Déclaration de M. Harlem Désir, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, sur le socle européen des droits sociaux et la convergence sociale et salariale dans l’Union européenne, à l'Assemblée nationale le 11 janvier 2017.

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Circonstance : Débat sur le socle européen des droits sociaux et la convergence sociale et salariale dans l’Union européenne, à l'Assemblée nationale le 11 janvier 2017

Texte intégral


M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur le rapport d'information de la commission des affaires européennes sur le socle européen des droits sociaux et la convergence sociale et salariale dans l'Union européenne.
La conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat en deux parties. Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes ainsi que la présidente de la commission des affaires européennes, puis le Gouvernement. Nous procéderons ensuite à une séquence de questions suivies de leurs réponses. Je vous rappelle que la durée des questions, ainsi que celle des réponses, est limitée à deux minutes.
(…)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mesdames et messieurs les députés, je veux d'abord vous remercier de votre invitation à débattre ce soir du socle européen des droits sociaux et de la convergence sociale et salariale dans l'Union européenne. Je remercie particulièrement la présidente de la commission des Affaires européennes, Danielle Auroi, d'avoir obtenu l'inscription de ce débat à l'ordre du jour de l'Assemblée, dans le prolongement du rapport présenté par Philip Cordery, Jean-Patrick Gille et Sophie Rohfritsch au début du mois de décembre dernier.
Je remercie les rapporteurs pour la qualité de leur travail : leur rapport a enrichi la contribution française à la consultation de la Commission européenne sur le socle européen des droits sociaux.
Le Gouvernement soutient cette initiative de la Commission parce que, comme l'Assemblée nationale, nous sommes convaincus qu'un meilleur équilibre entre les dimensions économiques et sociales de la construction européenne est absolument nécessaire.
L'Union européenne s'est fixé de longue date des objectifs ambitieux en matière de cohésion sociale, de progrès social et de plein-emploi. Elle s'est dotée au fil des ans d'un protocole social, d'une charte des droits fondamentaux et d'une clause sociale horizontale, tous intégrés dans les traités, mais aussi – cela a été rappelé, notamment par Joël Giraud – de nombreuses directives, concernant la santé et la sécurité au travail par exemple, qui constituent un acquis social de l'Union européenne.
Pourtant la vie et le fonctionnement de l'Union européenne continuent d'être marqués par un déséquilibre persistant entre l'économique et le social.
Il y a là des raisons historiques et structurelles, que Jean-Patrick Gille a en partie rappelées. L'Europe s'est construite par l'intégration économique, même si ses buts étaient politiques – et d'abord celui de la paix. Ce sont les règles économiques, la politique de la concurrence, la politique monétaire qui sont devenues petit à petit européennes tandis que le social, lui, malgré les buts sociaux affichés dans l'article 3 du Traité sur l'Union européenne et dans les articles des précédents traités ainsi que dans les directives que j'ai rappelées, est resté pour l'essentiel une compétence nationale.
Dans l'Europe des Six, qui était très homogène, et même dans l'Europe des Douze ou des Quinze, les niveaux de développement économique et social des États membres étaient assez proches et la convergence économique et sociale assez forte pour que cela ne pose guère de problème. Mais dans l'Europe du grand élargissement, à partir de 2004, les écarts des niveaux économiques et sociaux sont devenus plus grands et cette désynchronisation entre l'économique et le social a produit des effets délétères.
La question du détachement des travailleurs en est une illustration. Depuis 1996, date de la directive, comme Isabelle Le Callennec l'a rappelé, la situation a beaucoup changé du fait de cet élargissement. C'est pourquoi la France demande sa révision. Nous avons déjà obtenu une révision de son application mais nous voulons désormais que la directive elle-même soit révisée.
Le Brexit, les fractures sociales et géographiques qu'il a révélées et qu'on retrouve partout en Europe, la montée des populismes, rendent plus nécessaire encore une réponse forte de l'Europe, prouvant qu'elle est une protection économique et sociale dans la mondialisation, un cadre qui tire vers le haut et non vers le bas, qu'elle se dote d'outils et de politiques pour lutter contre le dumping en son sein.
II ne s'agit donc pas de chercher à transférer toutes les compétences sociales au niveau européen. Chaque État membre est attaché à ses compétences en la matière, de même que les partenaires sociaux. Il s'agit de s'assurer qu'existent des éléments communs à toute l'Europe et qu'un dumping inacceptable ne s'instaure pas entre États membres sur la base du « moins-disant » social.
L'enjeu du socle européen des droits sociaux est donc de permettre une convergence vers le haut des systèmes sociaux nationaux en même temps que d'assurer qu'existe un ensemble de droits sociaux garantis pour tous les Européens, quel que soit leur pays. Ce socle doit aussi encourager les États membres à coopérer davantage dans le domaine social et à échanger les meilleures pratiques, en particulier face aux nouvelles évolutions de l'économie, telle la numérisation, et à leurs conséquences dans le monde du travail.
Nous pensons donc, comme l'Assemblée – et Danielle Auroi, présidente de votre commission des affaires européennes, a insisté sur ce point –, que ce socle contribuera à la fois à lutter contre la pauvreté en Europe, à renforcer la coopération économique entre les États membres et à permettre un meilleur fonctionnement du marché intérieur et de la zone euro. Nous pensons aussi que le socle européen des droits sociaux doit montrer aux citoyens que l'Europe défend leurs droits sociaux ainsi qu'un modèle social élevé.
Tel est le sens des propositions que la France a transmises à la Commission européenne à la fin du mois de décembre, dans le cadre de sa consultation. Cette position française s'appuie d'abord sur l'avis rendu par le Conseil économique, social et environnemental, qui avait été saisi par le Premier ministre d'alors, Manuel Valls, et sur les travaux de l'Assemblée nationale en la matière – notamment ce rapport ou le rapport Cordery sur le salaire minimum.
Nous sommes convaincus que des avancées sont nécessaires sur les trois axes identifiés par la Commission européenne, c'est-à-dire l'égalité des chances et l'accès au marché du travail, les conditions de travail équitables et une protection sociale adéquate. Sans développer tous les détails de nos propositions, j'insisterai sur l'essentiel.
Le premier axe est l'accès au marché du travail. Les évolutions rapides des compétences requises et des besoins du marché du travail ainsi que la nécessité pour les travailleurs de faire face aux évolutions de leur emploi imposent que les droits liés à l'éducation et à la formation, qu'elle soit initiale ou continue, soient garantis partout en Europe.
Pour être le plus efficaces possible, les droits à la formation professionnelle tout au long de la vie doivent être attachés aux individus, comme l'a souligné Jean-Patrick Gille, en particulier pour favoriser tant leur mobilité professionnelle que géographique au sein de l'Europe. Il est donc souhaitable que ces droits soient clairement définis et mis en œuvre par le biais de législations nationales contraignantes, de recommandations du Conseil et du Parlement européen ou d'accords des partenaires sociaux et soient appuyés par des dispositifs au niveau européen.
Le premier point sur lequel nous avons voulu insister c'est sur la nécessité de faciliter la mobilité de tous les jeunes Européens. Cela renforcera leur employabilité future mais aussi leur sentiment d'appartenance européenne.
Nous fêtons en ce moment les trente ans d'Erasmus, formidable réussite dont l'Europe peut être fière et dont davantage de jeunes doivent pouvoir bénéficier à l'avenir, et pas seulement les étudiants. La France souhaite que ce programme, devenu « Erasmus + » soit encore étendu. Nous sommes ainsi favorables à la création d'un Erasmus des apprentis, destiné à encourager la mobilité des apprentis. La Commission devrait prendre une initiative pour lever les obstacles à cette mobilité qui sont encore trop nombreux du fait des différentes d'organisation de l'apprentissage entre États membres et d'un manque de reconnaissance des formations et de portabilité de certains droits.
Pour les étudiants, il faut aussi créer un statut du stagiaire au niveau européen. Pour les jeunes demandeurs d'emploi, l'accès à des dispositifs qui facilitent leur mobilité au niveau européen devrait être facilité à partir de l'expérience en cours de la mise en réseau des services publics de l'emploi au travers des initiatives EURES – European Employment Services – et « Ton premier emploi EURES ». Pour favoriser la mobilité des salariés, nous demandons aussi une révision du règlement européen sur la coordination des régimes d'assurance chômage qui permettrait d'en assurer un financement plus équitable en cas de mobilité d'un État membre à un autre.
Toujours dans l'objectif de favoriser l'accès au marché du travail, il faut renforcer la formation tout au long de la vie. L'insertion des jeunes dans l'emploi et en particulier des « décrocheurs » – ceux qu'on appelle les Neets en anglais, pout not in education, employement or training – doit être renforcée. À cet égard, l'initiative pour l'emploi des jeunes devra continuer à accompagner les politiques en faveur des jeunes les plus éloignés du marché du travail – la Garantie jeunes en France. Nous sommes parvenus à un accord européen pour qu'elle soit dotée de 1,2 milliard d'euros supplémentaire pour la période 2017-2020, ce qui permettra d'étendre et de prolonger la Garantie jeunes, en France et dans d'autres pays.
Pour assurer une formation professionnelle continue, un droit à la formation attaché à la personne devrait être créé dans chaque État membre. Dans la continuité du récent paquet « Compétences », ce droit individuel à la formation pourrait être instauré par voie de directive ou via une recommandation qui laisserait la définition précise du dispositif à la charge de chaque État, tout en assurant la compatibilité et la portabilité entre États des différents systèmes.
Le deuxième grand axe mentionné par la Commission vise à assurer des conditions de travail justes et équitables. Nous sommes d'accord avec cette priorité parce que nous considérons que le bon fonctionnement du marché intérieur repose sur une concurrence équitable en matière sociale aussi. Cela passe nécessairement, selon nous, d'une part par une certaine convergence des droits du travail et des conditions de travail à l'échelle de l'Union européenne et d'autre part par la promotion de standards de haut niveau.
La France souhaite pour cela favoriser l'instauration de salaires minimum nationaux dans l'ensemble des États membres de l'Union – nous nous appuyons d'ailleurs sur les analyses et les recommandations du rapport de Philip Cordery –, la mise en place de salaires minimum nationaux définis en pourcentage du salaire médian – 60 % du salaire médian par exemple –, en tenant compte de la situation économique de chaque État membre. Cela pourrait passer par un accord collectif européen ou par une recommandation du Conseil et nécessiterait l'implication des partenaires sociaux.
Il est également essentiel et urgent d'achever la révision de la directive de 1996 sur le détachement des travailleurs. Il faut en effet rendre effectif le principe « salaire égal pour un travail égal sur un même lieu de travail » et contrecarrer le développement des sociétés « boîtes aux lettres ». Myriam El Khomri a pris l'initiative de rencontrer les représentants des onze pays qui ont opposé un « carton jaune » à cette révision pour les convaincre que faire aboutir cette révision était de l'intérêt de tous les Européens.
De même la révision du règlement de coordination des systèmes de sécurité sociale est nécessaire, pour lutter contre les contournements du régime actuel du détachement.
En matière de santé et de sécurité au travail, pour assurer un haut niveau de protection des salariés dans tous les États membres, nous demandons que soit renforcée l'harmonisation européenne en matière de seuils d'exposition professionnelle aux substances dangereuses.
Du point de vue de la justice et de l'équité des conditions de travail, l'égalité entre femmes et hommes est une priorité politique pour la France. Des progrès doivent notamment être réalisés en matière de conciliation des temps de vie pour que l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes soit effective. D'une part, une initiative législative devrait être promue en vue de rééquilibrer les congés parentaux et de garantir l'accès, tant pour les femmes que pour les hommes, à un « congé du proche aidant » permettant de s'occuper des personnes handicapées ou en perte d'autonomie. D'autre part, des leviers budgétaires doivent être mobilisés pour soutenir la mise en place de structures d'accueil favorisant le libre choix des familles.
Les évolutions de l'économie et de l'emploi justifient qu'une initiative européenne soit prise pour sécuriser le statut des travailleurs indépendants. La diversification des formes d'emploi conjuguée à la révolution numérique et la nécessité de sécuriser les transitions professionnelles rendent indispensable la définition d'un socle de droits fondamentaux attachés à la personne du travailleur, quel que soit son statut. Ce socle doit recouvrir des droits individuels tels que la protection contre la discrimination, la prévention des risques professionnels et la possibilité d'accéder effectivement à la formation professionnelle, ainsi que des droits collectifs tels que la liberté syndicale.
Le troisième axe identifié par la commission vise à protéger les citoyens contre les aléas de la vie. Il est nécessaire qu'il existe des systèmes de protection sociale, d'accès aux soins et de droit à la retraite garantis pour tous les travailleurs de tous les pays de l'Union, quel que soit leur statut, salarié ou indépendant. C'est à juste titre, monsieur Carvalho, que vous avez insisté sur ce point, même si, sur d'autres points, vos mises en cause n'étaient pas justifiées : nous souhaitons autant que vous une convergence sociale vers le haut qui aille de pair avec l'intégration économique de l'Europe. Nous ne disjoignons pas ces deux objectifs.
Face aux restructurations enfin, le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation, qui intervient aujourd'hui lorsque de très grandes entreprises sont concernées, doit évoluer pour être plus réactif et voir son champ élargi afin notamment de prendre davantage en compte la situation des petites et moyennes entreprises.
La France a également souhaité présenter des propositions sur la dimension sociale du semestre européen. Nous sommes là au cœur du lien entre la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro et les objectifs sociaux. C'est un point qu'a soulevé Arnaud Richard et sur lequel d'autres orateurs ont également insisté.
Les évaluations conduites dans le cadre du semestre européen, notamment dans les rapports annuels des pays, devraient prendre en compte l'impact social et environnemental des mesures et des réformes préconisées. Un tableau de bord comprenant un nombre restreint d'indicateurs devrait être défini à l'issue d'une large consultation publique, en tenant compte des enjeux redistributifs, de la lutte contre la pauvreté, des questions d'emploi, de soutien à la recherche et développement et de protection de l'environnement.
Dans ce contexte, l'un des objectifs poursuivis doit également être de préserver et de développer un dialogue social de qualité, à la fois au niveau national, en impliquant les partenaires sociaux à différents stades de la procédure du semestre européen, et au niveau européen, en encourageant la relance du dialogue social européen. Les objectifs de convergence sociale ascendante doivent donc trouver leur place au cœur de la coordination économique de la zone euro.
Mesdames et messieurs les députés, il est de notre responsabilité de démontrer que l'Europe peut être une protection pour les peuples en termes économiques et sociaux, qu'elle nous permet de mieux maîtriser notre destin et qu'elle nous renforce dans la mondialisation et dans la préparation de l'avenir.
C'est un défi considérable. S'il est ambitieux, le socle européen des droits sociaux sera un immense progrès. La conviction du Gouvernement est qu'un socle de droits sociaux européens solide est une condition pour que l'Europe renoue avec ses citoyens et soit à la hauteur de son ambition démocratique et sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)
M. le président. Nous en venons aux questions, en commençant par le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Joël Giraud.
M. Joël Giraud. Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, de revenir sur la situation des travailleurs détachés.
Né d'une directive européenne de 1996, le principe des travailleurs détachés permet à des salariés issus d'États membres de l'Union européenne de travailler dans un autre État de l'Union à titre temporaire et de bénéficier d'un socle de droits fondamentaux dans leur pays d'accueil, dont le salaire minimum. Dans le même temps, ils continuent, ainsi que leurs employeurs, à payer les cotisations sociales dans leur pays d'origine.
Des abus ont cependant été constatés : beaucoup de ces travailleurs sont employés pour des salaires moins élevés que ceux qui se pratiquent dans leur pays d'accueil et, ces dernières années, leur nombre a augmenté de presque 45 % dans l'Union – ils sont près de 300 000 en France.
Le rapport dont nous discutons propose notamment de mettre en œuvre une prise en charge de l'assurance chômage par l'État de dernier emploi, c'est-à-dire celui où le travailleur a cotisé, et non par l'État de la demande, et pour une période qui ne serait plus de trois mois maximum, comme le prévoit la législation en vigueur, mais plus longue, d'un minimum de six mois. Ce serait en effet plus sécurisant mais il faut aller plus loin.
Les travailleurs détachés doivent pouvoir bénéficier de conditions de vie et de travail décentes et d'une rémunération équivalente à celle des travailleurs du pays d'accueil. Pour y parvenir, l'Union européenne doit fixer des règles qui puissent être facilement mises en place et compréhensibles pour les travailleurs et les employeurs. Une réforme de la directive sur les travailleurs détachés le permettrait, limitant ainsi les abus et le dumping social.
Pourriez-vous nous indiquer précisément l'état d'avancement des négociations sur la révision que vous venez d'évoquer ?
Par ailleurs, comme le rappelle Jacques Delors, « hormis le fait de veiller à la bonne application de la législation sur le travail, il reste beaucoup à faire » pour donner « un nouvel élan à l'Europe sociale ». Parmi les propositions qu'il avance, que pensez-vous de la création d'une « Union sociale », où il serait possible de jouir des droits sociaux protégés par les États membres, quel que soit son domicile, et qui permettrait ainsi de promouvoir la mobilité, très importante dans les régions frontalières – qui vont aujourd'hui bien au-delà des territoires à proximité des frontières – et de donner du poids à l'Europe sociale ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Monsieur le député, vous m'interrogez sur l'état de la discussion sur la révision de la directive relative au détachement de travailleurs de 1996. Comme vous le savez, la France est en première ligne sur ce sujet, ma collègue Myriam El Khomri étant particulièrement impliquée sur ce dossier.
La Commission européenne a fait une proposition conforme à nos souhaits et comportant plusieurs points que nous appelions de nos vœux depuis longtemps. Elle vise en particulier à rendre effectifs le principe d'un salaire égal pour un travail égal sur le même lieu de travail, le principe d'une meilleure affirmation du caractère temporaire du détachement et celui d'un encadrement accru des pratiques des entreprises intérimaires et des chaînes de sous-traitance. Il nous paraît nécessaire d'aboutir sur ces trois dimensions, mais aussi d'aller plus loin pour garantir une lutte effective contre toutes les formes d'abus.
C'est pourquoi, dans le cadre des négociations engagées, nous défendons auprès de nos partenaires des propositions visant notamment à contrecarrer le phénomène des sociétés dites « boîtes aux lettres », créées artificiellement pour organiser le détachement de travailleurs qui en réalité ne travaillaient pas auparavant dans la société d'un autre État membre et qui ont pour seule finalité de contourner les droits sociaux de l'État où ces travailleurs sont employés. Ce mécanisme crée des distorsions de concurrence au détriment des entreprises du bâtiment, des travaux publics, de l'agriculture ou du transport, en particulier du transport routier.
Deuxième axe, nous voulons renforcer le noyau dur de droits sociaux garantis aux travailleurs détachés en matière d'hébergement. La directive prend en effet en compte le niveau du salaire, mais si l'employeur soustrait de celui-ci des frais d'hébergement, les conditions de comparaison sont évidemment faussées. C'est aussi une question de dignité : l'inspection du travail a fait apparaître à de nombreuses reprises, en matière d'hébergement de ces travailleurs détachés, des conditions inacceptables sur le plan humain et sur le plan social.
La procédure de « carton jaune » engagée par onze États membres a révélé la crainte que les mesures proposées ne viennent entraver la liberté de circulation. Dans la discussion avec nos partenaires, nous posons clairement que nous ne voulons pas remettre en cause le principe de liberté de circulation mais que cette liberté n'est acceptable que si l'égalité des conditions salariales et des conditions sociales est réellement respectée entre les travailleurs détachés et les travailleurs nationaux.
M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour une question du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. Patrice Carvalho. Ma question porte elle aussi sur le travail détaché. Rappelons tout d'abord le constat : la France est aujourd'hui le deuxième pays d'Europe en matière d'accueil des travailleurs détachés. Comme vient de le rappeler M. Giraud, ce ne sont pas moins de 290 000 travailleurs européens qui sont déclarés officiellement sur notre sol, auxquels s'ajoutent 300 000 travailleurs non déclarés.
Cette explosion du travail détaché déclaré et de la fraude au détachement pose problème. Le travail détaché, régi actuellement par une directive européenne de 1996, participe d'une stratégie d'optimisation du coût salarial et de la protection sociale. Une refonte de la directive est indispensable, mais paraît aujourd'hui impossible du fait de l'opposition des pays de l'Est, principaux bénéficiaires du dumping social en Europe. Quant à la fraude au détachement, qui va de la sous-traitance en cascade au travail dissimulé, elle vise à échapper à la législation française et européenne.
Plusieurs lois sont intervenues durant le quinquennat pour renforcer la lutte contre ces pratiques illégales – la loi Savary en 2014, la loi Macron ou encore la loi « Travail » –, sans que les résultats soient au rendez-vous.
Le contrôle de la fraude au détachement par l'inspection du travail est certes complexe, seul l'État d'origine pouvant vérifier les certificats attestant le détachement, mais quels sont les moyens humains et financiers réellement mis en œuvre pour contrôler cette fraude ? Cette question se pose d'autant plus que les coupes budgétaires se poursuivent dans les moyens de fonctionnement des services d'inspection du travail. Elles se traduisent cette année par la suppression de 178 postes, qui s'ajoutent aux 192 suppressions de l'année précédente – ça, ce n'est pas Sarkozy, c'est vous qui l'avez fait.
Ma question est donc simple : les inspecteurs du travail disposent-ils des moyens nécessaires pour lutter contre la fraude au détachement ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Monsieur le député, vous me donnez l'occasion de rappeler que les lois Savary du 10 juillet 2014 et Macron du 6 août 2015, ainsi que la loi « Travail » ont renforcé les obligations pesant sur les employeurs de salariés détachés et ont permis de renforcer l'action de l'inspection du travail, au travers notamment de l'obligation de déclaration de détachement pour tout employeur établi à l'étranger souhaitant détacher des salariés en France, sanctionnée par une amende administrative pouvant aller jusqu'à 500 000 euros ; au travers aussi du renforcement de la responsabilité sociale et solidaire des maîtres d'ouvrage et des donneurs d'ordres de toute la chaîne de sous-traitance dans tous les secteurs d'activité et du renforcement des services de contrôle, avec la mise en place d'une carte d'identification professionnelle dans le BTP, qui vient d'être présentée par Myriam El Khomri.
Ces mesures ont produit des résultats : près de 1 500 interventions mensuelles depuis septembre 2015 ; un total cumulé des amendes notifiées – deux tiers aux employeurs et un tiers aux maîtres d'ouvrage et donneurs d'ordres – de près de cinq millions d'euros et trente-trois décisions d'arrêt de chantier ou de suspension de prestation de services internationale au cours de l'année 2016. Ces mesures, auxquelles s'ajoute la loi « Travail » du 9 août 2016, parachève l'arsenal législatif mis en place avec les lois Savary et Macron et dote la France de l'un des dispositifs les plus rigoureux en la matière en Europe.
Les sanctions sont en effet renforcées : l'administration peut désormais suspendre la prestation de services internationale en cas d'absence de déclaration de détachement. La responsabilité du maître d'ouvrage et du donneur d'ordres est également renforcée, ainsi que l'encadrement du recours au salarié détaché dans l'intérim. Sont également renforcés les droits des salariés détachés au travers de l'obligation d'affichage sur les grands chantiers des règles du droit du travail dans les langues des pays d'où proviennent la plupart des travailleurs détachés.
Sur le plan opérationnel, cette lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement a fait l'objet d'un plan national. Le 30 mai 2016, lors de la réunion annuelle de la commission nationale de lutte contre le travail illégal, le Premier ministre a dressé le bilan du plan 2013-2015 et a lancé le plan 2016-2018.
Nous nous situons donc dans le cadre d'une action tout à fait déterminée. Nous avons renforcé le cadre législatif, avec votre soutien et parfois même à l'initiative de l'Assemblée nationale. Nous mettons en œuvre, avec les inspections du travail, des mesures rigoureuses contre ceux qui ne respectent pas la loi et nous protégeons le droit des travailleurs détachés – et, par là-même, le droit de tous les travailleurs de France.
M. le président. Nous en venons aux questions du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Gilles Savary.
M. Gilles Savary. Il faut saluer le travail remarquable réalisé par nos collègues Jean-Patrick Gille, Sophie Rohfritsch et Philip Cordery, dont le champ excède de beaucoup celui du seul travail détaché, mais vous ne serez pas étonnés que je revienne sur cette question.
Tout d'abord, contrairement à ce qu'affirme M. Carvalho, des résultats très probants ont été obtenus en France, grâce à la législation la plus ferme, la plus sévère et la plus développée d'Europe. Notre pays compte cependant encore 285 000 travailleurs détachés en règle, ce qui signifie donc aussi qu'il existe des problèmes, des métiers en tension qui ne trouvent pas de travailleurs français. Il faut éviter que ce débat ne glisse vers une forme de xénophobie qui prétendrait, comme je l'ai entendu, interdire le travail détaché. Ce serait nous tirer une balle dans le pied, d'autant que la France elle-même détache 300 000 personnes pour vendre nos produits à travers le monde et en assurer la maintenance.
La question n'est donc pas celle du détachement mais du détachement à conditions sociales égales. C'est le principe de la révision de la directive de 1996, qui n'est pas complètement aboutie, même si, selon une étude très précise dont nous disposons, en France, à condition que la loi soit respectée, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE – et le pacte de solidarité font qu'aujourd'hui, dans les métiers peu qualifiés – rémunérés à moins de 1,6 SMIC –, un travailleur français est devenu moins cher qu'un travailleur détaché de l'Est. Il faut que ce soit clair dans l'esprit de tout le monde.
Il faut que l'on soit capable de suivre très précisément le parcours du travailleur détaché qui vient de l'Est afin de s'assurer qu'il travaille bien dans une entreprise à titre permanent dans son pays et qu'il a une couverture sociale. Or la seule preuve dont nous disposions à cet est le formulaire A1 que le travailleur doit conserver par devers lui, qui présente le double inconvénient de ne pas être contestable par l'État membre d'accueil et d'être falsifiable. C'est pourquoi nous avions proposé, dans le cadre de la résolution européenne du 11 juillet 2013, de créer une carte de travailleur européen, carte électronique qui permettrait d'assurer une traçabilité totale du travailleur détaché et donc de vérifier qu'il est bien en règle.
Je me permets donc de vous demander, monsieur le secrétaire d'État, comment vous envisagez de faire progresser cette proposition au niveau européen. Nous savons que la mise en place d'une telle carte est possible puisque la France s'est déjà dotée d'un tel dispositif – il a été présenté la semaine dernière par le Premier ministre et Mme El Khomri.
Chacun connaît mon opinion : la plus grande des dérives, c'est d'avoir inventé le détachement d'intérim, qui est un détachement de placement et non un détachement d'accompagnement des échanges économiques. Le détachement d'accompagnement des échanges économiques est sain mais le marché européen a cédé à une dérive, qui consiste à faire du placement de travailleurs qui sont en réalité au chômage. Le problème devra bien être posé à l'échelle européenne.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Vous avez raison de rappeler qu'il faut maintenant s'assurer de la mise en œuvre effective de toutes les dispositions que nous avons inscrites dans la loi. Il y a les contrôles, dont vous avez eu raison de souligner l'efficacité. Ils entraînent des conséquences pour ceux qui fraudent et assurent une protection aux travailleurs détachés et aux entreprises qui pourraient être victimes d'une concurrence déloyale.
Il faut maintenant faire en sorte qu'ils soient largement facilités. À cet égard, la carte BTP une première étape vers la carte de travailleur européen que vous proposez. Sa mise en uvre démontre que cela est possible dans un secteur connu pour être particulièrement exposé à la fraude. Cette carte comporte des informations relatives au salarié – nom, photographie, date de naissance –, et des éléments permettant d'identifier l'entreprise qui l'emploie – numéro du système d'identification du répertoire des entreprises, ou numéro SIREN, raison sociale. Un code numérique permet aux inspecteurs du travail d'accéder immédiatement à ces informations. Cela leur permet de savoir si l'entreprise est en règle, si elle a bien déclaré ce salarié et si celui-ci respecte les règles encadrant le détachement de travailleurs, notamment en termes de durée.
Nous sommes donc en train de faire la démonstration que l'on peut vérifier très simplement le respect des règles sans entraver la liberté de circulation en Europe.
Vous l'avez dit, nous sommes nous-mêmes concernés puisque près de 300 000 travailleurs français travaillent dans d'autres États membres de l'Union européenne. Ils ont besoin de cette directive sur les travailleurs détachés, qui leur permet de continuer à bénéficier d'une protection sociale et de droits à la retraite quel que soit leur parcours professionnel. Nous n'entendons donc pas remettre en cause l'existence de cette directive mais nous demandons que l'on prenne en compte les évolutions, que l'on soit réaliste quant aux fraudes et que l'on donne à chaque État membre les moyens de contrôler le respect des règles sociales. De ce point de vue, la carte de travailleur européen que vous proposez nous semble être une piste à explorer, d'autant que nous l'avons mise en œuvre dans notre pays pour le secteur du bâtiment et des travaux publics.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Guittet.
Mme Chantal Guittet. En 2015, le président Juncker a annoncé qu'il souhaitait développer un socle européen des droits sociaux. Cette aspiration a pris forme dans un débat d'orientation pour l'institution d'un socle des droits sociaux, suivi d'une large consultation publique qui vient de s'achever.
Je ne peux que me réjouir que l'Europe mette enfin en avant les droits économiques et sociaux, à un moment où un Européen sur quatre est touché par le chômage, la pauvreté ou l'exclusion sociale. La reconnaissance et la promotion des droits sociaux constituent donc une nécessité économique, comme vous l'avez souligné, mais aussi la base de la construction d'une Europe sociale soucieuse du bien-être de tous les citoyens, en même temps qu'un moyen efficace de lutter contre l'euroscepticisme.
Néanmoins, de nombreux obstacles restent à franchir pour que ce socle européen voie le jour. Je m'interroge d'abord sur les instruments d'évaluation des politiques. Au cours des années passées, c'est toujours l'économie, autrement dit la politique monétaire et financière, qui a été jugée prioritaire, les conséquences sociales de ces politiques étant considérées comme secondaires. Le socle européen des droits sociaux doit encourager une harmonisation vers le haut des marchés du travail et des systèmes de protection sociale au sein des États membres de la zone euro. Pensez-vous qu'il pourra surmonter l'évidente subordination du social à l'économique ?
Plus concrètement, à l'heure où l'on met en place un programme pour une réglementation affûtée et performante, le REFIT, censée passer au crible l'efficacité des politiques de l'Union, ne craignez-vous pas qu'un tel programme aboutisse à tirer vers les bas les normes sociales ?
Enfin, qu'en sera-t-il des instruments de pilotage économique que s'est donné l'Union, dont la direction générale des affaires économiques et financières est le grand maître, si le socle européen est lui-même doté d'outils d'évaluation et de performance ? Comment concilier une politique sociale de haut niveau et la mise sous mémorandum de tous les États membres qui s'éloignent des critères financiers et budgétaires ? Comment intégrer des priorités sociales dans l'instrument de gestion économique qu'est le Semestre européen ? Autrement dit, monsieur le secrétaire d'État, comment faire cesser la prise d'otage du social par l'économique et parvenir à une croissance inclusive et à la convergence sociale dont nous rêvons tous ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. La question que soulève Chantal Guittet est la question fondamentale : considérons-nous que « le social suivra » et que, compte tenu des problèmes de compétitivité qu'elle rencontre face aux pays émergents, l'Europe doit avant tout approfondir son intégration économique, qui est en effet décisive dans un grand nombre de domaines – le numérique, l'énergie, les services, etc. – et en espérer des retombées sociales ?
Certes, pour créer de l'emploi, il faut que l'économie européenne fonctionne de façon harmonisée. Mais si l'on néglige le social, la grande hétérogénéité des niveaux de développement social d'un État membre à l'autre peut entraîner des effets pervers de dumping, voire mettre en péril le niveau de développement social des États membres les plus anciens. Au lieu d'une convergence vers le haut en matière de droits sociaux ou en matière environnementale, on risque donc d'aboutir à l'effet inverse, à savoir que la croissance ne se traduise pas automatiquement par une convergence vers le haut. Il faut donc qu'il y ait des mécanismes, des règles.
Nous sommes en outre convaincus que des standards sociaux assez élevés, en matière de salaire minimum par exemple – on a évoqué une base qui pourrait être d'environ 60 % du salaire médian dans tous les États membres – ou de protection sociale – s'assurer que les employeurs participent au financement des systèmes de protection sociale – contribueront à une meilleure croissance en Europe. Il n'y a en effet pas de raison de penser que ce qui a été bon pour l'économie des pays les plus avancés de l'Europe, les pays scandinaves, l'Allemagne, la France, ne le soit pas pour les pays qui ont rejoint l'Union plus récemment et qui sont en phase de rattrapage sur le plan économique.
Il faut donc une concordance très forte entre les objectifs sociaux et les objectifs économiques. Cela suppose une évaluation, dans le cadre du Semestre européen, des mesures économiques et de leur impact social ; cela suppose des indicateurs sociaux ; cela suppose qu'on vérifie, dans le fonctionnement même de la coordination économique, que chacun contribue à cet alignement social vers le haut.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard.
M. Arnaud Richard. Le 29 septembre 2015, devant la Confédération européenne des syndicats, le Président de la République s'est livré à un vibrant plaidoyer en faveur de la convergence sociale en Europe, en déclarant que nous avions besoin d'une « impulsion, d'une coordination, d'une harmonisation et d'une convergence des politiques sociales européennes ».
Depuis, force est de constater que les initiatives prises par la France en la matière ont été pour le moins discrètes et que les avancées obtenues ne sont que minimes. Or notre groupe estime que la convergence des politiques sociales européennes est une urgence pour lutter contre le chômage et ses conséquences mais aussi pour construire un modèle économique performant, dans lequel les droits sociaux ne soient pas systématiquement sacrifiés à l'impératif de compétitivité.
Pour y parvenir, nous pensons qu'il faut favoriser l'émergence d'un véritable dialogue social européen. C'est de cette manière, et de cette manière seulement, que nous parviendrons à obtenir de réelles avancées sociales pour les Européens et à poser les jalons de ce que pourrait être une assurance chômage au niveau européen, des droits portables propres à favoriser la mobilité ou encore des garanties plus solides pour les salariés de la nouvelle économie.
J'ajoute que pouvoir s'appuyer sur des partenaires du dialogue social plus forts au niveau européen, attentifs à la protection de nos modèles sociaux, aurait sans doute permis de poser un certain nombre de garde-fous contre les fiascos des dernières négociations commerciales – je pense bien sûr au TAFTA.
Monsieur le secrétaire d'État, ma question sera simple : la France est-elle prête à prendre des initiatives concrètes – je dis bien concrètes – pour renforcer la place des organisations syndicales dans les processus de décision européen ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État. J'étais présent le jour où le Président de la République s'est exprimé devant la Confédération européenne des syndicats et a fixé des objectifs de renforcement des droits sociaux et du dialogue social européen. Depuis, chacun a pu constater que c'est bien la France qui est à l'initiative, qu'il s'agisse de formuler des propositions, notamment sur la révision de la directive sur le détachement de travailleurs ou sur le socle européen des droits sociaux, de mettre en œuvre à l'échelle nationale cette lutte contre le dumping social, ou encore de faire en sorte que l'on prenne en compte la dimension sociale dans la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro.
C'est aussi ce qui nous guide lorsque nous réfléchissons à la façon dont la Commission européenne doit traiter la situation de pays qui ont subi des politiques d'austérité très dures. Nous nous sommes ainsi battus pour que la Grèce reste dans la zone euro et pour que le programme de réformes qui lui est proposé ne prolonge pas inutilement ces politiques d'austérité. Je pense aussi au Portugal, à l'Espagne et à d'autres pays qui doivent sortir de la crise. Nous avons d'ailleurs constaté qu'il aurait parfois été bon qu'il y ait un consensus politique européen plus large sur ces questions. Mais en définitive c'est bien la position défendue par le Président de la République qui l'a emporté, à savoir permettre à ces pays de donner désormais la priorité à l'investissement, à la croissance et à l'emploi.
Cette priorité donnée à l'investissement, c'est aussi ce que nous avons défendu au plan européen en soutenant le plan Juncker. Nous nous sommes même souvent retrouvés dans la situation paradoxale d'être ceux qui soutenaient le plus le président de la Commission européenne alors qu'il n'appartient pas à notre famille politique. C'est encore le cas lorsque nous soutenons sa proposition d'un socle européen des droits sociaux et d'une révision de la directive sur le détachement des travailleurs.
Nous sommes donc d'accord sur le fond. Je me réjouis que la démarche de la France soit soutenue de manière unanime sur ces bancs, par-delà les différences politiques, et j'espère que cela contribuera à ce qu'elle soit entendue par l'ensemble des gouvernements de l'Union européenne.
M. le président. Le débat est clos.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 18 janvier 2017