Texte intégral
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Président,
Chers Professeurs,
Chers Étudiants,
Chers Amis,
Merci encore de votre invitation. Il y a peu de temps, c'était l'année dernière, le président de la République, François Hollande, est venu à Dublin. Le Premier ministre s'y était rendu en 2015. Il y a beaucoup d'échanges et de relations et c'est facile de se parler car nous sommes de vieux amis qui entretenons une relation originale et particulière et qui nous donne une responsabilité particulière dans la période actuelle sur le long terme.
Le Premier ministre irlandais, le Taoiseach, en est à son troisième séjour en France depuis qu'il est Premier ministre. En dehors des périodes de présidence européenne de l'un ou l'autre de nos deux pays, il y a énormément d'échanges.
J'ai commencé ce matin par une rencontre avec des chefs d'entreprises dans le secteur de l'exportation et j'ai inauguré les nouveaux locaux de l'Alliance française, ce qui montre à quel point la langue français est quelque chose de précieux que nous avons en commun. Ce n'est pas seulement la langue et la culture mais ce sont aussi des valeurs.
La France a, avec l'Irlande, de puissants liens d'amitié, témoignages de notre histoire commune. Nos deux peuples s'apprécient, se connaissent et se respectent. Je pense à la littérature, même si cela ne se limite pas à la littérature, avec Beckett, dramaturge de génie né en Irlande, mort en France et qui a écrit - comme d'autres auteurs irlandais - dans nos deux langues. Il avait grandi dans une famille d'origine française qui, persécutée chez nous pour des raisons religieuses, avait trouvé asile chez vous.
Je pense aussi à tous ces étudiants français qui fréquentent vos universités et j'en ai croisé quelques-uns ce matin à Dublin. Et puis, j'ai à l'esprit la ferveur et la gentillesse des milliers de supporters irlandais qui ont chanté dans les rues de France l'été dernier, à l'occasion de l'Euro 2016. Il y avait une chaleur sincère et spontanée. Ce qui reflète la qualité de nos liens et qui tient peut-être au fait que nos pays n'ont jamais été en conflit. Il n'y a qu'un sujet qui conduit à nous affronter - et que nous avons abordé à plusieurs reprises aujourd'hui sans en être embarrassés ni en créant un incident diplomatique - c'est ce qui va se passer samedi à l'Aviva Stadium avec le match de rugby entre la France et l'Irlande. Ce sera un peu plus rugueux.
Nos relations culturelles sont anciennes. Elles sont marquées, par exemple, par la création du Collège des Irlandais à Paris en 1677 ou la première chaire d'enseignement du français créée à Trinity College en 1776. J'ai visité la bibliothèque magnifique du Trinity College où j'ai été accueilli chaleureusement.
Nos relations économiques sont, elles aussi, très denses. La France est le 4e partenaire commercial de l'Irlande. Les investissements irlandais en France sont en forte accélération. La plus importante opération d'investissements directs étrangers en France en 2015 a été réalisée par le groupe irlandais CRH qui est une entreprise mondiale des matériaux de construction. Les PME irlandaises que j'ai rencontrées ce matin sont très actives et les entreprises françaises sont disponibles pour apporter leur contribution aux projets de modernisation et d'investissement définis par les autorités irlandaises dans le cadre d'une vision stratégique résolument tournée vers l'avenir.
J'ai pu apprécier, au cours de ma visite, le talent, la créativité et le dynamisme de l'Irlande dans tous les domaines. J'ai aussi poursuivi les riches échanges que j'entretiens avec mon collègue et ami Charles Flanagan, que j'avais eu le plaisir de recevoir à Paris le 1er décembre dernier.
Je suis heureux de pouvoir à présent m'exprimer dans le cadre de «l'Institute of International and European Affairs». Nous avons besoin, aujourd'hui sans doute plus que jamais, de prendre le temps de la réflexion et du débat pour affronter les grandes crises que traverse notre époque et chercher ensemble des réponses nouvelles, adaptées et efficaces, aux défis du monde. Ces défis sont nombreux.
Je pense bien évidemment à une menace que n'avions pas imaginée d'une telle ampleur. C'est la menace du terrorisme - qui est nouvelle par son systématisme - qui a frappé, dans toute sa barbarie, la France, nos principaux partenaires et de nombreux pays à travers le monde. En Irak et en Syrie, le combat mené par la coalition internationale conduit Daech à reculer. Mais la menace demeure. Elle peut frapper à tout moment et il y a ce développement sans précédent d'un groupe non étatique - nous avons eu par le passé un terrorisme étatique - qui est déterminé, structuré, pense et qui est hostile à notre mode de vie et à notre façon de vivre en société.
D'autres conflits existent et je pense à un conflit car il dure depuis si longtemps, c'est le conflit israélo-palestinien. L'engagement périodique de négociations et leur échec ont créé davantage de désillusions et d'amertume sur le terrain chez les Palestiniens, malgré l'intense mobilisation internationale, malgré la prise de conscience que le statu quo actuel n'est pas tenable et en dépit du fait que nous connaissons depuis des années les contours de la solution, celle de deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité. Si j'évoque particulièrement ce point, c'est qu'il ne faut pas le prendre comme un point secondaire. Il est trop ancré, trop profond et trop ancien pour que l'on ne le prenne pas encore plus au sérieux. Et je remercie une nouvelle fois l'Irlande pour son soutien à l'initiative française de relance du processus de paix au Proche-Orient et, en particulier, en participant à la conférence du 15 janvier dernier à Paris.
Le monde dans lequel nous évoluons est un monde de tensions et d'instabilité, où les équilibres peuvent être renversés du jour au lendemain, où l'action diplomatique de la première puissance mondiale - les États-Unis - peut elle-même être source de doutes et d'incertitudes. C'est un fait nouveau qu'il faut regarder en face.
L'Europe n'échappe pas à cette tempête. Les tensions du monde sont à ses portes et ont des conséquences directes sur nos pays européens. Plusieurs régions de notre voisinage sont en proie à l'instabilité et à la guerre. Des millions de réfugiés quittent leur pays pour échapper à la barbarie. Les groupes terroristes menacent directement l'Europe en s'efforçant de semer au sein de nos sociétés la division et la haine.
La crise financière de 2008 a, elle aussi, laissé des traces profondes qui n'ont pas disparu complétement. L'Irlande a été l'un des États membres de l'Union européenne les plus durement touchés par cette crise et l'un des plus courageux en procédant, durant sept années, à un ajustement budgétaire douloureux qui a permis un redressement durable de son économie. Mais le prix à payer a été lourd. Dans l'ensemble, l'Europe demeure malheureusement affectée par une trop faible croissance liée à des mutations profondes de l'économie, qui créent des opportunités nouvelles mais aussi de nouveaux risques pour les plus vulnérables. Je pense aux conséquences de la mondialisation des échanges et aussi de la révolution technologique du numérique.
La multiplication des crises, leur ampleur, leur simultanéité et les conséquences qui en découlent, et l'augmentation - malgré des progrès importants - des inégalités déstabilisent et alimentent l'inquiétude des populations européennes. La confiance des peuples dans nos démocraties s'est érodée et le projet européen devient, très souvent, un bouc-émissaire facile pour tous les populistes qui encouragent le retour à la nation comme solution. Et qui nous font revenir largement en arrière puisque cette crainte est celle du retour aux nationalismes qui ont conduit aux catastrophes au XXe siècle sur le continent européen.
Parmi les défis que l'Union européenne doit relever, une décision grave a été prise c'est celle du peuple britannique, celle du Brexit. Le retrait britannique n'est pas une question anecdotique. C'est d'abord un défi technique et juridique, car pour la première fois nous allons devoir défaire un à un les liens que nous avons tissés depuis 1973. Mais c'est aussi un défi politique. Car la décision britannique a mis en lumière les interrogations et les doutes des citoyens sur le projet européen. Pour répondre à ces interrogations, il nous faut agir de manière concrète et efficace, en maintenant la cohésion européenne qui est menacée.
Nous entrons dans une période de doutes, particulièrement perceptibles en Irlande compte tenu de la relation historique qui existe entre votre pays et le Royaume-Uni.
Sa sortie de l'UE soulève des questions inédites pour l'Irlande. Je pense notamment à celle de la libre-circulation des personnes sur l'île, permise par l'existence d'une zone de voyage commune (common travel area). Cette libre circulation est un élément central de la paix si chèrement acquise. Comme l'a dit votre Premier ministre, l'Union a toujours réussi à supprimer les barrières qui s'élevaient entre les peuples. Je sais les craintes que suscite ici le retrait du Royaume-Uni en la matière et nous en avons parlé à plusieurs reprises.
À bien des égards, nous partageons vos interrogations. La France a aussi des liens très forts avec le Royaume-Uni. Comme vous, nous évaluons les conséquences du départ des Britanniques sur nos relations, dans les domaines économique, de la défense ou en matière de politique étrangère. Avec le Royaume-Uni, nous sommes membres permanents du conseil de sécurité de l'ONU. Nous devrons faire en sorte que ces liens et nos coopérations bilatérales puissent perdurer, sans que les principes fondamentaux de l'Union soient mis à mal et en nous assurant que les règles du jeu soient équitables. Tout accord sur la relation entre le Royaume-Uni et l'UE devra reposer sur un équilibre entre droits et obligations. Le maintien d'une participation du Royaume-Uni au marché unique devrait passer obligatoirement par l'acceptation des quatre libertés, notamment celle relative à la libre circulation des personnes. Le Royaume-Uni a choisi une autre voie celle de la sortie de l'UE mais aussi de la Cour européenne de Justice, c'est-à-dire du droit européen que nous élaborons en commun pour reprendre sa liberté et sa souveraineté en matière législative. C'est leur choix, il est cohérent mais il faut en assumer les conséquences.
Il ne s'agit en aucun cas de punir le Royaume-Uni. Ce n'est pas la position de la France et ce n'est pas notre intérêt. Nous voulons une approche rationnelle et cohérente de la négociation en étant basé sur nos principes et les règles de droit qui doivent être traitées équitablement mais sans incohérences qui mettraient en péril l'avenir de l'Union européenne. C'est la position de la France qui, je crois, est partagée par l'Irlande - ce qui n'est pas une surprise pour moi - et ce n'est l'intérêt de personne de développer un processus d'agressivité.
Mais il doit être clair que l'on ne peut bénéficier des avantages de l'Union sans respecter les obligations qui en découlent. Le choix de sortir de l'UE est un choix grave qui n'est pas sans conséquence. Mais il faut en assumer la réalité qui vient d'un référendum.
Il faudra bien sûr que nous examinions comment la situation particulière de l'Irlande peut être prise en compte dans ce contexte et dans le respect des dispositions des traités. Et je l'ai dit au Premier ministre comme au ministre des affaires étrangères, vous pouvez compter sur la France pour y contribuer. Nous voulons vous aider pour trouver la bonne solution.
Ma conviction est que l'Union doit sortir plus forte de ces négociations. Cela suppose un engagement renouvelé de notre part, une conviction que l'Europe est seule à même de défendre nos objectifs, nos intérêts et nos valeurs, une détermination à faire prospérer un projet qui a apporté tant de bénéfice aux Européens.
Car, depuis soixante ans, le projet européen a été suffisamment fort pour se renforcer à travers les crises. Sommes-nous capables de le dire avec fierté ? Soyons fiers de nos réalisations, car nous ne parlons pas assez de l'Europe en termes positifs. Les jeunes le font souvent quand ils ont la chance de bénéficier d'un programme Erasmus mais ce n'est pas suffisant. Dans le monde complexe incertain dans lequel nous vivons aujourd'hui, l'Europe est la première puissance économique et commerciale. Notre monnaie est la deuxième monnaie de réserve. L'Europe est le plus grand espace démocratique, le plus grand espace de libre circulation pour les biens, les capitaux, les services et les hommes. Et aussi que l'Union européenne revendique les meilleures normes sociales et environnementales et les meilleurs standards démocratiques que nous devons défendre dans toute l'Europe. À chaque fois qu'un pays membre de l'UE veut s'en éloigner, cela nous interpelle. Sommes-nous conscients de la force que nous représentons, je n'en suis pas sûr. Nous pouvons faire mieux pour mieux défendre mais nous ne pouvons pas nous contenter de défendre mais nous pouvons aussi affirmer que l'avenir du monde passe par des ensembles politiques cohérents et stables. L'Union européenne existe et elle doit être renforcée et non affaiblie parce qu'elle est utile pour ses peuples, elle les protège, les défend, leur permet de se projeter dans l'avenir et, dans le même temps, elle est utile au reste du monde comme un grand pôle de stabilité et de progrès.
Je suis convaincu que nos concitoyens ne veulent pas «moins d'Europe». Vous avez vu qu'après le Brexit nous avons cru à une contagion qui allait se propager à grande vitesse. Ce n'est pas ce qui s'est passé même s'il y a toujours des interrogations et des hésitations. Intuitivement, les peuples sentent bien qu'il y a un basculement vers l'inconnu. Nous ne pouvons pas prendre de risque de cette nature. Dans le même temps, nos concitoyens veulent une Europe qui réponde mieux à leurs préoccupations. Une Europe qui les protège, non pas de manière défensive, mais en consolidant notre modèle et en assurant sa pérennité, en le modernisant et en l'adaptant aux défis du monde. Il faut être attentif à tous les territoires qui composent cette Union européenne.
Les populistes tirent argument des évolutions du monde, de la menace terroriste, de la crise migratoire et de la peur du déclin, pour remettre en cause ce beau projet. L'Europe devient leur bouc-émissaire. Ils font fausse route. Notre responsabilité est de ne pas les laisser concevoir un remède qui serait pire que le mal. C'est à nous de l'expliquer et d'être aussi engagé concrètement pour apporter les réponses lorsqu'elles n'existent pas jusqu'à présent. L'Europe doit rester notre boussole. Nous l'avons édifiée sur des valeurs qui justifient qu'on les défende et sur lesquelles il faut nous appuyer pour préparer notre avenir commun.
Ces valeurs et cet attachement viscéral à l'Europe, je sais que l'Irlande les partage. J'ai été très touché par les mots que le Premier ministre Enda Kenny a prononcé ici il y a une semaine, rappelant que l'Irlande est d'abord une nation au coeur de l'Europe et que cela ne changera pas.
L'Europe, ce sont aussi des solutions collectives aux grands défis du monde. Notre solidarité est essentielle pour promouvoir la paix et la prospérité au sein du continent européen. Notre solidarité, c'est aussi celle avec le reste du monde. Je souhaite souligner l'engagement exemplaire de l'Irlande pour secourir les migrants en Méditerranée, sa généreuse politique d'aide au développement et sa contribution aux Opérations de maintien de la paix, aujourd'hui encore au Liban et au Mali avec la France dans les deux cas. Je pense aussi à la solidarité exceptionnelle exprimée par le peuple irlandais dans les épreuves qui ont endeuillé la France en 2015 et en 2016. Cette solidarité est allée directement au coeur de tous les Français.
Nous partageons les mêmes préoccupations sur l'avenir du continent africain qui doit trouver une espérance. L'Afrique ne doit pas continuellement être considérée comme un problème. C'est le continent qui connaît la plus forte progression démographique avec une jeunesse qui est inventive, une société civile qui se réveille, des pays qui stabilisent leur gouvernance - même si il y a encore trop de conflits et de misère. C'est notre responsabilité comme pays européens de regarder directement en face ce que l'on peut faire pour aider le continent africain sur les plans de sa sécurité, de son développement et de son autonomie. L'Europe peut et doit le faire et cette idée progresse.
Nos deux pays ont en commun une forte culture rurale, qui place l'agriculture au centre de nos préoccupations. Cette politique essentielle pour nos territoires restera au coeur de notre action commune. Mais l'Europe souhaitée par la France et l'Irlande va bien au-delà. Elle incarne aussi une certaine conception des relations internationales. Nous sommes attachés au multilatéralisme. Ce multilatéralisme est aujourd'hui en danger et nous devons veiller à construire un ordre mondial consolidé fondé sur des règles, sur la coopération et sur le multilatéralisme.
J'étais à la Conférence de Munich sur la sécurité. J'ai écouté le discours de mon homologue russe - M. Serguei Lavrov avec qui je parle souvent - dans lequel il évoquait la nécessité d'un nouvel ordre international «post-occidental». Si ce mot veut laisser croire que les valeurs qui ont été la base de la construction de l'ordre international qui a permis la paix - et d'abord en Europe -, ce sont des valeurs occidentales qui le font, alors il y a de quoi s'interroger. Sorties de la Seconde guerre mondiale, les nations ont cherché à construire une paix durable basée sur le droit. Les Nations unies ont été créées alors que les enseignements avaient été tirés de l'échec de la Société des Nations et la Déclaration des droits de l'Homme qui a été adoptée en 1948 est une base fondamentale du droit. Un droit qui n'est pas occidental mais universel. Alors, si un ordre international «post occidental» est de remettre en cause les avancées du droit, je crois qu'il y a de quoi s'inquiéter. Et de quoi se mobiliser pour tenir bon et proposer une alternative. Et c'est là que l'Union européenne doit revendiquer et proclamer, plus qu'elle ne le fait, sa conception des relations internationales.
Et cette question est aussi posée avec l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche et aussi aux Chinois. J'ai rencontré mon homologue chinois à Munich et il m'a rappelé son attachement à cette conception des relations internationales, au libre-échange et à une Union européenne forte. Je ne l'ai pas entendu de la part du vice-président américain, Mike Pence, quand il s'est exprimé à Munich. Ce dernier s'est déplacé à Bruxelles où il a évoqué la nécessité de continuer les relations avec l'Union européenne et c'est tant mieux. Mais, nous avons besoin de précisions sur toutes ces questions car le risque d'isolationnisme américain existe. Ce n'est pas par des deals que l'on règle les crises et les questions qui sont devant nous mais par une approche multilatérale.
Au G20 de Bonn nous avons évoqué l'Afrique, l'agenda 2030 pour le développement avec la conférence de New York et le financement de cet agenda - c'est la conférence d'Addis Abeba pour le développement. Nous avons aussi évoqué la question du climat. C'est l'Accord de Paris qui est un accord multilatéral et qui est l'exemple de la manière dont on peut traiter des grands défis qui sont devant nous. Celui de la transition énergétique n'est pas anecdotique ni une affaire d'experts. C'est une question partagée par la communauté internationale. Nous avons progressé avec cet Accord qui, en moins d'un an, a été ratifié. Cela veut dire qu'il y a une prise de conscience non seulement chez les responsables politiques mais aussi dans les sociétés civiles, très actives dans la préparation de cet Accord, dans les ONG et dans les entreprises. C'est un défi mondial et l'Union européenne peut être en pointe pour porter cette transition énergétique. Elle doit le faire, c'est sa responsabilité. Soyons l'avant-garde de la mise en oeuvre d de l'Accord de Paris.
Je crois aussi au règlement des crises par la négociation comme nous l'avons fait avec le nucléaire iranien. Bien sûr, il faut rester vigilant et que cet accord soit respecté mais le remettre en cause serait une grave erreur. Cela ne veut pas dire que l'on ne doit pas discuter avec l'Iran sur d'autres sujets comme le conflit en Syrie
Mesdames et Messieurs,
Tous ces défis que nous avons devant nous nécessitent que les questions soient posées au bon niveau. Si nous voulons que les citoyens de chacun de nos pays aient confiance il faut que nous soyons capables de leur apporter une bonne formation, de bonnes conditions de vie, dans la santé et dans l'éduction, mais aussi de l'emploi. Il faut aussi être capable de leur donner la direction dans laquelle nous voulons aller pour le destin de chacun de nos pays. Ils ont besoin de vision à court, moyen et long termes. C'est le sens de l'engagement que je vois et qu'il faut réaffirmer, notamment quand les pays membres de l'UE vont se retrouver à Rome le 25 mars prochain. Mais il ne faut pas que ce ne soit qu'un moment de commémoration - celle de la signature du Traité de Rome - car nous ne ferions pas ce qu'il faut pour éclairer le chemin et donner de l'espoir et de la confiance.
J'espère que chacun de nos pays apportera sa contribution pour que nous donnions ce signe et qu'un message d'avenir et d'espoir en sorte. Il faut que ce message soit suffisamment fort et entraînant pour qu'il puisse convaincre les sceptiques. C'est notre mission qui est lourde et difficile mais c'est la responsabilité et la grandeur du politique de ne pas s'éloigner des responsabilités qui lui sont confiées.
Je suis fier d'être français et la France continuera de jouer son rôle sur la scène internationale, en particulier comme membre permanent du conseil de sécurité. Mais, en même temps, j'ai conscience des limites de ce que nous pouvons faire seuls. Et j'ai aussi conscience qu'au niveau européen nous pouvons défendre encore mieux les intérêts de chacune de nos nations. Il n'y a pas à imaginer l'effacement des nations et de leur identité mais il faut ensemble construire quelque chose de plus grand. C'est parfois ingrat car la politique des petits pas nous donne l'impression que les choses n'avancent pas assez vite. Ne négligeons pas les petits pas.
Ces valeurs rappellent de nouveau le plus Français des Irlandais, Beckett, qui, dans son roman, Molloy, écrivait que «se donner du mal pour les petites choses, c'est parvenir aux grandes, avec le temps». Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 mars 2017