Interview de M. Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture,de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "BFM/TV/RMC" le 15 décembre 2016 sur la situation à Alep (Syrie), les primaires à gauche, sur l'utilisation des produits phytosanitaires).

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Média : BFM TV - Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invité ce matin est Stéphane LE FOLL, porte-parole du gouvernement et ministre de l'Agriculture. Stéphane LE FOLL, bonjour.
STÉPHANE LE FOLL
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Avant de parler d'agriculture, la situation à Alep-est. François HOLLANDE demande une évacuation des habitants, des combattants et des personnels soignants aussi sous le contrôle d'observateurs internationaux. On en est où ? Parce qu'il y a des informations qui nous disent que peut-être il y aurait un début d'évacuation dans les heures qui viennent. On en est où ?
STÉPHANE LE FOLL
On en est à des informations que vous avez, que je ne peux ni confirmer ni infirmer. La seule chose que je sais, c'est que depuis l'été 2013 François HOLLANDE a été celui qui avait vu juste et qui avait proposé des frappes tout de suite pour éviter la dégradation de la situation qu'on connaît aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc le responsable, c'est Barack OBAMA qui a dit non ?
STÉPHANE LE FOLL
C'est le fait que la communauté internationale, au moment où elle aurait dû intervenir, n'est pas intervenue. Ce n'est pas de la responsabilité de la France puisque la France était et a été à l'origine, a souhaité une intervention immédiate. Après, la France s'est engagée comme à chaque fois pour trouver une solution politique en Syrie ; pour considérer que Bachar el-ASSAD, avec ce qu'il avait fait, ne pouvait pas être la solution politique. Ensuite elle a, au niveau du Conseil de sécurité de l'ONU, engagé sa responsabilité pour demander des résolutions qui ont été bloquées par un veto systématique de qui ? Des Russes qui soutiennent Bachar el-ASSAD. Aujourd'hui, on le constate.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est les Russes qui ont gagné aujourd'hui.
STÉPHANE LE FOLL
Qui ont gagné ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui ont gagné, oui. Qui sont les maîtres du jeu du moins.
STÉPHANE LE FOLL
Maîtres du jeu d'une ville qu'ils auront détruite, d'un pays qu'ils ne pourront pas reconstruire dans la mesure où ils auront fait des choix catastrophiques. Aujourd'hui, ils ont peut-être gagné la bataille d'Alep mais la bataille politique pour faire en sorte qu'une Syrie soit à nouveau souveraine, ils l'ont perdue. Il va donc falloir continuer et la France continuera à travailler.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que la France demande toujours le départ de Bachar el-ASSAD ?
STÉPHANE LE FOLL
La France dit qu'il n'y aura pas de solution avec le maintien de Bachar el-ASSAD pour la Syrie de demain. C'est une position constante, elle restera celle-là. Là, la France agit et veut agir pour trouver une solution humanitaire à une situation qui est catastrophique. Catastrophique. C'est ce qu'a fait le président de la République à chaque fois. Il a convaincu Angela MERKEL aujourd'hui pour avoir une proposition franco-allemande, pour que l'Europe aussi s'engage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aujourd'hui il y aura une proposition franco-allemande.
STÉPHANE LE FOLL
Elle est faite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors allez-y.
STÉPHANE LE FOLL
Elle est faite sur cette partie qui consiste à dire : dans Alep, il faut ouvrir des corridors pour faire sortir cent vingt mille personnes qui veulent partir, qui ne veulent pas rester. Il faut qu'on leur donne cette possibilité. Aujourd'hui, ils sont enfermés dans l'incapacité de pouvoir sortir. Ils subissent des bombardements et donc la mort et des souffrances. Deuxième point : il y a ceux qui sont dans la ville et qui vont rester. Il faut qu'on soit capable de leur apporter aussi un soutien humanitaire. C'est ces deux points qui font partie du plan avec une surveillance internationale de l'ONU pour que les choses se mettent en place. C'est ça la demande de la France, c'est ça la demande maintenant de la France et de l'Allemagne et c'est ça la demande de l'Europe, je l'espère, au Conseil européen pour que l'Europe parle aussi d'une voix qui soit unique et ferme dans ce débat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Parlons de la primaire de la gauche, Stéphane LE FOLL. Manuel VALLS, chez nos confrères de France Inter il y a quelques minutes demande la suppression pure et simple du 49-3. Vous êtes d'accord ?
STÉPHANE LE FOLL
[Soupirs] Écoutez, j'apprends ça ce matin. La suppression pure et simple…
JEAN-JACQUES BOURDIN
« Son utilisation est devenue dépassée. Elle apparaît comme brutale ».
STÉPHANE LE FOLL
Écoutez, je pense que dans ce débat il faut faire preuve de lucidité et ne surtout pas chercher à faire des choses qui… Au fond, le 49-3 c'est lorsqu'on a une difficulté sur le budget.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a été utilisé par Manuel VALLS.
STÉPHANE LE FOLL
Je pensais d'ailleurs que sa proposition était plutôt de le réserver au vote sur le budget parce qu'un budget, c'est très important. Il y a un Etat derrière et quand il y a un problème pour X ou Y raison – et on sait qu'il peut y avoir des problèmes – il y avait cette possibilité. En dehors du budget, je crois que c'est un 49-3, il n'y en a pas d'autre. Donc restreindre l'utilisation du 49-3 - ce qui a déjà été fait et ce qui est fait à des débats importants – me paraît être une bonne solution. Le supprimer, je l'apprends ce matin, il faudrait qu'à ce moment-là Manuel VALLS explique exactement quel est le sens de cette proposition.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes d'accord pour la suppression ? Vous êtes surpris ; je vous sens surpris.
STÉPHANE LE FOLL
Mais je suis surpris, oui. Je viens de l'apprendre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que ce n'est pas du tout sa position.
STÉPHANE LE FOLL
L'exercice du pouvoir, et je l'ai fait avec le Premier ministre appelé Manuel VALLS, il y a eu des 49-3. Et quelques-uns : deux, uniquement deux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'a pas appelé son porte-parole lorsqu'il s'est déclaré candidat, Manuel VALLS.
STÉPHANE LE FOLL
Non, je n'ai pas été prévenu mais je ne suis pas un proche de Manuel VALLS. Il était Premier ministre, il souhaitait être candidat. Je l'ai toujours dit, d'ailleurs je l'avais dit dans des interviews : je respectais le fait qu'il ait envie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il veut supprimer le 49-3 hors texte budgétaire.
STÉPHANE LE FOLL
Voilà !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il vous rejoint.
STÉPHANE LE FOLL
Il me rejoint. Parce que je me disais que là…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous étiez surpris.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, surpris, oui. J'avais compris qu'il avait plutôt l'intention de le restreindre au budget.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Stéphane LE FOLL, justement cette primaire : vous allez prendre position ? Vous prenez position ce matin ?
STÉPHANE LE FOLL
Je vais prendre une position qui va être très simple, en deux étapes. La première, c'est que dans ce débat, je suis là pour rappeler ce qui a été fait. Et le bilan du président de la République est un bilan sur lequel d'ailleurs les Français vont réévaluer ce qui a pu être à un moment leur sentiment sur ce bilan. Je ne veux pas, je n'accepte pas et je ne voterai pas pour ceux qui vont faire profession dans cette primaire – et je l'avais dit – profession de critiquer et de dénoncer ce bilan.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez donc soutenir celui ou celle qui défend le bilan de François HOLLANDE ?
STÉPHANE LE FOLL
Pas que ça. Le bilan est une étape, un socle qui doit nous projeter dans l'avenir avec un projet. Mais ceux qui n'ont comme ambition que de critiquer ce qui a été fait pour pouvoir présenter un projet font une erreur grave. Une erreur grave. J'ai bien connu, j'ai bien regardé tous ces débats avec les frondeurs pendant quatre ans et demi. Puis quand on regarde à la fin Sécurité sociale, quand on regarde retraite, quand on regarde les grands enjeux de la loi et des avancées sociales qui ont été faites, quand on regarde la question internationale et la position qui a été celle de la France et du président de la République pendant toutes ces années, on s'aperçoit que la critique qui a été portée de manière systématique est une erreur. Ça, c'est le premier point. Je ne voterai donc pas pour ceux qui vont uniquement dans cette primaire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais qui sont ceux-là ?
STÉPHANE LE FOLL
Il y en a quelques-uns, vous n'avez qu'à regarder. Et qui ont été ministre d'ailleurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Arnaud MONTEBOURG.
STÉPHANE LE FOLL
Arnaud MONTEBOURG, Benoît HAMON. Je ne parle pas de FILOCHE et d'autres qui ont uniquement comme ambition d'être dans cette critique systématique. Ça c'est le premier point ; première position que je prends.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il vous reste Manuel VALLS et Vincent PEILLON.
STÉPHANE LE FOLL
Première réponse. Deuxième réponse : moi, j'ai envie de regarder quand même aussi quel est le projet, comment on fait, qu'est-ce qu'on va mettre pour que les Français se sentent à la fois protégés et qu'en même temps on prépare l'avenir. La semaine prochaine, je sortirai ce qui me paraît être quelque chose d'important.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire ?
STÉPHANE LE FOLL
Il y a une inégalité qui se creuse, dont on ne parle pas et pas suffisamment et qui est perçue par les Français : c'est celle du patrimoine. En fait, les écarts de patrimoine sont de plus en plus importants. Un pour cent des Français concentre dix pour cent de la richesse de la France. Dix pour cent des Français concentrent cinquante pour cent de cette richesse. Je pense qu'on a fait dans ce quinquennat des choses qui permettent d'avoir une politique qui réduit ces inégalités parce qu'elles sont perçues par les Français. Et qu'est-ce qui est terrible ? C'est que quand vous travaillez, vous avez l'impression que vous n'allez pas pouvoir céder quelque chose, vous avez l'impression que c'est de plus en plus difficile d'acquérir une maison, de pouvoir satisfaire à cette ambition que tout le monde a à la fin d'une carrière, d'une vie, de pouvoir avoir un patrimoine. Cette question est au coeur du débat me semble-t-il.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais qu'allez-vous sortir la semaine prochaine ?
STÉPHANE LE FOLL
Je vais sortir des éléments sur cette question d'analyse et puis des propositions.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire ? Les sortir comment ? Vous allez faire des propositions ?
STÉPHANE LE FOLL
Je vais donner une analyse de ce que je pense être la réalité de nos économies.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais elle va servir à quoi cette analyse ?
STÉPHANE LE FOLL
C'est d'abord pour voir et pour dire ce que je pense, moi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous dites : « Je refais de la politique ».
STÉPHANE LE FOLL
Voilà. J'ai une liberté.
JEAN-JACQUES BOURDIN
« Je redeviens un homme politique ».
STÉPHANE LE FOLL
J'ai une liberté, le président de la République a annoncé qu'il ne se représenterait pas et maintenant, je considère que dans ce débat, ce n'est pas simplement qui je soutiens. C'est qu'est-ce que je souhaite, qu'est-ce que je veux. Bien entendu, sachez-le, je suis quelqu'un de responsable. J'ai toujours été responsable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez donc soutenir un des candidats quand même.
STÉPHANE LE FOLL
Mais bien sûr. J'ai toujours été cohérent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quand et qui ?
STÉPHANE LE FOLL
Ce sera pour le début de l'année prochaine, lorsque la primaire sera engagée, que les débats seront engagés, que les projets seront posés sur la table.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous hésitez entre VALLS et PEILLON ; j'ai bien compris.
STÉPHANE LE FOLL
Je n'hésite pas. Je sais exactement là où je veux aller mais j'irai avec la méthode qui est la mienne et avec le temps que j'aurais choisi pour le faire et pour le décider. J'ai toujours été responsable. Porte-parole de ce gouvernement, j'ai toujours assumé des responsabilités.
JEAN-JACQUES BOURDIN
A quoi sert la candidature de Vincent PEILLON franchement ?
STÉPHANE LE FOLL
Je n'ai pas à répondre à cette question puisque c'est Vincent PEILLON qui a présenté sa candidature. Il n'est pas venu me demander de savoir s'il pouvait ou pas se présenter : il s'est présenté.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a été incité à se présenter ?
STÉPHANE LE FOLL
Mais je n'en sais rien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord. Dites-moi, dans les derniers sondages je vois que le candidat vainqueur de la primaire est largement devancé par Emmanuel MACRON. Ça vous surprend ?
STÉPHANE LE FOLL
Écoutez, Emmanuel MACRON est parti depuis longtemps dans cette campagne. Il a pris de l'avance.
JEAN-JACQUES BOURDIN
« Il amène de l'air à la vie politique » dit Ségolène ROYAL. Vous êtes d'accord ?
STÉPHANE LE FOLL
Il amène de l'air, il amène des idées et on le voit bien. Une forme de liberté, une volonté de promouvoir la réussite et avec aussi quelques ambigüités sur le fond.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lesquelles ?
STÉPHANE LE FOLL
J'ai vu qu'il avait beaucoup de boucliers ; un bouclier social, un bouclier… D'ailleurs, c'est marrant ce côté bouclier. On voit bien qu'on cherche à protéger et en même temps, il cherche à libérer ou libéraliser. L'équilibre entre les deux, au fur et à mesure on va voir comment il se situe et où il se situe. Parce que le progrès qu'il revendique, et moi je revendique aussi le progrès, la nécessité de faire progresser les Français, de leur donner des capacités, je le disais, sur la question du patrimoine : je n'ai pas entendu parler de ça. J'ai vu qu'il faisait un système assez complexe où il baissait les cotisations, il transférait ça sur la CSG, il mettait de la CSG progressive, ce qu'on avait essayé de faire une fois et qui a été retoqué par le Conseil constitutionnel. Je le dis au passage. Tout ça, c'est des mesures techniques. Le projet, on le sent chez lui, c'est cette volonté de libéraliser, de donner de la liberté pour que les énergies et la réussite puissent… Mais ce n'est pas si simple.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne le sentez pas, vous ne le croyez pas.
STÉPHANE LE FOLL
Non. Parce que je n'ai pas cette fibre, moi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'êtes pas séduit.
STÉPHANE LE FOLL
J'ai une fibre plus, j'allais dire, structurante avec des choses qui équilibrent ce qu'il est nécessaire de faire pour permettre à l'économie de se développer et, en même temps, le fait – et j'en suis convaincu – qu'un modèle social c'est une garantie aussi fondamentale qu'on doit aux Français. D'ailleurs, quand François FILLON s'est attaqué à la Sécurité sociale avec le côté un peu enrhumé des réponses, aujourd'hui on voit bien que ça touche. J'ai été frappé même dans la Sarthe, dans ma circonscription qui était l'ancienne de François FILLON, sur la question de la Sécurité sociale : tout de suite on m'a interpellé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Hier, vous avez réuni les socialistes indécis proches de François HOLLANDE.
STÉPHANE LE FOLL
Hier ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, au ministère de l'Agriculture. Un petit-déjeuner, une quarantaine de personnalités politiques autour de vous.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, de députés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Orphelins de la candidature de François HOLLANDE.
STÉPHANE LE FOLL
Mais j'essaye de discuter avec ceux qui viennent me demander : « Qu'est-ce que tu fais ? Comment on fait ? »
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et que va faire François HOLLANDE ? Est-ce qu'il va se prononcer ?
STÉPHANE LE FOLL
Alors ça…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais est-ce que vous pensez qu'il va se prononcer ?
STÉPHANE LE FOLL
Sur ce sujet, on m'a déjà posé la question. Je ne pense rien sur ce sujet. C'est à lui de décider ce qu'il va faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça, c'est sûr.
STÉPHANE LE FOLL
Je ne ferai aucun commentaire sur ce sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'en avez pas parlé avec lui ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, je n'en ai pas parlé avec lui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord. Parlons d'agriculture et parlons de la grippe aviaire. La grippe aviaire. Les Français ne doivent pas s'inquiéter, c'est ce que disent absolument tous les spécialistes de la question.
STÉPHANE LE FOLL
Oui. Les Français ne doivent pas s'inquiéter, ça touche les animaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dix-neuf foyers et ce n'est pas transmissible.
STÉPHANE LE FOLL
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dix-neuf foyers dans les élevages de volaille en France ; on est bien d'accord. Combien de bêtes vont être abattues ou sont en cours ? On sait, on a des chiffres ?
STÉPHANE LE FOLL
C'est plusieurs milliers déjà. On est obligé de le faire parce que là, on n'est pas dans la même situation que celle qu'on a eue l'an dernier où c'était une grippe aviaire, une influenza aviaire qui était liée à un zootype qui était lié à la zone de production. C'est pour ça qu'on a fait un vide sanitaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y aura pas de vide sanitaire ?
STÉPHANE LE FOLL
Non. On n'a pas les animaux malades. Là, c'est une grippe qui est arrivée par des oiseaux sauvages, migrateurs et qui touche treize pays européens. Il n'y a pas que la France qui est touchée. Nous, on essaye de gérer ce problème avec le maximum de précaution, avec l'ensemble des mesures de biosécurité qu'on doit mettre en place pour confiner les animaux qui sont dehors pour éviter la transmission de ce virus. A chaque fois qu'on détecte un endroit, on abat et on évite en protégeant dix kilomètres autour les mouvements d'animaux et on essaye de trouver comme ça le moyen – et on va le trouver et on va y arriver…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien de départements touchés aujourd'hui ?
STÉPHANE LE FOLL
Je ne sais pas. Ça fait dix-neuf foyers, il y a sept ou huit départements je crois.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui sont touchés.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, qui sont touchés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc pas d'inquiétude mais inquiétude pour la filière foie gras et pour l'export.
STÉPHANE LE FOLL
Oui. Pour l'export, on était déjà avec le problème qu'on avait eu l'année dernière. On était pratiquement revenu à une situation où on allait avoir le label indemne de l'influenza aviaire et est arrivé ce virus HN8 différent par des oiseaux migrateurs mais qui touche toute l'Europe. On n'a pas aujourd'hui ce label indemne par définition puisqu'on ne l'est pas. Mais on a toujours les exploitations et la consommation de foie gras cette année, le foie gras cette année, il y aura du foie gras et il sera de grande qualité ce foie gras. Je l'ai déjà dit.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Stéphane LE FOLL, le groupe WILLIAM SAURIN avec des comptes qui ont été trafiqués, des commissaires aux comptes qui n'ont pas fait leur boulot.
STÉPHANE LE FOLL
En tout cas, tous ces comptes qui ont été validés…
JEAN-JACQUES BOURDIN
WILLIAM SAURIN, GARBIT, MADRANGE, PAUL PREDAULT, une tranche de jambon sur trois vendues en grande surface aujourd'hui. Que peut faire l'Etat ? Qu'allez-vous faire ? Trois mille deux cents salariés inquiets.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, et avec des emplois indirects à mille cinq cents salariés. Que peut faire l'Etat ? On est dans une situation où ces fausses factures servaient à gonfler un chiffre d'affaires et permettaient d'aller après…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il y a eu fausses factures.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, fausses factures. La justice est saisie, je ne vais pas essayer de définir exactement ce qui s'est passé. Oui, il y a eu tromperie. Tromperie avec ensuite des demandes de créances bancaires qui étaient négociées avec plusieurs, plus d'une dizaine de banques. Aujourd'hui, on se retrouve avec ce problème. Qu'est-ce qu'il faut faire ? Éviter que tous les créanciers, c'est-à-dire ceux qui ont des dettes vis-à-vis de cette entreprise, commencent à dire : « On veut le remboursement de toutes nos dettes », parce qu'à ce moment-là c'est la cessation d'activité. L'État sera donc là avec les partenaires financiers pour faire en sorte – et nous avons déjà pris tous les contacts pour dire que nous serions là, pour éviter que tout le monde dans un mouvement qui consisterait à dire : « Moi d'abord, je dois récupérer mon argent », et on fait tomber cette société et donc les emplois.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l'État va garantir l'avenir de la société.
STÉPHANE LE FOLL
On est train de travailler pour garantir la poursuite de l'activité et de l'emploi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas de nationalisation ? Je vois ça, Xavier BEULIN répond « non, non, une nationalisation n'est pas la solution. »
STÉPHANE LE FOLL
Non, mais une action est la solution, pas une nationalisation. En plus ce n'est pas une entreprise, puisque vous avez vu…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Plusieurs, oui, oui.
STÉPHANE LE FOLL
Il y avait une holding financière, c'est cette holding qui a été… et puis après il y a plusieurs entreprises. Ensuite il y aura un travail à faire sur – de moyen et de long terme – sur comment on donne une pérennité à toutes ces activités, parce que c'est ça l'enjeu. Donc, là, il y a une urgence, c'est de traiter cette question pour éviter la cessation d'activité, et ensuite il y aura un travail à faire sur la pérennisation de l'ensemble de ces entreprises, dont certaines sont des marques très connues, vous l'avez dit, GARBIT, MADRANGE et WILLIAM SAURIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Deux choses encore. Pas de caméras dans les abattoirs, vous regrettez ?
STÉPHANE LE FOLL
Moi j'avais vu la mission avec Olivier FALORNI et Jean-Yves CAULLET, j'étais prêt à faire des tests sur les possibilités qu'on avait…
JEAN-JACQUES BOURDIN
« Non » ont dit les députés.
STÉPHANE LE FOLL
Les députés, hier il y a eu une discussion, j'étais prêt à faire des tests. J'avais dit, lors de la commission et de l'audition qui avait été la mienne, j'avais dit attention, sur les caméras, avec des salariés, il faut qu'on fasse aussi très attention à ce qui peut se passer et comment ça peut se mettre en oeuvre. Donc j'étais prêt à faire des tests. Il y a une discussion, elle va se poursuivre. Cette mission elle est importante et moi j'y fais toute attention nécessaire pour pouvoir trouver les bonnes solutions.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dernière chose sur les produits phytosanitaires. Je sais que vous étiez en colère tout à l'heure…
STÉPHANE LE FOLL
Oui, je suis en colère, parce que j'arrive et on se moque de moi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non. Sur RMC Découverte…
STÉPHANE LE FOLL
On laisse penser qu'un ministre comme moi va demander 5 euros à MONSANTO…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Par certificat manquant.
STÉPHANE LE FOLL
Par certificat manquent. Et qu'est-ce que c'est que les certificats manquants ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est quoi ?
STÉPHANE LE FOLL
C'est ce que j'ai mis en place, ça s'appelle des certificats d'économie de produits phytosanitaires. On a, la France a…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Premier consommateur d'Europe de pesticides.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, et pourquoi ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et pourquoi ? Et pourquoi est-ce qu'on continue à être les premiers ?
STÉPHANE LE FOLL
Mais qu'on a une surface, en Europe, la plus grande, et en particulier une surface viticole, et la viticulture consomme beaucoup de phytosanitaires. Donc, en global, en valeur absolue, on est le plus gros consommateur. Si je ramène ça à l'hectare, on n'est pas ceux qui consommons le plus à l'hectare, mais ce n'est pas pour autant que moi je considère qu'il ne faut pas qu'on baisse l'utilisation des phytosanitaires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que l'utilisation est en baisse, ou pas, des pesticides ?
STÉPHANE LE FOLL
Elle est aujourd'hui… quand je suis arrivé, elle augmentait, 2012, 2013, 2014, 2015, elle n'a cessé d'augmenter, et c'est bien pourquoi j'ai été obligé de refaire un plan, qu'on a appelé « Ecophyto 2 », parce que le premier qui avait été en place avait loupé son objectif. Il devait réduire les phytosanitaires, ils augmentent. Mais pour faire baisser les phytosanitaires, c'est ça que je voudrais faire comprendre, la seule chose que je veux faire comprendre ce matin, plutôt que de se moquer d'un ministre, c'est qu'il faut mettre en place tout un processus de changement de modèle de production. Quand les agriculteurs ont un modèle de production, qui a été conçu pour utiliser des phytosanitaires, et que vous leur dites il suffit d'interdire les phytosanitaires, ils vous disent « mais vous êtes en train de nous tuer. »
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ou les taxer.
STÉPHANE LE FOLL
Ou les taxer, avec la situation économique qu'on connaît aujourd'hui. La difficulté elle est là pour un ministre comme moi, c'est qu'il est obligé de tenir compte…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les agriculteurs, qui perdent des revenus, j'ai vu les chiffres, ils sont catastrophiques pour l'année 2016, catastrophiques.
STÉPHANE LE FOLL
Catastrophiques, et on me dit il suffirait de taxer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'ailleurs les agriculteurs qui votent Front national, qui votent François FILLON, qui ne votent plus Parti socialiste.
STÉPHANE LE FOLL
Mais ça fait longtemps que les agriculteurs ne votent pas à gauche, il y avait 13, 14 % à chaque fois, c'est à peu près le même vote, mais ce que je dis, c'est que si on ne change pas les modèles de production, la manière dont on produit… moi j'ai mis un premier CEPP, qui a été distribué, les fameux certificats d'économie de produits phytosanitaires, aux productions d'oléoprotéagineux, ils ont associé oléoprotéagineux et légumineuses, qu'est-ce que ça permet de faire ? De baisser de 20 % l'utilisation des pesticides, des herbicides, de 20 à 30 % l'utilisation d'engrais azoté minéral, voilà le sujet. Mais ça se fait parce qu'on fait du colza et on l'associe avec une légumineuse. Si on dit simplement faites du colza, quoi que le colza n'est pas un gros consommateur, et n'utilisez pas de phyto, ça ne marche pas. Donc, les CEPP, ce n'est simplement 5 euros, c'est 5 euros pour des doses qui ne seront pas… si, dans 5 ans, les entreprises qui vendent des pesticides n'ont pas baissé de 20 %, à chaque non respect de ces doses qui n'auront pas baissé, ils paieront 5 euros, c'est ça l'enjeu. Mais l'enjeu c'est de changer complètement la manière de faire, et ça, les certificats d'économie de phytosanitaires, plutôt que de s'en moquer, on ferait mieux d'essayer de les défendre, sachant que les industriels, eux, sont contre, sont contre, ils ont déjà déposé un recours au Conseil d'Etat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Stéphane LE FOLL.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 décembre 2016