Interview de M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "France Info" le 6 avril 2017, sur la Syrie, sur le bilan du quinquennat de François Hollande.

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Média : France Info

Texte intégral

JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Journée spéciale sur Franceinfo : nous analysons le bilan de François HOLLANDE après cinq ans à l'Elysée. Avant de parler de cela, parlons de la Syrie. Un bombardement à l'arme chimique, au moins 86 morts, 30 enfants. Les Etats-Unis menacent d'agir seuls si le Conseil de sécurité des Nations unies n'arrive pas à adopter une résolution qui fera que le régime de Bachar el-ASSAD ne sera pas impuni après ce bombardement. La France pourrait soutenir une action unilatérale des Etats-Unis ?
STEPHANE LE FOLL
Je voudrais rappeler que la France, et ça fait partie du bilan de François HOLLANDE, avait eu une position extrêmement claire et ferme en 2013, qu'une attaque aérienne était prévue et que les Etats-Unis, à l'époque monsieur OBAMA, n'avaient pas souhaité aller jusqu'au bout. Résultat quatre ans après, on constate une nouvelle fois un crime de guerre. Crime de guerre proféré par Bachar el-ASSAD. Quand je pense que certains nous ont vanté l'axe Bachar-Poutine…
GUY BIRENBAUM
« Certains », vous voulez dire qui ?
STEPHANE LE FOLL
Certains candidats.
GUY BIRENBAUM
Vous parlez de François FILLON ?
STEPHANE LE FOLL
De François FILLON, de Marine LE PEN qui va voir monsieur POUTINE, de Jean-Luc MELENCHON qui avait eu aussi quelques mots pour Bachar el-ASSAD. Je voudrais que chacun prenne bien la mesure de ce qu'est une diplomatie, de ce qu'est la responsabilité d'un président de la République face à l'histoire. Voilà, c'est un message très clair qu'il faut faire passer ce matin. La France s'est associée avec la Grande-Bretagne et les Etats-Unis pour obtenir une résolution…
JEAN-MICHEL APHATIE
Un projet de résolution que la Russie ne veut pas voir adopté.
GILLES BORNSTEIN
Que la Russie ne votera pas, d'où la question de Jean-Michel.
STEPHANE LE FOLL
Qui bloque ? La Russie.
JEAN-MICHEL APHATIE
La question, elle est prématurée pour l'instant, s'il y a une action unilatérale des Etats-Unis, comment réagira la France.
STEPHANE LE FOLL
D'abord, les Etats-Unis ont annoncé qu'ils pourraient agir s'il n'y a pas de résolution. Des discussions doivent se dérouler aujourd'hui mais je rappelle que la France était prête à agir en 2013 déjà et de manière très claire.
GILLES BORNSTEIN
Est-ce qu'il y a un nouveau changement de la doctrine française ? C'est-à-dire on a compris ces derniers mois qu'il y avait un ennemi de premier rang qui était Daesh et donc un ennemi de second rang qui était Bachar, est-ce qu'on revient là-dessus ? Est-ce que Bachar est à nouveau…
STEPHANE LE FOLL
Non. Non, non, on ne revient pas là-dessus.
GILLES BORNSTEIN
Daesh est l'ennemi principal ?
STEPHANE LE FOLL
Bien sûr. Il y a une guerre qui est engagée contre le terrorisme. Le terrorisme frappe partout, partout. Il a encore frappé d'ailleurs en Russie, là où Marine LE PEN a pu aller voir monsieur POUTINE. Même chez monsieur POUTINE, avec le nombre de soldats et de policiers, il y a eu des attentats. Donc la lutte contre le terrorisme, elle reste…
GILLES BORNSTEIN
Le départ de Bachar n'est pas un préalable ?
STEPHANE LE FOLL
Il n'y a pas de préalable. Lutte contre Daesh partout.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il y en a eu.
STEPHANE LE FOLL
Non, ce n'est pas vrai. Sur la question de la Syrie, la question qui a été posée c'est la reconstruction politique peut-elle passer par le maintien de Bachar ? Ç'a été non depuis le début, mais ça n'a rien à voir avec la lutte contre le terrorisme. Pourquoi vous dites qu'il y aurait ou l'un ou l'autre ? C'est faux ! Et l'un, et l'autre, et en premier la lutte contre le terrorisme. Et en deuxième, si vous trouvez une solution politique à la Syrie, c'est toujours ce qui a été la position de la France, toujours réaffirmé par le président de la République, ça ne peut pas se faire avec le maintien de Bachar el-ASSAD. Pourquoi ? Parce qu'il y a eu ce qui s'est passé et encore une fois hier ou avant-hier.
FABIENNE SINTES
Et est-ce que nous on frapperait avec les Américains sans mandat de l'ONU, oui ou non ?
STEPHANE LE FOLL
Attendez, vous me posez des questions, mais je vais vous répondre je ne suis pas, pour l'instant, président de la République je crois. Je suis invité comme porte-parole du gouvernement, donc je ne vais quand même pas moi-même ce matin sur Franceinfo, même si ça pourrait faire beaucoup de dépêches AFP, annoncer une intervention de quel que soit l'enjeu de la France. C'est le président de la République qui a des discussions à l'ONU aujourd'hui. Je rappelle simplement, et ça c'est un fait, que le président de la République en 2013 était prêt à frapper.
JEAN-MICHEL APHATIE
Journée spécial sur Franceinfo, nous analysons le bilan de François HOLLANDE après cinq ans à l'Elysée. Comment qualifieriez-vous ce bilan, Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
En tout cas je sais une chose quand je vois les débats de la présidentielle aujourd'hui…
JEAN-MICHEL APHATIE
Ma question est le qualificatif pour le bilan.
STEPHANE LE FOLL
Oui, j'ai bien compris. Le qualificatif. Je sais une chose, c'est que la France d'aujourd'hui, en 2017, elle est en bien meilleur état que celle que nous avons trouvée en 2012.
JEAN-MICHEL APHATIE
Si c'était le cas, François HOLLANDE serait candidat à sa succession.
STEPHANE LE FOLL
Ça, c'est un syllogisme un peu bizarre.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ah bon ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, parce que malheureusement il n'est pas candidat, mais vous vous rendez compte… J'interprète ce que vous dites : il n'est pas candidat, donc la France va mal.
JEAN-MICHEL APHATIE
En tout cas vous, vous dites : elle va mieux et donc il n'est pas candidat. On est deux pas si logiques là.
STEPHANE LE FOLL
Non, non, non, non. Moi j'ai une logique, les résultats.
GILLES BORNSTEIN
Il y a un truc, c'est que les Français ne s'en sont pas rendu compte.
STEPHANE LE FOLL
Oui, parfait. Les Français ne s'en sont pas rendu compte, ça fait cinq ans qu'on le répète. Il y a eu un engagement du président de la République sur la question du chômage qui arrive en fin de quinquennat. Trop tard par rapport à l'engagement qu'était celui du président de la République mais qui arrive. Plus de 200 000 créations d'emplois dans l'économie marchande en France, c'est du jamais vu depuis 2007 c'est-à-dire avant la crise. Des investissements en entreprise qui atteignent 4 %, c'est des chiffres qu'on n'avait jamais connus depuis plus de dix ans. La prévision de croissance de l'INSEE révisée 0,03, 0,4 à 0,5 au deuxième trimestre, un point au moins de croissance et d'acquis de croissance dès juin 2017. Celui qui arrivera ou celle qui arrivera trouvera un pays qui retrouve de la dynamique. Ce n'était pas le cas quand nous sommes arrivés. Il n'y a qu'à se rappeler d'un exemple qui me frappe à chaque fois, c'est PSA lorsque François HOLLANDE arrive en 2012.
JEAN-MICHEL APHATIE
Oui.
STEPHANE LE FOLL
On dit que c'est pratiquement une entreprise qui va peut-être tomber en faillite. Elle est possiblement rachetable par GENERAL MOTORS. Cinq ans après, PSA est une entreprise…
GILLES BORNSTEIN
Qui a été rachetée par des Chinois au lieu d'être racheté par des Américains.
STEPHANE LE FOLL
Non, non, elle n'a pas été rachetée. Il y a eu une ouverture du capital, le capital dans lequel l'Etat avait pris sa part, des Chinois et aujourd'hui, je suis désolé de vous le dire quand même, PSA a racheté une entreprise automobile allemande OPEL à GENERAL MOTORS.
JEAN-MICHEL APHATIE
PSA, c'est une bonne illustration des hésitations du président de la République en matière économique. Le 12 juillet 2012, PSA présente son plan avec le projet de fermeture de l'usine d'Aulnay et vous savez ce que dit François HOLLANDE le 14 juillet 2012 ?
STEPHANE LE FOLL
Mais je m'en souviens, Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
« Ce plan n'est pas applicable et ne sera pas appliqué. » Puis il l'a été et c'est ce qui a sauvé PEUGEOT.
STEPHANE LE FOLL
Oui. Ce qui a sauvé PEUGEOT…
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est l'illustration des hésitations du président de la République en matière économique.
STEPHANE LE FOLL
Jean-Michel APHATIE, vous êtes en train de dire encore une fois – on a l'habitude du bashing depuis cinq ans – PEUGEOT a été sauvée par la prise de capital, PEUGEOT a été sauvée par l'accord qui a été trouvé.
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, PEUGEOT a été sauvée par le plan qu'il a mis en oeuvre puis par le capital.
STEPHANE LE FOLL
Non, non, non. Et l'accord qui a été trouvé avec les syndicats, qui s'est appuyé sur un accord défensif loi de Michel SAPIN – vous oubliez de le dire – puis le fait que le CICE comme le Pacte de responsabilité, ç'a été rappelé par le PDG de PEUGEOT, mais tout ça vous cherchez à l'oublier, ça fait partie de ce qui a permis un redressement d'une entreprise française. Une entreprise française d'automobiles rachète une entreprise allemande de l'automobile, ça mériterait au lieu d'être tout le temps dans le négatif, de regarder de temps en temps, et c'est mon rôle. C'est le vôtre de critiquer, c'est mon rôle de le défendre, de dire que ça, ça fait partie du bilan, et ça c'est un bilan positif.
FABIENNE SINTES
Et on n'a pas fini de regarder ce bilan de François HOLLANDE. […]
GILLES BORNSTEIN
Le 1er décembre dernier, c'était il n'y a pas si longtemps, François HOLLANDE a renoncé à se présenter. Je pense que vous vous en souvenez même.
STEPHANE LE FOLL
Oui, très bien.
GILLES BORNSTEIN
Et comme je sais que vous ne l'avez pas écouté, vous allez l'écouter maintenant.
- Déclaration du président de la République François HOLLANDE, le 1er décembre 2016 :
« Je suis conscient des risques que ferait courir une démarche, la mienne, qui ne rassemblerait pas largement autour d'elle. Aussi, j'ai décidé de ne pas être candidat à l'élection présidentielle. »
GILLES BORNSTEIN
Est-ce que Manuel VALLS a été déterminant dans cette décision du président de la République de ne pas se représenter ?
STEPHANE LE FOLL
Je n'en sais rien.
GILLES BORNSTEIN
Si. Un petit peu quand même.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous le savez mais vous ne venez pas le dire.
STEPHANE LE FOLL
Je me souviens bien d'avoir été invité un matin ici avec une dizaine de questions répétées. Je n'en sais rien. Dans tous les facteurs qui ont joué, il y en a de nombreux. Tout ce que je sais, c'est que lorsqu'on gouverne la France et que c'est difficile, et ç'a été difficile et les critiques n'ont cessé. Que ce soit du côté de la gauche, que ce soit du côté de la gauche du PS avec la fronde, que ce soit du côté de la droite, et j'entendais tout de suite que François FILLON veut poursuivre en justice le président de la République. Franchement, ça vient d'être dit.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous en parlez. Alors je ne sais pas, puisque peut-être que nos auditeurs ne le savent pas, c'est ce que François FILLON vient de dire sur France Inter. On l'écoute ?
GUY BIRENBAUM
On l'écoute.
STEPHANE LE FOLL
Allez.
- Extrait de l'interview de François FILLON sur France Inter :
François FILLON : Le moment venu, je poursuivrai tous ceux qui sont à l'origine de cette affaire.
Patrick COHEN : Vous dites à nouveau dans Le Point qui paraît ce matin que c'est François HOLLANDE qui a déclenché l'affaire.
François FILLON : Oui, bien sûr.
Patrick COHEN : C'est François HOLLANDE ?
François FILLON : Bien sûr.
STEPHANE LE FOLL
Franchement ! Franchement ! Entendre ça ce matin, là. J'arrive, j'entends cela. Un candidat à la présidentielle membre d'un parti de gouvernement, dire que s'il est élu il enclenchera des poursuites contre le président actuel, au nom du fait qu'il soupçonne qu'il ait engagé…
FABIENNE SINTES
Il a dit : « Il a déclenché l'affaire. »
STEPHANE LE FOLL
Mais c'est parfaitement… La justice, et ça François FILLON ne veut pas l'accepter et ça fera partie du bilan de François HOLLANDE, a été indépendante dans les choix, dans la conduite des affaires judiciaires. C'est un acquis de ce quinquennat, et entendre quelqu'un revenir dessus… D'ailleurs la droite, qui n'a jamais voulu voter la réforme du Conseil supérieur de la magistrature pour assurer définitivement cette indépendance, la droite n'a jamais voulu le faire, entendre ça ça veut dire qu'encore une fois on est dans cette forme de volonté de suspicion, d'insinuation, de manière de faire de la politique qui, je le dis, n'est pas à la hauteur de ce que doit être un engagement d'un homme politique pour gouverner un pays.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous l'entendez, Stéphane LE FOLL, quand vous allez sur les marchés, vous entendez sans doute des gens qui vous disent : « Mais enfin, vraiment quel heureux hasard. Ça sort maintenant, le dossier est tout ficelé, il y a toute la vie de François FILLON. » Beaucoup de gens pensent que ce n'est pas un travail ordinaire des journalistes ou de la justice qui a conduit aux embarras que connaît François FILLON.
STEPHANE LE FOLL
Je voudrais rappeler que Le Canard Enchaîné, dont François FILLON a utilisé un certain nombre de bonnes feuilles sur le fameux livre
GUY BIRENBAUM
C'est un livre écrit par deux auteurs du Canard Enchaîné, livre dont Le Canard Enchaîné dit qu'il ne vient pas du Canard.
STEPHANE LE FOLL
D'accord, mais le même François FILLON qui dit que Le Canard Enchaîné, bien sûr, aurait été alimenté, lui, par…
JEAN-MICHEL APHATIE
Par le cabinet noir.
GUY BIRENBAUM
Cabinet noir.
STEPHANE LE FOLL
Mais comment on peut…
GUY BIRENBAUM
Il n'y a pas de cabinet noir ? Ça n'existe pas ?
STEPHANE LE FOLL
Mais ça n'a jamais existé !
GUY BIRENBAUM
Ça n'a jamais existé ?
STEPHANE LE FOLL
Dans le passé.
JEAN-MICHEL APHATIE
« Dans le passé », c'est-à-dire ? Quel passé ?
STEPHANE LE FOLL
L'accusation, elle m'a été portée par Nicolas SARKOZY : j'étais à la tête du cabinet noir et j'avais répondu très simplement. Moi, j'étais à la tête d'un cabinet, oui, directeur de cabinet. Ça, je m'en souviens, au Parti socialiste. C'était officiel et c'était clair, et je n'ai jamais mangé de ce pain-là. Certains en sont encore aux histoires qui pouvaient se passer après et pendant malheureusement la guerre d'Algérie. Ça suffit, cette manière de faire et cette manière de faire de la politique. Je l'ai dit.
JEAN-MICHEL APHATIE
Pas de cabinet noir à l'Elysée avec François HOLLANDE ?
STEPHANE LE FOLL
Mais jamais, jamais. Ce sont des accusations diffamatoires.
GILLES BORNSTEIN
Mais il faut poursuivre.
STEPHANE LE FOLL
Mais poursuivre ? On va s'engager à poursuivre dans un débat comme celui-là ? On ne fait qu'alimenter. Regardez, le fait que des gens puissent penser aujourd'hui sur ce sujet qu'il y a un doute, la justice est indépendante et il n'y a jamais eu de cabinet ni noir, ni blanc, ni gris, ni jaune. Jamais. Et ça fait partie de l'honneur de François HOLLANDE et de ce gouvernement.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'était votre réponse à François FILLON qui dit qu'il demandera des comptes à François HOLLANDE.
GILLES BORNSTEIN
François HOLLANDE ne s'est donc pas représenté. Il y a eu des primaires qui ont donné comme vainqueur Benoît HAMON, candidat socialiste, qu'on écoute lors de son meeting à Bercy.
- Extrait du meeting de Benoît HAMON à Bercy :
« Voilà ce que je suis, candidat pour plus de justice, pour plus d'écologie, pour plus de fraternité, pour un futur désirable. »
GILLES BORNSTEIN
A l'instant même sur BFM, Michel SAPIN vient de dire que son candidat pour l'élection présidentielle c'était Benoît HAMON. Qui est le candidat de Stéphane LE FOLL ? Pour qui va voter Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Sur ce sujet, je m'étais exprimé. Vous savez, je savais qu'en venant j'aurai cette question.
GILLES BORNSTEIN
C'est assez légitime quand même. On est à quinze jours du premier tour.
STEPHANE LE FOLL
C'est légitime, mais vous l'avez posée la question.
GUY BIRENBAUM
Voilà, donc on attend la réponse.
STEPHANE LE FOLL
Le seul problème, c'est que vous attendez une réponse.
JEAN-MICHEL APHATIE
Quand on pose une question, on attend une réponse. Oui, ça c'est sûr.
STEPHANE LE FOLL
Donc je vais répondre à cette question. Tout simplement, et je l'ai déjà dit sur France Inter il y a deux mois, moi je vais avoir deux choses qui vont me guider. La première, c'est une fidélité au Parti socialiste, fidélité que je partage avec beaucoup de députés aujourd'hui qui sont dans leur circonscription et qui ne s'expriment pas non plus. Fidélité aussi à ce que nous avons fait et fierté de ce que nous avons fait, et ça je le porte avec d'autres aussi quand d'autres n'en parlent même pas. Moi cette fierté, je l'ai fait parce que j'étais socialiste, parce que j'ai participé à un gouvernement de François HOLLANDE, et moi je le revendique.
GILLES BORNSTEIN
Donc il faudrait que Benoît HAMON assume un peu plus le bilan.
STEPHANE LE FOLL
Je ne ferai pas la campagne de Benoît HAMON. C'est Benoît HAMON qui fait sa campagne.
JEAN-MICHEL APHATIE
Fidélité au Parti socialiste, et la deuxième ?
STEPHANE LE FOLL
Fidélité, ç'a été justement de ne pas participer à tout ce qui a pu être dit contre Benoît HAMON. Il a fait son choix de campagne, il fait sa campagne…
GILLES BORNSTEIN
A laquelle vous ne participerez pas.
STEPHANE LE FOLL
Non. Je n'y ai pas participé d'abord parce que je n'y ai pas été invité et, deuxièmement, parce que je fais mon travail. Et puis le deuxième point, et je l'avais dit à l'époque, c'est que moi je vais regarder jusqu'au bout. Le risque pour moi, c'est que la France bascule du côté de l'extrême droite et, chaque fois que je regarde les sondages le matin, je constate qu'elle est à un niveau jamais atteint. Et le deuxième, c'est quand j'entends en plus ce matin François FILLON, c'est de me dire que là je ne laisserai, et je prendrai des responsabilités comme d'autres d'ailleurs, mais s'il y a un risque de voir Marine LE PEN non seulement en tête avec un duel avec François FILLON au deuxième tour…
GILLES BORNSTEIN
Il y a un risque. Les courbes sont en train un peu… Il y a un risque.
STEPHANE LE FOLL
Je regarde tout ça et ma responsabilité politique à ce moment-là, ça sera de m'exprimer. Moi, je suis correct avec Benoît HAMON.
JEAN-MICHEL APHATIE
Stéphane LE FOLL, vous pourriez ne pas voter Benoît HAMON si vous sentez qu'il y a un risque.
STEPHANE LE FOLL
Voilà, vous avez répondu.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et ça, vous le décideriez…
STEPHANE LE FOLL
Attendez, vous avez posé une question, je vous ai répondu donc on ne va pas refaire mille fois le débat.
JEAN-MICHEL APHATIE
Michel SAPIN, votre collègue de l'économie, dit : « Moi je voterai Benoît HAMON parce que c'est le candidat de mon parti. » Vous, vous n'en êtes pas là aujourd'hui.
STEPHANE LE FOLL
Oui. Michel SAPIN, c'est un grand garçon et moi aussi.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ça me permet de poser la question.
STEPHANE LE FOLL
Non mais parce qu'on a toujours l'impression, je ne sais pas pourquoi d'ailleurs, que Michel SAPIN serait celui que je devrais suivre et commenter. Michel SAPIN, il fait ce qu'il veut. Stéphane LE FOLL, il a été loyal et fidèle pendant plus de vingt ans.
GUY BIRENBAUM
A la troisième personne.
STEPHANE LE FOLL
Maintenant, il est celui qu'il est et je prends mes décisions tout seul, voilà.
FABIENNE SINTES
Ça veut dire que le marqueur, ce sera les sondages ?
STEPHANE LE FOLL
Ça ne veut pas dire que les marqueurs, ce sera les sondages.
GILLES BORNSTEIN
Un peu quand même.
STEPHANE LE FOLL
Mais est-ce que vous pensez que quand vous avez les sondages, et Jean-Michel APHATIE disait : « Vous rencontrez du monde », vous croyez que je ne rencontre pas du monde ? Moi, je vis dans la Sarthe. Si vous voulez le samedi matin, vous venez au Pâtis-Saint-Lazare, vous verrez que j'y suis. Tous les samedis. Donc les gens qui viennent me voir, je sais ce qu'ils me posent comme questions. Je regarde et les sondages et ce que j'entends, ce que je vois, et je fais des réunions suffisamment avec beaucoup de monde.
GILLES BORNSTEIN
Est-ce que vous voyez ressemble aux sondages ?
STEPHANE LE FOLL
Ce que je vois et ce que j'entends, ça ressemble à un doute, ça ressemble à une inquiétude et ça ressemble aujourd'hui à une question à chaque fois qui m'est posée comme celle que vous m'avez posée ce matin. Et à chaque fois j'essaye d'y répondre avec ce que je viens de vous dire. Il y a des risques dans la vie politique qu'il ne faut pas prendre. […]
JEAN-MICHEL APHATIE
Stéphane LE FOLL, porte-parole du gouvernement, vous rendez compte…
STEPHANE LE FOLL
Jusqu'ici, ça va. Il y a le ministre de l'Agriculture aussi, ne l'oubliez pas. Et de la Forêt.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous rendiez compte des engagements de François HOLLANDE durant sa campagne électorale. Il avait promis que Fessenheim sera fermée. Conseil d'administration aujourd'hui d'EDF et visiblement, le PDG d'EDF Jean-Bernard LEVY résiste à l'idée de la fermeture.
STEPHANE LE FOLL
Oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
Qu'est-ce que vous lui dites ?
STEPHANE LE FOLL
J'ai parfaitement conscience des résistances et des réticences qui existent. J'avais moi-même, pendant la campagne, rencontré tous les salariés de Fessenheim. Je comprends à un moment que des salariés cherchent à défendre un outil de travail, et je leur avais dit : « Un jour, il faudra arrêter des centrales. Il y en a qui vont fermer. » Enfin, c'est comme si c'était éternel. La décision qui avait été prise, c'est pour trouver un mix énergétique qui fasse baisser le nucléaire sur une centrale qui est ancienne et qu'on devait fermer, et pour permettre justement de commencer aussi à travailler sur ce qu'on appelle le démantèlement des centrales nucléaires. Quand est-ce qu'on va commencer ? C'est vrai que le premier pas est toujours le plus difficile et je respecte les salariés de l'entreprise.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais là, le conseil d'administration et le PDG d'EDF, vous leur dites quoi ce matin ?
STEPHANE LE FOLL
Mais ce qu'a dit Ségolène ROYAL. Il y a eu un engagement qui a été pris, ils sont dans une responsabilité qui est de respecter ce qui avait été pris comme engagement.
GILLES BORNSTEIN
Ils défendent leur entreprise aussi.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous pourriez démettre…
STEPHANE LE FOLL
Oui, mais est-ce que vous pensez qu'EDF n'a pas été défendue ? Est-ce que vous pensez que lorsqu'on recapitalise EDF aujourd'hui, ça n'a pas été défendu ? Est-ce que vous pensez que tout le travail qu'a fait le gouvernement sur le rapprochement EDF-AREVA…
GILLES BORNSTEIN
S'il y a des doutes, c'est qu'il hésite. Il ne sait pas.
FABIENNE SINTES
Oui, il a des doutes.
STEPHANE LE FOLL
Sur AREVA, ce qui a été engagé par le gouvernement, plus de trois milliards de recapitalisation, vous croyez qu'on n'a pas défendu EDF ?
FABIENNE SINTES
Mais concrètement, est-ce qu'on leur tord le bras, monsieur LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Mais de toute façon depuis le début, je suis bien placé pour le savoir, je vous répète que dès la campagne présidentielle, j'ai eu ce débat et je l'ai eu avec les salariés.
JEAN-MICHEL APHATIE
Est-ce que vous pourriez démettre le PDG puisque l'Etat a 83 % du capital d'EDF ?
STEPHANE LE FOLL
D'abord, on va attendre.
JEAN-MICHEL APHATIE
Si ce matin il résiste et ne conduit pas la résolution présentée au conseil d'administration ?
STEPHANE LE FOLL
« Si », avec des « si » on refait le monde. Pour l'instant, le conseil d'administration n'a pas eu lieu, donc on ne va pas anticiper.
JEAN-MICHEL APHATIE
D'accord.
STEPHANE LE FOLL
Vous savez, il faut de temps en temps aller dans l'ordre. On n'a pas encore ce conseil d'administration qui s'est réuni. L'engagement avait été pris et, je le rappelle, il faudra à un moment que chacun prenne la mesure du fait qu'il y a des centrales qui vont fermer. Et il faut bien commencer pour mettre en place une filière de démantèlement. C'est aussi simple que ça, même si c'est difficile à accepter pour des salariés. J'en ai parfaitement conscience.
GILLES BORNSTEIN
Dans l'actualité toujours, la Guyane. Conflit difficile au point que la Secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, Ericka BAREIGTS, a dit ceci à Cayenne.
- Extrait d'une déclaration d'Ericka BAREIGTS :
« Au-delà de ma personne, de ma petite personne, au-delà des fonctions, toutes mes excuses au peuple guyanais. »
GILLES BORNSTEIN
De quoi s'excuse-t-elle exactement ?
STEPHANE LE FOLL
Du fait que le peuple guyanais a le sentiment que l'Etat n'aurait pas apporté les réponses à la hauteur de ce que sont les besoins qui s'expriment au niveau du peuple guyanais. C'était ça la…
GILLES BORNSTEIN
Il paraît que ça a rendu Bernard CAZENEUVE fou.
STEPHANE LE FOLL
Je ne crois pas. Moi j'ai vu Bernard CAZENEUVE le lundi avant le départ pour la Guyane, je l'ai vu au moment de la réunion le lundi suivant, je l'ai eu au téléphone à plusieurs reprises, il n'a jamais exprimé quoi que ce soit qui puisse être … Qui a été relaté… D'ailleurs je l'ai vu dans Le Canard Enchaîné. Je le dit, tranquillement. Et en même temps c'était une manière de dire à des gens qui voulaient exprimer justement ce sentiment d'abandon, qu'il y a eu bien sur des retards qui ont été pris. Et je peux vous le dire, sur les budgets on a hérité, le budget de l'Outre-mer n'avait cessé de diminuer sous les dix dernières années avant que nous arrivions. On l'a fait remonter. Le vrai problème dans tous ces débats c'est qu'à chaque fois on croit qu'avec une enveloppe on règle tous les problèmes. Et c'est le débat sur le nombre de milliards ; mais on ne change rien simplement avec des enveloppes ou avec des lois d'ailleurs, ça ne se règle pas d'un coup de cuillère à pot. Il y a eu des retards qui ont été pris…
JEAN-MICHEL APHATIE
Les enveloppes ça aide.
STEPHANE LE FOLL
Mais bien sûr que ça aide, personne n'a dit le contraire ! Mais moi j'ai vu hier par exemple qu'entre le début de la semaine et hier on était passé de 2 milliards à 3 milliards. On peut toujours demander des milliards, mais amener des milliards si derrière il n'y a pas les leviers qui vont mettre en oeuvre de manière méthodique et avec l'objectif recherché – plus d'écoles, rénovation des hôpitaux, aménagements routiers, responsabilité en terme de logement… -
GUY BIRENBAUM
Ils demandent de la sécurité aussi.
STEPHANE LE FOLL
Sécurité. La Guyane aujourd'hui – il y a eu des engagements qui avaient été pris par Bernard CAZENEUVE – plus de 70 gendarmes et policiers sont déjà arrivés. Vous savez quel est le taux… le rapport entre la population et le nombre de policiers ? C'est près de 10 %, on est déjà à un taux de police et de gendarmerie qui est extrêmement élevé. Pourquoi ? Parce qu'on a des problèmes énormes de frontière – on va se parler franchement – avec une immigration clandestine massive, avec des gens qui rentrent, qui sortent, qui repartent, et c'est une vraie difficulté. Vraie difficulté. On pourra rajouter énormément de policiers, le problème c'est qu'il faut qu'on arrive à réguler cette immigration, sinon on n'y arrivera pas. Et on pourra toujours demander plus de milliards, mais ça sera à rajouter. Donc il faut aussi être francs, clairs, et se parler clairement.
JEAN-MICHEL APHATIE
Le quinquennat se termine, vous n'en avez pas marre un peu de la politique ? Vous allez être candidat encore aux législatives ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, je vais être candidat aux législatives. En tout cas je ne suis pas mécontent d'arriver au bout de cinq ans et de pouvoir faire….
JEAN-MICHEL APHATIE
Et vous avez toujours envie de faire de la politique ?
STEPHANE LE FOLL
Moi je suis fidèle à un département, à une histoire, un territoire et donc je le fais aussi parce que cette fidélité elle a aussi une valeur d'éthique, de rapport aux gens. Si ceux qui me rencontrent de temps en temps me disent « monsieur LE FOLL, vous restez bien là, je dis oui je reste là, je suis là ».source : Service d'information du Gouvernement, le 7 avril 2017