Message de M. Laurent Fabius, président de l'Assemblée nationale, en hommage à Jean Moulin, Paris le 10 juin 1999.

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Circonstance : 1999/06/10Colloque Jean Moulin à l'Assemblée nationale les 10 et 11 juin 1999

Texte intégral

Jean Moulin, ce nom si simple qu'il pourrait être un pseudonyme de clandestinité, ce nom si vrai qu'il a fini par incarner la Résistance tout entière, à travers le sourire d'une photo, feutre rabattu et écharpe autour du cou, reste dans notre mémoire collective pour sa bravoure et son charisme, sa mission essentielle et dangereuse, son destin tragique. De la guerre secrète contre l'occupant nazi, il est le personnage le plus emblématique, l'un des plus attaqués aussi. Investi du rôle suprême d'unificateur et de conciliateur de la résistance intérieure, jeune sous-préfet, républicain, trahi, torturé, assassiné, sa passion et sa mort en font la figure de la France meurtrie.
Grâce à ce colloque, les plus grands spécialistes français et étrangers vont se rencontrer. En deux jours, il vous sera évidemment difficile de traiter intégralement d'une vie, d'une trajectoire si dense. Mais vos travaux permettront, j'en suis sûr, en examinant les actes, les idées, le parcours d'un homme d'exception, de montrer clairement les rapports délicats et complexes entre les différents réseaux, entre Londres et la Résistance intérieure, entre les combattants de l'ombre et les puissances alliées. Telle est la règle, me semble-t-il, de l'Histoire des historiens, de toujours se réécrire et de savoir s'amender, de se soumettre par principe à l'examen critique, de refuser l'instrumentalisation, de se réinterpréter à la lumière du présent, de se replonger dans la source vive des archives, pour dire la vérité et l'honneur d'un homme devenu un exemple et un mythe. Soyez-en remerciés.
(source http://www.assemblee-nationale.fr, le 14 juin 1999)