Déclaration de M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat aux anciens combattants et à la mémoire, en hommage aux soldats américains combattant sur le sol français en 1944, à Corny-sur-Moselle le 11 septembre 2016.

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Circonstance : Commémoration de la bataille de Corny-Dornot, à Corny-sur-Moselle le 11 septembre 2016

Texte intégral


Monsieur le Préfet,
Madame la Consule générale des Etats-Unis,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Monsieur le maire de Corny,
Monsieur le maire d'Ancy sur Modelle,
Monsieur le Gouverneur militaire de Metz, mon général,
Madame la Présidente de l'association Thanks GI's
Mesdames et messieurs les représentants d'associations d'anciens combattants,
Mesdames et messieurs les porte-drapeaux,
Mesdames et messieurs,
L'histoire qui nous réunit aujourd'hui n'a duré que 60 heures. Cela semble très peu au regard des six années qu'a duré la Seconde Guerre mondiale.
Mais ces 60 heures ont été marquées par le sacrifice de 945 hommes. Ils n'étaient pas des combattants français. Ils étaient des soldats américains, des GI's venus libérer la France au nom d'un idéal qu'ils avaient en partage avec leurs compagnons d'armes outre-Atlantique.
Un sacrifice qui consolide la mémoire partagée franco-américaine née sur les champs de bataille de la Grande Guerre et dont vous témoignez aujourd'hui, madame la Consule générale. J'ai rendu hommage à cette fraternité d'armes lors de mon premier déplacement en tant que ministre à Metz le 22 novembre 2014.
Cette bataille de Corny-Dornot n'était pas la première épreuve que les GI's ont subie.
Depuis plusieurs mois, les soldats de la 5e division américaine avaient déjà témoigné de leur courage et de leur fraternité avec le peuple français. Ils avaient débarqué en Normandie. Ils avaient libéré Angers, Chartres, Reims, Verdun. On leur avait confié une nouvelle mission : libérer Metz.
Le 7 septembre 1944, venant de Gorze, les GI's arrivent sur les hauteurs de Dornot mais la traversée de la Moselle s'avère très difficile, le fort Saint Blaise imprenable, la contre-attaque allemande terrible.
Réfugiés dans le bois du Fer à Cheval à Corny, les jeunes soldats tiennent 60 heures sous un déluge de fer et de feu, afin de permettre qu'une tête de pont soit mise en place à Arneville. 60 heures qui font d'eux des héros.
Ils ne sont que quelques dizaines à se replier le 10 septembre au soir, qu'une poignée à atteindre la rive ouest après avoir assisté, impuissants, à la noyade de leurs camarades dans la Moselle.
Qu'une poignée sur les 1 200 soldats engagés dans la bataille. Parmi eux, Jacob Kurtzberg, plus connu sous le nom de Jack Kirby à qui nous rendrons hommage tout à l'heure.
Le 11 septembre au matin, l'histoire de la bataille de Corny-Dormot vient de s'achever. La tête de pont d'Arnaville est un succès et les Américains se dirigent vers Metz. Le souvenir de la libération de la ville rejoindra très vite la mémoire nationale, enfermant l'épisode tragique de Corny Dornot dans l'Histoire.
Alors que reste-t-il aujourd'hui de l'engagement de ces GI's ?
Il reste un parcours de mémoire que la communauté de communes du Val de Moselle a mis en place en 2010 avec l'association Thanks GI's, où chaque photo exposée est un appel au souvenir.
Il reste l'ilot dédié à Jack Kirby – que nous nous apprêtons à inaugurer - dont le visage incarne la mémoire des 1 200 soldats qui ont vécu l'enfer du bois du Fer à Cheval.
Aujourd'hui, alors que les témoins disparaissent, c'est aussi la pierre qui témoigne pour qu'aucun de nos enfants ne puisse dire qu'il ne savait pas.
Ces sites de Corny-sur-Moselle ne sont pas isolés. Ils s'inscrivent dans un riche patrimoine qui raconte l'histoire de Lorraine. Une histoire singulière traversée par l'annexion allemande et l'Occupation qui nous impose à toutes et à tous un effort particulier pour valoriser les mémoires nées sur nos terres.
C'est tout le sens de ma présence aujourd'hui. C'était un devoir. C'était ma responsabilité.
Si nous avons eu à cœur de commémorer l'année 1944 dans un même élan national pour rappeler l'attachement de nombreux Français à la République et à ses valeurs qui ont guidé l'esprit de Résistance, nous avons aussi respecté la singularité mémorielle de chacune de nos régions, de chacune de nos villes.
Car la mémoire historique est aussi locale : elle est alimentée par des tragédies et des actes d'héroïsme, des Résistants et des libérateurs venus d'ailleurs.
Ici, à Corny sur Moselle, ces libérateurs étaient américains.
En leur rendant hommage, nous leur adressons un message de reconnaissance éternelle.
C'est aussi une manière de réaffirmer notre attachement aux valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité qui sont au cœur même de notre identité, qui nous définissent et qu'il importe de défendre pour conjurer le retour des obscurantismes.
C'est aussi une façon de réaffirmer que l'épreuve des armes a laissé place à l'idéal européen qu'il appartient aux générations futures de traduire en actes.
Tel est aussi le sens de l'engagement et du sacrifice des GI's américains il y a 72 ans.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 4 octobre 2016