Texte intégral
Monsieur le représentant spécial du secrétaire général, cher Mahamat Saleh Annadif,
Monsieur le gouverneur de Gao,
Mesdames et Messieurs les parlementaires, Madame la présidente de la Commission de la Défense nationale,
Madame l'ambassadrice,
Mon général,
Officiers, sous-officiers et soldats des Forces Armées Maliennes, de l'opération Barkhane, de la MINUSMA, et d'EUTM,
Je suis particulièrement heureux et fier de me tenir parmi vous aujourd'hui. Vous voir tous ici rassemblés, vous, soldats maliens, vous, soldats du mécanisme opérationnel de coopération (MOC), vous soldats de la MINUSMA, de la mission EUTM et vous soldats de Barkhane, à Gao, après la terrible attaque du 18 janvier, votre présence commune est un symbole fort dont je mesure la portée.
C'est la preuve éclatante que, malgré les tentatives des terroristes pour vous diviser, pour vous décourager et pour vous empêcher d'atteindre le processus de paix, vous avez tenus bon, vous vous êtes rassemblés, au-delà de vos différences, pour construire ensemble l'avenir du Mali. Nous ne laisserons pas les terroristes réussir. Grâce à vous, et singulièrement depuis hier, l'espoir demeure et le processus de paix progresse.
Colonel Rhissa, je voulais saluer votre action, elle est capitale et je veux remercier et féliciter à travers vous tous ceux qui ont eu le courage de persévérer après un attentat comme celui que vous avez subi. Merci et bravo pour votre action.
Je veux aussi féliciter ici les autorités de Gao et les chefs de détachements présents, que vous soyez des groupes signataires, de l'armée malienne, de la MINUSMA et d'EUTM. Comme je le disais hier soir au président Ibrahim Boubakar Keita, votre action commune portera ses fruits. Les premières patrouilles mixtes, si attendues, si symboliques et si importantes, sont maintenant au rendez-vous. Je peux témoigner ici de la complicité et de la fraternité d'armes qui existent entre vous ; elles se dégagent des présentations qui m'ont été faites. Ce sont des gages importants pour l'avenir.
Je veux enfin souligner les efforts de la force Barkhane pour soutenir et appuyer vos actions. Et je veux rendre hommage à l'action du colonel Despouys, sous l'impulsion du général de Woillemont, pour aider à renforcer la cohésion du MOC et parvenir à ces premiers résultats très encourageants.
Ce n'est bien sûr qu'un début et les différents volets de ces accords de paix doivent maintenant se matérialiser à leur tour. Mais je n'ai pas besoin de vous rappeler quelle était la situation dans laquelle était ce pays lorsque nous sommes intervenus en janvier 2013 et même la situation quand je suis venu pour la première fois avec le Président de la République, en février 2013. Je peux mesurer ici l'ampleur du chemin parcouru.
C'est dans ce contexte positif - singulièrement positif depuis les deux derniers jours - que je commence ce qui sera sans doute mon dernier déplacement au Sahel, en tant que ministre de la Défense. C'est donc avec émotion que je vous rencontre aujourd'hui, au plus près du terrain, là où un ministre de la Défense se doit de venir, au contact des hommes et des femmes qui combattent au nom de la France et avec nos partenaires. C'est particulièrement vrai en ce qui concerne l'opération Barkhane, qui est de loin notre plus importante opération extérieure.
M'adresser à vous aujourd'hui, c'est vous témoigner la reconnaissance et la gratitude que j'éprouve, à l'image de celle de la Nation toute entière, pour les sacrifices que vous consentez et les risques que vous acceptez de courir au nom de la France. La présence à mes côtés de parlementaires témoigne de l'engagement de la représentation nationale dans notre combat. Que chacun d'entre vous, quel que soit sa fonction, son grade, son ancienneté ou son expérience, soit assuré du soutien total de notre pays pour votre engagement ici. Je le fais aussi au nom du chef de l'Etat. Ce soutien, cette admiration je ne cesserai de les manifester, aussi souvent que possible, comme je le ferai cette après-midi à Niamey et demain à N'Djamena, et dans mes autres déplacements, jusqu'à la fin de mon mandat.
La situation sur le théâtre, et en particulier au Mali, vous le savez particulièrement ici, rappelle contre qui et contre quoi nous nous battons. Nous combattons des groupes terroristes qui ne reculent devant aucun moyen, aussi lâche, aussi brutal, aussi barbare soit-il. Le fondamentalisme religieux qui leur sert d'idéologie et de moyen d'endoctrinement n'est que le masque du mépris absolu qu'ils ont pour la vie humaine. Et cette violence extrême se joue des frontières. Elle ne se cantonne pas au Mali, vous le savez bien, vous qui opérez sur un théâtre couvrant cinq pays et grand comme l'Europe. Mais elle ne se limite pas non plus à la bande sahélo-saharienne : c'est ce même terrorisme que nous combattons au Levant ou dans les rues de France, avec les patrouilles de l'opération Sentinelle.
Face à ces combattants déterminés, face à la concurrence meurtrière à laquelle se livrent les organisations terroristes, nous avons fait le choix, non de la passivité, mais du combat ; un combat résolu, un combat fidèle aux valeurs de la République et qui fait l'honneur des armes de la France. La France est un des rares pays à avoir décidé de relever globalement ce défi. Grâce à vous, grâce à nos armées et à nos services de renseignement, nous menons ce combat global ; et dans ce combat, vous êtes à l'avant-poste. Au Levant, en Libye, au Mali ou sur les rives du lac Tchad, là où les terroristes tentent de s'approprier un territoire et de soumettre les populations à leur idéologie mortifère, ils se heurtent aux forces françaises, qui, directement par leur action, ou indirectement en soutenant nos partenaires, contrarient leurs projets et démantèlent leurs réseaux.
Des succès, nous en remportons beaucoup et sur tous les fronts. Au Levant, Daech est en passe de perdre sa capitale irakienne, Mossoul, et l'étau se resserre autour de Raqqa, sa capitale en Syrie. Sur le front de Boko Haram, la branche historique de la secte est en difficulté face aux opérations des pays de la région que nous soutenons activement. J'en reparlerai tout à l'heure avec le Président Issoufou.
Ici au Mali, même s'il reste encore beaucoup à faire pour que l'autorité de l'Etat s'impose sur l'ensemble du territoire, prenons un instant pour mesurer le chemin parcouru. En 2013, lorsque nous sommes intervenus, l'Etat s'effondrait, les forces locales étaient en déroute et le pays était sur le point de tomber entre les mains des groupes terroristes du Nord. Depuis, les forces françaises et africaines ont contenu la menace, annihilé les capacités militaires des groupes terroristes, neutralisé ou arrêté des centaines de combattants et bon nombre de leurs chefs. L'intégrité du pays a été préservée, le rétablissement de ses institutions démocratiques a eu lieu et se poursuit. Et les élections communales ont pu se tenir dans la majeure partie du pays, à la fin de l'année dernière.
Ces succès, nous les devons à votre action à tous, quels que soient votre grade ou votre fonction. L'armée française est un tout, où l'engagement de chacun est un facteur de victoire ; la cohérence de notre action garantit son efficacité. Nous devons aussi ces succès à nos amis maliens ici présents, qui ont fait le choix de la réconciliation et de l'engagement pour leur pays, et qui risquent tous les jours leur vie pour assurer leur sécurité et leur avenir. Nous les devons aussi aux forces internationales, EUTM Mali et la MINUSMA ; votre soutien est aussi précieux que nécessaire à la reconstruction des forces armées ici et à l'application des Accords de paix et de réconciliation, signés maintenant il y a 18 mois.
L'engagement de la communauté internationale, monsieur le Représentant du Secrétaire Général, dans la durée est primordial pour résoudre complètement la crise. Et par ailleurs l'impulsion des alliés européens est aussi fondamentale. J'en profite d'ailleurs pour remercier le contingent allemand du privilège d'avoir pu voler avec eux à l'instant. Ce déploiement, à la suite de celui du contingent d'hélicoptères néerlandais, est aussi pour moi le signe de la solidarité européenne. Monsieur Annadif me rappelait tout à l'heure que sur 28 pays de l'Union Européenne, il y en a 18 présents dans la MINUSMA, c'est un signe de cette solidarité.
Malheureusement, notre combat contre les groupes djihadistes ne peut pas se terminer par un traité de paix. Quel que soit votre succès sur le terrain, il ne vous met pas à l'abri d'une attaque ou d'un attentat. Une approche globale est par conséquent nécessaire pour venir sûrement, fermement, au bout de la menace terroriste. Vous accomplissez ici une part difficile du travail, rapprocher des adversaires est tout à fait indispensable, c'est une autre part du travail. La réconciliation des différents acteurs prendra du temps, et c'est pourquoi notre engagement ici n'est pas achevé.
C'est la raison pour laquelle nous devons rester déterminés et vigilants pour continuer à nous adapter, en permanence, aux évolutions possibles de la menace.
Vous devez, nous devons, faire évoluer nos modes d'action, comme vous l'avez toujours fait sur ce théâtre, en 2014 avec la régionalisation de l'opération ou, plus récemment, avec le développement des détachements de liaison et d'appui opérationnel (DLAO) ou plus récemment encore avec les partenariats avec les armées locales et le G5 Sahel, dont vous êtes l'illustration. Barkhane a su faire preuve jusqu'ici de discernement et d'intelligence pour s'adapter aux événements, aux partenaires et aux nouvelles menaces. Et je voudrais saluer, une nouvelle fois, la détermination du général de Woillemont et rendre hommage au travail remarquable mené depuis l'été dernier. Nul doute que vous continuerez sur cette voie qui assure votre force et fait votre valeur.
Nous continuerons aussi à nous adapter en vous donnant les moyens de remplir vos missions. Car je sais à quel point le rythme des engagements récents de nos armées éprouve les hommes et le matériels. Fidèles au devoir, nos armées ont répondu aux nombreuses sollicitations que la France exigeait d'elles à travers le monde.
Cet été, grâce à la révision de la loi de programmation militaire décidée par le Président de la République après les attaques de 2015, grâce au renforcement des effectifs qui sont désormais très concrets, le rythme opérationnel reviendra à un niveau moindre pour la plupart d'entre vous. Ces mesures nous permettront de mener, dans la durée, ce combat de longue haleine contre le terrorisme, hors de nos frontières et sur le territoire national.
Par l'effort de défense qu'elle met en uvre, la Nation reconnait la nécessité impérieuse de votre engagement et encourage votre détermination à servir votre pays. Car la qualité des hommes et des femmes qui servent les armées est primordiale dans la réussite de nos missions ; votre valeur est reconnue par nos partenaires à travers le monde. C'est grâce à vous si, depuis cinq ans en particulier, la France a pu assumer ses responsabilités sur la scène internationale et conduire une politique de défense à la hauteur des bouleversements du monde que nous constatons tous les jours.
Voilà pourquoi je tenais, une dernière fois, à venir vous rencontrer et à m'adresser à vous. Au nom du Président de la République, de l'ensemble du gouvernement et de la Nation toute entière, je vous exhorte à poursuivre les combats de la France. Vous êtes l'honneur de la République, et, chers amis maliens, l'honneur du Mali.
Vive l'amitié franco-malienne ! Vive la République ! Vive la France !
Source http://www.defense.gouv.fr, le 28 février 2017