Texte intégral
D'abord, je voudrais remercier Sigmar d'avoir accepté de coprésider cette réunion des like-minded [affinitaires], c'est-à-dire l'Allemagne, la France, l'Italie et la Grande-Bretagne, les États-Unis, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar, la Jordanie, la Turquie et l'Union européenne. Il y avait déjà plusieurs semaines que ce groupe ne s'était pas réuni et il était nécessaire de le faire, en particulier après l'arrivée d'une nouvelle administration américaine au pouvoir.
C'était l'occasion d'un premier échange avec notre collègue Rex Tillerson, parce que c'est important et c'est nécessaire qu'il y ait un dialogue étroit avec les États-Unis sur cette question syrienne comme sur beaucoup d'autres. Donc c'était, pour cette raison aussi, nécessaire et c'était particulièrement utile, surtout au moment où, la semaine prochaine, les discussions vont reprendre à Genève sous l'égide des Nations unies. Le travail intense qu'a produit le représentant des Nations unies Staffan de Mistura a permis d'organiser cette rencontre, mais il ne faut pas sous-estimer la difficulté et les dangers.
Nous, ce que nous voulons, c'est donner une chance à Genève. Ce n'est pas gagné d'avance. C'est pourquoi il faut coordonner toutes les initiatives en cours. Nous avons évoqué bien sûr avec la Turquie son rôle dans les discussions d'Astana, qui se sont concentrées sur une question qui est pour nous essentielle, à savoir l'arrêt des combats, le cessez-le-feu, et les capacités à surveiller ce cessez-le-feu. Donc les décisions qui ont été prises hier vont dans la bonne direction, mais on est loin du compte sur le terrain. Il y a encore de trop nombreux combats et puis l'aide humanitaire arrive au compte-gouttes. C'est aussi un point qui a été évoqué.
Mais ce que je retiendrai des échanges, c'est que nous sommes tous toujours d'accord pour dire que la solution à la crise syrienne ne peut être que politique, que le régime, qui ne survit d'ailleurs que grâce à des appuis extérieurs russes et iraniens sur le plan militaire en particulier, le régime ne pourra pas reconquérir et stabiliser tout le pays comme il le prétend, comme l'affirme encore hier à la radio française Bachar al-Assad. Plus la guerre continue en Syrie, plus elle renforce la haine, le ressentiment et donc renforce les terroristes que nous combattons, que nous combattons avec force et que nous allons continuer de combattre, Daech bien sûr en priorité et Al-Nosra. Donc, pour nous, l'option politique est la seule possible, mais elle doit se négocier dans le cadre des Nations unies à Genève et en respectant les termes de la résolution 2254, qui permettent de travailler aux contours de de la transition politique.
Voilà ce qui est essentiel, parvenir à une transition politique. Pour cela, il faut faire beaucoup d'efforts, beaucoup travailler. Mais c'est nécessaire pour permettre aux réfugiés de revenir dans une Syrie en paix et c'est nécessaire pour que toutes les minorités, qu'elles soient religieuses ou ethniques, puissent vivre ensemble dans une Syrie unitaire et puis dans une Syrie qui puisse se reconstruire.
Qui peut financer la reconstruction de la Syrie ? Principalement l'Europe. Nous avons redit encore ce matin qu'il n'était pas question de contribuer à la reconstruction de la Syrie avec le régime tel qu'il est. Donc il faut une transition politique. Tout se tient. Et puis nous avons également exprimé notre conviction concernant le rôle que peuvent jouer les parrains du régime syrien, l'Iran mais surtout la Russie. Nous pensons que la Russie peut jouer un rôle constructif, utile. Mais d'abord en respectant la constitution du groupe des représentants de l'opposition à ces discussions de Genève. Bien sûr, il ne faut exclure personne. Pour nous, il y a le haut conseil pour la négociation présidé par Riad Hijab, la coalition nationale syrienne, qui doit être représentée largement car elle a une vraie légitimité, mais il y a aussi les groupes armés combattant contre le régime qui doivent être dans la délégation. Et puis nous pensons en effet, c'est ce à quoi nous avons encouragé l'opposition, d'inclure des représentants des groupes dits du Caire et de Moscou, une large représentation de l'opposition.
De l'autre côté, nous demandons particulièrement à la Russie, bien sûr aussi à l'Iran, que le régime arrête de considérer toute l'opposition comme terroriste, car si toute l'opposition est terroriste, alors à Genève, il n'y aura pas de discussion. D'un côté la délégation du régime, la délégation syrienne, de l'autre côté les gens de l'opposition qui seraient tous des terroristes, ça ne marche pas. Donc si la Russie comme l'Iran prétendent qu'il n'y a pas d'autre solution à terme que la solution politique pour l'avenir de la Syrie, alors il faut qu'ils en apportent la preuve et nous voulons les convaincre qu'il faut que les deux parties discutent, négocient, pour la transition politique de la façon la plus sincère possible. C'est notre rôle, c'est notre conviction, nous le groupe des dix pays affinitaires plus l'Union européenne ; c'est ce que nous avons retenu encore ce matin, nous avons vérifié que nous étions bien d'accord et nous avons aussi décidé que nous nous réunirions à nouveau autant que nécessaire pour montrer et réaffirmer cette unité et la conviction que nous partageons. Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 février 2017