Texte intégral
Monsieur l'Ambassadeur,
Merci à toutes vos équipes qui ont préparé ce voyage. Cela demande beaucoup de travail la visite d'un ministre si l'on veut que cela marche, que cela soit réussi. Je voudrais associer à ses remerciements toutes les personnes qui travaillent ici, fonctionnaires et recrutés locaux. Je n'oublie pas les opérateurs. Ils forment une équipe France ici et c'est très important. Je ne manque pas de rencontrer nos compatriotes français à la Résidence de France. Je vous remercie d'avoir organisé cette réception Monsieur l'Ambassadeur.
Je voudrais saluer tous les élus, en particulier les élus consulaires qui jouent un rôle important et remercier Youssou Ndour de sa présence. C'est un ami de la France, vous le savez, un grand artiste, qui va venir bientôt chanter au Bataclan, tout un symbole.
Vous l'avez dit, Monsieur l'Ambassadeur, je suis venu souvent au Sénégal. Parfois en visite privé avec ma femme et mes enfants. Cela faisait longtemps que je n'étais pas revenu et je dois dire que ce n'est pas sans émotion. Venir ici dans ce beau pays, un pays qui compte dans la relation de la France avec l'Afrique, depuis longtemps et qui compte aussi en Afrique, qui joue un rôle important. Qui ne joue pas un rôle qu'en Afrique mais aussi sur la scène internationale.
En ce moment, le Sénégal préside le conseil de sécurité. Je vais vous dire qu'il préside bien, car il a mis sur la table de nombreuses questions, en particulier toutes les opérations de maintien de la paix. Le Sénégal est très engagé dans les opérations de maintien de la paix et il le fait avec beaucoup de sérieux, de convictions et en particulier je pense au Mali. Nous y sommes présent ensemble, nous avons partagé la même analyse. Il fallait prendre cette décision à l'appel des autorités maliennes, de stopper l'avance djihadiste. C'est toujours une décision difficile d'engager les forces françaises quand on sait que nos soldats, dans ce genre de mission, sont toujours en danger. L'un d'entre eux est mort d'ailleurs récemment dans l'exercice de sa mission. J'ai salué sa mémoire mais j'ai également salué tous les combattants de toutes les nations qui sont présents dans la MINUSMA au Mali. Mais si nous ne l'avions pas fait, c'est ce que le président Macky Sall m'a dit ce midi, alors c'est toute la région qui aurait été aux mains de ce mouvement, à l'idéologie dangereuse, violent, qu'on voit à l'oeuvre partout. Regardez à Mossoul. Cette population civile prise en otage, la Syrie... C'est un combat qui va durer. Mais en même temps il faut toujours un débouché politique.
Concernant le Mali, il y a les accords d'Alger, il faut les mettre en oeuvre. Cela passe par une réconciliation nationale, une gestion inclusive des régions les plus au Nord, des réformes, créer de la confiance. Et créer de la confiance, pour toute l'Afrique, c'est non seulement consolider l'État, consolider la démocratie là où elle existe, où elle est forte, c'est le cas du Sénégal, mais aussi ailleurs la construire et tout faire pour garantir l'avenir de ces pays, donner des perspectives à la jeunesse et en particulier en termes de formation, de débouchés professionnels. Je pense aux diplômés qui se retrouvent sans rien, qui peuvent se sentir abandonnés et aux plus jeunes, leur donner des perspectives d'emploi. Il faut être optimiste, être confiant si l'on sait se prendre en main, si l'on sait aussi faire des choix de coopération, de solidarité.
Cela vaut pour la France qui va augmenter très fortement, à partir de cette année, en tout cas c'est une proposition que j'ai faite mais ça devrait être retenu par le parlement, son budget d'aide publique au développement. Mais c'est vrai aussi pour l'Europe. L'Afrique attend non pas l'aumône, non pas la charité, mais l'accompagnement dans ses projets. J'ai été heureux de visiter le début de ce chantier de TER. Nous nous sommes retrouvés dans cette future gare, qui va être remise à neuf, à Dakar, qui sera la gare terminus de ce TER qui nous conduira jusqu'à l'aéroport, et qui va permettre de changer fondamentalement les conditions de mobilité de cette partie du Sénégal.
Mais il y a aussi d'autres projets : projet de transition énergétique, d'assainissement, d'équipement. Le Sénégal doit aussi se protéger. J'ai assisté à une cérémonie d'hommage aux forces armées sénégalaises et j'ai eu une excellente impression. On voit une armée fière de ses missions, avec des hommes et des femmes formés, des officiers généraux, chefs d'état-major. Avec l'idée que cette formation doit se faire de plus en plus au Sénégal. Cela ne veut pas dire que la France abandonne le Sénégal. On nous demande une expertise, on nous demande d'aider à construire des concepts, notamment en matière de formation, pas seulement militaire d'ailleurs. Le Sénégal veut affirmer en mettant en place cette autonomie de formation son rôle dans la région. Des pays qui n'ont pas les moyens de le faire, vont venir se faire former ici, dans ce pays voisin.
J'ai voulu aussi rencontrer des gens ou que j'avais connus, ou qui sont de Rufisque. J'avais un pincement au coeur, j'aurai voulu aller aussi à Ndiaganiao, mais c'est un peu plus loin. Plus au sud, dans le pays sérère. Il aurait fallu prendre la route pendant des heures, mais cela aurait été avec grand plaisir. Vous avez eu la gentillesse, dhers amis, de venir de si loin pour me rencontrer, ainsi que ma femme Brigitte que vous connaissez bien. Je vous salue du fond du coeur. C'était dans les années 80, d'abord un jumelage avec un petit village, puis ensuite la communauté rurale de Ndiaganiao. Il faut partir de Mbour, après on prend une route difficile et on arrive chez vous et on voit des gens formidables.
À Rufisque j'ai vu tous les chantiers en cours, mais j'ai vu surtout les gens, le peuple sénégalais, dans sa diversité, sa jeunesse, ses femmes, que ma femme a rencontré, qui sont aussi la force et la fierté du Sénégal, qui ne veulent pas laisser tomber, qui pensent que ce pays va réussir. Si on ne le voit pas, il nous manque quelque chose, donc si je n'avais pas pu prendre le temps, dans ce programme même court d'aller sur le terrain, je serais reparti un peu déçu mais pas complètement car je vous aurais quand même rencontré.
C'est l'occasion de vous dire que vous aussi vous jouez un rôle important ici au Sénégal, dans tous les métiers qui sont les vôtres. Je voudrais saluer les enseignants et les parents d'élèves. L'AEFE c'est l'une des fiertés de la France. C'est sans doute le pays qui a le plus d'écoles, collèges et lycées français à l'étranger. Nous avons le plus beau réseau, c'est pourquoi nous continuons de le soutenir, de rester en lien et en relation avec toutes ces équipes, essayer de continuer à leur donner des moyens. Il y a ici 14 établissements qui dépendent du réseau d'enseignement français à l'étranger (inaudible) mais aussi pour le rayonnement culturel de la France, car dans ces établissements on accueille aussi des jeunes qui ne sont pas que des français, de plusieurs nationalités, dont j'imagine de nombreux sénégalais.
Cette grande famille des expatriés, aujourd'hui c'est 2.500.000 personnes dans le monde ; elle a doublé en 20 ans. C'est considérable. Et ici vous êtes entre 20 et 25.000. C'est une grande communauté française, ici au Sénégal, la plus importante au sud du Sahara. Souvent vous êtes nés en France, parfois au Sénégal ou au Liban ou ailleurs. J'ai pu regarder vos origines, vos parcours très variés. Il y a aussi des couples mixtes, des binationaux, tout cela c'est aussi une richesse. Mais même si vous êtes au Sénégal et parfois sénégalais pour certains d'entre vous, vous êtes si attachés à la France, ça je le comprends, c'est notre pays avec son histoire, sa culture, ses valeurs, ce qu'il représente dans le monde et vous avez raison d'en être fiers. Mais le Sénégal est un pays ami, avec lequel nous pouvons aussi bâtir et je sais que le Sénégal veut jouer son rôle de pays responsable, dans cette sous-région, à l'échelle du continent, à l'échelle du monde, je l'ai dit tout à l'heure. C'est vrai dans la CEDEAO, du NEPAD ou de l'Union Africaine qui joue un rôle de plus en plus important dans la gestion des conflits. Et puis c'est un pays qui est en train d'exploser économiquement. Il y a longtemps que le Sénégal n'a pas connu un taux de croissance aussi élevé : 6,5%. Nous sommes impressionnés par cela. Notre appui au développement du pays doit rester important, il est nécessaire même si le Sénégal veut réussir à juste titre par ses propres forces. J'ai confiance, en tout cas, dans les capacités du Sénégal à réaliser ses ambitions. J'ai cité quelques projets : TER, autoroutes, un nouvel aéroport que je voudrais aussi évoquer, de Diamniadio, cette ville nouvelle, l'unité de production de vaccin contre la fièvre jaune grâce à l'Institut Pasteur, le centre de services numériques ATOS pour toute l'Afrique de l'ouest... La liste est longue...
Nos deux pays ont 350 ans d'histoire commune. Mais l'ambassadeur l'a cité, il y eut des pages sombres. D'abord une histoire qui remonte un peu plus loin, qui ne concerne pas le Sénégal. J'ai eu à travailler sur cette question, qui est aussi la base d'une confiance, du respect mutuel, c'est l'histoire du commerce triangulaire. Gorée est juste en face de nous ! Comme maire de Nantes j'ai été très engagé sur cette question. Mais je voudrais préciser une chose, comme je l'ai fait à Thiaroye, nous n'avons pas à nous exprimer à chaque fois que nous parlons du passé comme si nous avions une déclaration de repentance à faire. Certains nous le reprochent lorsque l'on en parle. Moi je ne le fais pas dans cet esprit, je le fais simplement dans un esprit de justice, de compréhension de ce qu'est notre histoire. Et notre histoire c'est une histoire commune. Ce ne sont pas les bons d'un côté et les méchants de l'autre.
Dans toute l'histoire, il y a des fardeaux qui peuvent toucher chacun de nous mais il y a aussi des moments ou si l'on veut une vraie confiance, une vraie réconciliation, un vrai respect, certaines choses doivent être nommées. Elles l'ont été en 2014 lors de la visite du président François Hollande à Thiaroye, avec le président Macky Sall. Ils ont fait les gestes qu'il fallait. La France à donné accès aux archives dont elle avait la possession. Et ces gestes ont été essentiels.
Tout à l'heure j'ai été extrêmement ému lorsque j'ai pu me recueillir à mon tour, et puis rendre hommage, au fond, en voyant ces anciens combattants, qui étaient là avec leurs uniformes et leurs médailles, et qui rappelaient avec fierté qu'ils avaient combattu aux côtés de nos soldats, et en particulier en Europe, pour combattre pour l'indépendance de la France durant la Première guerre mondiale ; puis, ensuite, contre le nazisme durant la Seconde guerre mondiale et que nous avions au fond une sorte de fraternité d'armes sincère et forte.
Et dans ce cimetière très simple, où il n'y a aucune inscription, sinon une sur le mémorial «À la mémoire des tirailleurs sénégalais», c'était important d'être là, de ressentir, la veille du 11 novembre quelque chose ensemble, quelque chose de plus grand et de plus fort. Et je sais que vous ressentez cela, vous qui êtes loin, le Sénégal est moins loin que d'autres pays de la France, mais je sais que quand on est un peu loin de la France, on va à l'essentiel de ce qui est fondamental et de ce qu'est notre pays. C'est-à-dire un grand pays qui a des responsabilités, qui a des devoirs mais qui en même temps veut continuer sur la scène mondiale à jouer son rôle. Non pas pour se surestimer, nous sommes une nation avec la taille qui est la sienne et nous savons bien que, sur beaucoup de sujets, si nous ne réagissons pas avec le concert d'autres pays européens alors nous ne serons pas suffisamment forts. Mais nous avons notre originalité, notre spécificité, nous avons notre histoire, nous sommes membre permanent du conseil de sécurité.
Et, dans ce contexte nouveau d'incertitudes, de ce monde au fond un peu dangereux dans lequel nous sommes, il est bien de se raccrocher à nos fondamentaux et de rappeler que la France a des alliés, et c'est le cas des États-Unis, mais qu'elle veut continuer à leur parler avec franchise, tout en les considérant, et l'on doit toujours les considérer, comme des alliés. C'est pourquoi je me suis exprimé en ce sens après l'élection américaine, non pas de façon agressive mais en disant : bon, il y a des choses à clarifier mais la France est un pays indépendant et qui le demeurera, mais en même temps qui sait que beaucoup de questions, beaucoup de problèmes du monde ne peuvent être traités que par la voie du multilatéralisme dans les cas des organisations internationales qu'elles soient européennes, africaines, comme les Africains le font avec l'Union africaine et, bien entendu, des Nations unies. C'est dans cet esprit que nous allons continuer à agir et à être nous-même.
Mes Chers Compatriotes, je n'ignore pas les difficultés que vous pouvez rencontrer dans votre vie quotidienne. Les services de l'ambassade, du consulat sont là pour vous aider, vous accompagner dans vos démarches, les formalités administratives, la scolarisation des enfants, la protection sociale, l'accompagnement des membres les plus fragiles, il y en a dans notre communauté, mais j'y attache une très grande importance. Et je voudrais citer une réforme parmi les réformes engagées, dans le cadre de la réforme du ministère, et c'est le cas pour 2020. Tous les Français de l'étranger, d'ici 2020, pourront effectuer l'essentiel de leurs démarches consulaires en ligne 24h/24. Je m'y engage au nom de mon ministère. Et plus proche encore de vous, vous savez, je ne vous apprend rien, 2017 sera une année électorale, nous allons tout faire pour faciliter les choses pour ceux qui souhaitent participer et faire entendre leur voix, donner leur point de vue et faire leur choix.
Je sais les efforts faits par votre consulat, Monsieur l'Ambassadeur, pour augmenter le nombre de bureaux de vote à Dakar, en ouvrir à Saly, permettre ce double rendez-vous majeur de notre vie politique et citoyenne.
Mesdames et Messieurs,
À la veille des cérémonies commémoratives du 11 novembre et en cette journée dédiée aux forces armées sénégalaises, j'ai évoqué plus tôt ces combats communs, eh bien je voudrais vous souhaiter aussi de vous recueillir, si vous le pouvez, à la mémoire de nos soldats demain.
Mais en tout cas, ce soir, c'est un moment de fête, un moment d'échanges. Vous êtes les bienvenus ici, dans cette belle résidence de France et je suis heureux de vous rencontrer. Je suis heureux de vous apporter le salut de la France, le soutien du ministère des affaires étrangères et du développement international dans tous vos projets et il y en a beaucoup, dans toutes vos activités, dans tous les liens que vous avez avec la société civile sénégalaise. Pour tout cela, mes chers compatriotes, je vous remercie.
Vous êtes au Sénégal, de Dakar à Ziguinchor, de Saint-Louis à Tambacounda, vous êtes le symbole de la France ouverte, mais aussi d'une France qui ose, qui n'a pas peur de découvrir d'autres cultures, qui n'a pas peur d'aller plus loin, qui n'a pas peur d'inventer, d'innover et qui comprend l'Afrique. Parce que, quand on est ici, non seulement on comprend l'Afrique mais on aime l'Afrique et on ne peut pas réussir sans aimer les autres. C'est important de le dire tout simplement et de dire aussi que : Vive l'amitié franco-sénégalaise, vive le Sénégal, vive la République et vive la France.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 novembre 2016