Entretien de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international, avec la presse française, sur la lutte contre le terrorisme, à Washington le 22 mars 2017.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion de la coalition internationale contre Daech, à Washington (Etats-Unis) les 21 et 22 mars 2017

Texte intégral


De Washington, où je me trouve à l'occasion de la réunion internationale de la coalition contre Daech, je me suis tenu informé des attaques en direct de Londres, des attaques de type terroriste même s'il n'y a pas de revendications à l'heure où nous parlons. Bien sûr j'ai exprimé ici à Washington ma solidarité à Boris Johnson, ma solidarité avec le peuple britannique, le Royaume-Uni qui est attaqué dans un lieu symbolique de la démocratie, Westminster, et puis la solidarité avec les victimes dont trois jeunes lycéens français du lycée Saint Joseph de Concarneau en visite scolaire au Royaume-Uni, qui ont été fauchés sur un pont tout près du parlement.
C'est dire à quel point cette violence terrible nous blesse et nous heurte au coeur parce que nous ne pouvons pas rester sans exprimer notre solidarité, notre affection et en particulier avec les victimes ; il y a eu des morts et puis il y a nos jeunes Français qui sont blessés, qui sont hospitalisés. Les familles sont informées en temps réel et vont pouvoir leur rendre visite dans les prochaines heures. Le Quai d'Orsay, ses services, le consulat général sur place évidemment, est aux côtés des victimes avec une cellule psychologique qui a été mise en place.
Q - Est-ce que vous avez eu des nouvelles justement de ces trois jeunes français ?
R - Je n'ai pas de nouvelles, là, des plus récentes. Je sais qu'ils sont pris en charge à l'hôpital Saint Thomas dans des conditions qui sont les meilleures bien entendu, mais il faut attendre des résultats qui viennent des médecins eux-mêmes.
Q - Est-ce que va se poser à nouveau la question des voyages scolaires ? Est-ce que cela se pose pour des établissements français désormais ?
R - Non, je crois qu'on ne peut pas, à cette heure-ci, répondre à cette question. Il ne s'agit pas de provoquer la panique et l'arrêt de toute activité. Nous avons l'expérience tragique de ces situations, nous prenons donc nos responsabilités à chaque fois que c'est nécessaire mais, là aussi, il faut que l'enquête aille jusqu'au bout. Scotland Yard ne tire pas encore de conclusion, se garde d'établir des hypothèses. Mais, en tout cas, c'est une attaque d'une violence inouïe qui s'attaque à des personnes dans un lieu symbolique, celui de la démocratie parlementaire britannique, donc cela a du sens, on ne peut pas ne pas l'interpréter comme cela.
Q - Vous êtes-vous entretenu avec votre homologue britannique ? Pouvez-vous aller un peu plus dans les détails de ce que vous vous êtes dit avec M. Johnson ?
R - D'abord, c'est la solidarité que je lui ai exprimée comme lui-même l'avait fait lorsque la France a été touchée et c'est la réaction spontanée que nous avons. Comme après l'attaque d'Orly, j'ai eu des collègues, des ministres des affaires étrangères qui m'ont téléphoné, nous exprimons cette solidarité qui est indispensable. Et cette solidarité est non seulement indispensable dans les mots mais elle est indispensable dans les actes et dans les engagements. Là, je suis à Washington à une réunion de la coalition internationale contre Daech, c'est 68 pays qui sont représentés, c'est énorme, c'est considérable. C'est la première réunion présidée par mon homologue Rex Tillerson, j'ai pu m'entretenir avec lui au déjeuner, j'ai également rencontré Jim Mattis, le secrétaire à la défense.
J'ai eu un moment d'échange avec le Premier ministre d'Irak, Haïder al-Abadi et d'autres collègues. Nous avons abordé les choses de façon à la fois stratégique mais aussi très pratique, très concrète : comment peut-on faire pour renforcer encore notre lutte contre Daech, pour éradiquer ce fléau, l'éradiquer militairement, l'éradiquer politiquement, l'éradiquer aussi en termes d'action contre la radicalisation, contre les financements de ce réseau terroriste ? Ce sont toutes ces questions que nous avons abordées lors de cette grande réunion de la coalition.
Q - Pour terminer sur le Royaume-Uni, les mesures de sécurité vont-elles être renforcées en France, notamment auprès de certains bâtiments ?
R - Elles sont déjà à un très haut niveau de sécurité. Comme vous le savez, la France a adopté l'État d'urgence et il est toujours d'actualité. Et il y a une mobilisation de la police, de l'ensemble des forces de police, ainsi que des militaires qui patrouillent. Chaque semaine, le conseil de défense présidé par le président de la République se réunit avec le Premier ministre, les ministres de la défense, de l'intérieur, de la justice, des affaires étrangères. Là aussi, nous nous tenons informés de toutes les menaces, et il y en a. Notamment des menaces qui sont déjouées parce qu'il y a une grande solidarité, une grande coopération entre services de renseignement.
J'ai rencontré le conseiller du président Trump. Nous avons abordé la coopération entre nos services. Elle est excellente et utile, et pas seulement avec les services américains. Si bien des attentats sont déjoués, c'est parce qu'à la fois nos forces françaises font un travail de terrain très remarquable et parce qu'il y a cette coopération. Si cette menace existe, c'est parce qu'elle est organisée, structurée. C'est pour cela qu'il est important de poursuivre le combat pour que Daech tombe à Mossoul. Et l'on sait que cette bataille est difficile, coûteuse en vies et provoque bien des dégâts et aussi des réfugiés. Mais cette bataille va être gagnée. Donc la coalition marque des points et Daech recule.
Après, bien évidemment, il faut s'intéresser à ce qui va se passer une fois que la bataille militaire est terminée et ce sera bientôt le cas à Mossoul. Comment on gère Mossoul, comment on gère la région de Mossoul. Il faut que ce soit une gestion inclusive, qu'il n'y ait pas de règlements de comptes, que la justice passe mais dans un cadre qui soit celui de la loi et puis qu'on aide les populations à s'insérer et qu'elles puissent vivre ensemble.
Puis il y a un autre objectif qui sort de cette réunion de la coalition qui est très clair, pour lequel je me bats depuis des mois, depuis plus d'un an, c'est Raqqa. Car ce sanctuaire concentre les forces organisées de l'État islamique, de Daech à Mossoul et Raqqa. À Raqqa on organise les attentats dans différents pays, on donne des ordres, on donne des consignes, on essaye de mobiliser, on recrute des gens. Il faut donc combattre pour détruire ce centre, ce sanctuaire de Daech. C'est la prochaine bataille, il faut qu'elle soit réussie. Et, là, il y a consensus entre tous les partisans à cette réunion et en particulier avec les Américains M. Mattis et M. Tillerson. Mais les pays de la région, les pays arabes sont également tous d'accord pour que Raqqa soit une priorité dans les mois qui viennent.
Q - Est-ce qu'il y a quelque chose à changer avec la nouvelle administration ?
R - Je ne crois pas que sur la détermination à lutter contre Daech et la gravité de ce qu'il représente, il y ait quelque chose de changé. Simplement, comme il y a une nouvelle administration, celle-ci, si je prends le cas de Raqqa par exemple, examine les conditions pour faire tomber Daech à Raqqa et n'est pas que dans la seule, simple continuité. Mais cela ne me choque pas si cet examen des différentes formules, des différentes hypothèses est plus efficace à la fois pour faire tomber Daech à Raqqa mais aussi pour réfléchir à une gouvernance efficace et inclusive après : quelles forces politiques pourront gouverner Raqqa ? Et on ne va pas mettre d'autres forces terroristes à la place, sous-entendu on ne va pas mettre des représentants du régime de Bachar al-Assad à la place. Donc, sur ces questions, les Américains demandent encore un peu de temps, ils examinent les hypothèses.
Nous, nous avons donné nos analyses, nos points de vue, nos propositions. Je souhaite simplement que la réponse ne prenne pas trop longtemps car il y a urgence. Et là il y a quelques instants, à la dernière séance de la rencontre, le général Mattis nous a rejoint, a fait une communication et il a dit lui-même : Raqqa c'est urgent car il y a des menaces qui partent de Raqqa.
Q - Avez-vous plus de précisions sur le fameux plan secret de Donald Trump pendant la campagne sur la Syrie et l'Irak ?
R - Je pense qu'il n'y a pas de plan secret mais j'ai rencontré le conseiller à la sécurité du président Trump qui m'a dit qu'une commande avait été passée à l'administration, au secrétaire d'État pour faire des propositions au président et c'est leur rôle. Je pense que dans les prochaines semaines ces propositions sont faites - comment mieux combattre Daech ? - et j'ai fait valoir à tous ceux que j'ai rencontré la manière dont nous, la France, nous voyons cette nouvelle bataille à Raqqa, contre Daech à Raqqa. Et nous la voyons non seulement comme une action militaire pour détruire Raqqa, toutes ses forces, mais aussi en liant cette question à la question de l'avenir de la Syrie.
Ce sont donc des négociations qui commencent demain, à Genève, avec l'opposition, les représentants du régime sous l'égide des Nations unies pour que l'on avance vers une vraie transition politique qui permette de sortir de la logique de guerre civile dans laquelle vit ce pays depuis des années, depuis maintenant six ans. Et même si on faisait tomber Daech à Raqqa, si on laissait cette situation de guerre civile permanente, on n'aurait pas réglé la question de la sécurité ni la question du terrorisme en Syrie. On n'aurait pas réglé la question du terrorisme. Parce que tous ceux qui se combattent aujourd'hui - il y a Daech d'un côté, al-Nosra de l'autre, il y a aussi des groupes de nature terroriste qui soutiennent le régime, des milices qui viennent d'Afghanistan, des milices qui viennent du Pakistan, des milices comme le Hezbollah ou iraniennes -, ce ne sont pas des enfants de choeur, ils pratiquent des méthodes terroristes, ils sont capables de piller, de trafiquer.
Il faut donc construire la paix en Syrie et cela ne passe pas seulement par la chute de Raqqa, cela ne passe pas seulement par une bonne gouvernance de Raqqa, cela passe aussi par un processus politique, de transition politique, c'est-à-dire la mise en oeuvre de la résolution 2254 du conseil de sécurité. C'est la base de la négociation sur la Syrie qui reprend encore une fois le 23 mars à Genève. J'ai moi-même rencontré les représentants de l'opposition. Je les ai encouragés à faire des propositions concrètes, que ce soit sur la transition politique, sur la constitution, sur l'organisation d'élections, sur la meilleure manière de lutter contre toutes les formes de terrorisme en Syrie.
Je crois qu'il faut que chacun apporte sa contribution et sa part. Pour avancer sur tous ces thèmes-là, j'ai pris l'initiative, en arrivant hier à Washington, de réunir plusieurs pays arabes : l'Arabie Saoudite, le Qatar, les Émirats arabes unis, la Jordanie ainsi que la Turquie. Chacun connaît bien la situation sur le terrain, mais nous avons partagé cette priorité qu'est désormais Raqqa. Combattre Daech à Raqqa, gouverner avec des représentants de l'opposition, qui ne soit pas l'opposition radicale mais l'opposition modérée, dans cette zone libérée, puis appuyer de toutes nos forces les acteurs qui sont autour de la table pour une vraie négociation sur une transition politique en Syrie qui permette à terme la reconstruction du pays et qui permette aussi le retour des réfugiés.
C'est tout cela l'enjeu politique et c'est ce qui m'a frappé en écoutant le général Mattis tout à l'heure, le secrétaire à la défense. C'est un militaire qui parlait, mais qui en même temps qu'il parlait d'objectifs militaires, disait «ce n'est pas suffisant, il faut la solution politique». Quand cela vient d'un militaire, c'est encore plus convaincant car il est vrai que, même quand on fait la guerre, il faut faire la paix et la paix elle passe par des solutions politiques, par des modes de gouvernance, par la réconciliation. Et si on ne fait pas les deux, alors on n'aura rien gagné.
Q - Justement, en termes de coopération entre la France et les États-Unis, aujourd'hui, face au défi du terrorisme, comment voyez-vous l'avenir, quelles sont les priorités aujourd'hui en termes de coopération ?
R - J'ai discuté de cela avec le conseiller du président Trump pour la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. Nous avons convenu que notre coopération en matière de renseignement, d'échange d'informations était déjà à un très haut niveau et qu'il fallait l'intensifier encore davantage. Elle fonctionne très bien. J'ai évoqué aussi toutes les mesures qui ont été prises en Europe pour sécuriser, notamment, nos frontières, pour sécuriser notre transport aérien, le PNR, mais aussi les systèmes qui existent aux États-Unis, les contrôles ESTA que nous allons également mettre en place. Donc nous échangeons des informations, nous partageons aussi des décisions et ceci est très positif. Puis nous avons échangé sur les menaces, la nature des menaces. Avec le conseiller à la sécurité intérieure, nous avons parlé de Raqqa. C'est donc une coopération qui apparaît sincère et, en tout cas, indispensable à mes yeux.
Q - Vous êtes un peu rassuré? Vous aviez vous-même, et après des propos de Donald Trump, dit «inquiétude», vous êtes rassuré de ces premiers échanges ?
R - Sur la question de la lutte pour la sécurité oui, je n'ai jamais eu de doutes.
Il y a beaucoup d'autres questions qui ne sont pas à l'ordre du jour aujourd'hui. L'avenir de l'accord sur le climat par exemple, la manière dont on va organiser les échanges commerciaux, le traité de libre-échange ou non - ou chacun pour soi ou droits de douane -, comment on va régler le conflit en Ukraine, l'accord iranien. Toutes ces questions sont encore sur la table. Je les ai posées à tous mes interlocuteurs. J'avais déjà rencontré Rex Tillerson en Allemagne pour parler de cela. Mais, là, nous sommes réunis pour lutter contre Daech. Et ce que j'ai constaté dans cette réunion, en parlant avec Rex Tillerson comme avec James Mattis ou la conseillère adjointe à la sécurité K.T. MacFarland, et le conseiller à la sécurité intérieure, c'est que la France est prise au sérieux, que la France est un partenaire fiable, non seulement en termes de renseignement pour lutter contre le terrorisme, mais aussi un partenaire fiable et souvent en pointe sur le terrain en Irak et en Syrie.
Je rappelle que la France arrive en deuxième position pour le nombre de frappes aériennes militaires ciblées. Le premier, ce sont les États-Unis et juste après arrive la France. Donc nous sommes très engagés. Et en Irak nous sommes même engagés avec les forces au sol, avec du matériel, avec des canons.
Donc, la France fait beaucoup dans cette coalition parce que nous avons conscience de notre responsabilité, parce que nous sommes un pays qui dispose d'une défense nationale bien équipée, avec des hommes bien formés, efficaces, comme nous le montrons au Sahel. Et les Américains reconnaissent que l'Afrique est un autre foyer du terrorisme et que la France est particulièrement présente.
Q - Avec le déclin de Daech, vous attendez-vous à une recrudescence des attentats, comme ce qui s'est passé à Londres ?
R - Je ne vais pas faire des prévisions, je ne sais pas si on peut parler de recrudescence. Ce qui est sûr c'est que la menace n'a pas disparu. Bien sûr, on fait des efforts considérables pour garantir dans nos pays respectifs - et c'est particulièrement le cas en France -, la sécurité de nos concitoyens. Je ne vais pas reprendre toutes les mesures que vous connaissez, elles sont très nombreuses et elles mobilisent des moyens humains et matériels considérables. Il faut les maintenir, il faudrait même, dans les années à venir, recruter davantage de personnel pas seulement sur le terrain mais aussi de renseignement. Tout cela est annoncé, mais il ne s'agit pas de baisser notre garde, il ne s'agit pas de baisser l'intensité de notre mobilisation, au contraire il faut la maintenir à un niveau élevé même si cela a un coût, un coût financier, un coût humain - cela mobilise beaucoup de gens. Parce que la menace n'a pas disparu et nous le savons. C'est la raison pour laquelle il faut continuer l'éradication de Daech dans ses sanctuaires territoriaux, là où l'État islamique voulait instaurer un État réel, ce qu'il a été dans l'incapacité de faire, mais il a toujours ses cellules. Il faut donc les détruire, et détruire sa propagande, détruire son idéologie, détruire ses financements, et détruire aussi ce qu'il fait sur les réseaux sociaux où l'on essaie de manipuler des gens qui peuvent se laisser entraîner comme par un phénomène sectaire.
Q - La France va-t-elle se joindre aux interdictions d'appareils électroniques ?
R - C'est une décision qui a été prise par les Américains et les Britanniques s'y sont joints. Nos services, le secrétariat général à la défense nationale, la DGAC, examinent s'il y a un risque avec ces appareils électroniques, ces tablettes où l'on peut regarder des séries dans un avion, pour vérifier si cela présente une menace ou non. À l'heure actuelle, je ne peux pas vous répondre. Mais, s'il y a une menace, on prendra, comme on le fait à chaque fois, nos responsabilités. Mais encore faut-il qu'il y ait une menace qui soit avérée et c'est ce que nous voulons à tout prix vérifier.
Q - Vous parliez d'idéologie. Est-ce que l'attaque de Londres, c'est la marque d'une idéologie qui est en perte de vitesse ou au contraire qui est plus forte que jamais ?
R - Je ne sais pas si on peut dire cela. Nous avons vécu en France des attentats terribles, et on ne pensait pas que cela allait recommencer aussi vite, avec une telle ampleur : des attaques comme Nice ou St-Etienne-du-Rouvray ou des assassinats de policiers en plus des autres attaques. Il y a donc une force organisée, très mobilisée idéologiquement, avec des moyens de propagande et d'intoxication, ce qui permet d'avoir des relais sur le terrain, sans doute - le mode d'organisation a évolué - pour déployer de nouvelles capacités. C'est donc un combat qui est de toute façon long puisque le combat dans ces sanctuaires n'est pas fini.
J'ai évoqué Raqqa et puis Mossoul, mais on pourrait parler aussi de l'Afrique, on pourrait parler non seulement du Mali, mais des voisins, on pourrait aussi parler de Boko Haram. Ce n'est pas tout le continent africain qui est touché mais on est, là encore, loin du bout de la lutte contre le terrorisme. Il faut continuer à organiser cette lutte et, en même temps, s'attaquer aux racines du mal.
Parce que, quand nous avons évoqué le Nigéria aujourd'hui - et nous en avons parlé - on voit bien que, dans ce pays qui est très peuplé, un des plus grands pays au monde, il y a beaucoup de pauvreté. C'est un pays qui souffre économiquement avec la baisse du prix du pétrole. Il y a même des régions qui souffrent encore plus que d'autres, dans le Nord du pays. Il y a des inégalités très grandes et donc, ce que la propagande de Daech utilise souvent, c'est ce désespoir. Daech trouve ainsi des adeptes. Donc il faut mener aussi le combat pour le développement, le combat pour la sécurité.
Au Mali, nous savions très bien qu'il fallait une solution politique après la solution militaire. La France l'avait clairement dit dès le départ, dès son intervention de 2013. La solution politique, ce sont les élections, présidentielles, législatives. Et puis c'est un gouvernement qui a un programme de réconciliation nationale et qui installe des troupes mixtes, des patrouilles mixtes au Nord, qui installe des autorités intérimaires avec une décentralisation au Nord - c'est un long processus - et puis, en même temps, qui doit aussi développer l'emploi, l'activité, la formation, les services à la population, pour ne pas laisser d'espace pour que le désespoir s'installe à nouveau, que les groupes extrémistes les utilisent comme base d'une propagande.
Quand on laisse traîner les questions, les problèmes, il y a des gens qui pensent, qui réfléchissent à ce qu'on pourrait en faire pour les exploiter. Alors, si c'est dans un cadre démocratique, pour changer une majorité au parlement ou une élection présidentielle, il est parfaitement légitime. Mais si c'est simplement pour entraîner les gens sur la voie d'une organisation terroriste, alors il faut les combattre.
Q - Une question sur al-Baghdadi. Les Américains disent que ce n'est qu'une question de temps pour le localiser. Est-ce que vous avez des informations à ce sujet ?
R - Non, je n'ai pas d'information. C'est un objectif symbolique parfaitement sincère, je crois. C'est Rex Tillerson qui l'a évoqué. Et c'est une manière de dire : on ne laissera aucun répit aux terroristes et à leurs chefs.
Q - Est-ce que vous avez parlé des interdictions de visas avec vos interlocuteurs américains ?
R - Non, on n'a pas abordé cette question. On a déjà abordé beaucoup de choses. Je reviendrai.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 mars 2017