Continuer d'innover
L'innovation est indispensable pour faire face à ces enjeux. Tout d'abord dans les modes de financements, dans lesquels la France s'est illustrée, avec ses partenaires, en mettant en place la toute première contribution sur les billets d'avion. UNITAID, dont la France est le premier contributeur, joue à cet égard un rôle essentiel en permettant d'accélérer la disponibilité des solutions innovantes de prévention, de traitement et de diagnostic en réduisant drastiquement leur coût de près de 90%. Je me réjouis à ce titre de la collaboration toujours plus étroite entre le Fonds mondial et UNITAID, qui permet des synergies et l'optimisation de leurs ressources. Nous devons poursuivre dans cette voie.
3 - Renforcer l'appropriation par les autorités et les communautés récipiendaires
L'appropriation passe par le suivi de la bonne mise en oeuvre des subventions et l'organisation du dialogue au niveau du pays récipiendaire. Ce processus de consultation participatif et continu doit inclure tous les acteurs concernés, et en particulier les communautés affectées par la maladie.
Un des enjeux majeurs de la prochaine décennie sera d'anticiper et de préparer la transition des pays appelés à sortir du champ d'intervention du Fonds mondial, en lien avec les gouvernements nationaux. Il faut donc nous assurer de la pleine intégration dans les programmes nationaux de l'ensemble des interventions de lutte contre les pandémies, en particulier à destination des populations vulnérables.
4 - Augmenter les ressources du Fonds
Ces dernières années, les ressources domestiques mobilisées pour la prise en charge des grandes pandémies ont augmenté et nous saluons ces efforts. Toutefois, il est nécessaire d'aller encore plus loin et c'est pourquoi le président de la République française, François Hollande, a annoncé en juin dernier le maintien de la contribution de la France au Fonds mondial, et cela en dépit d'un contexte budgétaire contraint. Je suis donc heureux de vous confirmer ce matin le prolongement de notre effort financier à hauteur de 1 milliard 80 millions d'euros pour les trois prochaines années.
Pour atteindre notre objectif à 2030, l'élargissement de la base des donateurs est plus que jamais indispensable. Les pays émergents doivent progressivement prendre une part plus importante à cet agenda commun : parties prenantes dans sa définition, ils doivent également faire converger leurs aides en ce sens.
Les financements innovants pour le développement en santé mondiale sont un moyen complémentaire de répondre aux objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés : la France encourage les pays qui ne l'ont pas encore fait à s'engager dans ce mouvement, déjà entamé sur plusieurs continents.
Nous sommes aujourd'hui à un moment important de la lutte contre les trois pandémies. En moins de 15 ans le Fonds mondial s'est imposé comme l'acteur majeur susceptible d'éradiquer des pandémies meurtrières, et à travers ses succès il a démontré sa capacité à changer la donne. Il a ainsi créé des attentes très fortes alors donnons-lui maintenant les moyens d'atteindre ses objectifs alors nous avons raison d'espérer qu'ils seront la dernière génération à avoir connu le sida, la tuberculose ou le paludisme.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 septembre 2016