Texte intégral
Monsieur le Ministre de l'intérieur,
Monsieur l'Ambassadeur de France,
Monsieur les Officiers, les Sous-officiers, les Soldats,
Mesdames et Messieurs,
Mesdames et Messieurs les Présidents des associations anciens combattants,
Messieurs les Vétérans, Anciens Combattants.
Nous sommes à la veille du 11 novembre. Demain partout en France, on va commémorer l'armistice du 11 novembre 1918, mais dans beaucoup de pays aussi qui ont connu la tragédie de la Première guerre mondiale. Mais aujourd'hui, le 10 novembre, c'était un jour important pour les forces armées sénégalaises, et j'ai assisté à la cérémonie présidée par le président Macky Sall. C'était une belle cérémonie en l'honneur de l'Armée sénégalaise qui fait honneur au peuple sénégalais. Mais j'ai tenu aussi personnellement à rendre hommage, à nos soldats et aux tirailleurs sénégalais tombés sous le drapeau français. Tirailleurs qui venaient d'ailleurs de toute l'Afrique de l'ouest et qui ont combattu avec courage à nos côtés sur tous les fronts.
J'ai voulu leur rendre hommage à l'heure où les soldats français, sénégalais, européens et africains et aussi d'autres nations combattent ensemble dans le cadre d'opération de maintien de la paix et en particulier au Mali. Ils combattent pour la paix. Ils combattent pour notre liberté mais aussi pour nos valeurs. Ils combattent ensemble pour protéger les populations et vaincre le terrorisme et le fanatisme. Ce soir, vous me permettrez d'avoir une pensée particulière pour le sergent-chef Fabien Jacq du 515e régiment du Train, qui est mort en opération au Mali, la semaine dernière. Une pensée pour lui, pour ses camarades blessés et aussi une pensée pour toutes les victimes, de toutes les nationalités qui sont tombées côte à côte dans cet engagement pour la paix.
La France n'a traversé avec succès les épreuves passées que parce que des hommes venant de tous les territoires ont donné leur vie à sa cause et parce que cette cause les a unis jusqu'à l'ultime sacrifice comme ce musée le rappelle.
Leur engagement, au prix de leur vie, nous oblige à ce devoir de mémoire. Ce devoir, c'est à leur famille que nous le rendons, c'est à leurs frères d'armes et aussi à tous ceux qui continuent de risquer leur vie pour notre liberté et pour nos valeurs.
À l'échelle de l'Afrique, de la planète, le Sénégal ne ménage pas ses efforts, en particulier en ce moment au conseil de sécurité qu'il préside pendant un mois, mais aussi sur le terrain. Je rappelle que le Sénégal est le 7ème contributeur mondial aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, les casques bleus. La qualité de ses troupes est reconnue, sa diplomatie fait autorité. Le Sénégal est un grand pays, un pays un partenaire privilégié de la France.
Monsieur le Ministre, en me rendant au cimetière militaire de Thiaroye ce soir en cette fin de journée de mon séjour au Sénégal, j'ai voulu aussi prendre part au devoir de vérité, revenir sur cette page sombre de notre histoire, trop longtemps passée sous silence et que ce grand tableau rappelle avec douleur. En effet, ici, le 1er décembre 1944, nous avons failli à nos devoirs tout simplement. Le devoir de fraternité, le devoir d'égalité, le devoir de reconnaissance face à des tirailleurs sénégalais récemment démobilisés qui ne réclamaient rien d'autre que la régularisation de leur solde et de leurs indemnités. Une répression sanglante a été menée par les forces françaises chargées du maintien de l'ordre, faisant de nombreuses victimes, au moins 35 morts, et conduisant à 48 arrestations et plusieurs condamnations, heureusement amnistiées en 1947 par le président de la République, Vincent Auriol.
Le président de la République française, François Hollande, s'est livré ici à ce devoir de mémoire et il a manifesté avec éclat sa reconnaissance, c'est-à-dire la reconnaissance de la France envers les tirailleurs sénégalais, en se rendant aussi dans ce cimetière le 30 novembre 2014 au côté du président Macky Sall. Les deux chefs d'État ont alors inauguré ce mémorial à nos tirailleurs. Le président de la République, M. François Hollande a rappelé ici «les erreurs d'appréciation et les fautes de jugement commises par les représentants de notre pays».
L'histoire, même, mais je dirais surtout, quand elle est tragique et douloureuse, elle doit être dite car elle permet aux générations futures de regarder vers demain et cela en toute confiance. Ceux qui parlent de repentance, se trompent de chemin. Ce que nous disons ce soir, c'est la justice tout simplement. C'est pourquoi la France s'était engagée, en octobre 2012, à reverser aux autorités sénégalaises l'intégralité des archives relatives au drame de Thiaroye. Ce fût fait en 2014. La France assume, en coopération avec les autorités sénégalaises, l'entretien de ce cimetière. Elle s'associe chaque fois que possible aux cérémonies commémoratives. Un musée lui est donc consacré.
Ce soir cette cérémonie prend un relief particulier, en cette année du centenaire de la bataille de Verdun. Ce centenaire a été marqué au Sénégal, il y a quelques jours, c'était le 7 novembre sur le BPC «Dixmude» de notre Marine nationale en présence d'anciens combattants français et d'anciens combattants sénégalais ainsi que de 20 cadets allemands, des chef d'état-major de la Marine et de l'Armée de l'air sénégalais et du ministre canadien de la défense. Se sont rassemblés, à ce moment-là, des belligérants d'hier, qui sont devenus aujourd'hui des amis, amis aujourd'hui justement avec la mission de transmettre à la jeunesse, les messages de paix, les messages de tolérance, les messages de fraternité, les messages de solidarité auxquels nos peuples aspirent. Eh bien, c'est ce message tout simplement que je veux rappeler à l'heure où nos valeurs sont menacées, elles doivent être défendues sans faiblesse mais animées par les valeurs qui nous rassemblent.
Vive le Sénégal, vive la France et à la mémoire des tirailleurs sénégalais, vive l'amitié franco-sénégalaise.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 novembre 2016