Texte intégral
Nous voici réunis, nombreux, pour le 6ème de nos forums régionaux et progressivement se précise le projet des entreprises pour la France, leur vision de la France du XXIème siècle.
- Après le lancement de notre campagne à Angoulême, le 25 octobre dernier, consacré à une valeur essentielle, fondamentale : le travail demain.
- Après Clermont-Ferrand consacré à un objectif majeur pour les entreprises comme pour les citoyens : concilier au mieux l'entreprise, l'homme, la nature et ainsi garantir un développement durable.
- Après Lille où ont été présentées nos propositions pour développer l'esprit d'initiative et l'esprit d'entreprise, ferments indispensables du progrès et de la croissance.
- Après Strasbourg consacré à la présentation d'une nouvelle architecture pour la protection sociale, afin de la rendre plus équitable, plus efficace et plus performante, afin de garantir la protection individuelle et collective de tous les Français en maîtrisant les charges qui pèsent toujours, in fine, sur le secteur productif.
- Après Nantes consacré au renouvellement du dialogue social, qui doit élargir désormais la place de la négociation, de la convention, et du partenariat,
Nous voici aujourd'hui réunis à Marseille, pour répondre à des questions décisives qui englobent en quelque sorte toutes celles que nous avons posées antérieurement :
o Comment, Mesdames et Messieurs, accroître et renforcer l'attractivité de la France dans un monde de plus en plus ouvert ?
o Comment faire en sorte que la France soit un pays dans lequel il fait certes bon vivre, mais dans lequel il fasse aussi bon produire ?
o Comment faire en sorte que les entrepreneurs qui ont choisi la France comme site de production puissent lutter à armes égales avec leurs compétiteurs étrangers ?
o Comment faire en sorte que nous attirions les entrepreneurs du monde entier qui choisiraient le site de production France pour y exercer leurs talents et y investir leurs capitaux ?
o Comment faire en sorte que la France occupe une place de premier plan dans le concert économique des nations ?
o Comment faire en sorte que la France soit en matière économique une terre de référence, un pays dont on s'inspire, un pays qui rayonne, un pays que l'on envie, un pays qui suscite l'admiration alors qu'il suscite aujourd'hui des interrogations ?
Faire de la France un pays d'excellence
Je le dis avec regret. Ces questions essentielles dont dépendent l'avenir de notre pays, l'emploi, le bien être, le dynamisme et l'esprit de la nation, la mobilisation de la jeunesse ne sont pas, loin de là une priorité dans notre pays. Alors que partout autour de nous on pense "production", on encourage son essor, nous en France nous ne pensons encore que "répartition" Alors que partout les pouvoirs publics s'attachent à faciliter la tâche des entrepreneurs, à les encourager, nos pouvoirs publics pensent surtout à prélever sur la richesse.
Alors que partout dans le monde, pouvoirs publics et entreprises forment une même équipe, jouent du même côté du terrain pour affronter la concurrence mondiale, malheureusement les entrepreneurs de France ont trop souvent le sentiment que les pouvoirs publics jouent dans le camp d'en face.
Partout autour de nous, chez nos principaux voisins, les dirigeants politiques nationaux ont fait de la recherche de la compétitivité l'axe principal autour duquel s'organise toute leur action. Par exemple, Tony Blair au Royaume-Uni ou Gerhardt Schröder en Allemagne insistent dans chacune de leurs interventions sur la priorité à accorder aux entreprises pour que leur pays relève les défis issus de la compétition économique mondiale. Permettez-moi de citer le manifeste Blair-Schröder, deux grands leaders socialistes européens, de les citer dans le texte : " Nos politiques publiques doivent être conçues dans un nouveau cadre économique, adapté aux réalités d'aujourd'hui, avec une règle d'or : le gouvernement doit tout faire pour soutenir les entreprises et ne jamais croire qu'il puisse s'y substituer ". Et ils ajoutent : " Le rôle essentiel des marchés doit être complété et amélioré par l'action publique, mais non pas entravé par elle ".
Chez nos partenaires, la comparaison internationale est permanente. Le "benchmark" est omniprésent pour guider les choix des pouvoirs publics. On cherche sans relâche à s'inspirer des réussites observées à l'étranger et des échecs pour ne pas les répliquer. C'est la raison d'ailleurs pour laquelle les 35 heures n'ont pas eu beaucoup d'émules. Qu'observe-t-on dans la plupart des pays industrialisés ? Le rôle des entreprises est valorisé, le dialogue social respecté, les entrepreneurs sont entendus et écoutés. Chez tous nos partenaires, l'objectif est clair et simple : " We have to be the first, we want to be leaders ", et pour cela, nous devons tout faire pour aider nos entreprises à être les plus fortes.
En France, les idées mêmes de comparaison internationale, de compétitivité, d'attractivité, de meilleures pratiques sont le plus souvent ignorées, quand elles ne sont pas simplement rejetées. Au contraire, on cultive à l'envie l'" exception française ". Plutôt que de chercher à rivaliser, à accepter de se comparer aux meilleurs pour les dépasser, on justifie en invoquant l'" exception française " tous nos retards, nos errements, nos renoncements, nos immobilismes. Au nom de la soi-disant " exception française ", on accumule des impôts nouveaux, on multiplie des lois d'un autre âge, on laisse bourgeonner des réglementations incompréhensibles et souvent inapplicables. Et lorsque à juste titre les entrepreneurs protestent, et revendiquent le simple droit de lutter à armes égales avec leurs concurrents, les pouvoirs publics renchérissent en les punissant de mesures encore plus contraignantes.
Ce constat, Mesdames et Messieurs, vous le connaissez. Vous le vivez dans votre expérience de chaque jour, c'est malheureusement votre lot quotidien. C'est pour cela que nous avons décidé de réunir des milliers d'entrepreneurs à travers toute la France, pour exprimer haut et fort, sans esprit partisan, de manière apolitique, nos idées, nos propositions, nos suggestions, pour que notre pays soit plus efficace, plus puissant, plus créateur d'emplois, plus créateur de richesse.
Chers amis, nous avons le devoir de nous exprimer. Nous avons le devoir de faire des propositions. Nous avons le devoir de dire publiquement ce qui semble bon et au contraire ce qui paraît mauvais pour les entreprises.
Oui, notre pays doit adopter comme objectif majeur pour les prochaines années la recherche de la compétitivité de son économie dans un monde sans cesse plus ouvert, plus fluide, plus concurrentiel. Car sans compétitivité globale, pas de croissance durable et pas d'emploi pérenne.
Oui, notre pays doit rétablir l'attractivité du site de production France en renforçant, en soutenant, en encourageant ses entrepreneurs ; ce n'est pas à Marseille que je dois rappeler que les supporters des gradins doivent encourager les joueurs qui sont sur le terrain pour les motiver et qu'ils réussissent des exploits : faisons nôtre la phrase de Tony Blair : " Un pays doit aimer ses entrepreneurs comme il aime ses footballeurs !"
Oui, notre pays doit relever le défi de la compétitivité globale qui exige que non seulement les entreprises elles-mêmes soient compétitives, mais aussi que tout l'environnement fiscal, juridique, administratif, éducatif, social, culturel dans lequel elles évoluent soit aussi compétitif. La mondialisation, la globalisation ont ajouté de nombreuses dimensions nouvelles à la compétition, qui n'est plus seulement une compétition entre entreprises, mais aussi une compétition entre territoires, entre Nations.
Oui, notre pays va subir un choc sans précédent avec le passage à l'euro, qui dans un peu plus de deux semaines, va rendre immédiate la transparence des prix et des coûts, accroître la mobilité des hommes, des capitaux et de la technologie, et aiguiser encore davantage une concurrence déjà très affûtée à l'intérieur de l'Union Européenne ; et l'élargissement de l'Union Européenne, s'il va créer de nouvelles opportunités de développement, va aussi apporter davantage de concurrence provenant de pays qui veulent la croissance.
Oui, notre pays doit se préparer sans tarder au vieillissement inéluctable de sa population, et à la dégradation du rapport entre actifs et retraités qui va créer des tensions majeures parce nous n'avons pas, par idéologie, réformé à temps nos régimes de retraite et que nous avons commis l'erreur historique de ne pas accumuler à temps des actifs, sous forme de fonds de pension. Lorsque la bise de l'hiver démographique va souffler, la France va se trouver, ma foi, fort dépourvue. Réformer les régimes de retraite et d'ailleurs aussi le système d'assurance-maladie est une exigence pour rétablir l'attractivité du site France dont l'avenir est aujourd'hui plombé par les perspectives de déficits sociaux abyssaux ou de hausses de cotisations insoutenables.
Oui, notre pays doit apprivoiser les nouvelles technologies dont l'essor rebat les cartes de la compétition mondiale et nous oblige à réagir plus vite, sans attendre que les réformes soient devenues tellement inéluctables qu'on improvise à la va-vite des " plans d'urgence " et des " plans de crise " dont la multiplication apparaît une véritable spécialité française qui montre à quel point nous sommes incapables de réformer en temps et en heure.
Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas rester inertes, sans réaction, devant le fait que nos principaux concurrents opèrent dans des pays qui se réforment, se modernisent, se restructurent sans relâche, tandis que notre pays a tendance à s'engourdir, s'ankyloser, s'endormir. Pourquoi diable ce qui est possible ailleurs - réforme fiscale, réforme des retraites, réforme de l'éducation, réforme administrative - pourquoi tout cela ne serait pas aussi possible chez nous ? Nous devons agir. Pourquoi ? Plus les autres pays se réforment, moins notre pays se réforme : ceci aboutit à un écart qui va croissant, écart qui affaiblit le degré d'attractivité de la France. Cette évolution nous rend profondément malheureux, et doit nous inciter à l'action.
Nous avons de formidables atouts
Toutes les études récentes le montrent, les débats de ce soir l'ont confirmé. Nous perdons progressivement du terrain.
Pourtant nos atouts sont nombreux :
o la situation géographique de notre marché est exceptionnelle ;
o la qualité de notre main d'oeuvre est largement reconnue et se traduit par une productivité du travail très élevée ;
o le management français a des compétences que beaucoup de concurrents nous envient ; à tel point qu'ils viennent les recruter ;
o le potentiel scientifique français figure parmi les meilleurs dans le monde ;
o le niveau technologique et technique de nos entreprises est partout reconnu ;
o nos infrastructures n'ont rien à envier à celles qui existent à l'étranger ;
o notre pays dispose grâce au nucléaire d'une énergie fiable à des prix raisonnables ;
o nous disposons de grandes entreprises mondiales puissantes et conquérantes ;
o nos PME sont particulièrement efficaces ;
o la qualité de nos produits et de nos services est à l'égal des meilleurs ;
o notre qualité de vie est sans comparaison ;
Et surtout, notre pays reste une terre qui fait naître des vocations d'entrepreneurs motivés, conquérants, combatifs.
Le degré d'attractivité de la France faiblit
Mais, Mesdames et Messieurs, cela ne suffit plus. Contrairement à ce que croient beaucoup d'observateurs, le problème n'est plus de se comparer à hier, mais de se comparer aux autres. La France de l'an 2001 n'est pas en compétition avec la France de 1990 ou avec celle de 1980, la France de l'an 2001 est en compétition avec tous les autres pays de la planète, industrialisés ou émergents, avec les pays des cinq continents. Or, cette comparaison dans l'espace, force est de l'avouer, n'est pas à notre avantage :
o Comment justifier que notre différentiel fiscal s'accroisse, avec désormais près de 500 Mds de Francs de plus d'impôts que chez la moyenne de nos concurrents européens ? Il s'agit là d'une surcharge pondérale qui empêche beaucoup d'entreprises de courir comme elles le devraient sur tous les terrains du monde !
o Comment justifier que nous soyons quasiment partout parmi les plus mauvais en matière d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur le patrimoine, d'impôt sur le revenu, d'impôt sur les transmissions, d'impôts locaux ?
o Comment rivaliser avec les autres pays quand 1 euro de rémunération nette d'impôts et de cotisations sociales coûte 3 euros en France, 2,3 euros en Allemagne (avant la réforme fiscale) et 1,7 euros au Royaume Uni ?
o Comment expliquer que pour des services publics équivalents, nous dépensions chaque année 600 Mds de Francs de plus que l'Allemagne, et que nous ayons 50 % de fonctionnaires en plus ? Comment expliquer que cet écart, loin de se réduire, se soit accru, depuis 1997, de plus de 100 Mds de Francs par rapport à la moyenne de l'euroland ?
o Comment expliquer que malgré la loi " miraculeuse " des 35 heures, dont tous nos concurrents se louent chaque jour, la France ait créé moins d'emplois depuis cinq ans que la moyenne de la zone euro ? Permettez-moi de citer un grand leader européen qui aurait déclaré : " je suis pour la loi des 35 heures en France parce que c'est bon pour les entreprises de mon propre pays " !
o Comment convaincre des entreprises étrangères d'investir massivement dans un pays dans lequel on répond à chaque problème rencontré par une nouvelle taxe ou une nouvelle loi, dans lequel on multiplie chaque jour les dépenses nouvelles en renvoyant à plus tard le problème de leur financement ?
o Comment convaincre les jeunes entrepreneurs d'exercer leurs talents dans notre pays, les chercheurs d'y poursuivre leurs travaux, les inventeurs d'y déposer leurs brevets, alors que le talent et l'effort sont toujours mieux reconnus ailleurs, comme le montrent les pays de résidence fiscale de nos artistes, de nos sportifs et de nos têtes chercheuses ?
Arrêtons ici cette liste, la poursuite de cette énumération pourrait tous nous rendre neurasthéniques. Vous le savez, Mesdames et Messieurs, le résultat de nos déficiences collectives est hélas sans surprise.
Selon une étude récente, 65 % des entreprises étrangères installées dans notre pays déclarent que la France ne bénéficiera pas de leur prochain investissement en Europe. 44 % envisagent de localiser ailleurs une partie de leurs activités françaises, cela avant même la loi de "modernisation" sociale. Et si les entreprises françaises sont dans le peloton de tête du classement international établi par le World Economic Forum, la France se classe en revanche en queue de peloton pour la rigidité de sa réglementation du travail, le niveau de ses dépenses publiques, sa fiscalitéet a même reculé de la 11ème à la 15ème place entre 1998 et 2000 en compétitivité globale.
Un seul chiffre résume à lui seul notre situation : pour 1 Franc investi en France en 2000 par des étrangers, 3 francs ont été investis à l'étranger par les Français. En un peu plus de deux ans, les sorties nettes de capitaux productifs ont dépassé 1300 Mds de Francs. Ceci révèle un profond malaise structurel.
Que faire ?
Que faire ? Sommes-nous condamnés à reculer dans le hit parade des nations ? A nous plaindre éternellement de l'inertie de notre secteur public ? A multiplier les rapports sans jamais rien mettre en chantier ? Sommes-nous condamnés à pointer les blocages de notre société sans jamais agir ? Non ! La résignation est contraire à l'esprit d'entreprise qui nous anime tous ! Notre communauté s'honore de ne jamais céder à la dépression, même si nous connaissons des désillusions et ressentons une profonde exaspération ! Ce n'est pas pour rien que flotte sur notre drapeau " En avant l'entreprise ! "
Nous sommes là :
o Parce que nous avons de vrais atouts ;
o Parce que les entreprises ont montré qu'elles savaient s'adapter ;
o Parce que les salariés du secteur concurrentiel ont fait preuve d'une grande maturité dans la mutation du secteur productif ;
o Parce que nous avons l'exemple de nos partenaires européens qui ont su résoudre une bonne partie de leurs problèmes.
Nous pouvons, nous devons tous ensemble : l'Etat, les entreprises - entrepreneurs et salariés - les citoyens, les collectivités locales, nous mobiliser, mobiliser la société française pour remettre notre pays sur un chemin de croissance potentielle plus élevée, plus porteur d'emploi, plus créateur de richesse, plus équilibré. Il nous appartient de porter l'espoir. Il nous appartient de mettre la France sur la voie de l'excellence.
Et les débats de ce soir nous indiquent la voie à suivre :
Il nous faut d'abord réformer notre fiscalité.
Il est plus que temps d'entreprendre une refonte totale de notre fiscalité. Nos entreprises, les femmes et les hommes qui y travaillent ne peuvent continuer de supporter une fiscalité dissuasive, désincitative, complexe, opaque, rétroactive, punitive, absurde même, lorsque l'on en arrive à cumuler les impôts sur une même assiette, à taxer des revenus non perçus, voire à payer l'impôt sur un impôt. Cette véritable " refondation fiscale " n'est crédible que si on s'engage dans une véritable diminution des dépenses publiques et dans une réforme de l'Etat de grande ampleur. Quant à la réforme de la fiscalité, elle doit s'organiser autour de quelques grands principes :
Le premier est celui de la compétitivité : nous devons ramener en cinq ans le poids de notre fiscalité au niveau de celui de nos principaux partenaires économiques, notamment de l'Allemagne. Avec internet et l'euro, nous ne pouvons accepter d'avoir cinq points de plus de prélèvements obligatoires que la moyenne de la classe, soit plus que l'équivalent du total de l'impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle. Nous ne pouvons durablement combattre contre des entreprises allemandes qui vont bénéficier d'un taux d'IS inférieur de dix points au nôtre, d'un taux marginal d'IR inférieur de 18 %, de 20 % de moins de taxation sur les plus-values, de la suppression de l'ISF et des impôts locaux sur les facteurs de production, pour ne pas parler des détaxations pour investir dans des fonds de retraite par capitalisation.
Le second de ces principes doit être l'efficacité. La taxe professionnelle, qui taxe les facteurs de production avant même que la production ne soit réalisée, et qui ne tient pas compte des résultats, doit être supprimée, de même que la taxe sur les salaires. Par ailleurs, une réforme de la fiscalité du patrimoine est indispensable pour mettre fin à la situation actuelle, unique en Europe, dans laquelle on taxe à la fois le patrimoine détenu, y compris les plus-values potentielles, les plus-values effectivement réalisées, sans tenir compte des versements déjà effectués, puis enfin la transmission au moment du décès. Tous les pays autour de nous ont soit supprimé l'ISF, soit exonéré les entreprises des droits de succession, soit même remis en cause l'ensemble. Il est plus que temps que l'on dépasse l'idéologie et que l'on cesse de décourager la constitution de capital en France : " sans capital, pas de travail ".
Le troisième et dernier principe d'une réforme de la fiscalité doit être enfin d'encourager l'initiative et la prise de risque. Cessons de décourager la réussite par une fiscalité totalement confiscatoire. Cessons de croire que seules les entreprises en difficulté méritent qu'on leur prête attention. Fixons-nous au contraire pour objectif à court terme que tout euro supplémentaire gagné par un salarié ne soit jamais taxé à plus de 50 %, et abaissons progressivement ce plafond. Fixons-nous comme objectif de simplifier notre système fiscal, pour qu'enfin y règne la transparence. Fixons-nous pour objectif de supprimer les seuils en tout genre, les mesures dérogatoires de tous poils, les aides déguisées et les complexités cachées pour transformer notre système fiscal en un vrai atout pour la France conquérante que nous souhaitons. Pour être attractif, il faut cesser d'être répulsif ! Selon le dernier projet de Mme Aubry, tous les investissements dans notre pays supporteraient désormais le poids de la protection sociale au travers d'une nouvelle taxe sur la valeur ajoutée des entreprises, c'est à dire et les salaires et les amortissements. Aucun autre pays au monde n'ose le faire ! Quel pire signal pourrait-on donner au moment où tout le monde s'accorde sur l'idée qu'il faut mettre la priorité sur l'investissement ?
Il faut ensuite réformer notre Etat
L'absence de réforme de l'Etat est devenue insupportable. D'autant plus que les entreprises, elles, sont sans cesse davantage en mouvement !
o Nous ne pouvons plus supporter les dysfonctionnements croissants de l'Etat : assurance maladie inefficiente, lois souvent inapplicables en matière de justice, services publics en grève à répétition, inégalités croissantes en matière d'éducation, multiplication des échelons administratifs locaux
o Nous ne pouvons plus supporter de payer aujourd'hui nos services publics 15 % plus cher que dans la moyenne de la zone euro, pour une qualité qui n'est guère meilleure que la moyenne, comme l'ont montré les récentes statistiques de l'OCDE sur l'éducation ;
o Nous ne pouvons plus accepter que, par une curieuse asymétrie, le secteur public s'occupe de nombreux domaines qui relèvent d'une approche marchande et concurrentielle : restauration, banque, emploi de travailleurs sociaux, assurances, et qu'il lui arrive, en sens inverse, d'être absent de domaines clés : politique foncière, soutien des PME à l'export, financement de la recherche, protection de la propriété intellectuelle, encouragement à la certification... ;
o Nous ne pouvons plus supporter que les textes soient uniquement faits en partant des besoins des administrations, et non en fonction des besoins des clients. Le maquis français du droit social et du droit fiscal contribue ainsi largement à l'absence de confiance des entreprises dans leurs services publics ;
o Nous ne pouvons plus supporter que l'Etat cherche à s'occuper de tout, de la politique sociale, à la place des partenaires sociaux, de la politique locale, à la place des collectivités locales, et que dans le même temps il soit incapable de se remettre en cause, de gérer ses personnels et de moderniser ses pratiques.
o Nous ne pouvons plus supporter que partout autour de nous mais jamais chez nous les réformes fleurissent et mettent en place des Etats modernes : multiplication des agences indépendantes, réforme du statut des personnels de la fonction publique, motivation des personnels, introduction de règles d'éthique et de transparence, transfert de certaines missions au secteur privé, introduction de normes de qualité ;
La réforme de l'Etat doit être au coeur de la prochaine législature. Une profonde rupture doit intervenir pour que l'Etat français accompagne l'économie et la société françaises au lieu de les freiner :
o L'Etat doit revoir ses missions : le rôle d'un Etat moderne n'est pas de réglementer à outrance, mais de favoriser l'adaptation de l'économie et de la société. Il doit être un "facilitateur de croissance" et non un "empêcheur decroissance" Il doit offrir une vision de l'avenir, rassurer les acteurs économiques, être crédible. Pour cela il ne doit plus tout faire mais faire faire, inciter à faire, et partout où cela est possible, laisser faire.
o L'Etat doit revoir ses responsabilités. Tout ce qui peut être mieux traité sur le terrain qu'au niveau national doit être décentralisé : éducation, formation professionnelle, éventuellement sécurité publique. De même, en matière sociale, la loi doit être réservée aux garanties fondamentales, les autres règles étant renvoyées au niveau du contrat d'entreprise ou de branche.
o L'Etat doit revoir ses méthodes : il doit créer un véritable partenariat avec la société civile, et n'intervenir que lorsque les autres solutions ont échoué. Il doit soumettre ses projets à discussion préalable (livres blancs ou verts). Les lois comme les organisations administratives doivent être à durée limitée. Le recours à la démarche contractuelle comme aux engagements négociés ou aux codes de bonne conduite doit de même être privilégié ;
o L'Etat doit revoir ses instruments : Le droit du travail, le droit fiscal, le droit des sociétés doivent être simplifiés pour les PME. Le droit pénal doit être remplacé, à chaque fois que cela est possible, par le droit civil. Les interventions économiques directes doivent être limitées, dès lors qu'elles introduisent une concurrence déloyale. En revanche, il serait temps que soient prises les mesures nécessaires pour assurer la continuité et la qualité des services publics, en définissant des normes de qualité ambitieuses, en mettant en place des systèmes d'indemnisation en cas de non-respect de ces normes, en intéressant le personnel aux résultats, en appliquant les sanctions prévues dans les textes.
oL'Etat doit revoir son coût, et éradiquer les déficits publics par des baisses de dépenses et pourquoi ne pas inscrire cette règle de l'équilibre budgétaire dans notre constitution comme vient de la faire un grand pays européen.
oL'Etat doit enfin revoir sa gestion. Pour réaliser les économies indispensables, il doit s'inspirer des méthodes de gestion privée, tout en les adaptant à ces propres contraintes : concentration sur le " core business " (privatisations), suppression des échelons redondants (simplification des échelons administratifs), responsabilisation des gestionnaires (création d'indicateurs, simplification de la grille salariale), réforme en profondeur de la fonction publique (recrutements nouveaux sur des CDI de droit privé pour toutes les fonctions non strictement régaliennes)
Dépenser moins en dépensant mieux, dépenser là où il le faut, supprimer les dépenses inutiles sont des règles indispensables pour que notre pays redevienne une terre d'attraction (plutôt qu'un parc d'attraction).
Il nous faut enfin investir dans l'avenir
Trop de décisions sont prises aujourd'hui le nez dans le guidon, en regardant seulement les quelques mètres qui séparent du tournant et souvent du fossé. Aucune entreprise ne pourrait être durablement gérée de cette façon.
Notre rôle est donc clairement de rappeler en permanence les contraintes de demain.
o Demain ce sera plus de concurrence, avec plus de pays, sur plus de produits.
o Demain ce sera moins d'hommes et de femmes, qui feront plus de métiers dans plus d'entreprises. Cela nécessitera donc plus de formation, plus de reconnaissance des compétences. Investir dans la formation suppose de mettre en oeuvre au plus vite les idées modernes, trop sans doute pour certains, que nous avions inscrites dans notre projet d'accord soumis aux partenaires sociaux : plus de formation dans les PME, partage des charges entre salariés et entreprises dans le cadre de plans de développement concertés, création de comptes épargne-formation, développement de l'enseignement par l'alternance ;
o Demain ce seront plus de risques qui viendront s'ajouter aux difficultés déjà fortes du métier d'entrepreneur : risques environnementaux, risques juridiques, risques liés aux nouvelles technologiesIl faudra donc en contrepartie moins de contraintes, moins de complexité, plus de compréhension si l'on ne veut pas que l'entrepreneur se transforme en espèce menacée de disparition ;
o Demain ce sera beaucoup plus d'innovations si l'on veut avoir plus de production sur le site France ;
Refaire de la France un grand pays inventif suppose de préparer les générations à venir à l'esprit d'innovation, dans les écoles, dans les formations par alternance. Cela implique également d'orienter la recherche publique vers l'innovation, en promouvant la coopération entre cette recherche publique et les entreprises. Cela suppose enfin de protéger le produit de l'innovation et d'encourager l'utilisation des dispositifs de protection de la propriété intellectuelle par les entreprises.
Au lieu d'inventer des législations surannées, qu'il faudra ensuite démanteler, inventons ensemble, comme les autres pays, les instruments de la croissance de demain !
Renforcer l'attractivité de la France doit être le grand projet des futurs dirigeants de notre pays, quels qu'ils soient !
o Le grand projet, c'est de faire de la France le leader de l'Europe, d'avoir une croissance durablement supérieure à la moyenne de nos concurrents, de faire en sorte que les entreprises se développent et investissent dans notre site de production. Nous voulons être en tête de la course !
o Le grand projet c'est de relever, grâce à cette croissance forte, le taux d'emploi en France, qui reste très insuffisant par rapport à celui de nos principaux partenaires ; Nous voulons davantage de gens sur le pont !
o Le grand projet, c'est qu'il fasse bon produire, innover, chercher, apprendre en France, et que notre pays redevienne un exemple ; Nous voulons faire des envieux !
o Le grand projet, c'est que l'on mette le génie français au service du développement économique et social du pays, que jour après jour, mesure après mesure, on encourage les entreprises à créer des richesses. Nous voulons des supporters plutôt que des détracteurs !
Nous croyons profondément dans le destin économique de notre pays. Nous souhaitons que cette haute ambition soit partagée par tous.
En avant l'entreprise, En avant la France !
(source http://www.medef.fr, le 3 janvier 2002)
- Après le lancement de notre campagne à Angoulême, le 25 octobre dernier, consacré à une valeur essentielle, fondamentale : le travail demain.
- Après Clermont-Ferrand consacré à un objectif majeur pour les entreprises comme pour les citoyens : concilier au mieux l'entreprise, l'homme, la nature et ainsi garantir un développement durable.
- Après Lille où ont été présentées nos propositions pour développer l'esprit d'initiative et l'esprit d'entreprise, ferments indispensables du progrès et de la croissance.
- Après Strasbourg consacré à la présentation d'une nouvelle architecture pour la protection sociale, afin de la rendre plus équitable, plus efficace et plus performante, afin de garantir la protection individuelle et collective de tous les Français en maîtrisant les charges qui pèsent toujours, in fine, sur le secteur productif.
- Après Nantes consacré au renouvellement du dialogue social, qui doit élargir désormais la place de la négociation, de la convention, et du partenariat,
Nous voici aujourd'hui réunis à Marseille, pour répondre à des questions décisives qui englobent en quelque sorte toutes celles que nous avons posées antérieurement :
o Comment, Mesdames et Messieurs, accroître et renforcer l'attractivité de la France dans un monde de plus en plus ouvert ?
o Comment faire en sorte que la France soit un pays dans lequel il fait certes bon vivre, mais dans lequel il fasse aussi bon produire ?
o Comment faire en sorte que les entrepreneurs qui ont choisi la France comme site de production puissent lutter à armes égales avec leurs compétiteurs étrangers ?
o Comment faire en sorte que nous attirions les entrepreneurs du monde entier qui choisiraient le site de production France pour y exercer leurs talents et y investir leurs capitaux ?
o Comment faire en sorte que la France occupe une place de premier plan dans le concert économique des nations ?
o Comment faire en sorte que la France soit en matière économique une terre de référence, un pays dont on s'inspire, un pays qui rayonne, un pays que l'on envie, un pays qui suscite l'admiration alors qu'il suscite aujourd'hui des interrogations ?
Faire de la France un pays d'excellence
Je le dis avec regret. Ces questions essentielles dont dépendent l'avenir de notre pays, l'emploi, le bien être, le dynamisme et l'esprit de la nation, la mobilisation de la jeunesse ne sont pas, loin de là une priorité dans notre pays. Alors que partout autour de nous on pense "production", on encourage son essor, nous en France nous ne pensons encore que "répartition" Alors que partout les pouvoirs publics s'attachent à faciliter la tâche des entrepreneurs, à les encourager, nos pouvoirs publics pensent surtout à prélever sur la richesse.
Alors que partout dans le monde, pouvoirs publics et entreprises forment une même équipe, jouent du même côté du terrain pour affronter la concurrence mondiale, malheureusement les entrepreneurs de France ont trop souvent le sentiment que les pouvoirs publics jouent dans le camp d'en face.
Partout autour de nous, chez nos principaux voisins, les dirigeants politiques nationaux ont fait de la recherche de la compétitivité l'axe principal autour duquel s'organise toute leur action. Par exemple, Tony Blair au Royaume-Uni ou Gerhardt Schröder en Allemagne insistent dans chacune de leurs interventions sur la priorité à accorder aux entreprises pour que leur pays relève les défis issus de la compétition économique mondiale. Permettez-moi de citer le manifeste Blair-Schröder, deux grands leaders socialistes européens, de les citer dans le texte : " Nos politiques publiques doivent être conçues dans un nouveau cadre économique, adapté aux réalités d'aujourd'hui, avec une règle d'or : le gouvernement doit tout faire pour soutenir les entreprises et ne jamais croire qu'il puisse s'y substituer ". Et ils ajoutent : " Le rôle essentiel des marchés doit être complété et amélioré par l'action publique, mais non pas entravé par elle ".
Chez nos partenaires, la comparaison internationale est permanente. Le "benchmark" est omniprésent pour guider les choix des pouvoirs publics. On cherche sans relâche à s'inspirer des réussites observées à l'étranger et des échecs pour ne pas les répliquer. C'est la raison d'ailleurs pour laquelle les 35 heures n'ont pas eu beaucoup d'émules. Qu'observe-t-on dans la plupart des pays industrialisés ? Le rôle des entreprises est valorisé, le dialogue social respecté, les entrepreneurs sont entendus et écoutés. Chez tous nos partenaires, l'objectif est clair et simple : " We have to be the first, we want to be leaders ", et pour cela, nous devons tout faire pour aider nos entreprises à être les plus fortes.
En France, les idées mêmes de comparaison internationale, de compétitivité, d'attractivité, de meilleures pratiques sont le plus souvent ignorées, quand elles ne sont pas simplement rejetées. Au contraire, on cultive à l'envie l'" exception française ". Plutôt que de chercher à rivaliser, à accepter de se comparer aux meilleurs pour les dépasser, on justifie en invoquant l'" exception française " tous nos retards, nos errements, nos renoncements, nos immobilismes. Au nom de la soi-disant " exception française ", on accumule des impôts nouveaux, on multiplie des lois d'un autre âge, on laisse bourgeonner des réglementations incompréhensibles et souvent inapplicables. Et lorsque à juste titre les entrepreneurs protestent, et revendiquent le simple droit de lutter à armes égales avec leurs concurrents, les pouvoirs publics renchérissent en les punissant de mesures encore plus contraignantes.
Ce constat, Mesdames et Messieurs, vous le connaissez. Vous le vivez dans votre expérience de chaque jour, c'est malheureusement votre lot quotidien. C'est pour cela que nous avons décidé de réunir des milliers d'entrepreneurs à travers toute la France, pour exprimer haut et fort, sans esprit partisan, de manière apolitique, nos idées, nos propositions, nos suggestions, pour que notre pays soit plus efficace, plus puissant, plus créateur d'emplois, plus créateur de richesse.
Chers amis, nous avons le devoir de nous exprimer. Nous avons le devoir de faire des propositions. Nous avons le devoir de dire publiquement ce qui semble bon et au contraire ce qui paraît mauvais pour les entreprises.
Oui, notre pays doit adopter comme objectif majeur pour les prochaines années la recherche de la compétitivité de son économie dans un monde sans cesse plus ouvert, plus fluide, plus concurrentiel. Car sans compétitivité globale, pas de croissance durable et pas d'emploi pérenne.
Oui, notre pays doit rétablir l'attractivité du site de production France en renforçant, en soutenant, en encourageant ses entrepreneurs ; ce n'est pas à Marseille que je dois rappeler que les supporters des gradins doivent encourager les joueurs qui sont sur le terrain pour les motiver et qu'ils réussissent des exploits : faisons nôtre la phrase de Tony Blair : " Un pays doit aimer ses entrepreneurs comme il aime ses footballeurs !"
Oui, notre pays doit relever le défi de la compétitivité globale qui exige que non seulement les entreprises elles-mêmes soient compétitives, mais aussi que tout l'environnement fiscal, juridique, administratif, éducatif, social, culturel dans lequel elles évoluent soit aussi compétitif. La mondialisation, la globalisation ont ajouté de nombreuses dimensions nouvelles à la compétition, qui n'est plus seulement une compétition entre entreprises, mais aussi une compétition entre territoires, entre Nations.
Oui, notre pays va subir un choc sans précédent avec le passage à l'euro, qui dans un peu plus de deux semaines, va rendre immédiate la transparence des prix et des coûts, accroître la mobilité des hommes, des capitaux et de la technologie, et aiguiser encore davantage une concurrence déjà très affûtée à l'intérieur de l'Union Européenne ; et l'élargissement de l'Union Européenne, s'il va créer de nouvelles opportunités de développement, va aussi apporter davantage de concurrence provenant de pays qui veulent la croissance.
Oui, notre pays doit se préparer sans tarder au vieillissement inéluctable de sa population, et à la dégradation du rapport entre actifs et retraités qui va créer des tensions majeures parce nous n'avons pas, par idéologie, réformé à temps nos régimes de retraite et que nous avons commis l'erreur historique de ne pas accumuler à temps des actifs, sous forme de fonds de pension. Lorsque la bise de l'hiver démographique va souffler, la France va se trouver, ma foi, fort dépourvue. Réformer les régimes de retraite et d'ailleurs aussi le système d'assurance-maladie est une exigence pour rétablir l'attractivité du site France dont l'avenir est aujourd'hui plombé par les perspectives de déficits sociaux abyssaux ou de hausses de cotisations insoutenables.
Oui, notre pays doit apprivoiser les nouvelles technologies dont l'essor rebat les cartes de la compétition mondiale et nous oblige à réagir plus vite, sans attendre que les réformes soient devenues tellement inéluctables qu'on improvise à la va-vite des " plans d'urgence " et des " plans de crise " dont la multiplication apparaît une véritable spécialité française qui montre à quel point nous sommes incapables de réformer en temps et en heure.
Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas rester inertes, sans réaction, devant le fait que nos principaux concurrents opèrent dans des pays qui se réforment, se modernisent, se restructurent sans relâche, tandis que notre pays a tendance à s'engourdir, s'ankyloser, s'endormir. Pourquoi diable ce qui est possible ailleurs - réforme fiscale, réforme des retraites, réforme de l'éducation, réforme administrative - pourquoi tout cela ne serait pas aussi possible chez nous ? Nous devons agir. Pourquoi ? Plus les autres pays se réforment, moins notre pays se réforme : ceci aboutit à un écart qui va croissant, écart qui affaiblit le degré d'attractivité de la France. Cette évolution nous rend profondément malheureux, et doit nous inciter à l'action.
Nous avons de formidables atouts
Toutes les études récentes le montrent, les débats de ce soir l'ont confirmé. Nous perdons progressivement du terrain.
Pourtant nos atouts sont nombreux :
o la situation géographique de notre marché est exceptionnelle ;
o la qualité de notre main d'oeuvre est largement reconnue et se traduit par une productivité du travail très élevée ;
o le management français a des compétences que beaucoup de concurrents nous envient ; à tel point qu'ils viennent les recruter ;
o le potentiel scientifique français figure parmi les meilleurs dans le monde ;
o le niveau technologique et technique de nos entreprises est partout reconnu ;
o nos infrastructures n'ont rien à envier à celles qui existent à l'étranger ;
o notre pays dispose grâce au nucléaire d'une énergie fiable à des prix raisonnables ;
o nous disposons de grandes entreprises mondiales puissantes et conquérantes ;
o nos PME sont particulièrement efficaces ;
o la qualité de nos produits et de nos services est à l'égal des meilleurs ;
o notre qualité de vie est sans comparaison ;
Et surtout, notre pays reste une terre qui fait naître des vocations d'entrepreneurs motivés, conquérants, combatifs.
Le degré d'attractivité de la France faiblit
Mais, Mesdames et Messieurs, cela ne suffit plus. Contrairement à ce que croient beaucoup d'observateurs, le problème n'est plus de se comparer à hier, mais de se comparer aux autres. La France de l'an 2001 n'est pas en compétition avec la France de 1990 ou avec celle de 1980, la France de l'an 2001 est en compétition avec tous les autres pays de la planète, industrialisés ou émergents, avec les pays des cinq continents. Or, cette comparaison dans l'espace, force est de l'avouer, n'est pas à notre avantage :
o Comment justifier que notre différentiel fiscal s'accroisse, avec désormais près de 500 Mds de Francs de plus d'impôts que chez la moyenne de nos concurrents européens ? Il s'agit là d'une surcharge pondérale qui empêche beaucoup d'entreprises de courir comme elles le devraient sur tous les terrains du monde !
o Comment justifier que nous soyons quasiment partout parmi les plus mauvais en matière d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur le patrimoine, d'impôt sur le revenu, d'impôt sur les transmissions, d'impôts locaux ?
o Comment rivaliser avec les autres pays quand 1 euro de rémunération nette d'impôts et de cotisations sociales coûte 3 euros en France, 2,3 euros en Allemagne (avant la réforme fiscale) et 1,7 euros au Royaume Uni ?
o Comment expliquer que pour des services publics équivalents, nous dépensions chaque année 600 Mds de Francs de plus que l'Allemagne, et que nous ayons 50 % de fonctionnaires en plus ? Comment expliquer que cet écart, loin de se réduire, se soit accru, depuis 1997, de plus de 100 Mds de Francs par rapport à la moyenne de l'euroland ?
o Comment expliquer que malgré la loi " miraculeuse " des 35 heures, dont tous nos concurrents se louent chaque jour, la France ait créé moins d'emplois depuis cinq ans que la moyenne de la zone euro ? Permettez-moi de citer un grand leader européen qui aurait déclaré : " je suis pour la loi des 35 heures en France parce que c'est bon pour les entreprises de mon propre pays " !
o Comment convaincre des entreprises étrangères d'investir massivement dans un pays dans lequel on répond à chaque problème rencontré par une nouvelle taxe ou une nouvelle loi, dans lequel on multiplie chaque jour les dépenses nouvelles en renvoyant à plus tard le problème de leur financement ?
o Comment convaincre les jeunes entrepreneurs d'exercer leurs talents dans notre pays, les chercheurs d'y poursuivre leurs travaux, les inventeurs d'y déposer leurs brevets, alors que le talent et l'effort sont toujours mieux reconnus ailleurs, comme le montrent les pays de résidence fiscale de nos artistes, de nos sportifs et de nos têtes chercheuses ?
Arrêtons ici cette liste, la poursuite de cette énumération pourrait tous nous rendre neurasthéniques. Vous le savez, Mesdames et Messieurs, le résultat de nos déficiences collectives est hélas sans surprise.
Selon une étude récente, 65 % des entreprises étrangères installées dans notre pays déclarent que la France ne bénéficiera pas de leur prochain investissement en Europe. 44 % envisagent de localiser ailleurs une partie de leurs activités françaises, cela avant même la loi de "modernisation" sociale. Et si les entreprises françaises sont dans le peloton de tête du classement international établi par le World Economic Forum, la France se classe en revanche en queue de peloton pour la rigidité de sa réglementation du travail, le niveau de ses dépenses publiques, sa fiscalitéet a même reculé de la 11ème à la 15ème place entre 1998 et 2000 en compétitivité globale.
Un seul chiffre résume à lui seul notre situation : pour 1 Franc investi en France en 2000 par des étrangers, 3 francs ont été investis à l'étranger par les Français. En un peu plus de deux ans, les sorties nettes de capitaux productifs ont dépassé 1300 Mds de Francs. Ceci révèle un profond malaise structurel.
Que faire ?
Que faire ? Sommes-nous condamnés à reculer dans le hit parade des nations ? A nous plaindre éternellement de l'inertie de notre secteur public ? A multiplier les rapports sans jamais rien mettre en chantier ? Sommes-nous condamnés à pointer les blocages de notre société sans jamais agir ? Non ! La résignation est contraire à l'esprit d'entreprise qui nous anime tous ! Notre communauté s'honore de ne jamais céder à la dépression, même si nous connaissons des désillusions et ressentons une profonde exaspération ! Ce n'est pas pour rien que flotte sur notre drapeau " En avant l'entreprise ! "
Nous sommes là :
o Parce que nous avons de vrais atouts ;
o Parce que les entreprises ont montré qu'elles savaient s'adapter ;
o Parce que les salariés du secteur concurrentiel ont fait preuve d'une grande maturité dans la mutation du secteur productif ;
o Parce que nous avons l'exemple de nos partenaires européens qui ont su résoudre une bonne partie de leurs problèmes.
Nous pouvons, nous devons tous ensemble : l'Etat, les entreprises - entrepreneurs et salariés - les citoyens, les collectivités locales, nous mobiliser, mobiliser la société française pour remettre notre pays sur un chemin de croissance potentielle plus élevée, plus porteur d'emploi, plus créateur de richesse, plus équilibré. Il nous appartient de porter l'espoir. Il nous appartient de mettre la France sur la voie de l'excellence.
Et les débats de ce soir nous indiquent la voie à suivre :
Il nous faut d'abord réformer notre fiscalité.
Il est plus que temps d'entreprendre une refonte totale de notre fiscalité. Nos entreprises, les femmes et les hommes qui y travaillent ne peuvent continuer de supporter une fiscalité dissuasive, désincitative, complexe, opaque, rétroactive, punitive, absurde même, lorsque l'on en arrive à cumuler les impôts sur une même assiette, à taxer des revenus non perçus, voire à payer l'impôt sur un impôt. Cette véritable " refondation fiscale " n'est crédible que si on s'engage dans une véritable diminution des dépenses publiques et dans une réforme de l'Etat de grande ampleur. Quant à la réforme de la fiscalité, elle doit s'organiser autour de quelques grands principes :
Le premier est celui de la compétitivité : nous devons ramener en cinq ans le poids de notre fiscalité au niveau de celui de nos principaux partenaires économiques, notamment de l'Allemagne. Avec internet et l'euro, nous ne pouvons accepter d'avoir cinq points de plus de prélèvements obligatoires que la moyenne de la classe, soit plus que l'équivalent du total de l'impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle. Nous ne pouvons durablement combattre contre des entreprises allemandes qui vont bénéficier d'un taux d'IS inférieur de dix points au nôtre, d'un taux marginal d'IR inférieur de 18 %, de 20 % de moins de taxation sur les plus-values, de la suppression de l'ISF et des impôts locaux sur les facteurs de production, pour ne pas parler des détaxations pour investir dans des fonds de retraite par capitalisation.
Le second de ces principes doit être l'efficacité. La taxe professionnelle, qui taxe les facteurs de production avant même que la production ne soit réalisée, et qui ne tient pas compte des résultats, doit être supprimée, de même que la taxe sur les salaires. Par ailleurs, une réforme de la fiscalité du patrimoine est indispensable pour mettre fin à la situation actuelle, unique en Europe, dans laquelle on taxe à la fois le patrimoine détenu, y compris les plus-values potentielles, les plus-values effectivement réalisées, sans tenir compte des versements déjà effectués, puis enfin la transmission au moment du décès. Tous les pays autour de nous ont soit supprimé l'ISF, soit exonéré les entreprises des droits de succession, soit même remis en cause l'ensemble. Il est plus que temps que l'on dépasse l'idéologie et que l'on cesse de décourager la constitution de capital en France : " sans capital, pas de travail ".
Le troisième et dernier principe d'une réforme de la fiscalité doit être enfin d'encourager l'initiative et la prise de risque. Cessons de décourager la réussite par une fiscalité totalement confiscatoire. Cessons de croire que seules les entreprises en difficulté méritent qu'on leur prête attention. Fixons-nous au contraire pour objectif à court terme que tout euro supplémentaire gagné par un salarié ne soit jamais taxé à plus de 50 %, et abaissons progressivement ce plafond. Fixons-nous comme objectif de simplifier notre système fiscal, pour qu'enfin y règne la transparence. Fixons-nous pour objectif de supprimer les seuils en tout genre, les mesures dérogatoires de tous poils, les aides déguisées et les complexités cachées pour transformer notre système fiscal en un vrai atout pour la France conquérante que nous souhaitons. Pour être attractif, il faut cesser d'être répulsif ! Selon le dernier projet de Mme Aubry, tous les investissements dans notre pays supporteraient désormais le poids de la protection sociale au travers d'une nouvelle taxe sur la valeur ajoutée des entreprises, c'est à dire et les salaires et les amortissements. Aucun autre pays au monde n'ose le faire ! Quel pire signal pourrait-on donner au moment où tout le monde s'accorde sur l'idée qu'il faut mettre la priorité sur l'investissement ?
Il faut ensuite réformer notre Etat
L'absence de réforme de l'Etat est devenue insupportable. D'autant plus que les entreprises, elles, sont sans cesse davantage en mouvement !
o Nous ne pouvons plus supporter les dysfonctionnements croissants de l'Etat : assurance maladie inefficiente, lois souvent inapplicables en matière de justice, services publics en grève à répétition, inégalités croissantes en matière d'éducation, multiplication des échelons administratifs locaux
o Nous ne pouvons plus supporter de payer aujourd'hui nos services publics 15 % plus cher que dans la moyenne de la zone euro, pour une qualité qui n'est guère meilleure que la moyenne, comme l'ont montré les récentes statistiques de l'OCDE sur l'éducation ;
o Nous ne pouvons plus accepter que, par une curieuse asymétrie, le secteur public s'occupe de nombreux domaines qui relèvent d'une approche marchande et concurrentielle : restauration, banque, emploi de travailleurs sociaux, assurances, et qu'il lui arrive, en sens inverse, d'être absent de domaines clés : politique foncière, soutien des PME à l'export, financement de la recherche, protection de la propriété intellectuelle, encouragement à la certification... ;
o Nous ne pouvons plus supporter que les textes soient uniquement faits en partant des besoins des administrations, et non en fonction des besoins des clients. Le maquis français du droit social et du droit fiscal contribue ainsi largement à l'absence de confiance des entreprises dans leurs services publics ;
o Nous ne pouvons plus supporter que l'Etat cherche à s'occuper de tout, de la politique sociale, à la place des partenaires sociaux, de la politique locale, à la place des collectivités locales, et que dans le même temps il soit incapable de se remettre en cause, de gérer ses personnels et de moderniser ses pratiques.
o Nous ne pouvons plus supporter que partout autour de nous mais jamais chez nous les réformes fleurissent et mettent en place des Etats modernes : multiplication des agences indépendantes, réforme du statut des personnels de la fonction publique, motivation des personnels, introduction de règles d'éthique et de transparence, transfert de certaines missions au secteur privé, introduction de normes de qualité ;
La réforme de l'Etat doit être au coeur de la prochaine législature. Une profonde rupture doit intervenir pour que l'Etat français accompagne l'économie et la société françaises au lieu de les freiner :
o L'Etat doit revoir ses missions : le rôle d'un Etat moderne n'est pas de réglementer à outrance, mais de favoriser l'adaptation de l'économie et de la société. Il doit être un "facilitateur de croissance" et non un "empêcheur decroissance" Il doit offrir une vision de l'avenir, rassurer les acteurs économiques, être crédible. Pour cela il ne doit plus tout faire mais faire faire, inciter à faire, et partout où cela est possible, laisser faire.
o L'Etat doit revoir ses responsabilités. Tout ce qui peut être mieux traité sur le terrain qu'au niveau national doit être décentralisé : éducation, formation professionnelle, éventuellement sécurité publique. De même, en matière sociale, la loi doit être réservée aux garanties fondamentales, les autres règles étant renvoyées au niveau du contrat d'entreprise ou de branche.
o L'Etat doit revoir ses méthodes : il doit créer un véritable partenariat avec la société civile, et n'intervenir que lorsque les autres solutions ont échoué. Il doit soumettre ses projets à discussion préalable (livres blancs ou verts). Les lois comme les organisations administratives doivent être à durée limitée. Le recours à la démarche contractuelle comme aux engagements négociés ou aux codes de bonne conduite doit de même être privilégié ;
o L'Etat doit revoir ses instruments : Le droit du travail, le droit fiscal, le droit des sociétés doivent être simplifiés pour les PME. Le droit pénal doit être remplacé, à chaque fois que cela est possible, par le droit civil. Les interventions économiques directes doivent être limitées, dès lors qu'elles introduisent une concurrence déloyale. En revanche, il serait temps que soient prises les mesures nécessaires pour assurer la continuité et la qualité des services publics, en définissant des normes de qualité ambitieuses, en mettant en place des systèmes d'indemnisation en cas de non-respect de ces normes, en intéressant le personnel aux résultats, en appliquant les sanctions prévues dans les textes.
oL'Etat doit revoir son coût, et éradiquer les déficits publics par des baisses de dépenses et pourquoi ne pas inscrire cette règle de l'équilibre budgétaire dans notre constitution comme vient de la faire un grand pays européen.
oL'Etat doit enfin revoir sa gestion. Pour réaliser les économies indispensables, il doit s'inspirer des méthodes de gestion privée, tout en les adaptant à ces propres contraintes : concentration sur le " core business " (privatisations), suppression des échelons redondants (simplification des échelons administratifs), responsabilisation des gestionnaires (création d'indicateurs, simplification de la grille salariale), réforme en profondeur de la fonction publique (recrutements nouveaux sur des CDI de droit privé pour toutes les fonctions non strictement régaliennes)
Dépenser moins en dépensant mieux, dépenser là où il le faut, supprimer les dépenses inutiles sont des règles indispensables pour que notre pays redevienne une terre d'attraction (plutôt qu'un parc d'attraction).
Il nous faut enfin investir dans l'avenir
Trop de décisions sont prises aujourd'hui le nez dans le guidon, en regardant seulement les quelques mètres qui séparent du tournant et souvent du fossé. Aucune entreprise ne pourrait être durablement gérée de cette façon.
Notre rôle est donc clairement de rappeler en permanence les contraintes de demain.
o Demain ce sera plus de concurrence, avec plus de pays, sur plus de produits.
o Demain ce sera moins d'hommes et de femmes, qui feront plus de métiers dans plus d'entreprises. Cela nécessitera donc plus de formation, plus de reconnaissance des compétences. Investir dans la formation suppose de mettre en oeuvre au plus vite les idées modernes, trop sans doute pour certains, que nous avions inscrites dans notre projet d'accord soumis aux partenaires sociaux : plus de formation dans les PME, partage des charges entre salariés et entreprises dans le cadre de plans de développement concertés, création de comptes épargne-formation, développement de l'enseignement par l'alternance ;
o Demain ce seront plus de risques qui viendront s'ajouter aux difficultés déjà fortes du métier d'entrepreneur : risques environnementaux, risques juridiques, risques liés aux nouvelles technologiesIl faudra donc en contrepartie moins de contraintes, moins de complexité, plus de compréhension si l'on ne veut pas que l'entrepreneur se transforme en espèce menacée de disparition ;
o Demain ce sera beaucoup plus d'innovations si l'on veut avoir plus de production sur le site France ;
Refaire de la France un grand pays inventif suppose de préparer les générations à venir à l'esprit d'innovation, dans les écoles, dans les formations par alternance. Cela implique également d'orienter la recherche publique vers l'innovation, en promouvant la coopération entre cette recherche publique et les entreprises. Cela suppose enfin de protéger le produit de l'innovation et d'encourager l'utilisation des dispositifs de protection de la propriété intellectuelle par les entreprises.
Au lieu d'inventer des législations surannées, qu'il faudra ensuite démanteler, inventons ensemble, comme les autres pays, les instruments de la croissance de demain !
Renforcer l'attractivité de la France doit être le grand projet des futurs dirigeants de notre pays, quels qu'ils soient !
o Le grand projet, c'est de faire de la France le leader de l'Europe, d'avoir une croissance durablement supérieure à la moyenne de nos concurrents, de faire en sorte que les entreprises se développent et investissent dans notre site de production. Nous voulons être en tête de la course !
o Le grand projet c'est de relever, grâce à cette croissance forte, le taux d'emploi en France, qui reste très insuffisant par rapport à celui de nos principaux partenaires ; Nous voulons davantage de gens sur le pont !
o Le grand projet, c'est qu'il fasse bon produire, innover, chercher, apprendre en France, et que notre pays redevienne un exemple ; Nous voulons faire des envieux !
o Le grand projet, c'est que l'on mette le génie français au service du développement économique et social du pays, que jour après jour, mesure après mesure, on encourage les entreprises à créer des richesses. Nous voulons des supporters plutôt que des détracteurs !
Nous croyons profondément dans le destin économique de notre pays. Nous souhaitons que cette haute ambition soit partagée par tous.
En avant l'entreprise, En avant la France !
(source http://www.medef.fr, le 3 janvier 2002)