Texte intégral
Je suis heureux de pouvoir m'exprimer devant vous à la fin de cette journée. Je voudrais rappeler que, dès le 1er octobre, quand nous avions présenté le premier plan français pour l'Afghanistan, nous pensions, à ce moment-là, que le problème n'était pas que militaire, mais nous avions aussi parlé de la dimension politique et de la dimension reconstruction après, pas simplement l'humanitaire d'urgence.
Sur le plan politique, je n'y reviens pas. Vous savez que la France a été active à partir de ce plan qui a été actualisé, par les contacts que nous avons eus avec Lakhdar Brahimi, par les résolutions que nous avons inspirées au Conseil de sécurité et par de nombreux contacts avec les protagonistes. Mais ce n'est pas le sujet principal d'aujourd'hui. Je le rappelle simplement pour dire que je suis heureux de voir que la Conférence de Bonn a l'air d'être vraiment proche d'une conclusion. Les délégations afghanes se sont comportées, je trouve, avec un vrai sens du compromis constructif. Il y a une vraie dynamique, me semble-t-il. Lakdar Brahimi a fait un travail subtil et efficace. C'est bien et tout à fait encourageant pour la suite.
Il y a la question de la sécurité qui est tout à fait considérable et que, je crois, beaucoup ont posée dans les travaux ici. Elle est préalable à beaucoup d'activités, naturellement. Nous ne sommes pas réunis ici pour en parler. Nous ne sommes pas dans la formation adéquate. Cela a été également débattu à Bonn et la question de la sécurité part aussi de ce que les différents groupes afghans acceptent ce sur quoi ils se sont mis d'accord, ce qu'ils vont demander. C'est à partir de là que l'on verra quelle est la mécanique internationale que l'on peut brancher là-dessus : résolution ou autre, quel type de force... Je n'en parle pas plus. Ce n'est pas non plus l'objet de cette journée mais, naturellement, nous sommes très conscients que c'est l'un des sujets clé de l'avenir.
Il y a donc plusieurs semaines, nous pouvions anticiper sur tout cela. Nous pouvions anticiper sur l'action militaire américaine contre Al Qaïda, sur la chute du régime taliban sur lequel Al Qaïda était en quelque sorte greffé et nous pouvions penser que nous serions devant cette circonstance historique. C'est une situation, pour la première fois en Afghanistan depuis plus de vingt ans, où l'on peut tenter de reconstruire, ou de construire peut-être, un pays nouveau. Vous avez vu aujourd'hui plusieurs ministres qui sont intervenus. Nous souhaitons participer à cela parce qu'il y a une relation affective, ancienne, presque sentimentale par certains côtés, entre la France et l'Afghanistan. En tout état de cause, je dirais que l'accumulation incroyable de malheurs qui a frappé ce pays depuis une vingtaine d'années suffirait à ce que l'on ait envie de faire quelque chose pour la suite.
Alors, bien sûr, toutes sortes de mécaniques vont se mettre en place. Il y a beaucoup d'organisations internationales et multilatérales qui sont compétentes. La Banque mondiale, l'Union européenne va agir, le PNUD, d'autres organismes. Naturellement, tout cela existe. Mais je pensais qu'il fallait que l'on organise une journée pour faire l'inventaire de tout ce que la France est capable d'apporter à cette construction ou à cette reconstruction, que ce soit par des actions relevant de la coopération française directement, ou que ce soit en s'insérant dans des programmes plus larges, multilatéraux. Et quand je dis la France, cela peut être le gouvernement, l'administration, les budgets publics ou comme le disait Bruno Delaye il y a un instant, des ONG, des collectivités locales. Et c'est vrai, on en parlait avec Charles Josselin il y a un instant, il faut qu'il y ait une réserve considérable en plus du côté des collectivités territoriales, ce que l'on appelle la coopération décentralisée.
Tout cela, nous le savions mais nous avons éprouvé le besoin justement de le concrétiser par un rendez-vous qui était celui de cette journée pour faire l'inventaire de nos capacités. Je relisais d'ailleurs quelques fiches rappelant tout ce que nous avions fait avant dans le chapitre des liens passés entre la France et l'Afghanistan. Il y a d'abord une référence que j'aime à rappeler parce que j'ai connu cet homme que j'aimais beaucoup, qui est le rôle du juriste français Louis Fougère, dans la Constitution d'autrefois de l'Afghanistan qui, malheureusement, n'a pas servi très longtemps. C'était une Constitution libérale. Il n'y avait aucune discrimination. Je pense aux femmes par exemple. Il y a une tradition de coopération importante à propos des lycées dont on croit que c'étaient des lycées français ; ce n'étaient pas des lycées français mais des lycées afghans. Il y avait un lycée de garçons, et un lycée de filles, où il y avait beaucoup de professeurs français. On en a retrouvé. Je ne sais pas s'il y en a dans la salle qui ont des souvenirs de cette époque. L'hôpital français, dont de nombreux médecins français ont soigné par ailleurs à la faculté de médecine de Kaboul. Cet hôpital fonctionnait avec Lyon. Il y avait les infirmières françaises qui enseignaient à l'école d'infirmières. Il y avait des professeurs à la faculté de droit, la délégation archéologique française en Afghanistan, la mission du CNRS, la mission cotonnière de la compagnie française de développement textile, les prospections de l'industrie gazière française. Donc, il y avait beaucoup de choses et ces institutions, ce sont des gens en pratique. Ce sont des hommes et des femmes qui ont vécu en Afghanistan, qui se sont attachés à ce pays, qui ont un savoir-faire qui est encore disponible, qui n'est pas perdu, et souvent la volonté de participer. Et même après, dans la période la plus effrayante de l'histoire afghane, il y a eu cette extraordinaire floraison d'ONG qui ont entretenu cette flamme autrement et, dans les toutes dernières périodes, on sait bien que c'est par des ONG françaises, pas uniquement françaises mais beaucoup quand même, qu'arrivait encore de l'aide humanitaire aux populations afghanes d'un côté comme de l'autre.
Il y a donc toute une histoire et tout un passé. Cela nous donne quelques indications que vous avez certainement retrouvées dans les groupes, de domaines dans lesquels on est en mesure de démarrer plus vite ou d'apporter quelque chose qui est plus immédiatement opérationnel. Cette journée était donc conçue pour être une journée d'inventaire, de mobilisation, sur tous les plans. Nous allons retrouver un certain nombre de choses que nous avions faites et nous allons d'emblée regarder comment on peut aider à redémarrer les lycées, comment nous pouvons aider à redémarrer l'hôpital. A chaque fois, il y a une dimension "action direction", une dimension "formation". Nous allons retrouver les questions des filières de production agricole. Nous allons retrouver la question du patrimoine archéologique, ce qui a pu être préservé. Cela a l'air peut-être secondaire dans la situation de détresse dont sort ce pays, mais ce n'est pas secondaire. C'est en même temps l'identité, c'est l'histoire. Il y a beaucoup de sujets et aussi bien en ce qui concerne l'agriculture, la santé, la formation, le patrimoine, la question des femmes qui est à la fois spécifique et qu'on retrouve en croisement dans tous ces éléments. Nous allons travailler.
Alors comment ? On ne va pas bâtir un plan français comme cela, que l'on va inventer tout seul dans notre coin, et qui s'articulerait plus ou moins bien avec la réalité afghane nouvelle. La première chose est de partir de ce que veulent les Afghans. C'est quand même la toute première chose. C'est important. Il ne faut pas réinventer le paternalisme parce que c'est un pays qui a été plus matraqué que d'autres et dans lequel il y a encore moins de structures. Il faut que l'on fasse cela finement. Cela dépend un peu des résultats imminents de Bonn, du type d'administration provisoire qui en sort, des types d'interlocuteurs que nous avons, ce qu'ils souhaitent, leurs propres priorités. Il faut faire les choses intelligemment, naturellement. D'autant que c'est lié à la question de la sécurité dont je parlais tout à l'heure. Nous allons travailler le plus vite possible avec des interlocuteurs afghans, de façon globale ou sujet par sujet. Mais déjà j'ai des indications ; par exemple sur l'hôpital, comme quoi il y a une demande afghane tout de suite. Il faut que l'on fasse des choses mais il faut que l'on s'insère dans l'ensemble. D'autre part, nous allons donner instruction à nos représentants dans tous les organismes multilatéraux dont j'ai parlé pour que l'on oriente les politiques et les organismes d'une façon qui tienne compte de ce que demandent les Afghans. Ce que je dis pour la France : pas de paternalisme un peu balourd. C'est vrai aussi pour les autres organismes. Il faut que l'on bâtisse un nouveau partenariat. Je crois que cela aussi fait partie de la construction d'un Afghanistan nouveau, nous allons donc travailler au sein de l'Union européenne et des autres organismes dans ce sens. Nous apporterons, grâce à cette journée et grâce à ses suites dont je vais dire un mot, un potentiel, une capacité, des financements que l'on va mobiliser, des réseaux, des gens, des expertises, des dévouements. Nous apporterons tout cela dans les semaines qui viennent.
A partir de cette journée, nous allons récapituler de façon plus complète et plus formelle. Bruno Delaye a tous les éléments mais il n'a pas voulu vous infliger la lecture de tout parce que c'est une journée très riche. Nous allons récapituler tout cela. Ce sera donc lisible, disponible, et nous allons en faire un document de travail à partir duquel nous allons, avec tous les autres interlocuteurs que j'ai mentionnés au début dans l'administration et ailleurs dans la société civile, regarder tout ce que l'on peut faire. Nous allons avancer. Nous allons garder le lien. Je crois que c'est important après le rendez-vous d'aujourd'hui et les attentes et les distances que cela crée, que sous une forme ou sous une autre, les groupes continuent par thème par rapport à cela. Il faut que ceux d'entre vous qui êtes venus par intérêt personnel, vous sachiez à qui vous adresser après. Les structures, les administrations, sont ensemble tout le temps. Il faut, je crois que cela serait également utile, qu'il y ait au sein de la DGCID une sorte de porte d'entrée unique.
Je crois que j'ai dit ce que je voulais vous dire d'utile et d'opérationnel. C'est un temps fort dans une démarche qui doit se poursuivre, qui va évidemment se diversifier, qui va rentrer dans des procédures de coopérations qui existent et qui sont connues. Nous voulions donner à tout cela un élan qui doit se développer. Ce que je souhaite très sincèrement pour l'Afghanistan, c'est que l'accord qu'on nous annonce comme imminent à Bonn se confirme effectivement, qu'il y ait un volet sécurité sérieux. Nous avons bien vu la réaction des Afghans qui ne veulent aucune présence extérieure en matière de sécurité et puis, finalement, ils ont accepté un peu plus. J'espère qu'ils seront raisonnables et qu'ils accepteront quelque chose quand même, même si les fonctions doivent être très clairement définies, naturellement : à quel type de sécurité doit-on contribuer ? Si les Afghans, à partir de l'accord politique, quasiment fait, à Bonn, sont capables de bâtir une force, de fabriquer une vraie police moderne, une vraie armée moderne, en tenant compte des types d'accord politique qu'ils ont passés au début qui peuvent servir de matrice, il faut aussi qu'ils s'ouvrent à des coopérations internationales. Ce qui s'est passé au centre de conférence de Petersberg est encourageant. Au début, il y avait des positions rigides sur pas mal de points. Puis, il y a eu une dynamique à l'intérieur des différentes délégations, des différents groupes d'ailleurs, entre les groupes à l'intérieur des groupes, une dynamique en terme de génération. Il y a quelque chose qui est prometteur. Je souhaite donc vraiment que cela se consolide, que cela se confirme. Tout ce que nous avons fait ces dernières semaines était dirigé évidemment contre le terrorisme. S'étaient greffés sur l'Afghanistan, à un moment donné, les problèmes qui se posent ailleurs. L'autre objectif, c'est de redonner une chance historique à l'Afghanistan. C'est pour cela que vous êtes venus aujourd'hui. C'est pour cela que nous avons travaillé. Il faut que nous gardions ces contacts pour garder cet élan et que la France apporte, avec le plus de générosité possible et en même temps le plus d'opérationnalité possible, une contribution forte à l'Afghanistan de demain.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 décembre 2001)
Sur le plan politique, je n'y reviens pas. Vous savez que la France a été active à partir de ce plan qui a été actualisé, par les contacts que nous avons eus avec Lakhdar Brahimi, par les résolutions que nous avons inspirées au Conseil de sécurité et par de nombreux contacts avec les protagonistes. Mais ce n'est pas le sujet principal d'aujourd'hui. Je le rappelle simplement pour dire que je suis heureux de voir que la Conférence de Bonn a l'air d'être vraiment proche d'une conclusion. Les délégations afghanes se sont comportées, je trouve, avec un vrai sens du compromis constructif. Il y a une vraie dynamique, me semble-t-il. Lakdar Brahimi a fait un travail subtil et efficace. C'est bien et tout à fait encourageant pour la suite.
Il y a la question de la sécurité qui est tout à fait considérable et que, je crois, beaucoup ont posée dans les travaux ici. Elle est préalable à beaucoup d'activités, naturellement. Nous ne sommes pas réunis ici pour en parler. Nous ne sommes pas dans la formation adéquate. Cela a été également débattu à Bonn et la question de la sécurité part aussi de ce que les différents groupes afghans acceptent ce sur quoi ils se sont mis d'accord, ce qu'ils vont demander. C'est à partir de là que l'on verra quelle est la mécanique internationale que l'on peut brancher là-dessus : résolution ou autre, quel type de force... Je n'en parle pas plus. Ce n'est pas non plus l'objet de cette journée mais, naturellement, nous sommes très conscients que c'est l'un des sujets clé de l'avenir.
Il y a donc plusieurs semaines, nous pouvions anticiper sur tout cela. Nous pouvions anticiper sur l'action militaire américaine contre Al Qaïda, sur la chute du régime taliban sur lequel Al Qaïda était en quelque sorte greffé et nous pouvions penser que nous serions devant cette circonstance historique. C'est une situation, pour la première fois en Afghanistan depuis plus de vingt ans, où l'on peut tenter de reconstruire, ou de construire peut-être, un pays nouveau. Vous avez vu aujourd'hui plusieurs ministres qui sont intervenus. Nous souhaitons participer à cela parce qu'il y a une relation affective, ancienne, presque sentimentale par certains côtés, entre la France et l'Afghanistan. En tout état de cause, je dirais que l'accumulation incroyable de malheurs qui a frappé ce pays depuis une vingtaine d'années suffirait à ce que l'on ait envie de faire quelque chose pour la suite.
Alors, bien sûr, toutes sortes de mécaniques vont se mettre en place. Il y a beaucoup d'organisations internationales et multilatérales qui sont compétentes. La Banque mondiale, l'Union européenne va agir, le PNUD, d'autres organismes. Naturellement, tout cela existe. Mais je pensais qu'il fallait que l'on organise une journée pour faire l'inventaire de tout ce que la France est capable d'apporter à cette construction ou à cette reconstruction, que ce soit par des actions relevant de la coopération française directement, ou que ce soit en s'insérant dans des programmes plus larges, multilatéraux. Et quand je dis la France, cela peut être le gouvernement, l'administration, les budgets publics ou comme le disait Bruno Delaye il y a un instant, des ONG, des collectivités locales. Et c'est vrai, on en parlait avec Charles Josselin il y a un instant, il faut qu'il y ait une réserve considérable en plus du côté des collectivités territoriales, ce que l'on appelle la coopération décentralisée.
Tout cela, nous le savions mais nous avons éprouvé le besoin justement de le concrétiser par un rendez-vous qui était celui de cette journée pour faire l'inventaire de nos capacités. Je relisais d'ailleurs quelques fiches rappelant tout ce que nous avions fait avant dans le chapitre des liens passés entre la France et l'Afghanistan. Il y a d'abord une référence que j'aime à rappeler parce que j'ai connu cet homme que j'aimais beaucoup, qui est le rôle du juriste français Louis Fougère, dans la Constitution d'autrefois de l'Afghanistan qui, malheureusement, n'a pas servi très longtemps. C'était une Constitution libérale. Il n'y avait aucune discrimination. Je pense aux femmes par exemple. Il y a une tradition de coopération importante à propos des lycées dont on croit que c'étaient des lycées français ; ce n'étaient pas des lycées français mais des lycées afghans. Il y avait un lycée de garçons, et un lycée de filles, où il y avait beaucoup de professeurs français. On en a retrouvé. Je ne sais pas s'il y en a dans la salle qui ont des souvenirs de cette époque. L'hôpital français, dont de nombreux médecins français ont soigné par ailleurs à la faculté de médecine de Kaboul. Cet hôpital fonctionnait avec Lyon. Il y avait les infirmières françaises qui enseignaient à l'école d'infirmières. Il y avait des professeurs à la faculté de droit, la délégation archéologique française en Afghanistan, la mission du CNRS, la mission cotonnière de la compagnie française de développement textile, les prospections de l'industrie gazière française. Donc, il y avait beaucoup de choses et ces institutions, ce sont des gens en pratique. Ce sont des hommes et des femmes qui ont vécu en Afghanistan, qui se sont attachés à ce pays, qui ont un savoir-faire qui est encore disponible, qui n'est pas perdu, et souvent la volonté de participer. Et même après, dans la période la plus effrayante de l'histoire afghane, il y a eu cette extraordinaire floraison d'ONG qui ont entretenu cette flamme autrement et, dans les toutes dernières périodes, on sait bien que c'est par des ONG françaises, pas uniquement françaises mais beaucoup quand même, qu'arrivait encore de l'aide humanitaire aux populations afghanes d'un côté comme de l'autre.
Il y a donc toute une histoire et tout un passé. Cela nous donne quelques indications que vous avez certainement retrouvées dans les groupes, de domaines dans lesquels on est en mesure de démarrer plus vite ou d'apporter quelque chose qui est plus immédiatement opérationnel. Cette journée était donc conçue pour être une journée d'inventaire, de mobilisation, sur tous les plans. Nous allons retrouver un certain nombre de choses que nous avions faites et nous allons d'emblée regarder comment on peut aider à redémarrer les lycées, comment nous pouvons aider à redémarrer l'hôpital. A chaque fois, il y a une dimension "action direction", une dimension "formation". Nous allons retrouver les questions des filières de production agricole. Nous allons retrouver la question du patrimoine archéologique, ce qui a pu être préservé. Cela a l'air peut-être secondaire dans la situation de détresse dont sort ce pays, mais ce n'est pas secondaire. C'est en même temps l'identité, c'est l'histoire. Il y a beaucoup de sujets et aussi bien en ce qui concerne l'agriculture, la santé, la formation, le patrimoine, la question des femmes qui est à la fois spécifique et qu'on retrouve en croisement dans tous ces éléments. Nous allons travailler.
Alors comment ? On ne va pas bâtir un plan français comme cela, que l'on va inventer tout seul dans notre coin, et qui s'articulerait plus ou moins bien avec la réalité afghane nouvelle. La première chose est de partir de ce que veulent les Afghans. C'est quand même la toute première chose. C'est important. Il ne faut pas réinventer le paternalisme parce que c'est un pays qui a été plus matraqué que d'autres et dans lequel il y a encore moins de structures. Il faut que l'on fasse cela finement. Cela dépend un peu des résultats imminents de Bonn, du type d'administration provisoire qui en sort, des types d'interlocuteurs que nous avons, ce qu'ils souhaitent, leurs propres priorités. Il faut faire les choses intelligemment, naturellement. D'autant que c'est lié à la question de la sécurité dont je parlais tout à l'heure. Nous allons travailler le plus vite possible avec des interlocuteurs afghans, de façon globale ou sujet par sujet. Mais déjà j'ai des indications ; par exemple sur l'hôpital, comme quoi il y a une demande afghane tout de suite. Il faut que l'on fasse des choses mais il faut que l'on s'insère dans l'ensemble. D'autre part, nous allons donner instruction à nos représentants dans tous les organismes multilatéraux dont j'ai parlé pour que l'on oriente les politiques et les organismes d'une façon qui tienne compte de ce que demandent les Afghans. Ce que je dis pour la France : pas de paternalisme un peu balourd. C'est vrai aussi pour les autres organismes. Il faut que l'on bâtisse un nouveau partenariat. Je crois que cela aussi fait partie de la construction d'un Afghanistan nouveau, nous allons donc travailler au sein de l'Union européenne et des autres organismes dans ce sens. Nous apporterons, grâce à cette journée et grâce à ses suites dont je vais dire un mot, un potentiel, une capacité, des financements que l'on va mobiliser, des réseaux, des gens, des expertises, des dévouements. Nous apporterons tout cela dans les semaines qui viennent.
A partir de cette journée, nous allons récapituler de façon plus complète et plus formelle. Bruno Delaye a tous les éléments mais il n'a pas voulu vous infliger la lecture de tout parce que c'est une journée très riche. Nous allons récapituler tout cela. Ce sera donc lisible, disponible, et nous allons en faire un document de travail à partir duquel nous allons, avec tous les autres interlocuteurs que j'ai mentionnés au début dans l'administration et ailleurs dans la société civile, regarder tout ce que l'on peut faire. Nous allons avancer. Nous allons garder le lien. Je crois que c'est important après le rendez-vous d'aujourd'hui et les attentes et les distances que cela crée, que sous une forme ou sous une autre, les groupes continuent par thème par rapport à cela. Il faut que ceux d'entre vous qui êtes venus par intérêt personnel, vous sachiez à qui vous adresser après. Les structures, les administrations, sont ensemble tout le temps. Il faut, je crois que cela serait également utile, qu'il y ait au sein de la DGCID une sorte de porte d'entrée unique.
Je crois que j'ai dit ce que je voulais vous dire d'utile et d'opérationnel. C'est un temps fort dans une démarche qui doit se poursuivre, qui va évidemment se diversifier, qui va rentrer dans des procédures de coopérations qui existent et qui sont connues. Nous voulions donner à tout cela un élan qui doit se développer. Ce que je souhaite très sincèrement pour l'Afghanistan, c'est que l'accord qu'on nous annonce comme imminent à Bonn se confirme effectivement, qu'il y ait un volet sécurité sérieux. Nous avons bien vu la réaction des Afghans qui ne veulent aucune présence extérieure en matière de sécurité et puis, finalement, ils ont accepté un peu plus. J'espère qu'ils seront raisonnables et qu'ils accepteront quelque chose quand même, même si les fonctions doivent être très clairement définies, naturellement : à quel type de sécurité doit-on contribuer ? Si les Afghans, à partir de l'accord politique, quasiment fait, à Bonn, sont capables de bâtir une force, de fabriquer une vraie police moderne, une vraie armée moderne, en tenant compte des types d'accord politique qu'ils ont passés au début qui peuvent servir de matrice, il faut aussi qu'ils s'ouvrent à des coopérations internationales. Ce qui s'est passé au centre de conférence de Petersberg est encourageant. Au début, il y avait des positions rigides sur pas mal de points. Puis, il y a eu une dynamique à l'intérieur des différentes délégations, des différents groupes d'ailleurs, entre les groupes à l'intérieur des groupes, une dynamique en terme de génération. Il y a quelque chose qui est prometteur. Je souhaite donc vraiment que cela se consolide, que cela se confirme. Tout ce que nous avons fait ces dernières semaines était dirigé évidemment contre le terrorisme. S'étaient greffés sur l'Afghanistan, à un moment donné, les problèmes qui se posent ailleurs. L'autre objectif, c'est de redonner une chance historique à l'Afghanistan. C'est pour cela que vous êtes venus aujourd'hui. C'est pour cela que nous avons travaillé. Il faut que nous gardions ces contacts pour garder cet élan et que la France apporte, avec le plus de générosité possible et en même temps le plus d'opérationnalité possible, une contribution forte à l'Afghanistan de demain.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 décembre 2001)