Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance no 2016-966 du 15 juillet 2016 portant simplification de procédures mises en uvre par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et comportant diverses dispositions relatives aux produits de santé (nos 4178, 4222).
Présentation
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les députés, nous sommes réunis ce soir, à quelques-uns, pour examiner un projet de loi qui, au-delà de ses aspects très techniques, a surtout pour objectif de moderniser nos procédures de sécurité sanitaire, de compléter notre arsenal de lutte contre les ruptures d'approvisionnement de médicaments et de renforcer la gouvernance de la politique vaccinale.
L'objet premier du texte est la ratification de l'ordonnance du 15 juillet 2016 portant simplification de procédures mises en uvre par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l'ANSM. Depuis sa création, celle-ci est un lieu de référence pour l'évaluation, l'expertise et les prises de décision relatives aux médicaments et aux produits de santé. Parce qu'elle est devenue, en quelques années seulement, une agence reconnue en France mais aussi au niveau international, il nous faut encourager son développement et renforcer ses missions pour améliorer encore la sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé. Tel est l'objet de l'ordonnance du 15 juillet 2016, qui vise à supprimer toutes les tâches de nature administrative, ne contribuant pas à la mission principale de l'agence, à savoir la sécurité sanitaire des produits de santé. Il s'agit donc de simplifier son fonctionnement en supprimant certaines procédures, devenues obsolètes ou revêtant un caractère administratif.
L'article 3 du projet de loi vient renforcer le champ d'action de l'ANSM en matière de contrôle des importations de tissus et de cellules en provenance des pays extérieurs à l'Union européenne. En transposant la directive UE/2015/566, relative aux procédures de vérification des normes de qualité et de sécurité des tissus et cellules importés, les États membres ont choisi d'encadrer les conditions de l'importation, pour répondre à un objectif de sécurité sanitaire. Ces dispositions viseront principalement les dentistes et les chirurgiens orthopédistes, qui ont besoin d'importer des tissus osseux ou de la poudre d'os, souvent utilisée en chirurgie dentaire. Ils devront désormais recevoir l'autorisation de l'ANSM pour effectuer ces importations.
Après avoir évoqué l'article 3, j'en viens, en toute logique, à l'article 2 (Sourires), qui appelle davantage de commentaires. Cet article vise en effet à expérimenter, pour les entreprises de vente en gros de spécialités pharmaceutiques, la déclaration des quantités de médicaments et de produits acquis, non consommés au sein du système de santé français et exportés. Cette expérimentation, annoncée par le Premier ministre lors du lancement du 7e Conseil stratégique des industries de santé CSIS , le 11 avril 2016, aurait lieu sur trois ans. Certains sénateurs ont objecté qu'elle serait insuffisante pour lutter contre les ruptures d'approvisionnement de médicaments ; mais, je veux le rappeler, elle viendra compléter d'autres mesures, adoptées par votre assemblée lors de l'examen de la loi de modernisation de notre système de santé, et pour lesquelles tous les textes d'application ont déjà été publiés.
Je tiens aussi à rappeler que cette disposition ne vise nullement à désigner les grossistes-répartiteurs comme responsables des ruptures d'approvisionnement constatées, pour certains produits, depuis plusieurs années.
M. Élie Aboud. Un peu, quand même !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Car ces ruptures de stocks ont en réalité des causes multiples : elles peuvent tenir à des problèmes de fabrication ou de disponibilité du principe actif, ou encore résulter de logiques d'exportation.
Je veux insister sur le fait que les grossistes-répartiteurs constituent un maillon indispensable de la chaîne de distribution du médicament en France, soumis à une obligation de service public en matière d'approvisionnement des officines. Quelques chiffres illustrent l'importance de leurs missions : ils approvisionnent en moyenne deux fois par jour ce n'est pas rien environ 22 000 officines, sur tout le territoire français ;
M. Jean-Pierre Barbier. C'est vrai !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. ils ont aussi l'obligation de détenir 90 % des références des médicaments existants, de disposer d'un stock d'au moins deux semaines et de livrer en 24 heures toute pharmacie de leur secteur.
La ministre des affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine, entend les revendications exprimées par les grossistes-répartiteurs quant à leur rémunération. Plus globalement, une réflexion sur leur modèle économique nous semble aujourd'hui indispensable. Marisol Touraine a saisi l'inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, qui pilotera un groupe de travail réunissant les acteurs de la distribution et les directions d'administration centrale, de façon à engager cette réflexion et à proposer des scénarios d'évolution du modèle économique de la distribution en gros des produits de santé.
Par ailleurs, le Gouvernement a été attentif aux nombreux débats qui ont eu lieu lors de l'examen du texte en commission des affaires sociales. Comme je l'ai dit, la mesure dont nous parlons ne cherche en rien à désigner des acteurs comme responsables des tensions d'approvisionnement. Au contraire, elle vise à renforcer la transparence et à donner aux pouvoirs publics une meilleure visibilité sur les niveaux et les contenus des stocks, afin de fluidifier les approvisionnements et d'anticiper les besoins. Ce qui compte, au final, c'est que les pharmacies soient approvisionnées pour que les patients reçoivent leur traitement en temps voulu.
Des interrogations ont également été soulevées à propos du tiers de confiance, qui sera chargé de recueillir les données. Un amendement de votre rapporteur a apporté des précisions utiles pour garantir la confidentialité des données déclarées. Néanmoins, je sais que des doutes persistent quant à la nature de l'organisme qui assumerait cette responsabilité de tiers de confiance. Nous examinerons des amendements sur ce point, et le Gouvernement s'attachera, au cours de la discussion, à vous apporter des garanties supplémentaires.
D'autre part, votre commission des affaires sociales a adopté un amendement de sa présidente visant à étendre l'obligation de déclaration aux titulaires d'une autorisation de mise sur le marché, aux entreprises pharmaceutiques et aux distributeurs en gros à l'exportation. Le Gouvernement salue cette initiative, qui renforce la portée du dispositif et améliore l'information des pouvoirs publics sur l'ensemble de la chaîne de distribution.
Enfin, lors de l'examen en première lecture, le Sénat a enrichi le texte de deux articles additionnels.
Un amendement du Gouvernement relatif à la vaccination a ainsi été adopté : le Comité technique des vaccinations ne sera plus rattaché au Haut conseil de la santé publique mais à la Haute autorité de santé. Cette mesure, annoncée par la ministre des affaires sociales et de la santé dès le 12 janvier dernier, à l'occasion de la remise du rapport de votre ancienne collègue Sandrine Hurel, permettra d'unifier les instances d'expertise et d'assurer une meilleure gouvernance de la politique vaccinale en France. L'objectif est de regrouper, au sein d'une même instance, l'expertise sur les recommandations vaccinales et celle sur l'évaluation du service médical rendu par les médicaments et les vaccins ainsi que sur l'amélioration de ce service médical rendu. La Haute autorité de santé figurera donc désormais parmi les institutions intervenant dans la conception et l'évaluation des politiques et stratégies de prévention.
Le Sénat a également accepté un amendement du Gouvernement visant à prolonger le délai d'habilitation à légiférer par ordonnances ce qui ne va pas toujours de soi pour la Haute assemblée , prévu par l'article 225 de la loi de modernisation de notre système de santé, afin d'assurer la cohérence des codes au regard du nouveau texte. Cette ordonnance, dite « de toilettage », ne pourra se faire qu'à droit constant et ne devra emporter aucune modification des textes sur le fond. Elle permettra de corriger les erreurs de référence ou de renvoi d'article, lesquelles, vous le savez mieux que personne en tant que législateur, se produisent souvent lors des modifications apportées par voie d'amendement et ce fut le cas, en l'espèce, surtout dans le code de la santé publique, suite à l'adoption de la loi de modernisation de notre système de santé.
Mesdames, messieurs les députés, l'ANSM est un acteur central et indispensable de la surveillance des produits de santé et, plus généralement, de la sécurité sanitaire dans notre pays, et je sais que vous y êtes tous particulièrement attachés. C'est aussi un maillon essentiel de la politique de santé menée par Marisol Touraine. Ce projet de loi, de prime abord très technique, comporte en réalité diverses dispositions qui permettront d'accompagner l'évolution de l'ANSM tout en garantissant à nos concitoyens le niveau de sécurité et de confiance qu'ils attendent s'agissant des produits de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 25 novembre 2016